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Opinion

« Syrie : Manœuvres militaires en Jordanie...simple message ou signes avant-coureurs d’une opération militaire conjointe de 19 pays »

Jeudi, 24 mai 2012 - 6h31 AM

jeudi 24 mai 2012

« Se faire une opinion sur.... » ne peut majoritairement résulter que d’une investigation personnelle sur le terrain même du sujet traité ou du croisement d’informations censées être fiables ainsi que de la lecture d’opinions diversifiées envers lesquelles il faudrait se dégager préalablement de tout a priori reposant sur des rumeurs ou de fâcheux précédents.
Nous livrons ici une opinion parmi tant d’autres, déjà reproduites ou à venir, et laissons au lecteur le soin de se forger sa propre appréciation de la situation dans cette partie du Proche-Orient qui mobilise actuellement, à fort juste titre, l’attention des grandes puissances et de leurs satellites (au sens propre comme au sens figuré).

Alexandre le Grand devant le noeud gordien avait tranché ? fera-t’il école ?

Michel Flament

Coordinateur

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par Dr. Amin Hoteit

"Lorsque les manœuvres militaires de grande envergure ont débuté en Jordanie, sous commandement des États-Unis avec participation de 19 pays arabes et étrangers, et sous la dénomination « el-assad el-mutaaheb » ou « lion en alerte » [1], il était logique de se demander s’il existait un lien quelconque entre ces manœuvres et ce qui se passe en Syrie. Mais les personnes concernées n’ont pas tardé à exclure toute relation entre cet exercice militaire international et les affaires syriennes. Où est la vérité ? Que se cache t-il derrière ces manœuvres ? Quels en sont les objectifs ?

En science militaire, il est établi qu’on a recours à de tels manœuvres pour tester une formation militaire théorique, s’entraîner à coordonner des actions sur le terrain, ou se préparer à une opération militaire conjointe. Le premier de ces trois objectifs étant exclu, il convient de s’intéresser aux deux autres en prenant obligatoirement en compte la réalité syrienne.

Il est désormais évident que depuis que l’étincelle du « Printemps arabe » a prétendument gagné la Syrie, l’Occident sous la direction des USA tente de compenser ses défaites des deux dernières décennies en travaillant à détruire la Syrie, isoler le Hezbollah puis, encercler l’Iran tout en empêchant l’Irak de rejoindre « l’arc de la Résistance », un front du refus qui s’étend de l’Iran jusqu’aux aux frontières de la Palestine.

Les Occidentaux ont sous-estimé les difficultés croyant qu’ils avaient affaire à un gouvernement syrien fragile, à un État abandonné par ses citoyens, et à une armée croulant sous les charges et la fatigue. Partant de là, ils avaient imaginé que le résultat de leur offensive contre la Syrie était garanti et qu’ils pourraient, à coup sûr, se débarrasser d’un tel « régime ». C’est pourquoi, quelques semaines seulement après la fameuse étincelle printanière et avant même de distinguer les fils noirs des fils blancs, les États-Unis et les états qui leur sont inféodés se sont précipités pour mettre en œuvre un plan progressif, mais accéléré, pour dénigrer la légitimité du gouvernement syrien, faire suspendre la Syrie des instances de la Ligue arabe, avant de lui imposer toutes sortes de sanctions économiques et politiques. Ce faisant, les planificateurs du plan étaient sûrs d’eux-mêmes et sont allés jusqu’à choisir la date du renversement souhaité pour Mai 2011… puis Août 2011… date définitive, selon eux, de la victoire de l’alliance occidentalo-sioniste et de ses agents arabo-islamiques sur la Syrie.

La réalité sur le terrain fut toute autre. Le peuple syrien ne s’est pas laissé duper par les média-mensonges et n’a pas cédé à leurs provocations ; l’armée a témoigné de sa cohésion, de sa force, et de son courage en assumant le lourd fardeau de la situation ; les autorités ont montré sagacité, sang froid et nerfs d’acier… autant de surprises qui ont plongé l’ennemi dans une stupeur oppressante. Puis est arrivé le coup porté par une stratégie inattendue, celui donné par les prises de position de la Russie et de la Chine, suivi de leurs deux vétos répétés au Conseil de sécurité et prononcés contre une agression frauduleuse de l’OTAN et de ses alliés par des frappes militaires analogues à celles qui ont détruit la Libye.

