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Confirmant son précédent rapport

Peter HANSEN dénonce à nouveau les conditions de vie à GAZA

samedi 26 février 2005

Le Commissaire des Nations-unies pour la Palestine affirme que les conditions de vie à Gaza sont horrifiantes.
Le Commissaire général danois de l’Unwra [1], qui quittera son poste en mars, selon les médias danois [2], s’est exprimé sur les conditions à Gaza, Palestine, dans une récente conférence sous les auspices de la Faculté pour la Paix israélo-palestinienne, qui s’est tenue à Jérusalem.

D’après Hansen, la situation à Gaza est si horrifiante que sans l’aide de bulldozers, on ne peut pas traverser les débris et les barricades de sable élevés pour bloquer la circulation [3].

« Si vous vouliez aller à Gaza aujourd’hui vous ne le pourriez pas parce qu’il y a des chars tout le long de la route principale qui mène à Gaza. Sur les côtés de la route vous verrez des maisons qui ont été rasées au bulldozer. Et quand on descend vers le sud de Gaza cela empire encore », a déclaré Hansen.« Quand on approche de l’extrémité sud de Gaza, où Khan Younis et Rafah ont subi des destructions continues, et où le nombre des gens laissés sans abris par les bulldozers se monte à plus de 25 000, nous avons réussi à reloger 8 000 personnes mais nous menons un combat perdu d’avance. Nous ne pouvons pas construire, aussi vite que les destructions s’étendent. Gaza est vraiment dans un très triste état. Tout le monde là bas espère que le conflit va prendre fin, pour que s’arrête non seulement leur souffrance, mais aussi, après des décennies, la privation d’une vie humaine digne. »

Hansen a été systématiquement dénoncé par Israël comme agent des activités terroristes palestiniennes, malgré les dénégations et les preuves du contraire [4]. Néanmoins le Commissaire général de l’Unwra a exprimé sa préoccupation pour les souffrances israéliennes. « N’oublions jamais qu’il y a deux parties au conflit et deux peuples qui exercent de la violence l’un contre l’autre et donc des victimes de l’autre côté aussi. » a-t-il déclaré.

« Les Israéliens ont souffert. Il y a des milliers de familles en Israël où des gens ont perdu des êtres chers du fait d’attaques terroristes. Il y a eu aussi des dégâts matériels côté israélien. L’un des dégâts les plus graves qu’ont subi les Israéliens est peut-être l’expérience d’assumer les fonctions exercées par une armée d’occupation », a insisté Hansen.

« Quand je vois aux check-points le traitement infligé à des femmes et des enfants innocents, Palestiniens ou autres, qui essaient de passer, je pense qu’il y a un facteur de ‘brutalisation’ dans le fait que des jeunes hommes et des jeunes femmes sont exposés à exercer le type de pouvoir discrétionnaire et souvent de cruauté qu’ils manifestent aux check-points [5] »,continua-t-il. « Cela fait des dégâts qui sont bien sûr difficiles à mesurer, mais qui je crois -et de nombreux psychologues seraient d’accord avec moi- affectera et pourrira la société israélienne pour des années, une fois que ces postes aux check-points et l’occupation militaire auront disparu quand sera venu le temps d’une solution.

C’est peut-être une bonne chose pour l’état mental des soldats qu’ils ne pensent pas à ce qu’ils sont en train de faire. », dit Hansen. « C’est une chose de penser à la souffrance de ce que l’on fait et une autre de souffrir aux mains de ceux qui l’imposent. L’excuse qu’un ordre est un ordre et qu’on ne le discute pas a été utilisée par des soldats d’armées diverses à travers l’histoire et dans certains cas avec des conséquences morales plus graves que d’autres ».

Hansen a continué à expliquer que malgré une censure occasionnelle, il est évident, si l’on se base sur la générosité des pays donateurs à l’Unwra, que la plus grande partie du monde comprend très bien ce que fait l’agence. Le budget de l’an passé, de 72 million de dollars, était basé sur des engagements de donateurs tels que les Emirats Arabes Unis, le Danemark, la Suède, le Luxembourg, la République de Corée, la Suisse, Chypre, l’Indonésie, la Tunisie, le Koweit, la Thaïlande, la Norvège, Bahrein, l’Inde, l’Autriche, la Chine, l’Irlande, la Malaisie, les Pays-bas, le Japon, les Etats-Unis, la Turquie et la Grande-Bretagne. La Commission Européenne et l’Observateur du Saint Siège se sont aussi engagés. Le pays de Hansen, le Danemark, s’est engagé pour 7 millions et les Pays-bas pour 14.

