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Vigilance pour la Paix

Leïla Shahid était à Colmar pour renouveler les appels au droit à l’autonomie d’un Etat palestinien

vendredi 27 mai 2005

Colmar était vendredi la journée étape de ce circuit entamé voilà deux ans pour solliciter dans des conférences débats, les jeunes des lycées en fin d’après midi et un public plus large en soirée, la situation palestinienne, l’appel à la solidarité internationale et citoyenne pour revendiquer enfin l’application et le respect du droit à l’autonomie d’un état Palestinien. L’occasion de faire le point sur l’état du conflit israélo palestinien.

Déjà une quarantaine de villes traversées et au moins 20 000 personnes rencontrées puisqu’il s’agit d’une réelle rencontre lorsqu’il s’agit de Leïla Shahid accompagnée dans son argumentaire par le rédacteur en chef adjoint du Monde Diplomatique Dominique Vidal et d’un pacifiste israélien invétéré qu’est Michel Warschawski. Et ce fut difficile pour le représentant de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS) du Haut-Rhin, Guy Petercshmitt qui lançât l’invitation, de trouver un lieu adéquat pour recevoir l’accueil digne de la démarche intellectuelle entreprise par Leïla Shahid pour sortir de toutes récupérations politiques étant donné qu’il ne s’agit que de discussions et d’exposés orientés pour la paix, non plus seulement au plan de son éventuelle recherche mais en une application effective par l’obligation, indiscutable celle-ci, de respecter les règles des principes fondamentaux des droits de l’homme en ce qui concerne le droit du sol et la cessation des colonisations.

Malgré la persuasion démocratique de l’intitulé de cette réunion, s’opposèrent tout d’abord le Recteur de l’académie qui soumit le proviseur à des pressions irréversibles et irrécupérables en interdisant les conférences dans le lycée. Puis ce fut autour du centre socio culturel de la cité de trouver porte close sous l’interdiction de la Mairie et c’est finalement au cercle St Martin qu’une salle bondée le soir écoutât attentivement les témoignages de la représentante palestinienne en France entourée de deux hommes de plume tout aussi percutant l’un que l’autre, n’hésitant pas à applaudir dès lors qu’étaient mises à jour certaines contre vérités sur une situation qui empire dès qu’on croit que des négociations vont définitivement déboucher vers la paix comme si les nouvelles ne pouvaient provenir que de personnes en contact directement avec les deux sociétés, palestinienne(-s) et israélienne(-s) et non plus des représentants politiques, des chefs d’Etats et même de la plupart des médias pris au propre jeu des lobbies dont le plus terrible d’entre tous est bien le lobby chrétien conservateur qui irait jusqu’à demander que les Juifs se convertissent ou qu’ils quittent la Terre Sainte ! ? Cela va de soi étant donné que ce haut lieu de l’histoire n’est peut-être pas gorgé de pétrole en son sol mais il y conduit... Bien sûr ils sont pour la paix et l’application du droit international mais la manière de présenter les problèmes en Palestine n’est pas toujours la même selon qu’on cherche à protéger les intérêts israéliens ou défendre la survie des palestiniens et encore moins lorsqu’on dispose de moyens de pression internationaux comme en est dotée l’Europe mais qu’ils ne sont pas utilisés dès lors qu’ils avantageraient les Palestiniens.

A cause de la gravité de la situation en terre palestinienne il est devenu urgent pour une organisation internationale de parvenir politiquement à faire respecter le droit non pas par des moyens policiers ou militaires mais par les lois des droits fondamentaux. Hélas souvent cette démarche est compromise sur cette région décisive qui établie un pont entre l’Europe, la Méditerranée et l’Asie depuis le canal de Suez du point de vue de la considération d’un simple marché au service du capitalisme. Dans un tel enjeu les visées de l’hégémonie mondiale obligent presque les Etats-Unis à contrôler la région avec son principal allié qu’est Israël, au moins depuis 1967, dans ses liens avec l’occident mêmes si aujourd’hui ce n’est plus le cas. Vu qu’ils ont une bonne armée, bien équipée, constitue une des raisons fondamentales pour que des groupes idéologiques soutiennent et fassent fonctionner ces lobbies.

