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Source : « Ruminances »

Indignés en Israël ? Oui et non...

Jeudi, 8 septembre 2011 - 8h36 AM

jeudi 8 septembre 2011

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300.000 manifestants en Israël (2/3 à Tel Aviv). Beaucoup réclament la démission de Netanyahu, se réclament être du ’mouvement des indignés’. Tous exigent plus de Justice Sociale. Soudain, Israël réapparaît autrement dans l’actualité.

Là, nous étions hélas habitués à ce que l’actualité soit exclusivement consacrée au (soit disant) ’conflit israélo-arabe’ qui est (réellement) l’inouïe agression coloniale de l’État d’Israël contre le peuple palestinien et ce qu’il lui reste de territoire.

On savait plus ou moins la complexité du peuplement juif (ou supposé tel) d’Israël, venant de pays très différents, à des périodes très différentes... et on savait – au delà des formules politiciennes classiques, ’droite-gauche’ – sa capacité apparente de créer, hors minorité israélo-arabe, une nation dynamique de ce ’melting pot’ : à quel prix !...

On oubliait que, derrière l’unanimisme national, il y a (toujours et partout) la réalité des classes, des luttes de classes : moteur de l’Histoire. Dont l’actualité éclate, de façon souvent impromptue, du point de vue de ’savants politologues’ prétentieux.

’Israël : le prix des loyers est exorbitant’... La crise sociale y éclate, dont le manque de logements abordables n’est que la facette la plus évidente. Là comme ailleurs dans les mœurs occidentales d’Amérique ou d’Europe (et Israël est d’essence occidental), les spéculateurs, banquiers et autres affairistes sévissent : les autres trinquent...

Ce qui est nouveau, c’est que ce scandale social éclate aussi en Israël d’une façon inédite : en contagion, formelle, du mouvement dit des ’indignés’ (Le Portugal, l’Espagne, la Grèce...), mouvement du ras-le-bol de la jeunesse... lui-même inspiré de la jeunesse révoltée du ’Printemps Arabe’.

Curieux effet de boomerang, lorsque l’on sait que les principales dictatures (Égypte, Syrie) arabes voisines d’Israël n’existaient qu’avec la bénédiction occidentale (USA en tête) pour ’protéger’ Israël... donc lui permettre de continuer sa colonisation et domination ’en Paix’ !

Qu’importe ce boomerang . L’importe est que l’abcès crève, et spectaculairement. Les jeunes israéliens font 3 ans de service militaire, essentiellement pour ’protéger les colonies et les frontières’ (toujours floues, juridiquement, comme ’La paix’). C’est un dur tribut à l’État, mais ils entendent bien ’avoir vraiment la paix’ une fois civils. A Tel-Aviv, la vie est socialement, culturellement, celle de n’importe quelle grande ville occidentale. Bien loin de cet ’Orient compliqué’ expulsé de leur horizon mental – celui du ’conquérant en toute bonne conscience’ (c’est à dire ’négation de l’Autre’, ici et aujourd’hui le Palestinien, ailleurs et hier l’Algérien... avant-hier le Sioux...).

Mais voilà, c’est la crise, notamment du logement, à Tel-Aviv comme à Paris, Londres, Madrid, Athènes, New-York, etc. ’Partie visible de l’iceberg’ menaçant aussi (et plus encore) le plein-emploi, les protections sociales : place aux traders et autres Golden Boys, ’There Is No Alternative’... Le pouvoir du Fric écrase tout, pseudo ’classes moyennes’ comprises !

Dans les années 1929-33, ’la Grande Crise’ est un précédent instructif. Elle fut réglée de façon énergique en Amérique par le ’New Deal’ et bien pire en Allemagne par l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Il en reste de puissantes marques sociales et culturelles. Parmi elles, le fameux roman de lutte de classes : ’Les Raisins de la Colère’ de John Steinbeck ou l’amer roman, plus difficile : ’La Route du Tabac’ de Erskine Caldwell. Puis tant d’immenses œuvres (romans, théâtre, cinéma, poésie, chansons, etc.) sur les années de montée du fascisme, de la 2° Guerre Mondiale, des Libérations, des Goulags...