Hansen a déclaré : « Nous sommes la plus grande agence humanitaire internationale en termes de personnel, d’éducation, de services de santé et de services sociaux. Et je pense que pour tout ça notre personnel reçoit une reconnaissance bien méritée. En même temps il n’y a sans doute pas d’agence qui soit aussi dénigrée que l’Unwra et sujette à des représentations délibérément déformées de ce que nous sommes dont la plupart sont si folles et excessives que personne ne peut les prendre au sérieux, sauf quelques fanatiques prêts à croire tout ce qu’on leur dit » [6].

Hansen a également maintenu que dans l’ensembles les Américains sont peu ou mal informés. Choisissant ses mots avec soin, il a dit que les Etats-Unis font partie des pays qui ont le plus l’occasion de s’informer du travail de l’Unwra. « Il y a peut-être tant de choses en même temps qui attirent l’attention des Etats-Unis qu’ils ne donnent pas la priorité aux choses telles que ce que fait l’Unwra. J’ai le sentiment que beaucoup (d’Américains) le comprennent bien mais je ne serais pas honnête si je ne disais pas que la plupart de ces déformations mal intentionnées semblent naître aux USA et qu’il y a une proportion étonnamment importante de gens aux Etats-Unis qui sont prêts à les accepter aveuglément. »


Né en 1941 au Danemark, le Commissaire général Peter Hansen a commencé sa carrière aux Nations-unies en 1978. Il a été nommé à son poste actuel par le Secrétaire-général Boutros Boutros-Gali en 1996.

Le 19 mai 2004 il écrivait dans Le Monde, à propos des camps de réfugiés :

« Si vous vous trouvez en Jordanie, en Syrie, au Liban, ou dans les territoires occupés, allez voisiter un camp de réfugiés palestiniens.Pendant votre promenade, vous découvrirez des allées si étroites que les cercueils doivent être transportés verticalement pour passer les coins des rues.

Jetez un coup d’oeil furtif dans les abris en ciment des réfugiés et vous verrez qu’ils ne sont souvent guère mieux que des cabanes améliorées, accueillant des familles de 13 personnes ou plus, toutes entassées dans une seule pièce, souvent sans fenêtre ni aération. Dans certains abris insalubres, vous rencontrerez des mères qui préfèrent dormir avec leur bébé dans les bras ou sur leurs genoux, de peur que les rats ne les attaquent. Si vous avez la malchance de visiter ce camp sous une pluie hivernale, vous pourrez constater comment les égouts, fétides et pullulants d’insectes en été, inondent désormais leurs misérables habitations.

Maintenant, arrêtez-vous dans une école. Vous découvrirez dans une salle de classe décrépie, aux murs noircis par les ans, 3 enfants s’agrippant à un petit bureau fendu de toutes parts. Les salles sont surpeuplées ; les professeurs font de leur mieux pour enseigner à 50 élèves désireux d’apprendre. Patientez et observez un instant. Soudain, vers midi, les bâtiments souvent délabrés par les ans se vident entièrement de leurs enseignants et collégiens, immédiatement remplacés par leurs collègues et camarades du tour de l’après-midi. Dans un brouhaha chaotique mais bon enfant, les collégiens du matin partent alors jouer dans les rues sales des camps, n’ayant pas la possibilité de profiter de la cour de récréation, déjà conquise par les nouveaux arrivants.

Ensuite, rendez-vous dans la clinique d’un de ces camps bondés, dont les médecins s’efforcent de recevoir, du mieux qu’ils peuvent, ces 115 patients journaliers, ces mères dont le nombre croissant de prématurés inquiète, ces bébés en pleurs, ou ces vieillards que l’âge a fragilisés. Ils attendent patiemment les quelques minutes que le médecin va pouvoir leur accorder, quelle que soit la nature de leurs maux, une grippe, des douleurs pulmonaires, ou la diarrhée préoccupante d’un nouveau-né. Parlez à ces spécialistes des choix bouleversants qu’ils doivent effectuer chaque jour, du fait des maigres ressources à leur disposition : qui va financer l’opération qui sauvera peut-être la vie d’un de leurs patients ? Certains seront plus chanceux que d’autres...