C’est dans le cadre d’« une situation qui évolue au jour le jour » que Mme Shahid ne baisse pas les bras et nous encourage à ne pas baisser les nôtres à un moment où « la violence ne peut qu’augmenter si des actions concrètes et un engagement effectif pour la paix ne s’enclenchent pas » dans des analyses qui deviennent de plus en plus pertinentes depuis qu’un certain nombre de personnes sont directement impliquées dans des actions de solidarité avec la Palestine, tant au plan agricole avec la mise en réseau commercial de l’huile d’olive qu’avec le parrainage d’enfants palestiniens. Là-bas, autour du « mur de la honte » une cinquantaine de militants s’accrochent dans des arbres pour empêcher la construction des barrières de sécurité, des femmes israéliennes interviennent lorsqu’un homme de Palestine est malmené et les manifestations se multiplient ; des soldats de Tsahal vont même jusqu’à refuser de faire leur service militaire dans des territoires occupés, de sorte qu’à chacune de ses visites répondant à une invitation des élus d’une ville, la présence de Leïla Shahid mobilise conférence de presse et multiples rencontres dans un souci de mise au point sur l’actualité concernant les rapports politiques et humains (sociaux) entre Palestinien et Israélien qui ne vont pas forcément dans le même sens et sont encore moins d’une finalité fonctionnant à l’unisson. A preuve, les précisions apportées par Michel Warschawski à propos de la liquidation du Hamas, de ses dirigeants et militants trouvée illégale. Préférant l’estimation d’un jugement pouvant être suivi d’une condamnation, « la liquidation est stupide, elle s’attaque à un résultat pas à la cause » et tient encore moins compte du fait que « la minorité qui utilise des procédés terroriste réagit en fonction d’une occupation. Dans 99% des cas, ce sont des personnes profondément confrontées à des humiliations (père frappé sous vos yeux, une femme perd son fiancé) » appuie-t-il au sens juridique de la réflexion.

Pour bien faire comprendre la résistance des palestiniens Leïla Shahid insiste fortement sur la différence entre ces actions menées « contre l’occupation » de celles d’un colonialisme qui a des portées différentes. Pour obtenir la paix il faut mettre fin à cette situation et l’existence de tous les mouvements sensibilisés par la cause palestinienne prouve qu’une « réflexion réelle à l’égard du sens démocratique » s’est enclenchée. Après 38 années d’occupation il paraît convenable de « fonder d’autres relations entre israéliens et palestiniens » malgré une Knesset qui ne vise pas forcément la rencontre entre les deux peuples et une gauche qui n’est plus vraiment une gauche expliquera plus tard Michel Warschawski mais ce problème nous le connaissons aussi en France où elle aurait tendance à se disperser.

L’un des points les plus important qui doit être compris pour éviter les amalgames c’est de ne pas faire du conflit israélo palestinien une guerre de religion puisque dans les pays du Maghreb il n’existe pas de conflit entre Juifs et Musulmans. Il s’agit donc d’un problème spécifiquement politique, d’un type de politique bien précise provenant de la catastrophe crée par l’Etat d’Israël sur la population palestinienne. Depuis deux ans que se poursuivent les conférences Leila Shahid se rend compte qu’il ne suffit plus de parler dans les universités ou parmi les groupes politiques mais que les interventions dans les banlieues et les lycées sont également d’une importance prépondérante pour que ne soient pas mélangées sous couvert de conflit de religions les notions de citoyen juif avec celles d’Israéliens qui concernent les affrontements sur des bases communautaires et ethniques.

