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Source : Info-Palestine

Jordanie : les réfugiés oubliés de Gaza

Mercredi, 31 octobre 2012 - 9h24 AM

mercredi 31 octobre 2012

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Siraj Davis & Yasmin Omar Lulu

Le camp de Gaza, en Jordanie, près des ruines historiques de Jerrash au nord-ouest du pays, où était jadis florissant l’empire grec et romain, avait été mis en place en 1968 par les Nations Unies comme une mesure d’urgence.

Les eaux usées s’écoulent dans une rue dans le camp de réfugiés palestiniens de Gaza en Jordanie - Photo : MaanImages/Siraj Davis
Pendant la guerre israélo-arabe de 1967, environ 12 000 réfugiés se sont enfuis de Gaza, fuyant l’invasion israélienne, jusqu’à parvenir à cet endroit. Le camp héberge maintenant une population d’environ 30 000 habitants, tous originaires de Gaza.

La plupart des touristes n’ont aucune idée de l’existence du camp, caché à la périphérie de Jerrash, relié au reste de la civilisation par un unique chemin de terre sans le moindre entretien. Les agences locales sont connues pour répondre aux demandes de renseignements des visiteurs avec une réplique peu engageante : « Pourquoi voulez-vous y aller ? »

Certains touristes se demandent si la municipalité de Jerrash ne veut pas garder les étrangers à l’écart, pour cacher une telle misère sise à deux pas d’une attraction touristique très animée et d’une ville bien entretenue.

Les conditions de vie dans le camp de Gaza ont été décrites comme étant les pires en Jordanie.

Entouré d’un désert vide, le camp voit ses rues remplies d’enfants qui jouent près des écoulements eaux usées et des tas d’immondices. Les voies sont encombrées de nourriture périmée, de vieux matériaux recyclables ou non, qui sont souvent brûlés parce que la collecte des ordures fonctionne mal.

Il est étonnant de constater que les enfants qui jouent au football en courant dans les eaux sales, ne semblent pas remarquer l’odeur nauséabonde.

Trouver une solution est très coûteux. Les habitants paient des frais exorbitants en comparaison à d’autres villes jordaniennes, pour simplement avoir ces eaux usées déversées par intermittence en dehors de la ville.

L’eau pour se laver et pour la consommation est également disponible de façon irrégulière, à peu près toutes les deux semaines, et les eaux usées se mélangent parfois à l’eau potable en raison des tuyauteries vétustes.

De plus, les quartiers d’habitation sont sordides, délabrés avec des fissures dans les murs de béton, et surpeuplés. Parfois, 10 personnes vivent dans une seule pièce sans fenêtre et avec un toit métallique. Il y a des cas connus où jusqu’à 25 personnes vivent dans la même maison.

D’autres vivent dans des appartements sans toit ou à l’extérieur dans des tentes où ils sont exposés aux rigueurs du temps extrêmement froid une partie de l’année. Il n’y a aucune zone de loisirs, comme des parcs pour enfants, et il n’y a aucun réseau de rues digne de ce nom.

La plupart des résidents du camp ne possèdent ni carte d’identité ni passeport. Comme des fantômes visibles, après cinq décennies de vie et de naissances en Jordanie, leurs familles ne sont pas reconnues. Ils ne peuvent pas travailler, ni recevoir de prestations gouvernementales, ni avoir pleinement accès à l’éducation, ni posséder une voiture, ni voyager librement. Le chômage atteint 50 pour cent, les taux d’échec scolaire sont élevés et l’espérance de vie est beaucoup plus faible que les moyennes régionales.

L’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, l’UNRWA, a tenté de remédier à cette situation. Elle propose de la formation dans quatre écoles jusqu’à l’âge de 10 ans, ainsi qu’un centre de distribution alimentaire. Certains de ces Gazaouis déplacés reçoivent une aide financière de l’Organisation des Nations Unies.

L’état de santé des résidents est terrible. Les bénévoles signalent la présence de nombreuses maladies qui sont facilement évitables quand on a accès à la médecine occidentale. De nombreux cas de diabète, de troubles nerveux, de cancers, d’hypertension artérielle et autres, ne sont pas traités.

Certains résidents critiquent l’UNRWA pour ne gérer qu’au minimum le camp, limitant en même temps l’initiative locale. D’autres disent que les organismes de bienfaisance destinés à aider les réfugiés de Gaza ont empoché l’argent à leur place.

Mais au milieu de ces récriminations, il y a quelques jeunes volontaires qui ont à leur actif d’admirables réalisations.

Un réseau de bénévoles jordaniens, Youth Before Age, fournit une aide alimentaire, des cours d’anglais, contribue à la réfection des logements, entre autres initiatives, tout en documentant les conditions de vie dans le camp.

Un membre de l’organisation, un dentiste du nom de Essam Amiss, dit que tout le monde peut faire du bénévolat en soutien, y compris en donnant son sang, ce qui ne prend que quelques minutes.

Un autre volontaire, Dua Abdel Rahman Qandeel, nous dit : « Quand vous voyez des gens qui n’ont pas de quoi manger, pas de vêtements, pas d’éducation ni de santé, sans rien, vous devez prendre soin d’eux ... J’espère transmettre leur voix au peuple [de Jordanie] pour que d’autres leur rendent visite et voient les conditions terribles dans lesquelles ils vivent ».

Au milieu de l’énorme afflux de visiteurs voulant voir les admirables ruines historiques de Jerrash, les réfugiés de Gaza qui vivent juste à côté se sentent oubliés.

* Siraj Davis est nippo-américain, écrivain et militant des droits humains. Il enseigne actuellement l’anglais et l’histoire de la Jordanie. * Yasmin Omar Lulu est un réfugié de Gaza vivent en Jordanie, qui étudie la littérature anglaise et l’administration des affaires à l’Université arabe à Amman.

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