Accueil > Sociétés Civiles à Parlement Européen > « Mais contre qui s’arme donc Riyadh ? »

De + en + mystérieuse Arabie saoudite ou plutôt : De - en - ....... (ndlr)

« Mais contre qui s’arme donc Riyadh ? »

Jeudi, 5 janvier 2012 - 7h16 AM

jeudi 5 janvier 2012

============================================

Par Karim MOHSEN

L’Arabie Saoudite vient d’acquérir 84 chasseurs-bombardiers F-15 américains pour la modique somme de 29,4 milliards de dollars. Ce qu’annonçait jeudi dernier le département d’Etat américain. Pour les Etats-Unis, cette vente constitue un « message fort » selon lequel « Washington est attaché à la sécurité du Golfe ». Suivez le regard du porte-parole du département d’Etat qui, positif ajoute, - les affaires sont les affaires et un pactole de tant de milliards de dollars n’est pas de refus - cette transaction « va améliorer les capacités de dissuasion et de défense de l’Arabie Saoudite contre des menaces extérieures à sa souveraineté ». Une dissuasion contre qui ? Israël ?

A notre connaissance, le seul « vrai ennemi » du Royaume wahhabite. Vous n’y êtes pas. L’ennemi auquel songe Washington est bien évidemment l’Iran et son controversé programme nucléaire.

Est-ce là le combat de l’Arabie Saoudite ? La question mérite désormais d’être posée lorsque Riyadh surenchérit, déclarant par la voix du porte-parole de son ministère de la Défense que ce contrat « garantit au royaume de bénéficier des capacités de défense les plus élevées possibles pour protéger son peuple et son territoire ». Pour se prémunir contre qui ? Israël ou l’Iran ? Il faut savoir que dans les ventes de ces armes aux pays arabes un alinéa interdit leur utilisation contre Israël. Ceci dit, « l’ennemi » pour lequel les Etats-Unis arment l’Arabie Saoudite est donc identifié : l’Iran ! On relève, dès lors, qu’il y a là comme un défaut : l’Arabie Saoudite, siège des Lieux Saints de l’Islam, et qui accueille (à Djeddah) l’Organisation de la Conférence islamique (OCI, 57 pays, dont l’Iran) peut-il être l’ennemi d’un autre pays musulman ? Désormais la question se pose avec gravité : le combat que les Etats-Unis mènent contre l’Iran peut-il être celui de l’Arabie Saoudite ?

L’interrogation se pose d’autant plus que Riyadh aurait dû - devait - faire l’effort d’ijtihad pour une interprétation correcte du bras de fer qui oppose depuis des années l’Iran aux Etats-Unis.

Si l’Arabie Saoudite ne s’arme pas contre l’Iran ni, on le sait, contre Israël, contre qui s’arme-t-elle alors ? Contre ses voisins arabes ?

Il serait donc opportun que Riyadh explique ce qu’il entend par ce contrat qui « garantit au royaume de bénéficier des capacités de défense les plus élevées possibles pour protéger son peuple et son territoire » si ce n’est pas contre le seul ennemi connu de l’Arabie Saoudite, Israël, contre qui Riyadh veut protéger « son peuple et son territoire » ?

De fait, beaucoup de questionnements pour ce qui apparaît comme le « marché du siècle » en matière de vente d’armes - quand des dizaines de milliards de dollars sont en jeu - mais contient peu de réponses. Admettons que Riyadh soutienne à coups de milliards de dollars le complexe militaro-industriel américain (qui en a bien besoin en ces moments de récession), c’est son problème, comme c’est son droit de jeter son argent par les fenêtres - encore que cela se discute eu égard à la question du Proche-Orient et au veto de Washington à l’admission de la Palestine à l’ONU - mais que l’Arabie Saoudite s’embrigade dans un combat douteux qui n’est pas le sien, cela remet en question l’indépendance des pays du Golfe - lesquels accueillent l’armada américaine notamment à Bahreïn, au Qatar, au Koweït et...en Arabie Saoudite (Riyadh Air Base et King Fahd Air Base, Prince Sultan Air Base a été rendue à l’armée saoudienne en septembre 2003) - et pose avec acuité l’interrogation quant à la sécurité du Monde arabe dans son entier. En attendant, la liste des « achats » saoudiens, confirmés ou en attente de concrétisation, est ahurissante.

Jugez-en plutôt : 84 chasseurs F-15 dernier modèle, plus la rénovation de 70 F-15 S (c’est le contrat annoncé le 29 décembre), achat de 72 hélicoptères lourds Black Hawk dont les Saoudiens possèdent déjà 22 exemplaires, 60 hélicoptères antichars Apache Longbow, et 36 hélicoptères légers Little Bird. No comment !

Source : L’Expression