Ce conflit le plus long de l’histoire contemporaine échappe à une communauté internationale qui par ailleurs est parvenue à régler la plus part des foyers de tension mais le veto des Etats-Unis est incompréhensible et empêche le processus de paix d’entrer dans une phase de réalité effective. Le pragmatisme étant plutôt du côté d’un retour aux hostilités. Le droit existe mais il est plus simple d’employer de préférence le rapport de force et « en utilisant la violence, on produit la violence » ce qui ne peut que mener dans des impasses où le terrorisme est la dernière réponse encore possible. Ce n’est qu’en 1994 que commencèrent vraiment les actions kamikazes, avant il était question d’attentats liés à l’OLP et à ses revendications alors que la pratique terroriste est autant utilisée par le mouvement sioniste que par les groupes palestiniens du Hamas mais aussi du Fatah.

Aujourd’hui l’implication des pays arabes dans le conflit et la survie de la Palestine est des plus limitée et sa marge de manœuvre réduite les éloigne de toute possibilité de marché commun. Pourtant la solidarité des « sociétés » (différentes des gouvernements) arabes reste totale. Dans ce contexte Leïla Shahid considère Israël comme « un soldat debout sur les puits de pétrole » et les conditions géopolitiques ont évolué depuis Oslo et l’époque où avec Israac Rabbin les populations étaient prêtes à faire la paix. « Aujourd’hui ces deux peuples sont pris dans un cadre de guerre globale contre le terrorisme » rappelle Dominique Vidal en précisant qu’il suffit d’un rien pour que sous l’effet de l’opinion publique la situation ne bascule en faveur de la création d’un Etat palestinien alors que « dans les années 1980, l’opinion française était pro israélienne » et que durant la guerre des Six jours on voyait défiler côtes à côtes l’extrême droite, la gauche, les centristes ; seul le Parti Communiste étant resté en dehors d’une quelconque prise de position.

Autour du contexte historique Dominique Vidal remonte au temps de Jésus où cette terre particulière composée de beaucoup de peuples connût très tôt une accélération de l’exode pour finalement aboutir aux Hébreux suite aux conversions de nombreux autres peuples comme le firent les Khazares en émigrant du sud de la Russie. Napoléon également pensait s’appuyer sur les Juifs dans ses conquêtes mais cela ne s’est pas fait. Puis plus récemment, en 1896 se conceptualisât le terme de sionisme avec l’ouvrage de Théodore Hetzel, l’Etat des Juifs composé dans une situation où les pogroms en Russie faisaient rage et la persécution à l’égard des Juifs s’étendait jusqu’à toucher la France, dans la même période, où l’affaire Dreyfus faisait remonter l’intégrisme. Finalement et aboutissant à un sérieux problème d’intégration et d’adaptation territoriale, il fut préférable de créer un Etat juif et d’en envisager l’établissement dès le lendemain de la seconde Guerre mondiale. La région appartenant alors à ce moment au protectorat britannique, les Anglais appuyèrent l’émergence de l’Etat israélien dans un déséquilibre impressionnant avec moins de 7% des terres appartenant alors aux juifs qui étaient minoritaires. Au 14 mai 1948, suite à un génocide très particulier qu’on doit à la seconde Guerre mondiale, la Shoah légitime tragiquement la naissance administrative de l’Etat juif par le partage de la Palestine en deux Etats distincts, 56% du territoire allant administrativement à l’autorité juive tandis que les 44 autre % sont détenus par l’Etat palestinien arabe. Mais on ne parlait pas encore chez nous de Palestiniens, terme qui ne fut adopté par notre vocabulaire qu’à partir des années soixante dix - soixante quinze parce que avant on disait « réfugiés ». Ce partage du sol exprime alors pour les occidentaux une volonté et une manière de régler leurs propres problèmes ce qui aura pour conséquence d’empêcher que le partage n’ait lieu, Israël augmentant d’un tiers sa superficie. Dans ces tiraillements territoriaux historiques, la Palestine ressemble à un Etat « mort né », une fois annexé par la Jordanie, une autre par l’Egypte dans la Bande de Gaza. Après cinq guerres généralisées et soixante ans plus tard on vit encore dans les conséquences de la guerre de 1948 ce qui pose une question d’ordre de politique nationale dans un conflit qui est le seul au monde auquel on n’applique pas le droit ; l’Etat israélien étant reconnu en ses frontières de 1967 depuis 1988 tandis qu’Israël n’a jusqu’à présent ni reconnu l’Etat palestinien, ni l’existence de son peuple. Par tabou ou somme des amalgames on pourrait cantonner cette question à un conflit de religions mais en fait c’est un conflit national et politique dans lequel il manquerait les moyens diplomatiques nécessaires à l’application du droit international.

