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Paix et Justice au Moyen-Orient (2008 - analyse N°4)

Aujourd’hui : Pourquoi Israël s’acharne-t-il sur le ghetto de Gaza ?

Notre rubrique géopolitique

dimanche 27 janvier 2008

Strasbourg, le 27 janvier 2008

D’aucuns réduisent le conflit israélo-palestinien à un conflit entre les Juifs et les Arabo- Musulmans palestiniens. Cette vision réductrice n’explique pas pourquoi les pays arabes, ne viennent pas en aide au peuple palestinien. Ni pour quelle raison Israël entretient d’excellents rapports avec la Turquie musulmane, qui met son espace aérien au service de l’aviation israélienne, dont les conseillers militaires sont omniprésents au sein de l’armée turque ? Cette dernière achète du matériel israélien, dont des drones survolent le Kurdistan irakien et les zones frontalières iraniennes.

Les pays arabes du Golfe Persique ont investi massivement dans l’économie des pays occidentaux, notamment des Etats-Unis, qui ont absorbé plus de 400 milliards de dollars d’investissements saoudiens, produisant 7% du PNB (Produit National But) américain. Les intérêts économiques, donc politiques, des pays arabes du Golfe Persique sont intimement liés à ceux des Etats-Unis. Ayant des intérêts stratégiques communs avec l’Occident, les pays arabes d’Afrique du Nord ont plus d’« affinité » avec Israël, bras armé des Etats-Unis, qu’avec les Palestiniens.

Le conflit israélo-palestinien n’est donc pas un conflit ethnique ou un conflit israélo-arabe. C’est un conflit politique et territorial, qui oppose, sur un plan régional, les colonialistes aux anticolonialistes : ces derniers comprenant l’Iran, la Syrie et le Liban, nations souveraines ainsi que des mouvements révolutionnaires, partiellement de caractère religieux.

Dans leur ensemble, c’est avec leurs conceptions de la démocratie et des « droits de l’homme », en vigueur dans divers pays développés occidentaux, que les intellectuels de ces pays jugent les mouvements de transformation sociale en Orient. Or, les Orientaux jugent les paroles démocratiques de l’Occident selon leurs pratiques orientales. Que remarque-t-on ? Les dictatures en Egypte, en Arabie saoudite, au Yémen, en Tunisie, en Algérie, sont considérées et traitées en « amies » par l’Occident. Lors de son dernier voyage en Arabie saoudite, Nicolas Sarkozy a rendu hommage à la « sagesse » du roi Abdallah, après avait salué son « rôle de modération » au Proche-Orient (Nathalie NOUGAYREDE- Le Monde du 20-21/01/08). La journaliste n’en revient pas et écrit : « A l’instar de M. Bush, le président français emploie volontiers le terme « modéré » pour désigner les régimes arabes sunnites autoritaires. »

Les intellectuels et autres démocrates occidentaux n’arrivent pas à soutenir ouvertement le Hamas, traité de tous les noms par la propagande officielle occidentale. Pourtant, soutenir le Hamas ou le Hezbollah, ce n’est pas adhérer à leur idéologie. En soutenant la lutte d’indépendance des Algériens ou des Vietnamiens, adhérait-on à l’idéologie du FLN ou du parti communiste vietnamien ? De même, condamner l’holocauste, crime contre l’humanité, implique-t-il l’adhésion au judaïsme ? En l’occurrence, il s’agit de soutenir les opprimés face à aux oppresseurs, les anticolonialistes face aux colonialistes.

