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OPINION

La seule voie possible

par Mustafa Barghouti

mardi 23 mai 2006

Les Palestiniens font face à une des pires agressions de leur histoire contre leur droit à l’auto-détermination, leur bien-être économique et leur futur en tant que peuple indépendant.

Israël, avec le soutien actif des pouvoirs internationaux et l’accord tacite des autres pays, développe inoxérablement son emprise militaire, politique et et économique sur le peuple Palestinien. Mais les centaines de barrages routiers, la poursuite de la construction du mur de séparation, le blocage des millions de dollars destinés à l’Autorité Palestinienne (AP) et de l’assistance humanitaire ne sont pas seulement pour les israéliens des moyens de serrer les vis.

Ces moyens font partie intégrante de son objectif de s’assurer la bénédiction internationale pour sa prochaine action unilatérale qui consistera à confisquer près de la moitié de la Cisjordanie, y compris Jérusalem, et par la même occasion à supprimer toute possibilité de création d’un Etat Palestinien indépendant et toute perspective de paix basée sur une solution à deux-états.

Même si Mère Théresa revenait à la vie et devenait présidente du peuple de Palestine, Israël continuerait à refuser de reconnaître qu’il y ait un partenaire palestinien pour une négociation. Une telle reconnaissance signifierait qu’Israël est dans l’obligation de négocier, ce qui est la dernière chose qu’Israël souhaite aussi longtemps qu’existera la possibilité d’imposer les réalités ur le terrain.

Pendant ce temps, le regrettable conflit interne entre le Hamas et le Fatah est une des nombreuses excuses que les occupants invoquent comme un écran de fumée pendant qu’ils renforcent leur main-mise. En effet, si Israël s’active à quelque chose c’est à alimenter le conflit interne palestinien pour faire en sorte qu’il dégénère en véritable guerre civile. Pour Israël, cela s’inscrirait parfaitement dans sa campagne actuelle d’intensification des incursions, des arrestations et des bombardements, correspondant à la phase finale du projet sioniste maintenant modifié de façon à voler le maximum possible de terres palestiniennes et à cloisonner les Palestiniens dans des prisons et des cantons.

Réunion du 9 mai entre le gouvernement palestinien et les dirigeants du Fatah après les affrontements inter-palestiniens

Israël a déclenché une guerre implacable contre les Palestiniens, une guerre menée sur les fronts politique, économique et militaire. Lorsqu’un peuple se retrouve propulsé dans un conflit de cette façon, son seul choix possible est de de concentrer toutes ses énergies pour un seul but : faire échec à l’attaquant. C’est le futur même des Palestiniens qui est en jeu, et nous devenons défendre notre futur comme celui de nos enfants, défendre notre droit à une paix juste et à une véritable sécurité et notre droit à une vie digne.

Dans une situation aussi critique, les intérêts partisans et les divergences entre organisations perdent en importance et les rivalités parlementaires comme les campagnes électorales perdent de leur intérêt puisque les éventuels gagnants font face en dernier ressort au même destin que les éventuels perdants : l’emprisonnement derrière les murs de haute-sécurité construits par le pouvoir occupant, sous la menace constante des attaques de ses tanks et autres machines de guerre.

C’est cela, l’amère réalité que les treize années qui ont suivi la signature des accords d’Oslo n’ont pu dissimuler. Nous sommes encore et toujours sous occupation. Gaza est simplement devenue la plus grande prison du monde et l’Autorité Palestinienne comme le gouvernement Palestinien, et quelque soit le genre d’accord économique et politique qu’ils puissent conclurent, ne sont jamais que des sujets sous le contrôle de leurs surveillants comme quiconque en Palestine.

Je ne nie pas que les Palestiniens ont réussi à développer leurs capacités à s’auto-gérer par l’exercice de pratiques démocratiques à l’occasion de leurs élections municipales et parlementaires. Cette expérience démocratique unique a mis un terme, et définitivement, aux prétentions des occupants israéliens d’imposer un régime fantoche au peuple Palestinien. Que la légitimité d’une position de responsabilité soit uniquement basée sur la volonté populaire comme cela a été démontré à travers les urnes est acquis qui ne doit jamais être remis en cause.

Cet acquis excluant clairement la possibilité pour Israël d’imposer aux Palestiniens [avec leur consentement] des solutions leur portant préjudice, l’on comprend pourquoi les occupants ont adopté leur stratégie basée sur des solutions décidées unilatéralement.