A signaler ici ’La Tour d’Ezra’, curieux roman lyrique, bien dépassé désormais, du si célèbre Arthur Koestler : il s’inspire de son bref engagement (en 1926 !) comme ’pionnier agricole’ dans une ferme sioniste de Palestine (avant le statut de kibboutz). Le livre ne paraît qu’en 1946 puis deviendra un temps un outil de propagande pour les sionistes (encore de ’gauche progressiste’), fondateurs du nouvel État d’Israël... !

Retour dans l’Israël post-sioniste actuel (encore de ’droite extrême’) via un dernier détour littéraire important : ’1984’ de George Orwell (publié en 1948). Cette prévision est erronée, mais sur sa date beaucoup plus que dans sa terrible philosophie : Il reste, selon l’écrivain, 2 classes : Le Parti et les Prolétaires. Plus, aux confins brumeux du Bon Empire et de son ennemi le vague Empire Mauvais, des combats douteux contre une 3° classe. De sous-hommes sauvages, révoltés dont on ne sait jamais rien : la ’novlangue’ ne cesse de réécrire l’Histoire, d’agiter (ou d’effacer) selon les nouveaux besoins de la propagande tel ou tel épisode censé devenir seule ’vérité vraie’, car ’la Paix = la Guerre’. Cela ’réjouit les foules’, propagande désormais sioniste !

Car Israël a le triste privilège d’être un confetti égaré de ce ’Bon Empire’ (du Capitalisme de Papa) tout près de cette nébuleuse sauvage des ’mal contrôlés’ qu’est – entre autres – le Monde Arabo-musulman (...malgré leurs potentats ’amis’). D’où le privilège israélien de ne pouvoir exister qu’en guerre : en criant toujours à la paix, refusée toujours par ’les méchants terroristes’ : tour à tour le Fatah, l’OLP, le Hamas, les alliés libanais, les internationaux pacifistes, le théâtre de Jénine, moi qui écrit ces lignes, vous qui les lisez, etc. ! Et c’est dans ce confetti là que s’invite, comme aux USA, Europe, etc., LA CRISE désormais, créée par l’ ARGENT contre le PEUPLE !

Ce n’est là qu’un schéma, certes, mais bien plus exact que des tonnes d’analyses ’pointues’ faites pour égarer nos ’petites comprenettes’ méprisables. L’essentiel est de continuer à régner, à faire de l’argent, sur nos dos. A Tel-Aviv comme partout... Et ’les autres’ (la 3° classe des ’mal contrôlés’ palestiniens) assistent désormais à ce ’spectacle’ nouveau de Tel Aviv ’indigné’... en rêvant bien sûr que cette 2°classe israélienne rejoigne sa cause d’opprimé : ne sont-ils pas du même côté de la barrière de classes, face au fou furieux du Capitalisme spéculateur ? Et surtout : ne sommes-nous pas tous hommes égaux face au ’robofric’ de la 1°classe déshumanisée ?...

Les enjeux sont terribles, décisifs sans doute pour l’Humanité. Les Crises de 1929 et les suivantes furent moins graves que celle d’aujourd’hui. La Chine le sait bien, cet ex ’Autre Empire’ devenu concurrent du vieux capitalisme ’de papa’, pour un capitalisme ’jeune’. Beaucoup plus agressif (c’est possible ?), en tout cas successeur... probable.

Israël est donc très utile comme grand laboratoire ’in situ’ de la Guerre Mondiale à venir : école militaire - dont la guerre secrète : infiltrations, espionnages y compris industriels... et carcéral : blocus de Gaza, Mur de Cisjordanie, etc. ou administratif : papiers, rafles, refoulements, rafles et tribunaux arbitraires... J’en passe !

Mais ne passons pas une note finale d’espoir, ’d’indécrottable espoir’. Renforcé par la chute de l’apartheid fasciste et ’indestructible’ : NOUS VAINCRONS !!

Oui, ’le mouvement des indignés d’Israël’ vaincra... ou Non, il ne vaincra pas s’il s’enferme dans le piège (loger les mal-logés en Palestine !!) du pouvoir nationaliste fasciste d’Israël : et s’il aboutit à cela, il n’aboutira à rien d’autre que de renforcer la hideuse colonisation israélienne. Il sera indigne de s’appeler ’indigné’, c’est tout !

Car la justice sociale ne peut s’appliquer à un peuple au détriment de son voisin !