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Appel : Justice pour la Palestine

Un appel à l’action de féministes indigènes et de couleur

Jeudi, 14 juillet 2011 - 20h01

jeudi 14 juillet 2011

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Entre le 14 et le 23 juin 2011, une délégation de 11 universitaires, de militantes et d’artistes a visité la Palestine occupée.

Comme femmes féministes indigènes et de couleur impliquées dans de multiples luttes de justice sociale, nous cherchions à affirmer notre association avec le mouvement international en croissance pour une Palestine libre. Nous voulions voir par nous-mêmes les conditions sous lesquelles le peuple palestinien vivait et luttait contre ce que nous pouvons maintenant nommer en toute confiance comme le projet israélien d’apartheid et d’épuration ethnique.

Chacune d’entre nous – y compris les membres de notre délégation qui ont grandi dans le Jim Crow South, dans l’apartheid sud-africain, et dans des réserves indiennes aux USA – nous avons été choquées par ce que nous avons vu. Dans cette déclaration nous décrivons certaines de nos expériences et lançons un appel urgent à d’autres qui partagent notre engagement pour la justice raciale, l’égalité et la liberté.

Pendant notre court séjour en Palestine, nous avons rencontré des professeurs d’université, des étudiants, des jeunes, des dirigeants d’organisations civiques, des élus, des syndicalistes, des dirigeants politiques, des artistes et des militants de la société civile ainsi que des habitants de camps de réfugiés et de villages qui ont récemment été attaqués par des soldats israéliens et par des colons. Tous ceux que nous avons rencontrés – à Naplouse, Awarta, Balata, Jérusalem, Hébron, Dheisheh, Bethléem, Birzeit, Ramallah, Um el-Fahem, and Haifa— nous ont demandé de raconter la vérité sur la vie sous l’occupation et sur leur engagement inlassable pour la liberté de la Palestine. Nous avons été très impressionnées par l’insistance des gens sur les liens entre le mouvement pour une Palestine libre et les luttes pour la justice à travers le monde, comme Martin Luther King, Jr. avait insisté au cours de toute sa vie, La Justice est indivisible. L’injustice quelque part est une menace pour la justice partout ».

En voyageant en bus dans tout le pays, nuus avons vu un grand nombre de colonies israéliennes toujours perchées sur des collines, témoignant de la confiscation systématique de terres palestiniennes en violation flagrante avec le droit international et les résolutions de l’ONU. Nous avons rencontré des réfugiés dans tout le pays dont les familles avaient été éjectées de leur maison par les forces sionistes, leur terre confisquée, leurs villages et leurs oliveraies rasés. A cause de ces déplacements sans fin, les Palestiniens constituent la plus grande population de réfugiés au monde (plus de cinq millions), la majorité vivant dans les 100 km de leur maison natale, de leurs villages et de leurs champs. Au mépris de la résolution 194 des nations Unies, Israël a une politique active d’opposition au droit au retour des réfugiés palestiniens dans leurs maisons et terre ancestrales sur la base qu’ils ne sont pas habilités à exercer le droit israélien au Retour, qui est réservé aux Juifs.

A Sheikh Jarrah, un quartier dans la partie est de Jérusalem occupé, nous avons rencontré une femme de 88 ans qui a été éjectée de force au milieu de la nuit ; elle a observé comment l’armée israélienne a introduit des colons dans sa maison, à peine deux heures plus tard. Vivant maintenant dans les petites chambres à l’arrière de ce qui était autrefois la résidence d’une grande famille, elle a affirmé d’un air de défi que ni les tribunaux d’Israël ni son armée ne pourraient jamais la forcer à quitter sa maison. Dans la ville d’Hébron, nous avons été abasourdies par la présence bien en évidence de soldats israéliens qui maintiennent des conditions véritables d’apartheid pour la population palestinienne de la ville de près de 200.000 habitants, contre 700 colons juifs. Nous avons traversé divers checkpoints israéliens destinés à contrôler les mouvements palestiniens sur les routes en Cisjordanie et le long de la Ligne verte. Tout au long de notre séjour, nous avons rencontré des Palestiniens qui, à cause de l’annexion par Israël et les projets d’en retirer la population d’origine, se sont vus refusés l’accès à la Ville sainte. Nous avons parlé avec un homme qui vit à 10 minutes de Jérusalem mais n’a pas eu la possibilité d’entrer dans la ville depuis 27 ans. Le gouvernement israélien continue donc à mener une guerre démographique pour une domination juive sur la population palestinienne.

Nous n’avons jamais réussi à échapper à la vision crispante du mur de l’apartheid omniprésent, qui est là en contradiction avec les principes du droit international et des droits humains. En plaques de béton,, à une hauteur de 25 pieds, avec une barrière électrifiée et un fil de rasoir, il entoure presque complètement la Cisjordanie et s’étend bien à l’est de la Ligne verte qui marque la frontière avec d’Israël d’avant 1967. Il serpente au travers d’anciennes oliveraies, détruisant la beauté du paysage, divisant les communautés et les familles, écartant les paysans de leurs champs et les privant de revenus. A Abu Dis, le mur coupe à l’intérieur du campus de l’Université de Al Ouds par le terrain de football. A Qalqiliya, nous avons vu des grilles massives construites pour contrôler l’entrée et l’accès des Palestiniens à leurs terres et leurs maisons, y compris une corridor grillagé par lequel des Palestiniens munis d’un permis israélien devenu de plus en plus rare, sont acheminés pour entrer travailler en Israël, soutenant l’état même qui les a déplacés. « La Palestine occupée est la plus grande prison du monde ».

