UN NOTRE MONDE - Alsace & Grand’Est
économie - Crise économique - USA

Crise systémique globale. Ce serait pour 2008. Déjà !

Billet écrit en février 2008 et republié pour la circonstance
jeudi 25 septembre 2008 par Pascal Bitsch

Nous courrons à toute jambes pour rejoindre la terre ferme du bon sens avec sous nos pieds la glace amincie et fragilisée d’une civilisation dominante qui se dévore elle-même chaque jour d’avantage. Pour des millions de personnes, dont nous faisons peut-être partie, il n’y aura pas d’issue civilisée à la fin de cette course déjà entamée depuis plusieurs décennies à l’insu du plus grand nombre. Quelle est la nature de la "crise systémique globale" ? Quelles sont ses conséquences prévisibles ? Comment se prémunir de ses conséquences, et c’est peut-être la même chose, comment la stopper dans ses causes et ses effets ?

De nombreux analystes économiques hors "establishment" annoncent une "crise systémique majeure" de l’économie américaine et de sa sphère d’influence.
Ces analystes publient leurs analyses et conclusions principalement sur internet. La presse et les médias industriels ou nationaux de leur côté sont mobilisés depuis plusieurs mois pour la cause apparemment perdue du replâtrage de la confiance du public et des acteurs économiques.

Mais au fait, quelle est la nature de cette crise dont celle de l’été 2007 (subprimes) apparaît plutôt comme un symptôme que comme une cause ?
La réponse aux yeux des analystes indépendants apparaît en prenant un peu de recul historique.

La thèse défendue brillament par la revue http://dedefensa.org est que la dépression de 1932-33 n’a pas trouvé sa solution dans le "nex deal" (qui n’a eu qu’un effet psychologique) mais dans l’effort de guerre de 39-45, poursuivi sans interruption par la course aux armements de la guerre froide (avec ses guerres chaudes, Corée, Vietnam), puis par la "gendarmerie du monde" (1ère guerre du Golfe) et la "guerre perpétuelle contre la terreur" à partir de 2001 (Afghanistan, Irak). Cet effort industriel et militaire peut être considéré comme une "bulle militaro-industrielle" permanente qui injecte année après année des centaines de milliards de dollars de fonds publics dans l’économie privée. Or une marche a été ratée par cette cavalerie en 2007. Contrairement aux calculs et aux manoeuvres du complexe (militaro intustriel), des néo-conservateurs américains et israéliens et de l’administration Bush, la guerre prévue contre l’iran en 2007 n’a pas eu lieu. Stoppée qu’elle a été par une levée de boucliers tous azimuths de la société civile et de la blogoshère qui ont grippé la "machine à mentir", du commandement militaire US - qui a menacé de démissionner en masse et des centrales de renseignement (CIA tête) qui ont refusé en décembre de porter le bonnet d’âne des armes de destruction massive en révélant que le programme nucléaire militaire iranien était gelé depuis 2003. Donc - en attendant Mc Cain fin 2008- pas de possibilité de guerre à court terme pour relancer la machine...

En réalité, outre cette bulle militaro-industrielle, l’économie américano-centrée a besoin d’au moins une ou deux autres bulles ou locomotives. Celles de l’immobilier et de la finance se sont dégonflées en 2007. Depuis les années 40, on a connu tour à tour la reconstruction, l’automobile, l’équipement ménager, les infrastructures, les télécommunications, la "nouvelle économie", l’immobilier, la finance... En effet le gaspillage du système et le taux de ponctionnement du capital financier sur l’économie réelle est tel (l’objectif est de 15% du capital par an) qu’il faut perpétuellement l’alimenter par une croissance déraisonnable dopée par le marketing et par un déficit public à l’Ouest dont le rôle est d’absorber les excédents monétaires des pays en révolution industrielle (tour à tour le Japon, les Dragons du Sud-Est asiatique, la Chine). La future "bulle écologique", à savoir les milliards de dollar qu’il faudra pour faire face à la crise climatique - ou pour la combattre - arrivera trop tard. Faire la "guerre contre la terreur" au lieu de faire celle contre le réchauffement climatique a été l’erreur historique qui précipite désormais la chute de l’empire américain.

Privée de 2 de ses bulles, l’économie américaine entre en récession, et ses dominions à sa suite. Pour se redresser, il manque aux Etats-Unis mille milliards de dollars d’infrastructures publiques désormais inexistantes ou en ruine à cause du retrait de la sphère du service public - idéologie néo-libérale depuis Reagan oblige.

Mille milliards qui ont été gaspillés pour "raser l’Irak et en faire un parking" (pour reprendre l’expression des boys) ou pour menacer le moyen-orient du liban jusqu’au Pakistan de "se faire bombarder en arrière jusqu’à l’âge de pierre" (avertissement poétique adressée par un général américain au Pakistan)

Un ogre grimé en Mickey et dont le poids fait craquer la banquise qu’il a lui-même fragilisée

La nature réelle et le cynisme profond de cette civilisation qui marche sur deux jambes, celle de la guerre (hard power) et celle de l’hubris (l’avidité comme vertu consumériste) sont perpétuellement masqués aux yeux des foules sentimentales par les tours et les paillettes de l’industrie du spectacle (soft power). Le rôle d’Hollywood & consors est fondamental, il est de distraire perpétuellement l’attention, d’étaler et d’exhalter les bons sentiments qu’on ne mettra de toute façon jamais en pratique, de grimer l’ogre lui-même en Mickey démocrate et droit-de-l’hommiste. Cette distraction industrialisée participe de façon décisive à l’aggravation de la crise structurelle et systémique. Les meilleurs esprits et les forces vives qui pourraient y remédier sont soit clientélisée par le système (ce qui se traduit par le conformisme), soit captées par les mirages de ses distractions multi-médiatiques (lobotomie et aboulie des victimes du nouvel opium du peuple).

