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Accueil > NAKBA > Le district de Jaffa ( n°7 de notre série de 14 districts) > District de Jaffa : al-Safiriyya

Et si on parlait de la Nakba ! (numéro 7)

District de Jaffa : al-Safiriyya

Jeudi 19 janvier 2012 - 16 h 37

jeudi 19 janvier 2012

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al NAKBA

(la catastrophe)

Si nous ouvrons aujourd’hui une nouvelle rubrique intitulée al NAKBA, c’est notamment pour éviter que tous les pernicieux efforts de l’Etat d’Israël pour faire disparaître ce terme de la mémoire de l’humanité aboutissent. Il serait, en effet, dommageable pour l’Histoire que soient « oubliés » les moments tragiques que connut le peuple palestinien, notamment en 1947-1948, période durant laquelle se déroulèrent les événements ayant donné lieu à cette appellation qui se passe de commentaires, les faits étant là pour en témoigner.

Les faits

Faits significatifs précédant la période dénommée Nakba par les Palestiniens

1917 : Le ministre des affaires étrangères du Royaume Uni, sir Arthur James Balfour, déclare envisager "favorablement l’établissement d’un foyer national pour le peuple juif". L’armée britannique occupe la Palestine et facilite l’entrée et l’installation d’immigrés étrangers armés, créant, de fait, une situation de colonisation.

1922 : La S.D.N (Société des Nations devenue O.N.U) entérine la déclaration Balfour en confiant au Royaume Uni un mandat sur la Palestine. Cette reconnaissance provoque une intensification de la résistance des Palestiniens à l’occupation britannique et à son soutien à l’ établissement de l’Etat d’Israël.

1936-1939 : Un soulèvement majeur et massif marque le point culminant de la double résistance des Palestiniens contre l’occupant britannique et le Mouvement sioniste : "Grande grève", boycott de l’Etat, contrôle des zones rurales par des maquisards ; forte répression par l’armée britannique cantonnée essentiellement aux frontières et qui "réoccupe" plus de 700 villages.

1939-1945 : Seconde guerre mondiale et génocide nazi contre les juifs

Période Nakba

29/11/1947 : L’ONU vote un plan de partition de la Palestine toujours placée sous mandat britannique. Dès le lendemain, le 30 novembre, les affrontements deviennent de plus en plus violents entre les communautés palestinienne et juive ; cette dernière, puissamment armée et soutenue par une opinion internationale encore traumatisée par le tragique sort réservé aux juifs par les nazis, attaque, dévaste, villes et villages palestiniens, harcelant et forçant la population à fuir et c’est ainsi qu’environ 800 000 Palestiniens sont conduits à prendre la route de l’exil.

14/05/1948 : Fin du mandat britannique et proclamation de l’Etat d’Israël contre la volonté des Palestiniens et des Etats arabes voisins. Dès le lendemain, la première guerre israélo-arabe éclate mais 80% de la population de la Palestine est déjà expulsée. Israël déclarera « absents » les propriétaires palestiniens réfugiés dans les pays arabes voisins, ce qui permettra la mainmise de l’Etat sur 90% des terres et possessions palestiniennes après que plus de quatre cent villages ont été rasés.

Ces événements constituent le cœur même de cette tragédie que les Palestiniens ont dénommée Nakba et, au vu et au su de tous les crimes perpétrés durant cette période envers ce peuple martyr par l’occupant toujours présent 63 ans après l’envahissement, on comprend les raisons qui poussent Israël à tenter de faire oublier ce sinistre épisode qui d’ailleurs se prolonge sous d’autres formes plus perverses encore jusqu’à aujourd’hui.

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Les informations fournies dans les articles de cette nouvelle rubrique proviennent du remarquable ouvrage "All that remains : The palestinian villages occupied and depopulated by Israel in 1948" (ed. Walid Khalidi )- Traduction : Philippe Lewandowski.

L’ouvrage édité par Walid Khalidi et publié en 1992 (second tirage : 2006) par
the Institute for Palestine Studies (Washington, D.C.) recense, district par district,
l’ensemble des 418 villages qui ont disparu de la carte.

Nous nous proposons
d’en publier des extraits permettant de faire connaître aux lecteurs francophones
la réalité de la Nakba (c’est-à-dire la catastrophe), nom donné par les Palestiniens
à l’évènement tragique dont le gouvernement israélien, dans une vaine tentative
d’effacer l’histoire réelle, prétend même interdire la commémoration.

Pour chacun
des 14 districts traités, nous reproduirons la liste de tous les villages concernés avec
leur population estimée en 1944/45, et en traduisant entièrement l’article consacré à
l’un d’entre eux.

Les Palestiniens aussi ont droit à leurs livres du souvenir.

