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Oubliés les réfugiés ? certainement plus pour longtemps (ndlr)

Les Palestiniens de Syrie dans la tourmente

Samedi, 4 août 2012 - 11h11 AM

samedi 4 août 2012

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Dans tous les pays où ils se trouvent, les réfugiés palestiniens subissent de plein fouet, et souvent de manière particulièrement dangereuse, les conséquences des conflits. Ci-dessous l’article de Ramzy Baroud sur les Palestiniens du camp de réfugiés de Yarmouk en Syrie.

Les réfugiés palestiniens en Syrie

RAMZY BAROUD*

« Les flammes s’approchent rapidement de Yarmouk car on essaie d’entraîner les Palestiniens dans le feu », écrit le reporter Rashad Abu Shawar.

Yarmouk est le camp de réfugiés palestiniens le plus grand de la Syrie. Ses habitants forment presque un quart de toute la population réfugiée qui s’élève à presque 500.000 personnes. Malgré la mémoire qui dure et l’insistance à demander son droit au retour en Palestine, la communauté palestinienne de Syrie est, dans l’ensemble, pareille à toute autre communauté ordinaire.

Bien entendu, « ordinaire » n’est pas toujours un terme qui va avec les malheureux réfugiés palestiniens se trouvant dans les pays arabes. Ghassan Kanafani, romancier palestinien de renom, a écrit un jour : « Oh Palestiniens, ne misez pas sur une mort naturelle ». Il exprimait avec fierté la façon dont son peuple envisage toutes les possibilités. Kanafani a été lui-même assassiné, en même temps que sa nièce, dans un attentat à la voiture piégée, orchestré par le Mossad israélien à Beyrouth en juillet 1972.

Les réfugiés palestiniens de Syrie ne peuvent s’attendre à exister en dehors d’un contexte de danger et d’imprévisible. Leurs frères du Liban ont compris la même leçon il y a des années. Les Palestiniens du Koweït ont été victimes de représailles importantes en 1991, avec d’autres communautés accusées d’être favorablement disposées envers Saddam Hussein. Comme on pouvait s’y attendre, la petite communauté d’Irak a reçu sa part de mauvais traitement après l’invasion américaine de 2003.

Cela ne veut pas dire que la communauté palestinienne est la seule à souffrir en temps de guerre. Mais du fait qu’il n’y ait pas de choix, la situation des réfugiés palestiniens est souvent la plus dangereuse et désespérée. Ils sont apatrides. La plupart des états arabes leur accorde délibérément un statut légal précaire sous diverses formes, afin de les contenir et de les contrôler. Le problème est cependant aggravé par des guerres qui provoquent des exodes massifs. Les réfugiés apatrides sont toujours coincés, et par conséquent vulnérables à la souffrance et aux abus continuels.

Avant 2003, une petite communauté de 35.000 Palestiniens résidait en Irak. Ils ne se mêlaient pas souvent de controverse politique. Toutefois, quand les États-Unis ont envahi, ils ont constitué une cible facile pour les diverses milices, les forces armées américaines et les bandes criminelles. Beaucoup se sont fait tuer. D’autres ont tourné en rond, cherchant en vain un refuge autre part en Irak, et des milliers d’entre eux se sont trouvés coincés dans des camps de réfugiés aux frontières de la Jordanie et de la Syrie. Cette situation a montré que le problème des réfugiés palestiniens était plus que jamais réel et urgent. Les circonstances désespérées des Palestiniens ont aussi fait honte aux Arabes qui n’ont jamais cessé de déclarer des guerres verbales mais qui ont omis d’accueillir les réfugiés en fuite. Même les factions palestiniennes, occupées à leurs querelles internes, n’ont fait que de lamentables déclarations de soutien, qui ne risquaient rien.

La situation en Syrie promet d’être pire encore. Traditionnellement, il y a de l’animosité entre la Syrie et certaines factions palestiniennes, y compris le Fatah, le parti qui domine l’OLP, et aussi l’Autorité Palestinienne (PA) basée à Ramallah. Tandis que Damas a accueilli diverses factions palestiniennes de gauche au cours des années, le Hamas ne s’est installé à Damas qu’après la rupture avec la Jordanie. Ces derniers mois, le Hamas a quitté discrètement ses bureaux de Damas. Il était impossible au mouvement islamique de fonctionner dans une situation où on le forçait à prendre parti. Dans ses efforts pour atteindre un terrain d’entente – soutenir le peuple syrien tout en combattant les efforts venus de l’étranger destinés à affaiblir la Syrie – il n’a pas été entendu. Certains gouvernements arabes ont voulu absolument faire pression sur les responsables du Hamas pour qu’ils prennent une décision concluante sur un conflit alors qu’ils n’y sont pour rien – et finir par les forcer à se séparer de la Syrie.