Si vous le pouvez, essayez d’imaginer la souffrance de ces réfugiés. Vous serez toujours bien en deçà de la réalité ! Cinquante-six ans de conflit et d’exil ont étouffé cette population reléguée sur un lambeau de terre sans Etat.Il n’en a pas toujours été ainsi : l’UNRWA, l’Agence des Nations unies chargée des réfugiés palestiniens, créée il y a cinquante ans, s’est toujours occupée d’eux. Mais, alors qu’auparavant elle disposait de 200 dollars par réfugié et par an pour couvrir leurs besoins en éducation, santé et services sociaux, elle ne dispose plus aujourd’hui que de 70 dollars pour assurer les mêmes services.

L’UNRWA a toujours fait de son mieux pour que les réfugiés de Palestine maintiennent un niveau de vie à peu près semblable à celui des pays hôtes. On peut même relever quelques réussites notables dans des domaines tels que l’alphabétisation des femmes et la vaccination généralisée des enfants.

Malheureusement, depuis une dizaine d’années, ce manque de moyens et l’augmentation de la population réfugiée - maintenant supérieure à 4 millions - ont plongé l’UNRWA dans une crise grave. La qualité des services fournis par l’Agence s’effrite, et les chances des réfugiés de se sortir du marasme s’en trouvent diminuées d’autant. Certains finissent par perdre l’espoir de connaître des jours meilleurs.

Afin d’arrêter l’hémorragie, l’UNRWA et le gouvernement suisse ont invité 70 pays à participer à une conférence organisée à Genève au mois de juin prochain, pour adopter de nouvelles stratégies visant à améliorer la vie des réfugiés palestiniens. Cette conférence portera tout particulièrement sur les moyens et programmes facilitant l’accès de la population réfugiée à l’emploi, à l’hébergement, à l’éducation et aux services de santé, lui permettant ainsi de s’aider elle-même.Des experts des quatre coins du monde, de pays donateurs et d’organisations internationales ont déjà commencé à travailler afin de présenter des recommandations qui feront l’objet de débats lors de la conférence.

En aidant l’UNRWA à planifier pour les années à venir, la communauté internationale soutient ainsi les besoins croissants des réfugiés palestiniens.Cette conférence constitue une première dans l’histoire de l’UNRWA. Je le répète : allez vous promener dans l’un des 59 camps et vous comprendrez mieux pourquoi cet événement est si important pour les réfugiés palestiniens."

[1] United Nations Relief and Works Agency for Palestine, l’Agence des Nations-unies pour le secours aux réfugiés palestiniens

[2] Peter Hansen, Commissaire- général de l’Unwra en Palestine occupée, ne verra pas son mandat renouvelé à cause des pressions israélo-américaines sur le Secrétaire- général des Nations-unies.

[3] par les troupes d’occupation israéliennes qui, en plus des check -points, entravent la circulation des personnes et des biens palestiniens en coupant les routes par des tranchées ou des monticules de terre ou de débris divers.

[4] en octobre 2004, pendant une offensive israélienne meurtrière dans le camp de réfugiés de Jabalyia, dans le nord de la Bande de Gaza, les Israéliens ont prétendu que le brancard porté par un ambulancier qui courait pour accéder à un blessé était un lance roquette. Les photos ont prouvé le contraire, mais les excuses réclamées par M. Brisson, responsable de n’ont pas été apportées par les Isaéliens qui ont cependant reconnu s’être trompés.

[5] les Israéliens, filles et garçons, sont tenus à faire un service militaire de 3 ans depuis 1967. Les filles sont souvent postées aux check-points car l’état-major israélien ne les met pas en situation de combat potentiel. Ca ne rend en rien le passage plus facile.

[6] par exemple des employés palestiniens de l’agence sont régulièrement accusés par Israël d’appartenir à des groupes terroristes, les ambulanciers d’utiliser leurs ambulances pour transporter des « terroristes », etc. Certains sont harcelés, de même que leurs familles. Les autorités israéliennes ont utilisé ces calomnies pour limiter considérablement l’accès des véhicules et de personnel -même expatrié- de l’Unwra dans les zones soumises à des attaques brutales ou démunies de tout après les opérations militaires israéliennes. Au point que l’été dernier l’Unwara a arrêté pendant quelques jours la distribution de nourriture et de médicaments dont 70% de la population est maintenant tributaire

Traduction et notes : Claude Léostic, Afps.