Si les Palestiniens veulent sauvegarder leurs avancées démocratiques et briser le blocus israélien, ils doivent alors lancer une contre-offensive contre les objectifs des israéliens aux niveaux régional et international, en mettant pour le moins constamment en évidence que les pratiques de l’occupant violent les lois et conventions internationales et toutes les valeurs humanitaires. Nous devons garder à l’esprit que nous menons une lutte très simple qui requière une stratégie unifiée et un plan d’action unifié.

Aucune organisation palestinienne ne peut elle-même prendre en charge ce combat. Il y a six ans, j’avais appelé à la création d’une direction nationale unifiée. Aujourd’hui nous payons un prix terrible pour avoir négligé l’importance d’une telle direction.

Une stratégie unifiée doit en premier se concentrer sur quatre objectifs majeurs :

unifier nos énergies et nos activités dans le cadre d’un accord simple sur les normes et le règles applicables
briser l’isolement international et le blocus financier qui ne sont pas totalement verrouillés mais que les personnes concernées ne sont pas disposées à abroger
s’attaquer aux difficultés économiques en remobilisant les énergies des Palestiniens à l’étranger pour qu’ils viennent en aide à leur nation et à leurs compatriotes résidant en Palestine
contrecarrer le plan unilatéral israélien de désengagement par une campagne internationale mettant en lumière l’injutsice d’un tel plan et présentant une alternative convaincante basée sur les résolutions internationales soutenant les droits des Palestiniens.

La première étape pour atteindre ces objectifs est d’intégrer les trois organisations palestiniennes qui sont encore en-dehors de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) — le Hamas, le PNI (Palestinian National Initiative) et le Jihad Islamique - dans le cadre de l’OLP et de mettre en place une direction unifiée qui déterminera collectivement des positions politiques et des actions des Palestiniens.

Une fois ce mécanisme en place, aucun parti n’aura le droit d’agir en-dehors du consensus national ou de prendre des décisions de façon unilatérale. Simultanément, bien évidemment, la tâche de réformer l’OLP sera poursuivie ainsi que la relance du dynamisme nécessaire pour que les Palestiniens de la Diaspora puissent participer aux élections dans ses différentes instances.

La seconde étape est de mette en place un gouvernement d’unité nationale représentant tous les blocs parlementaires. Le noyau de ce gouvernement prendra la forme d’un conseil de ministres constitué de représentants de tous les blocs parlementaires et disposant des pouvoirs requis pour prendre des décisions politiques et sociales qui sont celles d’un gouvernement.

Dans tous ses actes et prises de position, ce gouvernement restera totalement conforme avec le droit des Palestiniens à établir un état indépendant sur tous les territoires palestiniens occupés lors de la guerre de 1967, dont Jérusalem, avec la suavegarde des droits des réfugiés Palestiniens, et le maintien d’une opposition absolue au Mur de séparation et aux colonies israéliennes.

Un des premiers actes de ce gouvernement pourrait être d’appeler à une conférence internationale pour résoudre toutes les questions liées à un statut final dans le cadre du conflit israélo-palestinien, sur la base des résolutions internationales et de l’initiative de la Ligue Arabe [la restitution des territoires palestiniens sous occupation contre la paix et l’établissement de relations économiques et diplomatiques].

En définitive, de façon à ce que ce mécanisme reste fort et cohérent, les forces qui s’y impliqueront doivent rester engagées vis-à-vis des règles et procédures démocratiques dans la façon de résoudre leurs divergences dans le cadre d’un dialogue national comme dans le nécessaire processus de réforme qui est à poursuivre.

De façon évidente un programme d’unité nationale ne sera pas la propriété d’une organisation particulière. Alors que toutes les organisations ont le droit de disposer de leurs propres analyses et de leurs propres plateformes, elles doivent en même temps accepter l’idée d’être liées par le consensus national. C’est en définitive le meilleur moyen d’assurer à la fois l’unité de vue et l’efficacité.

Un gouvernement d’union nationale ne peut être dissout. Une direction nationale et unifiée ne peut être défaite. Même isolées du reste, toutes ces réalisations contribueraient à renforcer le moral du peuple Palestinien, à developper ses actions et à imaginer de nouveaux moyens pour forcer les portes d’un large et puissant mouvement international de solidarité que notre région et le monde entier n’ont jamais vu.

Chaque organisation a tenté de suivre sa propre voie en conformité avec ses propres buts. Il ne reste plus qu’une seule voie à tenter : celle de l’unité sous la conduite d’une direction nationale unifiée.

* Mustafa Barghouti est secrétaire général du PNI (Palestinian National Initiative)

12 mai 2006 - Al Ahram - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2006/794...
Traduction : Claude Zurbach

Mustafa Barghouti

publié le samedi 13 mai 2006.

