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Source Al-Ahram

Les véritables couleurs de Blair (au fait qui est-ce monsieur ? ndlr)

Par Saleh Al-Naami

lundi 29 octobre 2007

ISM - Grande Bretagne - 29-10-2007

Le rabbin Benny Elon, président du Parti israélien d’Union Nationale, avait du mal à cacher son soulagement, jeudi dernier, lorsqu’un présentateur d’un programme hébreu d’informations radiophoniques lui a demandé ce qu’il pensait du plan récent imaginé par l’envoyé spécial du Quartet et ancien Premier Ministre britannique Tony Blair.

« Finalement, Blair est même d’accord avec nous sur deux points essentiels", a dit Benny Elon. "Eradiquer les organisations terroristes palestiniennes et résoudre le problème des réfugiés sans tenir Israël responsable. »

Révélé la veille, le projet de Blair pour réformer les institutions de l’Autorité Palestinienne a eu des répercussions retentissantes dans l’arène palestinienne. Les factions, les élites et le public palestiniens ont été choqués quand ils ont découvert que la « réforme » des institutions de l’Autorité Palestinienne, selon Blair, signifie d’ établir les conditions qui permettront de resserrer l’emprise sur les mouvements palestiniens de résistance, en particulier en Cisjordanie. Et le projet ne conditionne pas cela avec une diminution des attaques des Palestiniens par l’armée d’occupation israélienne et les colons.

Selon le plan, dont une copie en hébreu a été mise en ligne sur le site web du quotidien israélien Haaretz, Blair considère comme nécessaire d’acter une réforme administrative des agences de sécurité du Président Mahmoud Abbas, de manière à rendre plus efficace leur guerre contre les militants du Hamas et du Jihad Islamique en Cisjordanie. Le projet établit une relation entre la capacité des agences d’Abbas à mener une campagne contre le Hamas et le Jihad Islamique et l’avenir d’un règlement du conflit.

Dans l’introduction du projet, Blair écrit que si les organes palestiniens de sécurité ne conduisent pas des opérations dures contre les mouvements palestiniens de résistance en Cisjordanie, il n’y aura aucun espoir de parvenir à un règlement du conflit.

Pour rendre les agences de sécurité d’Abbas plus efficaces dans leur guerre contre les mouvements palestiniens de résistance, le plan recommande de donner à l’administration judiciaire et au Procureur de Cisjordanie les pouvoirs qui leur permettront de juger les membres et les chefs de la résistance.

De plus, le plan recommande la création d’une nouvelle administration de l’Autorité Palestinienne chargée de la surveillance des prisons, sous supervision européenne pour garantir que les membres de la résistance qui auront été jugés ne soient pas libérés.

Plus loin, le plan demande une augmentation du nombre de consultants européens qui aident la police palestinienne dans ses activités pour poursuivre les membres des mouvements de résistance. Il demande également que soit intensifié le travail de l’équipe dirigée par le coordonnateur de la sécurité le Général Keith Dayton, grâce à qui l’efficacité des agences de sécurité de l’Autorité Palestinienne et, en particulier les agences de sécurité nationale et présidentielle, a été développée.

Les Palestiniens ont été révoltés par la recommandation de Blair d’ inclure le Ministre israélien de la Défense Ehud Barak comme membre du comité qui supervisera l’exécution du plan, aux côtés du Premier Ministre palestinien Salam Fayyad et de Blair lui-même.

Blair a soumis une copie de son projet au Premier Ministre israélien Ehud Olmert et envisage de le présenter, pour accord, lors de la rencontre au sommet qui va se tenir cette année à Annapolis.

Cependant, les Palestiniens s’accordent à dire que la partie la plus alarmante du plan de Blair est sa tentative de poser la base d’un règlement de la question des réfugiés palestiniens. Utilisant comme argument un effort d’amélioration des conditions économiques des Palestiniens, le projet propose la construction de nouveaux logements en Cisjordanie, dans le but d’y rapatrier les réfugiés. En tête des projets de Blair, on trouve la création d’une nouvelle ville palestinienne, près de Ramallah, au centre de la Cisjordanie, qui hébergera des centaines de milliers de réfugiés palestiniens et fera partie d’un plan de « réhabilitation ». Les dirigeants de la droite israélienne et les experts israéliens promeuvent ce même plan comme solution de la question des réfugiés.

En échange de toutes ces obligations imposées à l’Autorité Palestinienne, le projet demande seulement à Israël d’alléger les restrictions de liberté de mouvement des Palestiniens en Cisjordanie, car Blair considère qu’il est important que les Palestiniens sentent un changement « positif » dans leur vie quotidienne.

