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Trois militaires israéliens parlent

Palestine : « Démasquer les mensonges »

vendredi 29 avril 2005

Palestine : « Démasquer les mensonges »
l’Humanité

publié le mardi 26 avril 2005

Trois « refuzniks » parlent. Rencontre avec Elik Elhanan, Jonathan Shapira et Oren Medicks, trois combattants israéliens de la paix qui tirent le signal d’alarme.

« Il faut se méfier de l’espoir. C’est parfois un sentiment inutile. En tout cas, il ne suffit pas. »

L’homme qui parle ainsi s’appelle Oren Medicks. Il est ce qu’on appelle en Israël un « refuznik » - ces hommes et ces femmes qui ont décidé de - refuser de se faire complices de l’occupation israélienne des territoires palestiniens et des crimes de guerre qu’elle - entraîne.

Avec deux autres compagnons de cette lutte difficile, Elik Elhanan et Jonathan Shapira, ils ont entrepris d’aller de par le monde - notamment en Europe et aux États-Unis - expliquer le sens de leur combat et ce qui se passe vraiment en Palestine. Ils viennent de passer plusieurs jours en Belgique, invités par plusieurs associations de solidarité avec la Palestine et par l’ Union des progressistes juifs de Belgique.

« Nous avons voulu inviter le vrai camp de la paix israélien, celui qui se bat sur le terrain et ne se contente pas de discours », explique son responsable, Henri Weinblum, qui, revenant d’un voyage sur place, s’indigne : « À en croire la presse, on a l’impression que ces derniers temps le calme règne et tout va bien alors que sur place, la colonisation continue, l’arrachage des oliviers continue, le mur continue. Nous avons pensé qu’il fallait faire entendre des Israéliens qui le disent. »

Ce devoir de vérité, les trois hommes l’estiment nécessaire non seulement par solidarité avec les Palestiniens qui continuent de souffrir sous l’occupation, mais aussi pour leur pays lui-même, menacé dans ses fondements par la poursuite d’une politique coloniale : « Le gouvernement israélien peut mentir à l’opinion mondiale, pas aux soldats qui sont sur le terrain. En tant que juifs et Israéliens, notre devoir est de démasquer les mensonges et de dire la vérité sur une politique qui est en train de tuer tout ce qu’il y a de bien en Israël », dit Elik Ehlanan.

Jonatha Shapira, lui, est un de ces 27 pilotes qui, il y a deux ans, ont lancé un appel à refuser de continuer à bombarder les populations civiles et à pratiquer les « assassinats ciblés » de militants palestiniens. « J’ai appris à dire non, et je le fais aussi pour mon pays. Pour moi, envoyer des missiles sur des villes fait partie du même cycle de violence que d’envoyer un kamikaze dans un restaurant », dit-il, affirmant que plus de 100 pilotes soutiennent l’attitude des signataires de l’appel. Et il dénonce une politique qui « fait de la majorité de la population des schizophrènes qui ont en eux des valeurs qu’ils doivent violer dans leurs actions ».

Oren Medicks est le plus âgé des trois, le plus expérimenté aussi puisque sa prise de conscience des dégâts causés par l’occupation date de la première Intifada, en 1987.

C’est lui qui dénonce le « désastre » des espoirs déçus. Ceux d’Oslo d’abord : « Le résultat a été encore plus de - colonies : le nombre des colons a doublé depuis les accords d’Oslo pour atteindre aujourd’hui le chiffre de 400 000. »

Il met également en garde contre le leurre que constitue le plan de désengagement de Gaza : « En réalité, la bande de Gaza va devenir la plus grande prison du monde et le départ de 8 000 colons va servir de prétexte à expulser 150 000 Palestiniens qui vivent aujourd’hui dans la partie de la Palestine que le mur a de fait déjà annexée à Israël. »

Et de dénoncer « une stratégie à long terme qui est non seulement celle de Sharon mais aussi celle de tous les dirigeants israéliens. Elle vise, de fait accompli en fait accompli, à occuper le maximum de terres ». « Le seul espoir, conclut-il, ne peut venir que de l’extérieur, des peuples d’Europe et de la diaspora juive, qui doit comprendre que tout cela finira par se retourner contre elle ».

Avec l’aimable autorisation de Françoise Germain-Robin et du Journal l’Humanité. http://www.humanite.presse.fr