Les Palestiniens font face à une des pires agressions de leur histoire contre leur droit à l’auto-détermination, leur bien-être économique et leur futur en tant que peuple indépendant.

Israël, avec le soutien actif des pouvoirs internationaux et l’accord tacite des autres pays, développe inoxérablement son emprise militaire, politique et et économique sur le peuple Palestinien. Mais les centaines de barrages routiers, la poursuite de la construction du mur de séparation, le blocage des millions de dollars destinés à l’Autorité Palestinienne (AP) et de l’assistance humanitaire ne sont pas seulement pour les israéliens des moyens de serrer les vis.

Ces moyens font partie intégrante de son objectif de s’assurer la bénédiction internationale pour sa prochaine action unilatérale qui consistera à confisquer près de la moitié de la Cisjordanie, y compris Jérusalem, et par la même occasion à supprimer toute possibilité de création d’un Etat Palestinien indépendant et toute perspective de paix basée sur une solution à deux-états.

Même si Mère Théresa revenait à la vie et devenait présidente du peuple de Palestine, Israël continuerait à refuser de reconnaître qu’il y ait un partenaire palestinien pour une négociation. Une telle reconnaissance signifierait qu’Israël est dans l’obligation de négocier, ce qui est la dernière chose qu’Israël souhaite aussi longtemps qu’existera la possibilité d’imposer les réalités ur le terrain.

Pendant ce temps, le regrettable conflit interne entre le Hamas et le Fatah est une des nombreuses excuses que les occupants invoquent comme un écran de fumée pendant qu’ils renforcent leur main-mise. En effet, si Israël s’active à quelque chose c’est à alimenter le conflit interne palestinien pour faire en sorte qu’il dégénère en véritable guerre civile. Pour Israël, cela s’inscrirait parfaitement dans sa campagne actuelle d’intensification des incursions, des arrestations et des bombardements, correspondant à la phase finale du projet sioniste maintenant modifié de façon à voler le maximum possible de terres palestiniennes et à cloisonner les Palestiniens dans des prisons et des cantons.

Réunion du 9 mai entre le gouvernement palestinien et les dirigeants du Fatah après les affrontements inter-palestiniens

Israël a déclenché une guerre implacable contre les Palestiniens, une guerre menée sur les fronts politique, économique et militaire. Lorsqu’un peuple se retrouve propulsé dans un conflit de cette façon, son seul choix possible est de de concentrer toutes ses énergies pour un seul but : faire échec à l’attaquant. C’est le futur même des Palestiniens qui est en jeu, et nous devenons défendre notre futur comme celui de nos enfants, défendre notre droit à une paix juste et à une véritable sécurité et notre droit à une vie digne.

Dans une situation aussi critique, les intérêts partisans et les divergences entre organisations perdent en importance et les rivalités parlementaires comme les campagnes électorales perdent de leur intérêt puisque les éventuels gagnants font face en dernier ressort au même destin que les éventuels perdants : l’emprisonnement derrière les murs de haute-sécurité construits par le pouvoir occupant, sous la menace constante des attaques de ses tanks et autres machines de guerre.

C’est cela, l’amère réalité que les treize années qui ont suivi la signature des accords d’Oslo n’ont pu dissimuler. Nous sommes encore et toujours sous occupation. Gaza est simplement devenue la plus grande prison du monde et l’Autorité Palestinienne comme le gouvernement Palestinien, et quelque soit le genre d’accord économique et politique qu’ils puissent conclurent, ne sont jamais que des sujets sous le contrôle de leurs surveillants comme quiconque en Palestine.

Je ne nie pas que les Palestiniens ont réussi à développer leurs capacités à s’auto-gérer par l’exercice de pratiques démocratiques à l’occasion de leurs élections municipales et parlementaires. Cette expérience démocratique unique a mis un terme, et définitivement, aux prétentions des occupants israéliens d’imposer un régime fantoche au peuple Palestinien. Que la légitimité d’une position de responsabilité soit uniquement basée sur la volonté populaire comme cela a été démontré à travers les urnes est acquis qui ne doit jamais être remis en cause.

Cet acquis excluant clairement la possibilité pour Israël d’imposer aux Palestiniens [avec leur consentement] des solutions leur portant préjudice, l’on comprend pourquoi les occupants ont adopté leur stratégie basée sur des solutions décidées unilatéralement.