Un vaste système pénitencier soutient l’occupation et supprime la résistance. Partout où nous avons été nous avons rencontré des gens qui avaient soit été emprisonnés eux-mêmes ou avaient des parents qui avaient été incarcérés. 20.000 Palestiniens sont enfermés dans les prisons israéliennes, et au moins 8.000 d’entre eux sont des prisonniers politiques et plus de 300 sont des enfants. A Jérusalem, nous avons rencontré des membres du Conseil législatif palestinien qui sont protégés contre l’arrestation par le Comité international de la Croix rouge. A Um el-Fahem, nous avons rencontré un dirigeant islamiste juste après sa libération de prison et avons entendu un récit à rester cloués sur place de son expérience sur le Mavi Marmara et la Flottille de Gaza de 2010. La criminalisation de leur activité politique, et celle des nombreux Palestiniens que nous avons rencontrés, était un thème constant et déchirant.

Nous en sommes venues à comprendre comment une répression manifeste est étayée par des représentations trompeuses de l’état d’Israël comme la sociale démocratie la plus développée dans la région. Comme féministes, nous déplorons la pratique israélienne de « laver rose » (pink-washing) l’utilisation par l’état d’un soutien ostensible pour l’égalité de genre et sexuelle pour déguiser l’occupation. En Palestine, nous avons trouvé constamment des preuves et des analyses d’une approche plus substantielle d’une justice indivisible. Nous avons rencontré la Présidente et la direction de l’Union féministe arabe et plusieurs autres groupes de femmes à Naplouse qui ont parlé de leur rôle et de leurs luttes de femmes palestiniennes sur divers fronts. Nous avons visité un des plus vieux centres de renforcement des femmes en Palestine, In’ash al-Usra, et avons pris connaissance de divers revenus – générant des projets culturels. Nous avons aussi parlé avec les Queers palestiniennes pour le BDS (Boycott-Désinvestissements–Sanctions) de jeunes organisatrices qui cadrent la lutte pour le genre et la justice sexuelle comme une partie intégrante d’un cadre détaillé pour l’autodétermination et la libération. Des collègues féministes à l’Université Birzeit, l’Université An-Najah, et à Mada al-Carmel nous ont parlé du lien organique de la résistance anti-coloniale avec l’égalité de genre et sexuelle, ainsi que du rôle de transformation que jouent les institutions palestiniennes d’éducation supérieure dans ces luttes.

Nous avons continuellement été impressionnées par l’esprit de résistance profond et permanent dans les récits que nous faisaient les gens, sur les peintures murales à l’intérieur des bâtiments comme dans le centre Ibdaa dans le camp de réfugiés de Dheisheh, par les slogans peints sur le mur de l’apartheid à Qalqiliya, Bethléem, et Abu Dis, par l’éducation des jeunes enfants, et par l’engagement à une production de connaissance émancipatoire. A notre rencontre avec le Comité national du Boycott – une alliance chapeau de plus de 200 organisations de la société civile palestinienne, y compris l’Union générale des femmes palestiniennes, l’Union générale des travailleurs palestiniens, le Boycott culturel et académique palestinien d’Israël (PACBI) et le réseau palestinien des ONGs – nous avons été mortifiées par leur appel : « Nous ne vous demandons pas des actions héroïques ou de former des brigades de liberté. Nous vous demandons simplement de ne pas être complices en éternisant les crimes de l’état israélien. »

C’est pourquoi nous adhérons sans équivoque à la Campagne boycott, désinvestissements, sanctions. Le but de cette campagne est de faire pression sur les institutions sponsorisées par l’état israélien pour qu’elles adhèrent au droit international, aux droits humains élémentaires et aux principes démocratiques comme condition pour des relations justes et équitables. Nous rejetons l’argument que critiquer l’Etat d’Israël est antisémite. Nous sommes aux côtés des Palestiniens d’un nombre croissant de Juifs et autres militants des droits humains dans le monde entier pour condamner les injustices flagrantes de l’occupation israélienne.

Nous appelons tous nos collègues universitaires et militants aux US et ailleurs à se joindre à nous en adhérant à la Campagne BDS et en oeuvrant pour stopper l’aide financière US de $ 8,2 millions par jour, pour l’état israélien et son occupation. Nous faisons appel à toutes les personnes de conscience pour qu’elles engagent un dialogue sérieux sur la Palestine et qu’elles reconnaissent les connexions entre la cause palestinienne et d’autres luttes pour la justice. L’injustice quelque part est une menace pour la justice partout.

Rabab Abdulhadi, San Francisco State University*Ayoka Chenzira, artist and filmmaker, Atlanta, GAAngela Y. Davis, University of California, Santa Cruz*Gina Dent, University of California, Santa Cruz*G. Melissa Garcia, Ph.D. Candidate, Yale University*Anna Romina Guevarra, author and sociologist, Chicago, ILBeverly Guy-Sheftall, author, Atlanta, GAPremilla Nadasen, author, New York, NYBarbara Ransby, author and historian, Chicago, ILChandra Talpade Mohanty, Syracuse University*Waziyatawin, University of Victoria*