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Les districts de la Palestine avant 1948

Le district de Jaffa

Les villages détruits du district

al-‘Abbasiyya (5.800 habitants) ; Abu Kishk (1.900) ; Bayt Dajan (3.840) ;
Biyar ‘Adas (300) ; Fajja (1.570) ; al-Haram (880) ; Ijlil al-Qibliyya (680) ;
Ijlil al-Shamaliyya (190) ; al-Jammasin al-Gharbi (1.080) ; al-Jammasin al-Sharqi
(730) ; Jarisha (190) ; Kafr ‘Ana (3.020) ; al-Khayriyya (1.420) ; al-Mas’udiyya (850)
 ;
al-Mirr (170) ; al-Mawaylih (360) ; Rantiya (590) ; al-Safiriyya (3.070) ; Salama
(6.730) ;
Saqiya (1.100) ; al-Sawalima (800) ; al-Shaykh Muwannis (1.930) ; Yazur (4.030).

al-Safiriyya

al-Safiriyya avant 1948

Le village était situé sur un terrain plat dans la plaine côtière centrale. Il était
relié par une route secondaire à la grande route menant à Jaffa et à al-Ramla,
parmi d’autres centres urbains. Al-Safiriyya était connu sous la période byzantine en
tant que Sapharea, et se trouvait à l’intérieur des frontières du district de Diospolis
(Lydda). Lors de la première époque islamique, Hani’ al-Kindi, érudit et ascète
musulman [qui avait refusé le gouvernement de la Palestine que lui avait proposé le
calife omeyyade ‘Umar ibd al-‘Aziz (681-720)], fut enterré à al-Safiriyya. Les croisés
appelèrent le village Saphyria. En 1596, al-Safiriyya était un village de la nahiya (la
plus petite circonscription fiscale sous l’empire ottoman), dans la liwa’ (province) de
Gaza, avec une population de 292 habitants. Il payait des taxes sur de nombreuses
récoltes, incluant du blé, de l’orge, des fruits et du sésame, ainsi que sur divers
autres types de propriétés, comme des chèvres, des ruchers et des vignobles.
À la fin du dix-neuvième siècle, al-Safiriyya était un village construit en briques
d’adobe. Les terres au sud du village étaient plantées d’oliviers.

Lors de la période
du Mandat, les habitants du village, qui étaient tous musulmans, construisirent leurs
maisons de briques d’adobe très près les unes des autres. Al-Safiriyya avait deux
écoles primaires, l’une pour garçons (ouverte en 1920), l’autre pour filles (ouverte
en 1945, avec 45 écolières).

Vers le milieu des années 1940, il y avait 348 écoliers
inscrits à l’école de garçons, qui possédait environ 11 dunums (1 dunum = 919 m²)
pour des exercices d’agriculture.

Le village était le plus grand producteur de tomates du district de Jaffa ; des
oranges étaient également cultivées sur une grande partie des terres. En 1944/45,

3.539 dunums étaient dévolus aux citrons et aux bananes, et 3.032 dunums étaient
alloués aux céréales ; 3.708 dunums étaient irrigués ou utilisés pour des vergers.
Des preuves archéologiques d’une occupation antérieure du site étaient visibles à
al-Safiriyya. De plus, Khirbat Subtara, un tertre artificiel avec des réservoirs sur ses
côtés est et ouest, se trouvait tout proche.

Occupation et nettoyage ethnique

Une dépêche télégraphique annonça que les forces israéliennes s’étaient
emparées de al-Safiriyya le 20 mai 1948. Le communiqué de l’United Press dit que
l’occupation du village coïncida avec des attaques de l’Irgun Zvai Leumi contre la
ville de al-Ramla au sud. Cependant l’historien palestinien ‘Arif al-‘Arif relate qu’il fut
occupé presque un mois plus tôt, en même temps que les proches Yazur et Bayt
Dajan, qui furent attaquées lors de l’opération Chametz, pour préparer l’encerclement
de Jaffa et son occupation définitive. S’il fut pris à cette époque, les unités d’attaque
appartenaient probablement à la brigade Alexandroni.
Dans les deux cas, le village était certainement sous contrôle israélien en
septembre 1948, car le 13 septembre, le premier ministre Ben Gurion demanda au
cabinet israélien la permission de détruire al-Safiriyya (en même temps que treize
villages des environs). L’historien israélien Benny Morris écrit que Ben Gurion prit la
précaution de formuler la demande au nom de l’officier commandant du front central
et non en son propre nom. La permission fut accordée.



Implantations israéliennes sur les terres du village

Quatre implantations se trouvent maintenant sur les terres du village :
Tzafriyya et Kefar Chabad, tous deux construits en 1949, Achi’ezer, fondé en 1950,
et Tochelet, fondé en 1951. La colonie de Shafrir, établie en 1949, a été absorbée
par eux ainsi que par les faubourgs de Ri’shon le-Tziyyon.

Le village aujourd’hui

Les deux écoles – de longues structures en béton avec des entrées et des
fenêtres rectangulaires – sont toujours debout et ont été réaménagées.

Plusieurs
maisons, quelques-unes en briques d’adobe et d’autres en ciment, demeurent
également, et sont soit abandonnées soit habitées par des familles juives. Elles sont
d’une architecture simple et ont des portes et des fenêtres rectangulaires ; la plupart
de leurs toits sont plats. Des cactus et diverses sortes d’arbres s’étendent le long
d’une ancienne route du village, et le site est un peu partout parsemé de sycomores
et de cyprès.

Des parties des terres environnantes sont couvertes de constructions,
mais d’autres parties sont cultivées par des Israéliens.

Pour en savoir plus : english
arabic, sur le site palestineremebered

Images : Palestineremembered.com