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Un avis trés autorisé. (ndlr)
Le CRIF : « Un sale boulot pour les juifs français »
par Michèle Sibony, de l’UJFP
jeudi 5 mars 2009
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Le CRIF vient encore une fois de tenir son devenu incontournable dîner. Il se permet aujourd’hui d’éliminer les partis politiques qui lui déplaisent parce qu’ils ne soutiennent pas inconditionnellement la politique israélienne.
Sans doute cela signifie-t-il pour lui qu’ils sont antisémites, ou soutiennent des antisémites. Il est atterrant d’entendre les commentaires sur ces exclusions par la plupart des media et certains élus, qui viennent confirmer l’importance de l’événement. Il faut absolument en être sinon on est un paria antisémite.
Fonctionnant en véritable groupe de pression en France au service du gouvernement israélien et de son armée (ne participe-t-il pas régulièrement à des galas chargés d’honorer et de financer cette armée ?), le CRIF passe donc ses messages politiques, et presque toute la presse les relaie allègrement. La France entière les reçoit... mais surtout le gouvernement français prend position publiquement et s’aligne.
Les messages du CRIF pour l’année 2009, l’année Gaza :
1 – la France doit être placée sous le signe de l’antisémitisme qui monte.
Monsieur Prasquier, celui là même qui a osé affirmer, lors d’une manifestation de soutien à l’opération israélienne à Gaza, que 95% des juifs de France soutenaient ce massacre - une phrase considérée comme franchement antisémite par Jean François Khan dans Marianne -, n’est pas gêné de parler d’une « explosion de haine d’une virulence alarmante » lors des manifestations de soutien à la population de Gaza. Ainsi il ressort la vieille bonne carte, le Joker qui sert à faire taire sur Gaza.
S’il est vrai, problématique et dangereux que des pics d’actes ou propos antisémites sont constatés à chaque opération meurtrière de l’armée israélienne contre les Palestiniens de Cisjordanie ou de Gaza, le CRIF et ses présidents successifs depuis 2000 devraient cependant s’interroger sur leur rôle actif dans l’assimilation de tous les juifs français avec la politique israélienne d’aujourd’hui, d’occupation de colonisation, de blocus et de crimes de guerre ainsi que de violations des droits humains. Assimilation qui marche aux yeux de certains, les plus fragiles et les moins construits politiquement et qui favorise les passages à l’acte antisémites au lieu de l’action politique requise.
A l’inverse, il faut rappeler le rôle exemplaire du collectif national des associations pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens comme des innombrables collectifs de Province qui ont organisé et conduit dans toute la France les manifestations politiques contre l’opération israélienne sur la Bande de Gaza. Les communiqués et appels aux manifestations, les mots d’ordres et des services d’ordre qui ont fonctionné avec la règle qu’aucun slogan raciste ne serait admis. Même si le service d’ordre parisien a été débordé par le nombre incroyable de participants dans la première manifestation, il s’est renforcé dès la seconde et a travaillé avec deux lignes rouges : pas de fascistes dans nos manifestations et pas de racisme d’aucune sorte. C’est ainsi qu’il a sorti de force plusieurs groupes répondant à l’un ou l’autre de ces deux critères (ou aux deux) des manifestations où ils tentaient d’entrer.
Monsieur Prasquier parle de haine dans ces manifestations. Non, il n’y avait pas de haine, mais une immense colère contre la violence sans limite, « sauvage » selon le terme recommandé par Tsipi Livni pour l’action de ses soldats. Oui, c’est la colère, et aussi une immense douleur devant le sort des habitants de Gaza livrés aux criminels de guerre par nos dirigeants politiques et que nous étions, nous la société civile, des millions dans le monde à défendre, exigeant que les crimes soient punis. Et cette colère n’est pas près de se calmer, pas avant que les criminels de guerre ne soient présentés à La Haye. N’en déplaise au CRIF.
La haine, nous l’avons vue dans les bombardements au phosphore de Gaza, sur les écoles, les hôpitaux et les lieux de culte, entendue dans les propos des dirigeants israéliens et les commentaires d’une grande partie de la presse et même, de certains soi-disant intellectuels de gauche en Israël.
Car en réalité le CRIF et Monsieur Prasquier ont un problème : leur minable et pathétique tactique d’allumage du contre-feu « antisémitisme » pour faire oublier Gaza, si elle marche avec une certaine classe politique, qui simule la sympathie - en grinçant des dents parfois, mais alliances et stratégies néo libérales ont leurs exigences ; et effectivement pour ceux là il faudrait faire oublier Gaza et mettre au pas les Palestiniens en les obligeant à accepter l’inacceptable, comme ils tentent de le faire ici en France-, elle n’a aucune chance de prendre sur la société civile qu’elle irrite gravement et qui ne renonce pas à défendre les droits que les pouvoirs attaquent là bas comme ici.