Le discours politique concernant la Syrie est le récit qui polarise le plus, parmi ceux qui sont liés au soi-disant Printemps Arabe. Les Palestiniens sont pris au piège dans cette polarisation. Al Jazeera a fait du tort aux réfugiés palestiniens en voulant contextualiser les Palestiniens dans un débat général sur la Syrie. Dans le réseau de télévision, on sait ce qui arrive aux Palestiniens apatrides et vulnérables. Les reporters avaient bien documenté l’humiliation subie par les Palestiniens en Irak. Même si c’était pour des raisons simplement humanitaires, les médias arabes devraient présenter comme neutre la présence des Palestiniens dans le conflit syrien.

Les Palestiniens sont déjà pris pour cibles. On signale 300 morts en Syrie depuis le début du conflit. L’AP dit qu’elle est en contact avec les autorités syriennes afin d’assurer la sécurité de l’importante population de réfugiés. On signale un grand nombre de meurtres commis à Yarmouk. Les médias arabes qui s’opposent au gouvernement syrien de Bashar Assad, rejettent la responsabilité de viser les Palestiniens sur les forces de sécurité syriennes. Mais d’autres médias ne racontent pas la même histoire.

« Dans le pire incident, 16 membres de l’Armée de Libération de la Palestine, que soutiennent les autorités syriennes, ont été tués après avoir été arrêtés et kidnappés par des terroristes », nous apprend Khaled Abu Toumeh dans le Jerusalem Post du 20 juillet. Les corps des Palestiniens, dont la gorge avait été coupée, ont été découverts en plein champ dans la banlieue de Damas ».

Une déclaration faite le 16 juillet par l’État-major conjoint de l’Armée Syrienne Libre, et mentionnée par l’AFP, a qualifié les dirigeants palestiniens se trouvant sur le sol syrien, de « cibles légitimes ». Vu que la coopération entre les diverses factions de l’OLP et la Syrie remonte à des dizaines d’années, cette appellation ressemble à une menace de mort pour un grand nombre de Palestiniens de Syrie. L’Armée de Libération de la Palestine, pour une fois, joue plus ou moins un rôle symbolique. Elle s’est très peu impliquée dans des actions militaires, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de la Syrie. L’atroce massacre de ces hommes laisse à penser qu’il s’agit d’une tentative flagrante de punition contre des Palestiniens innocents.

Les réfugiés palestiniens pourraient très bien être de nouveau en fuite, tellement la situation est dangereuse. Les factions palestiniennes doivent mettre de côté leur intérêt personnel et s’unir, même temporairement, afin de protéger les réfugiés palestiniens de Syrie. L’agence des réfugiés des Nations-Unies, UNHCR, dont le but principal est « d’assurer les droits et le bien-être des réfugiés », doit agir dès à présent pour assurer la sécurité des réfugiés palestiniens dans quelque sinistre scénario à venir. La Ligue Arabe, qui n’a pour ainsi dire rien fait dans le passé pour protéger les réfugiés palestiniens chaque fois que ceux-ci se retrouvaient pris dans des conflits régionaux, doit agir cette fois-ci afin de compenser ses omissions du passé.

Il n’y a rien de pire que d’être un réfugié en fuite, sauf d’être un réfugié en fuite maintes et maintes fois, avec un statut légal d’apatridité perpétuelle, et sans pays où trouver un abri. Quant aux médias arabes, il faut qu’ils sachent que leur insistance à vouloir représenter les Palestiniens comme des complices dans le carnage en Syrie, équivaut à les préparer à un désastre d’importance majeure, pour na pas dire plus.

*Ramzy Baroud est rédacteur en chef de PalestineChronicle.com. Il est l’auteur de The Second Palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle et de “My Father Was a Freedom Fighter : Gaza’s Untold Story” (Pluto Press, London).

(Traduit par Ch. C. pour CAPJPO-EuroPalestine)

Source : http://www.counterpunch.org/2012/07...

http://www.europalestine.com/spip.p...

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