Si les Palestiniens veulent sauvegarder leurs avancées démocratiques et briser le blocus israélien, ils doivent alors lancer une contre-offensive contre les objectifs des israéliens aux niveaux régional et international, en mettant pour le moins constamment en évidence que les pratiques de l’occupant violent les lois et conventions internationales et toutes les valeurs humanitaires. Nous devons garder à l’esprit que nous menons une lutte très simple qui requière une stratégie unifiée et un plan d’action unifié.

Aucune organisation palestinienne ne peut elle-même prendre en charge ce combat. Il y a six ans, j’avais appelé à la création d’une direction nationale unifiée. Aujourd’hui nous payons un prix terrible pour avoir négligé l’importance d’une telle direction.

Une stratégie unifiée doit en premier se concentrer sur quatre objectifs majeurs :

unifier nos énergies et nos activités dans le cadre d’un accord simple sur les normes et le règles applicables
briser l’isolement international et le blocus financier qui ne sont pas totalement verrouillés mais que les personnes concernées ne sont pas disposées à abroger
s’attaquer aux difficultés économiques en remobilisant les énergies des Palestiniens à l’étranger pour qu’ils viennent en aide à leur nation et à leurs compatriotes résidant en Palestine
contrecarrer le plan unilatéral israélien de désengagement par une campagne internationale mettant en lumière l’injutsice d’un tel plan et présentant une alternative convaincante basée sur les résolutions internationales soutenant les droits des Palestiniens.

La première étape pour atteindre ces objectifs est d’intégrer les trois organisations palestiniennes qui sont encore en-dehors de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) — le Hamas, le PNI (Palestinian National Initiative) et le Jihad Islamique - dans le cadre de l’OLP et de mettre en place une direction unifiée qui déterminera collectivement des positions politiques et des actions des Palestiniens.

Une fois ce mécanisme en place, aucun parti n’aura le droit d’agir en-dehors du consensus national ou de prendre des décisions de façon unilatérale. Simultanément, bien évidemment, la tâche de réformer l’OLP sera poursuivie ainsi que la relance du dynamisme nécessaire pour que les Palestiniens de la Diaspora puissent participer aux élections dans ses différentes instances.

La seconde étape est de mette en place un gouvernement d’unité nationale représentant tous les blocs parlementaires. Le noyau de ce gouvernement prendra la forme d’un conseil de ministres constitué de représentants de tous les blocs parlementaires et disposant des pouvoirs requis pour prendre des décisions politiques et sociales qui sont celles d’un gouvernement.

Dans tous ses actes et prises de position, ce gouvernement restera totalement conforme avec le droit des Palestiniens à établir un état indépendant sur tous les territoires palestiniens occupés lors de la guerre de 1967, dont Jérusalem, avec la suavegarde des droits des réfugiés Palestiniens, et le maintien d’une opposition absolue au Mur de séparation et aux colonies israéliennes.

Un des premiers actes de ce gouvernement pourrait être d’appeler à une conférence internationale pour résoudre toutes les questions liées à un statut final dans le cadre du conflit israélo-palestinien, sur la base des résolutions internationales et de l’initiative de la Ligue Arabe [la restitution des territoires palestiniens sous occupation contre la paix et l’établissement de relations économiques et diplomatiques].

En définitive, de façon à ce que ce mécanisme reste fort et cohérent, les forces qui s’y impliqueront doivent rester engagées vis-à-vis des règles et procédures démocratiques dans la façon de résoudre leurs divergences dans le cadre d’un dialogue national comme dans le nécessaire processus de réforme qui est à poursuivre.

De façon évidente un programme d’unité nationale ne sera pas la propriété d’une organisation particulière. Alors que toutes les organisations ont le droit de disposer de leurs propres analyses et de leurs propres plateformes, elles doivent en même temps accepter l’idée d’être liées par le consensus national. C’est en définitive le meilleur moyen d’assurer à la fois l’unité de vue et l’efficacité.

Un gouvernement d’union nationale ne peut être dissout. Une direction nationale et unifiée ne peut être défaite. Même isolées du reste, toutes ces réalisations contribueraient à renforcer le moral du peuple Palestinien, à developper ses actions et à imaginer de nouveaux moyens pour forcer les portes d’un large et puissant mouvement international de solidarité que notre région et le monde entier n’ont jamais vu.

Chaque organisation a tenté de suivre sa propre voie en conformité avec ses propres buts. Il ne reste plus qu’une seule voie à tenter : celle de l’unité sous la conduite d’une direction nationale unifiée.

* Mustafa Barghouti est secrétaire général du PNI (Palestinian National Initiative)

12 mai 2006 - Al Ahram - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2006/794...
Traduction : Claude Zurbach