Cette tactique est encore une fois calquée sur celle des gouvernements israéliens : comme en 2002 Sharon avait appelé à l’émigration des juifs français victimes de l’antisémitisme, aujourd’hui l’une des 5 exigences de Lieberman pour accepter la coalition avec Netanyaou et/ou Livni est la création d’un cabinet gouvernemental chargé de l’intégration de l’immigration juive qui ne manquera pas d’arriver d’Europe et d’Amérique en raison de la poussée d’antisémitisme que l’on sait. Exigence acceptée d’ailleurs par les deux leaders politiques !
Pourtant la tentative est perdu d’avance, seuls les convaincus le seront, et nous ne marcherons pas dans la combine, c’est peut-être cela que Monsieur Prasquier appelle l’antisémitisme : le refus de se taire sur Gaza et la Palestine, quoiqu’il arrive. Et le refus de céder au chantage obscène. Si l’antisémitisme se développe en France ce sera grâce au CRIF et à Monsieur Prasquier et à leur tactique du gendarme, et aussi grâce à ces nombreux média larbins des petits chefs. Nous nous resterons du côté des droits et des opprimés, contre l’injustice, et la barbarie. Mais il est clair que Monsieur Prasquier et le CRIF ne font pas le pari de la société civile et du droit, mais celui du pouvoir et de la force.
2 - La France ne doit pas aller à Genève :
Prasquier a utilisé, lui, l’expression israélienne consacrée pour désigner le quatrième Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des nations unies qui se tiendra à Genève en Avril. Il l’a appelé comme le gouvernement israélien et ses soutiens : « Durban 2 » , afin de clairement l’aligner sur le premier qui s’était tenu à Durban en août 2001 au moment de la seconde Intifada.
Dans le forum des ONG parallèle à ce conseil de représentants des Etats, des propos antisémites avaient été tenus. Et l’amalgame avait été fait par Israël entre ce qui avait circulé du fait de certaines ONG, et les recommandations officielles du Conseil des droits de l’homme, afin de les couvrir d’opprobre. Car ces recommandations parfaitement honorables avaient, très timidement, remarqué que la situation des Palestiniens des Territoires Occupés méritait l’attention, tout en prenant soin de rappeler la nécessaire garantie de Sécurité pour Israël. Mais en 2001 c’ était déjà trop pour Israël, et la campagne anti Durban a servi à baîllonner toutes les critiques sur l’occupation et la colonisation et leur illégalité, sur les assassinats ciblés, les meurtres de civils, les emprisonnements sans jugement ... la liste serait trop longue.
Ainsi, il faut donc se débarrasser de cette conférence : une véritable conquête pour les peuples, une organisation de l’ONU qui repère sur tous les continents les violations des droits humains et le racisme, qui fait des recommandations à chaque Etat, et qui mesure de session en session l’avancement des situations. Tout cela se fera sans Israël bien sûr, sans le Canada qui a déjà cédé à l’intimidation, sans les Etats-Unis qui viennent de se retirer, et sans doute sans la France a pratiquement annoncé Monsieur Fillon, au dîner du CRIF.
De même Israël fait partie des sept Etats avec les Etats- Unis et la Chine qui se sont opposés à la création de la Cour Pénale Internationale. Hors de question d’avoir à rendre des comptes à quiconque, Israël se situe aujourd’hui dans l’exception, au dessus des lois et critiques. Normal, tout ce qu’il peut faire il le fait pour sa survie, c’est cet obsédant discours qu’il insuffle aux israéliens et à l’étranger. Tout acte ne se justifie-t-il pas par cette raison absolue et immanente de la survie ?
Et là quel tribunal ou quelle conférence internationale pourrait avoir quelque chose à dire ? Il est important de mesurer à quel point ce concept est intégré jusque dans l’inconscient israélien, comme un « mantra », au point même que devant chaque « crise » - et la métaphore médicale prend ici tout son sens -, les journalistes et « intellectuels » israéliens reproduisent presque mot à mot leur partition pour soutenir l’insoutenable.
Pour la société civile française, et particulièrement pour les associations oeuvrant pour une paix fondée sur le droit entre Palestiniens et Israéliens, la participation à Genève en Avril comporte un double enjeu :
exiger la condamnation des violations des droits humains par Israël dans les Territoires Occupés et à Gaza, ainsi que de ses pratiques légales discriminantes à l’égard de ses citoyens d’origine palestinienne ;
l’exiger ensemble, français de toutes origines, en même temps que nous réaffirmerons notre violente répulsion contre toute forme de racisme.
Parce que ce racisme, outre qu’il est totalement étranger à notre action et notre conception du monde, est un double piège : il veut transformer le conflit et ses enjeux de politiques en ethniques et religieux ; et du coup délégitimer un des combats contemporains les plus justes : celui de la reconnaissance des droits des palestiniens bafoués depuis plus de 60 ans. Et cela c’est le rêve du CRIF et d’Israël.