Il reste à savoir quand et comment la crise de déclarera. Certains se risquent à un pronostic de date - à la suite d’autres pronostics déjà vérifiés dans les faits, comme ici sur http://www.newropeans-magazine.org. Ce serait à partir de septembre 2008 pour les U.S.A. avec un décalage en temps et en intensité pour les économies découplées comme l’Europe et l’Asie.

D’autres ne se risquent pas à des pronostics, mettant en avant à quel point "toutes les options sont sur la table" et que le système est prêt à toutes les extrêmes quant il est poussé dans ses retranchements.

En tout cas la conjonction prévisible - quoique probablement décalées - des crises énegétiques, climatiques, économiques et migratoires mettront des centaines de millions de personnes en difficultés En Europe même, la crise du pouvoir d’achat qui met aux abois des millions de familles risque de marquer une rupture sociale et de donner le coup d’envoi à une nouvelle barbarie au sein de populations urbaines rendues hyper-dépendantes sur le plan de l’approvisonnement (en nourriture, en énergie, dans son accès au logement).

Face à l’accélération du pronostic de crise systémique, la seule réponse systémique est existentielle. C’est une réponse qui s’offre aux individus puisque cette civilisation a fait essentiellement de nous des individus a qui on a imprimé la caractéristique d’être en concurrence les uns avec les autres et celle de chercher la réponse à tous ses besoins par un acte individuel d’achat ou par une revendication adressée à la puissance publique. Mais à l’heure où celle-ci avoue son impuissance publique ("les caisses sont vides", comprendre, elles sont remplies de dettes), à l’heure où l’individu n’a bientôt plus assez d’Euros ou de dollars pour acheter la satisfaction de ses besoins fondamentaux réels, à l’heure où il est invité à exploiter autrui ou à se sous-prolétariser en tant que téléspectateur ou qu’internaute sous perfusion virtuelle pour assister, enrichi ou apauvri, alcoolisé au fond de son sofa à la fin d’un monde, à la fin du contour connu des continents, à la fin de la diversité biologique, à la fin de ses droits, jusqu’à ce que cette fin l’atteigne et le jette dans le froid et la faim en quête d’une solidarité qu’il ne trouvera pas autour de lui s’il n’a rien fait d’ici là pour la faire renaître des cendres de son humanité oubliée.

La première réponse existentielle des individus face à la perspective de crise systémique, c’est à dire celle de l’imprévisibilité totale sur tous les plans est de mettre fin à l’organisation systématique de leur mise sous dépendance (alimentaire, énergétique économique, psychologique...), et paradoxalement pour eux leur seule chance d’accéder à un minimum vital d’autonomie est dans la réappropriation de stratégies collectives à échelle humaine, c’est-à-dire dans la création collective d’activités recentrées sur l’essentiel, dans la création de nouvelles coopérations relocalisées (ville-campagne par exemple) dans le développement de solidarités et d’actions locales de développement, dans la mise en réseau du partage des "voies et issues", des "modes d’emplois" des pratiques souhaitables, des évidences à redécouvrir et à remettre en pratique. Les moyens de communication post-modernes sont à employer pour diffuser les savoir-faires pré-modernes. Toutes ces solutions impliquent essentiellement la réappropriation de la pensée et de l’action collective à échelle humaine - celle qui justement est rendue très difficile pour des individus rendus individualistes, souvent stressés, infantilisés par le système éducatif, politique, économique, obsessionnels et malades de reconnaisance, méfiants, projetant perpétuellement sur autrui leurs peurs et leurs envies et habitués à ce que d’autres - des spécalistes, des experts, des professionnels - agissent et pensent à leur place. La première étape pour répondre existentiellemnt à la crise systémique est donc d’être capable de se mettre ensemble pour faire soi-même, mais pas seul, les bonnes choses qui doivent être faites, malgré nos différences et grâce à elles.

Malgré les errements idéologiques et sectaires qui en rendent l’abord difficile, la réponse est bien dans la recherche de l’intelligence et de l’action collective. L’individu en concurrence et qui ne connait plus de la solidarité que les ponctions obligatoires dont il fait l’objet doit se redécouvrir individu capable de coopérer et de solidarité concrête. L’individu seul qui achète la solution à son besoin a à développer sa capaciter à trouver collectivement ou en communauté(s) fussent-elles entrecroisées des solutions intellligentes et durables à ses besoins. Le garde-fou contre les dérives sectaires se trouve dans le refus et la vigilance contre la domination et la perversion, deux maux qui se retrouvent à grande échelle dans le système du monde entré en crise.

GK
février 2008


Accueil | Contact | Plan du site | | Statistiques du site | Visiteurs : 224 / 0

Suivre la vie du site fr  Suivre la vie du site Dossiers brûlants   ?

Site réalisé avec SPIP 3.0.16 + AHUNTSIC

Creative Commons License