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Source : www.info-palestine.net

Lettre ouverte à Nadine Gordimer

by British Committee for the Universities of Palestine

mardi 22 avril 2008

Chère Nadine Gordimer

Beaucoup d’entre nous avons pris note et apprécié vos écrits lors des sombres journées de l’Apartheid et nous sommes consternés d’apprendre que vous allez participer au Festival international des Ecrivains en Israël au mois de mai.

Votre venue ne peut qu’envoyer un message décourageant aux Palestiniens : qu’un écrivain de votre envergure morale et internationale accepte de venir dans une ville dont la moitié au moins se trouve sous l’occupation militaire illégale d’un Etat fondé sur le nettoyage ethnique. (Nettoyage ethnique n’est pas juste notre terme : c’est celui que l’historien Ilan Pappe dit avoir finalement accepté comme étant la qualification la plus juste pour décrire ce que les forces israéliennes font aux Palestiniens depuis 1948).

Réfléchissez à un villageois palestinien en Cisjordanie occupée, cerné par les barrages routiers de l’armée israélienne, coupé de ses fils et filles en prison sans inculpation ni procès, ses autres enfants incapables de quitter le village pour se rendre à l’école. Il y en a des milliers de centaines comme lui. Dans ce contexte, n’est-ce pas là une contradiction que de se trouver à Jérusalem occupée, discutant de la moralité et de la responsabilité de l’écrivain en compagnie d’Amos Oz ?

Nous prenons pour argent comptant le fait que vous croyiez toujours aux choses que vous avez dites pendant l’Apartheid au sujet de la responsabilité de l’écrivain qui ne doit pas ignorer l’injustice et au sujet de votre haine du racisme. Mais alors comment votre visite peut-elle cadrer avec cela ? En prenant part à un événement qui est fortement financé par le ministère des Affaires étrangères, vous apportez de la crédibilité à l’Etat qui depuis des décennies assujettit les villes et villages palestiniens à une punition collective, qui se vante des assassinats extrajudiciaires, qui a recouvert le Liban sud de bombes à fragmentation en 2006 alors que le cessez-le-feu avait déjà été convenu (et la liste est vraiment sans fin).

Dans l’un de vos essais, vous avez décrit le professeur John Dugard comme étant un ami. Vous savez sans doute qu’en sa capacité de Rapporteur special des Nations unies sur les Droits humains des Palestiniens dans les territoires occupés, John Dugard a dénoncé sans équivoque les maux infligés aux Palestiniens en Cisjordanie et dans le bande Gaza. Ses déclarations n’ont pas mis fin à la souffrance des Palestiniens. Mais il a eu le grand mérite de démasquer la cruauté systématique de la politique israélienne à l’encontre des Palestiniens.

Toute la société civile palestinienne a appelé à un boycott culturel d’Israël. Ne donnez pas s’il vous plait à l’establishment israélien, à la presse israélienne, à toute la machinerie des relations publiques israéliennes, le prix qu’ils veulent : c’est-à-dire le fait que vous trouvez apparemment des excuses à leur politique.

Votre réputation en tant que figure de conscience est mondiale.

Votre retrait des événements de mai aura un impact important sur une société israélienne qui est en grande partie dans le déni des souffrances barbares qu’elle inflige.

Sincèrement votre,

Professor Hilary Rose

Professor Steven Rose

Professor Jonathan Rosenhead

British Committee for the Universities of Palestine
BM BRICUP
London
WC1N 3XX

Nadine Gordimer est une écrivaine sud-africaine née à Springs le 20 novembre 1923. Elle a reçu le prix Nobel de littérature en 1991. Elle a combattu l’apartheid. (Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nadine_Gordimer)