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Le rôle « clé » de Djibouti et son avenir florissant (ndlr)

Un pays en chantiers : DJIBOUTI

Vendredi, 10 août 2012 - 6h42 AM

vendredi 10 août 2012

Courtisée par toutes les puissances de la planète, Djibouti, qui détient la clé de l’accès et de la sortie de la Mer Rouge devient un véritable acteur essentiel de la géopolitique de cette partie du monde et le fait qu’elle envisage de devenir une plate-forme de raffinage hors Mer Rouge et hors Golfe Persique est un élément majeur de la politique pétrolière des composantes du « Noyau dur » (USA compris).

Il n’est pas innocent non plus que Djibouti influe sur la position de l’Egypte, maîtresse du Canal de Suez dans sa partie nord mais dépendante totalement de la possibilité ou non, pour les navires qui l’empruntent, d’entrer ou de sortir de la Mer Rouge par les détroits de Bar el Mandeb dont Djibouti est une des clés pour le trafic vers et en provenance de l’Océan Indien, c’est à dire rien de moins que le contrôle du trafic, entre autres commercial, vers et en provenance des pays asiatiques et des pays côtiers de l’Afrique orientale.

C’est un enjeu majeur dont il s’agit ici.

Michel Flament

Coordinateur

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Le petit État profite de sa position privilégiée en Afrique de l’Est pour développer ses infrastructures de transport et de logistique. Il entend devenir la clé de voûte d’une croissance régionale tirée notamment par l’Éthiopie, voisin dynamique mais enclavé.

Un petit bout de territoire, mais de gros atouts économiques. Djibouti, 23 200 km² et 900 000 habitants, tire son potentiel de sa position géo­stratégique. Il est situé sur le principal axe maritime reliant l’Europe à l’Asie, il est la porte d’entrée et de sortie des échanges commerciaux des pays enclavés d’Afrique de l’Est, notamment de l’Éthiopie, économie en plein essor et, avec 85 millions d’habitants, deuxième plus grand marché du continent derrière le Nigeria.

Si cette situation avantageuse a jusqu’ici surtout servi à des fins sécuritaires et humanitaires (la France et les États-Unis y ont implanté des bases militaires, et le Programme alimentaire mondial son hub régional), les autorités entendent désormais la transformer en véritable moteur de développement. Avec l’appui financier de la Banque mondiale, elles ont élaboré un plan dénommé Vision 2035, qui doit être adopté en septembre. Le transport et la logistique, déjà piliers de l’économie de ce pays classé parmi les moins avancés, y occupent une large place. Il s’agit en fait de développer et de renforcer la compétitivité de Djibouti en tant que port de transbordement et d’éclatement de flux vers l’Afrique de l’Est.

De manière générale, Djibouti veut devenir un carrefour régional de services et de transformation de matières premières. Le gouvernement mène ainsi des négociations avec un investisseur suisse (dont le nom reste confidentiel) pour la construction d’ici à 2013 d’une raffinerie (490 millions d’euros d’investissement). L’objectif de ce pays non producteur de pétrole est d’importer du brut des pays du Golfe, de le raffiner localement puis de commercialiser les produits finis en Afrique de l’Est et dans les pays de la péninsule Arabique, le Yémen notamment.

PROJETS TOUS AZIMUTS. Ce n’est là qu’un projet parmi tant d’autres annoncés depuis début 2012. Pas moins de 3,4 milliards d’euros d’investissements sont prévus, notamment pour la construction de cinq nouveaux terminaux portuaires à l’horizon 2017. La construction de ceux de Tadjourah et de Ghoubbet démarrera dès cette année. Le premier (53 millions d’euros financés par le Fonds saoudien de développement et le Fonds arabe pour le développement économique et social) sera livré en 2014 et servira à exporter près de 4 millions de tonnes de potasse éthiopienne par an. Addis-Abeba a d’ailleurs signé, début juillet, un contrat de 2,5 milliards d’euros avec le turc Yapi Merkezi et China Communications Construction Company pour la construction d’un chemin de fer reliant la région de l’Afar, dans le nord de l’Éthiopie, et ce nouveau port. Le deuxième, 42 millions d’euros financés par des investisseurs chinois et japonais, et dont les travaux s’achèveront en 2013, sera notamment destiné à l’exportation annuelle de 4,5 millions de tonnes de sel, principale matière première de Djibouti, extraite du lac Assal.

