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Source : Amnesty International

Bahreïn doit libérer un militant emprisonné

Vendredi 13 juillet 2012 - 12h15

vendredi 13 juillet 2012

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L’emprisonnement de Nabeel Rajab est l’exemple le plus récent montrant que peu de progrès ont été effectués sur le terrain, malgré les promesses du gouvernement qui s’était engagé à mettre en place des réformes après la répression violente des manifestations de 2011.

Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International
Bahreïn doit remettre en liberté immédiatement un militant des droits humains et prisonnier d’opinion de premier plan, qui a été condamné à trois mois d’emprisonnement pour diffamation après que les autorités eurent mal réagi à l’un de ses tweets, a déclaré Amnesty International le 11 juillet.

Nabeel Rajab, président du Centre bahreïnite pour les droits humains, a été arrêté le 9 juillet, quelques heures après qu’un tribunal de Manama, la capitale, l’eut condamné pour diffamation. Il était visé par une plainte déposée par des habitants de la région d’al Muharraq, dans le nord de Bahreïn, qui l’accusaient de les avoir « calomniés publiquement » et d’avoir « remis en question leur patriotisme par des affirmations scandaleuses publiées sur des sites de réseaux sociaux ».

« L’emprisonnement de Nabeel Rajab est l’exemple le plus récent montrant que peu de progrès ont été effectués sur le terrain, malgré les promesses du gouvernement qui s’était engagé à mettre en place des réformes après la répression violente des manifestations de 2011, a déclaré Ann Harrison, la directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Il apparaît clairement que la liberté d’expression continue d’être réprimée en toute impunité à Bahreïn. »

« Nabeel Rajab est un prisonnier d’opinion. Comme de nombreuses personnes à Bahreïn, il a été emprisonné uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression. Il doit être remis en liberté immédiatement. Toutes les charges pesant contre lui doivent être abandonnées et toutes les condamnations prononcées à son encontre doivent être annulées. Les autorités doivent aussi prendre des mesures pour faire en sorte que tous les défenseurs des droits humains puissent travailler sans craindre de représailles. »

Nabeel Rajab était mis en en cause pour un tweet en date du 2 juin dans lequel il s’adressait au Premier ministre, Khalifa Bin Salman al Khalifa, à la suite de la visite de ce dernier dans la région. Il avait écrit : « Khalifa, quitte les rues d’al Muharraq, les cheiks et les anciens, tout le monde sait que tu n’es pas populaire là-bas et s’ils n’avaient pas besoin d’argent ils ne seraient pas venus t’accueillir. Quand vas-tu tirer ta révérence ? »

Nabeel Rajab a été arrêté le 6 juin après que plusieurs habitants d’al Muharraq eurent porté plainte contre lui à propos de ce tweet. Inculpé de diffamation le 14 juin, il a été remis en liberté sous caution le 27 juin.

Nabeel Rajab est actuellement détenu à la prison de Jaw, à Manama. Il a déjà purgé 21 jours de sa peine de trois mois de détention. Son avocat a déposé un appel, qui doit être examiné le 18 juillet. Nabeel Rajab doit comparaître dans trois autres affaires.

En novembre 2011, la Commission d’enquête indépendante de Bahreïn, créée par le roi Hamad bin Issa al Khalifa, a présenté un rapport qui concluait que les autorités avaient commis en toute impunité des atteintes graves aux droits humains : utilisation excessive de la force contre des manifestants, multiples actes de torture et autres mauvais traitements contre des protestataires, procès iniques et homicides illégaux, entre autres.

Le rapport exhortait les autorités à créer un organe indépendant chargé de superviser la mise en place des recommandations de la Commission, à faire adopter des réformes législatives pour mettre les lois en conformité avec les normes internationales relatives aux droits humains, à amener les responsables présumés de violations à rendre des comptes, à libérer tous les prisonniers d’opinion et à enquêter sur les allégations de torture.

Le gouvernement n’a guère agi jusqu’à présent. Les réformes ont été introduites sans plan d’ensemble ; elles n’ont pas permis d’amener les auteurs de violences à répondre véritablement de leurs actes et ont laissé les victimes en quête de justice.

Les opposants au régime de la famille al Khalifa continuent d’être victimes de violations. Selon certaines informations, plusieurs manifestations ont été réprimées par la force en juin.

Le 27 juin, la militante Zainab al Khawaja a été touchée à la cuisse par une grenade lacrymogène tirée de très près, alors qu’elle observait des incidents dans une manifestation organisée dans le village de Buri (sud-ouest de Manama) pour demander un plus grand respect du droit de manifester pacifiquement. Elle a subi une fracture et une plaie qui a nécessité 17 points de suture, a-t-elle déclaré à Amnesty International.

Présent lors de l’attaque, le militant Said Yousif Almuhafdah, qui travaille pour le Centre bahreïnite pour les droits humains, a porté plainte au poste de police. On lui a dit qu’une enquête serait ouverte.

Pendant ce temps, le gouvernement refuse de remettre en liberté des dizaines de prisonniers qui sont détenus uniquement parce qu’ils ont réclamé de vraies réformes politiques. Les autorités ne font rien non plus par rapport au profond sentiment de discrimination présent au sein de la population chiite (majoritaire), qui se sent exclue politiquement.

En juin, le ministre de l’Intérieur, Rashid bin Abdullah al Khalifa, a affirmé lors d’une visite au Royaume-Uni qu’il n’y avait pas à Bahreïn de personnes détenues en raison de leurs opinions, mais simplement des personnes « qui ont commis des infractions au regard de la loi ».

Le Code pénal de Bahreïn contient des dispositions formulées en des termes vagues qui peuvent être utilisées pour réprimer l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

Nabeel Rajab doit être jugé pour participation à un « rassemblement illégal » et « troubles à l’ordre public » lors d’une manifestation antigouvernementale le 6 février à Manama. La prochaine audience est prévue le 26 septembre 2012.

Il est également poursuivi pour « rassemblement illégal » dans le cadre d’une autre affaire. Inculpé le 6 juin, il doit comparaître de nouveau le 16 juillet.

Par ailleurs, Nabeel Rajab a fait appel de sa condamnation, prononcée le 28 juin, pour « insultes à une institution nationale » (le ministère de l’Intérieur) à travers des commentaires sur Twitter. L’appel sera examiné le 27 novembre.