Pour leur part, les représentants des factions palestiniennes ont durement critiqué le projet Blair, le décrivant comme une recherche d’éradication de la cause palestinienne. Jamil Al-Majdalawi, membre du politburo du Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) et chef du Comité des Réfugiés au Conseil Législatif Palestinien, a déclaré que certains, dans l’entourage proche d’Abbas, ont encouragé Blair à proposer son plan.

Pour sa part, Khaled Al-Butsh, un dirigeant important du Jihad Islamique, dit que le projet a pour but de « tricher » avec le droit au retour, sous la formule de « réhabilitation des réfugiés ». C’est une tentative qui vise essentiellement à tirer un trait sur la question des réfugiés. Parlant à Al-Ahram Weekly, Al-Butsh a dit que Blair ne voit aucun problème dans les « attaques criminelles » d’Israël, les activités de colonisation, la judaïsation des secteurs palestiniens et les attaques des colons.

Pour Yehia Moussa, vice-président du bloc Hamas au Conseil Législatif Palestinien, Abbas est de connivence avec Blair pour éliminer la question des réfugiés. Moussa souligne que les déclarations faites récemment par Abbas indiquaient qu’il était possible de trouver « des solutions créatives » au problème des réfugiés. Parlant à Weekly, Moussa a souligné que Blair et ceux qui sont en contact avec lui vont découvrir que le peuple palestinien est capable de « saper la conspiration qu’ils complotent ».

La rancœur des Palestiniens a été attisée par le fait que le plan Blair ignore d’une manière flagrante les mesures oppressives et punitives sur les Palestiniens par l’armée et les colons israéliens. Et ceci en dépit de toutes les statistiques fournies par les groupes de droits de l’homme, y compris les associations israéliennes, qui confirment que les civils palestiniens sont soumis à des abus épouvantables.

Selon ces statistiques, le nombre de Palestiniens tués par les balles de l’armée d’occupation en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza depuis le début de l’année s’élève à 350, quand le nombre de soldats de l’occupation et de colons tués par les opérations de la résistance palestinienne n’est que de cinq.

Selon les associations israéliennes pour les droits de l’homme, les colons ont lancé 25.000 attaques contre les Palestiniens en Cisjordanie, et ceci seulement depuis le début de l’année. Dans certains secteurs, comme Hébron, ces attaques ont poussé un grand nombre de Palestiniens a quitter leurs quartiers. En dépit du nombre en augmentation et de l’intensité de ces attaques, un seul colon a été traduit en justice, et il a été relâché contre une caution modique.

Dans le nord de la Cisjordanie, les colons ont déraciné 10.000 oliviers et empoisonné des centaines de puits artésiens. Ils ont aussi lâché des troupeaux de porcs pour détruire les récoltes. Et selon une étude israélienne, les checkpoints militaires qu’Israël a installés en Cisjordanie interfèrent dans la vie de 80% de l’ensemble des Palestiniens.

Et encore plus grave dans le projet de Blair, c’est qu’il ignore les comptes-rendus directs et documentés établis par les chefs de l’armée israélienne, dans lesquels ils reconnaissent avoir créer les conditions qui facilitent la perpétration des crimes contre les Palestiniens par les colons.

Le Général Yuval Bazak, chef du département du "développement de la théorie militaire" dans l’état-major de l’armée israélienne, et qui a dirigé l’armée israélienne en Cisjordanie, a récemment déclaré au journal israélien Yediot Aharonot que l’armée d’occupation a, pendant des douzaines d’années, ignoré les attaques des colons contre les civils palestiniens. « Il y a là un énorme mensonge », a dit Bazak. « Nous, l’armée, aidons les colons juifs à commettre des crimes contre les civils palestiniens désarmés. »

Il a ajouté que l’armée israélienne avait couvert des organisations terroristes israéliennes actives dans les colonies. Il a également souligné que l’armée et les services secrets israéliens ne font rien pour démanteler les organisations terroristes israéliennes.

En même temps que le plan recommande de « réformer » le système judiciaire palestinien pour le rendre plus « compétent » pour s’occuper des mouvements palestiniens de résistance, il omet de s’adresser au système judiciaire israélien, dont les associations israéliennes pour les droits de l’homme disent qu’il ignore, de manière raciste, les plaintes des citoyens palestiniens attaqués par les colons.

Un rapport publié par l’organisation israélienne « There is Law » (« Il y a la loi », ndt) qui surveille les activités d’occupation en Cisjordanie, indique que seulement 1% des plaintes déposées par les citoyens palestiniens en Cisjordanie auprès de la police israélienne au sujet d’attaques des colons se terminent par une condamnation.

Dans tous les autres cas, le dossier est tout simplement classé.

Source : Al-Ahram

Traduction : MR pour ISM