Du fait de l’immobilisme des démocrates occidentaux, la résistance anticolonialiste en Orient s’avère plus difficile. C’est dans un climat d’indifférence presque générale qu’Israël a resserré son étau autour de la bande de Gaza, avec l’objectif d’asphyxier ce territoire de 1,5 million d’habitants. Tous les points de passage ont été bouclés. Même l’aide humanitaire ne passe plus, alors que quatre Palestiniens sur cinq en dépendent. Le courant électrique a été coupé, les hôpitaux ont cessé de fonctionner et la nourriture a commencé à manquer. Le pétrole arabe qui arrive en Israël ne peut pas atteindre la bande de Gaza. « Il y a une augmentation de cas de rachitisme chez lez enfants. Il n’y a plus de ciment pour les tombes et les hôpitaux fournissent des draps pour remplacer les linceuls. Même dans la mort, les Palestiniens sont affectés par le blocus » a déploré Christopher Gunnes, porte- parole de l’Unrwa (LM du 20-21/01/08). Faut-il souligner que ce blocus n’a pas pu s’instaurer sans l’assentiment du gouvernement égyptien ?

Un faisceau d’indices vient confirmer qu’Etats-Unis, l’après Bush se met en place. L’AFP nous apprend, que « le président Georges Bush [qui a commencé par être réticent avec le rapport des services de renseignement américain sur le programme nucléaire iranien] a approuvé, jeudi, l’ensemble des conclusions du renseignement américain sur le nucléaire iranien » (LM du 19/01/08). Il faut noter, qu’en plus, Nicholas Burns, numéro trois du département d’Etat et chargé du dossier nucléaire iranien, a démissionné de son poste. La Russie alimente la centrale nucléaire (en construction) de Bouchehr et, selon le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, des « négociations directes, y compris avec les Etats-Unis » seront lancées.

Pourtant, avec les autres puissances du Conseil de sécurité, la Russie s’est mis d’accord, mardi 22 janvier, sur une résolution sanctionnant l’Iran pour la poursuite de ses activités nucléaires (LM du 24/01/08). C’est que le Moyen-Orient reste un terrain d’affrontement Est-Ouest. Y a-t-il un rapport entre la signature et le rapprochement russo-géorgien ? En effet, participant à l’investiture de Saakachvili, Sergueï Lavrov, ministre russe des affaires étrangères a confirmé l’intention « sincère et profonde » de la Russie de normaliser les relations avec la Géorgie (LM du 22/01/08).

Le problème soulevé par l’industrie nucléaire iranienne renferme une vérité : les puissances occidentales sont opposées au développement technologique indépendant de l’Iran, jalouse de sa souveraineté et refusant de servir de monnaie d’échange entre l’Est et l’Ouest. L’exemple de l’Irak montre que : « La pierre angulaire de la puissance n’est pas le territoire mais la technologie » (Henry Kissinger, ancien secrétaire d’Etat américain. LM du 21/04/06).

L’enlisement des Etats-Unis en Irak et celui de l’OTAN en Afghanistan, l’échec de l’armée israélienne au Sud Liban, à l’été 2006 et l’impasse de l’élection libanaise sont là pour nous rappeler que l’Occident a perdu du terrain au Moyen-Orient. La bande de Gaza reste le maillon faible de la chaîne de résistance anticolonialiste. En mettant la pression sur le Hamas, les américano-israéliens cherchent à marquer un point dans leur lutte contre le camp anticolonialiste. Le Hamas et l’ensemble de la résistance palestinienne représentent le grain de sable qui empêche Israël de neutraliser définitivement le Fatah.

En ouvrant des brèches dans le mur qui sépare Gaza du territoire égyptien, le Hamas a neutralisé le plan israélien visant à asphyxier les Palestiniens. D’une manière ou d’une autre, Israël cherchera à justifier son échec, voire à le transformer en « victoire ». Mais, la résistance palestinienne a montré une fois de plus qu’elle est solide face à Israël.

Livrée à elle-même, la résistance palestinienne ne pourra pas vaincre. Le soutien des Palestiniens de Cisjordanie et de tous les anticolonialistes, à commencer par les peuples des pays arabo-musulmans, lui est indispensable. Les manifestations de soutien des Egyptiens et des Yéménites augurent bien de l’avenir de la résistance palestinienne.

Le comité de rédaction