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Opinion

Effacer l’Onu !

par M. Saâdoune - Quotidien d’Oran

dimanche 13 janvier 2008

George Bush était hier à Koweït, en campagne contre l’Iran chez ses amis arabes. L’intermède palestinien est terminé avec des voeux pieux. Remercions le président américain de ne pas avoir fait l’affront à Yasser Arafat de s’arrêter devant son mausolée.

Les habitants de Ramallah, littéralement encasernés durant le passage du chef de la Maison-Blanche, ont pu reprendre un semblant de vie « normale » sous occupation. Ceux qui ont osé manifester contre la présence du « grand ami » ont été copieusement bastonnés et pansent leurs plaies.

Quelle satisfaction peut tirer Mahmoud Abbas de cette visite américaine ? Un peu plus de « légitimité » ? Mais auprès de qui, de Bush ou des Palestiniens ? On connaît la propension des éternels laudateurs à tout présenter sous un jour agréable, les Palestiniens n’y échappent pas. Il faut espérer que M. Mahmoud Abbas a gardé suffisamment de lucidité politique pour ne pas croire que la visite de Bush à la Mouqataa lui donne un surcroît de légitimité. Car, ce que de très nombreux Palestiniens ont retenu - et pas seulement dans le camp du Hamas - est qu’au-delà des paroles mielleuses sur l’Etat palestinien, le président américain a décrété que l’Onu « a échoué » à résoudre la question palestinienne. Il l’a dit en présence de M. Mahmoud Abbas lors d’une conférence de presse.

Tout le monde sait que l’Onu n’a pas échoué et qu’elle a produit une longue liste de résolutions « essentielles » qui n’ont pas connu d’application du fait des... Etats-Unis. Le président américain le sait mieux que beaucoup d’autres. S’il le répète « chez » Mahmoud Abbas, c’est pour lui signifier que le plafond des espérances palestiniennes doit être considérablement réduit à la baisse et en tout cas doit être loin de ce que prévoit la légalité internationale, que ce soit pour les territoires ou pour le droit au retour des réfugiés.

L’Onu est de facto mise hors du coup dans le dossier palestinien, mais l’accusation « d’échec » que lui décoche le président américain ne relève pas de l’absurde. Il ne s’agit pas seulement d’effacer l’Onu en tant qu’acteur, mais de gommer définitivement les références aux résolutions des Nations unies. Or, même M. Mahmoud Abbas et ses « négociateurs » auront de la peine à le contester : les résolutions de l’Onu sur la question palestinienne sont le « minimum » qui fait le consensus au sein des différents courants palestiniens.

L’effacement de l’Onu et de ses résolutions décidé par Bush n’a qu’un seul décryptage : acceptez ce que « nous », Américains et Israéliens, vous offrons et cessez de penser aux résolutions de l’Onu. C’est tout simplement une attaque frontale de ce que tous les Palestiniens considèrent comme leurs « constantes ».

Les responsables de l’Autorité palestinienne auraient tort de croire que la visite de Bush est un succès pour eux. Effacer la référence à l’Onu et à ses résolutions est bien la pire des choses qui puisse arriver aux Palestiniens. Ce pire que Yasser Arafat a constamment refusé, quitte à susciter la haine de Bush.

12 janvier 2007 - Le Quotidien d’Oran