Pour un investissement de près de 2 milliards d’euros (usine de liquéfaction et gazoduc compris), le terminal gazier de Koubado expédiera quant à lui 10 millions de mètres cubes de gaz éthiopien par an vers la Chine à partir de 2015. Également dans les tuyaux, un terminal pétrolier destiné à recevoir la production de brut du Soudan du Sud, et un quai à Damerjog pour exporter annuellement environ 5 millions de têtes de bétail d’Éthiopie et de Somalie vers les pays du Golfe et du Maghreb.

En attendant la réalisation de ces nouveaux terminaux, c’est celui de Doraleh, opérationnel depuis près de trois ans, qui continuera de porter l’activité. Avec 1 million de conteneurs traités chaque année, ce port, dont Dubai Ports World a obtenu en 2000 la concession pour vingt ans, arrive à saturation et doit être agrandi, pour porter sa capacité annuelle à 3 millions de conteneurs d’ici à 2017. Mais selon Mariam Hamadou Ali, directrice de l’économie au ministère des Finances, Doraleh a deux défauts : « Primo, l’Éthiopie est son principal client [90 % des flux commerciaux du pays y transitent, NDLR] et il n’est pas encore ouvert sur d’autres pays. Secundo, si sa contribution à la croissance est importante, celle-ci ne profite pas à l’ensemble de l’économie. » Reste que Doraleh demeure le principal moteur de la croissance du PIB, qui atteindra 4,8 % cette année puis 6,7 % en 2013, selon les prévisions de la Banque africaine de développement (BAD). Le pays se relève progressivement de la crise financière de 2008, qui a ébranlé Dubaï, son principal pourvoyeur en investissements directs étrangers : les flux en provenance de ce petit émirat et des autres pays du Golfe ont baissé de près de 68 % entre 2009 et 2010. Cette région (avec le Koweït notamment) contribue aussi beaucoup à l’aide bilatérale, laquelle s’élève à 110 millions d’euros par an et représente 25 % des subsides dont bénéficie annuellement Djibouti.

Les yeux vers la Chine. Le pays tente désormais de diversifier ses partenaires en se tournant notamment vers la Chine. En route pour le cinquième sommet Chine-Afrique, qui s’est tenu les 19 et 20 juillet à Pékin, le président Ismaïl Omar Guelleh, accompagné d’une délégation d’hommes d’affaires, s’est arrêté à Shenzhen, haut lieu des zones économiques spéciales de l’empire du Milieu. Plusieurs protocoles d’accord ont été signés à l’occasion : avec l’équipementier télécoms Huawei Technologies, notamment pour augmenter la bande passante djiboutienne de 1 à 20 gigaoctets ; avec China Merchants Holdings, un conglomérat basé à Hong Kong, pour développer le Port autonome international de Djibouti ; et avec l’énergéticien Sinopec (lire encadré p. 61).

Le pays a aussi souffert d’une sévère sécheresse qui a conduit les autorités à supprimer des taxes afin de venir en aide à la population. La décision a occasionné un manque à gagner de 21 millions d’euros par an. Djibouti, dont la dette publique représente 56 % du PIB, ne bénéficie pour l’heure que du programme de Facilité élargie de crédit du Fonds monétaire international (FMI). En cours depuis 2009, il a permis au pays de disposer d’un montant total de 12,6 millions d’euros.

En plus du transport et de la logistique, Djibouti mise, dans son plan Vision 2035, sur la finance et les télécoms pour renflouer ses caisses et améliorer ses finances publiques. Ainsi, dans le secteur bancaire (onze établissements, dominés par Bank of Africa-Mer Rouge, propriété du marcocain BMCE, et par Banque pour le commerce et l’industrie-Mer Rouge, que contrôle le français BPCE), une réforme en cours vise à durcir les obtentions de licence afin d’attirer les établissements de taille plus importante. Mais aussi bien pour les banques que pour les télécoms, le tourisme ou la pêche - autant de secteurs dans lesquels les initiatives se multiplient pour attirer davantage d’investisseurs -, le pays devra améliorer son climat des affaires. Dans son dernier rapport « Doing Business », la Banque mondiale classe le pays au 170e rang sur 183. Un long chemin reste à parcourir

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