C’est cette inextricable situation enlisée qu’il apparaît nécessaire pour ces trois intervenants de « montrer en France ce qui se passe là-bas dans une volonté réelle d’être ensemble et d’œuvrer ensemble en apportant le reflet de quelque chose de réel sur le terrain » dans le soucis permanent de trouver une solution qui mettra fin au conflit dont la communauté internationale a créé les conditions les plus favorables à son éclosion. A l’intérieur de la société israélienne une résistance s’impose également au fur et à mesure que l’impasse politique se poursuit tandis qu’en face les Palestiniens n’en finissent pas de maintenir une force de résistance à l’occupation et à la colonisation dans le but de changer la politique d’une situation que de toutes façons ils n’accepteront pas. « Il manque une position objective, une position de droit. Vivre libre dans un état indépendant c’est le principal pour ces deux peuples dans le respect du droit de l’autre » insiste Dominique Vidal dans un propos qui cherche à attacher plus d’importance aux droits des hommes et des citoyens à disposer de leur sol plutôt que d’entreprendre une émotion médiatique liée à une exploitation de la souffrance. Seulement la Palestine est occupée et une politique différente de la part d’Ariel Sharon qui « continue à faire ce qu’il veut » (Leïla Shahid) risque de ne pas s’orienter vers une reconnaissance palestinienne réelle puisqu’il ne reçoit en retour de ses actions aucune critiques effectives sur son désir à poursuivre le développement d’une politique unilatérale dans laquelle personne ne voudrait de l’interlocuteur palestinien.

Les campagnes internationales d’information et d’appels au boycott des bulldozers Caterpilar, le principal outil de destruction pour les camps de Jénine, Rafah et Naplouse alors qu’en quinze jours si les pays arabes arrêtaient d’importer des bulldozers à la société Caterpilar, celle-ci changerait de politique à l’égard d’Israël par décision de son conseil d’administration. Rappelant alors à tous que l’Union européenne possède également des moyens de pression qu’elle n’utilise pas, Mme Shahid met au banc des accusés « un phénomène de diffamation » dans lequel l’ensemble des médias préfèrent utiliser la manipulation de la peur pour des raisons politiques orientées à l’exagération de la violence dans les banlieues dont il faut dire qu’un tiers seulement des tournantes sont l’acte de jeunes issus des cités qui se retrouvent happés par une généralisation éhontée dont ils font leur slogan du genre « voileur, voleur, violeur ». C’est là que Leïla Shahid est très pédagogique pour ces jeunes - peut-être aussi en crise d’identité - qu’elle cherche à informer d’une situation et non pas à « enflammer à la moindre étincelle » pour réutiliser les termes de l’arbitraire municipal qui n’a pas permis à Leïla Shahid d’accéder au centre culturel de la cité colmarienne où plus de monde encore aurait pu être sensibilisé. Avec 90% d’individus « obligés de se transformer en réfugiés, c’est la nakbah sur le peuple palestinien » dont quatre million habitent en dehors de la Palestine et « tant que le problème ne sera pas résolu, il ne pourra y avoir de réconciliation » et encore moins de maintient du droit au retour.
D’un commun accord chacun se quitte en estimant qu’il convient autant de pleurer les morts israéliens victimes des attentats suicides que les morts palestiniens des raids israéliens qui constituent chaque fois autant de tentatives pour obtenir des percées territoriales il que ne s’agit tout simplement pour que la situation puisse évoluer que la communauté internationale puisse faire appliquer les règles du droit commun et ordonne l’adoption d’une paix sans concession. Cela pourtant reste difficile lorsque sur le marché mondial les modestes palestiniens n’ont que de l’huile d’olive enrichie en amandes à proposer aux chars israéliens de Tsahal qui protègent une partie du marché du pétrole…

L.CH

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