C’est à partir de Septembre 2011 que l’Occident a acquis la certitude que le Président Bachar al-Assad ne pourra pas être renversé par une « révolution colorée, pré-conditionnée, et truquée », actualisée par de prétendues manifestations civiles, parce que la grande majorité du peuple syrien le soutient, parce que la soi-disant « Armée Syrienne Libre » est une supercherie incapable de renverser le gouvernement par la force militaire en dépit de l’arrivée soutenue de bandes terroristes venues de plusieurs pays arabes et islamiques, et parce que la porte du Conseil de sécurité est désormais fermée devant une intervention militaire de l’OTAN. Il ne restait plus à la coalition occidentalo-sioniste, armée de ses agents arabo-islamiques, que d’adopter la stratégie de la vengeance et du chaos dans le but de perturber le pays, d’en torpiller la stabilité et la sécurité jusqu’à paralyser toutes ses capacités ; et ainsi, préparer le terrain à une intervention militaire qui se passerait allégrement d’une résolution du Conseil de sécurité [procédé irakien par excellence !]. C’est à ce stade que s’est manifestée l’outrecuidance des agents arabo-islamiques appelant à armer l’opposition syrienne, suivie par la décision des États-Unis d’organiser un « exercice militaire » regroupant tous ces coalisés sur le sol jordanien… énième tentative de pression sur la Syrie, doublée d’une préparation à l’intervention militaire, en attendant que le plan Annan ait bien rempli son rôle : gagner du temps et préparer le terrain !

Aujourd’hui, cette dernière manœuvre d’un « exercice militaire » conjoint est donc en cours d’exécution avec la participation de 19 pays sur une période de deux semaines ; ce qui mène aux observations suivantes :

1. Les pays participants peuvent être classés en trois groupes fondamentaux auxquels s’ajoute un quatrième, hybride ; avec pour chacun de ces groupes son jeu spécifique contre la Syrie.

1.1. Le groupe des pays limitrophes de la Syrie [Turquie, Irak, Jordanie, Liban], supposés participer au blocus projeté durant l’opération militaire, et censés prêter leurs territoires comme couloirs de passage aux forces d’intervention.

1.2. Le groupe des pays du Conseil de Coopération du Golfe [CCG : Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn, Qatar, Koweït], chargés du financement des opérations et de la désinformation médiatique de l’opinion publique ; en plus de fournir « une couverture arabe » par l’implication de certains de leurs corps militaires.

1.3. Le groupe fondamental des pays de l’OTAN [Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Italie, Espagne], en tant que leaders politiques et forces militaires agissant au nom de cette organisation.

1.4. Le groupe hybride [Égypte, Pakistan, Australie, Ukraine, Brunei] dont la fonction essentielle est d’amener une dimension internationale, arabe et islamique, en plus du camouflage des objectifs propres à chacun de ces pays.

2. Quant aux ambitions et objectifs de cette dernière manœuvre des dirigeants des États-Unis, elle consiste à :

2.1. Délivrer un message pressant à la Syrie, lui signifiant qu’une action militaire internationale est en cours de préparation et que la « Plan Annan » était sa dernière chance [plan auquel personne n’a cru et que certains pays fondamentaux de cette coalition ont enterré avant même qu’il ne soit prétendument adopté].

2.2. Permettre aux pays participants de s’organiser en une sorte de « coopérative militaire » où chacun d’eux pourra ultérieurement assumer la fonction qui lui a été impartie.

2.3. Achever les préparatifs militaires en vue d’une intervention internationale en Syrie, une fois que le plan Annan aura été un échec [ce dont ils sont convaincus !].

3. Par conséquent la situation actuelle pourrait se résumer comme suit :

3.1. Au cas où une intervention étrangère directe et militaire était enfin rendue nécessaire aux yeux de l’opinion internationale suffisamment travaillée à cet effet, les forces d’intervention seront prêtes à intervenir rapidement et efficacement pour renverser le gouvernement syrien, tel qu’il en a été en Libye.

3.2. Au cas où les émissaires terroristes et criminels sévissant en Syrie réussissaient à déborder l’État syrien ou à le faire abdiquer, ces mêmes forces d’intervention pourraient intervenir pour reprendre les choses en main et organiser la réalité qui leur convient.

3.3. Au cas où la Syrie résiste [ce qui est fort probable à la lumière des données réelles], ces forces d’intervention auront le mérite d’exister et d’avoir distribué les rôles pour alimenter les besoins des gangs terroristes oeuvrant sur le sol syrien, interdisant ainsi la restauration de la stabilité et de la sécurité ; ce qui leur permettrait de gagner du temps avant de revenir à charge dans deux ans !

4. Quant aux objectifs supplémentaires que cette manœuvre devrait pouvoir atteindre, ils concernent essentiellement le traitement des réfugiés et le transfert des populations ; ce qui est en relation directe avec les visées inavouées touchant aux questions du changement démographique et aux manipulations visant à déplacer les civils en « évacuant » et « vidant », comme cela s’est produit pour les chrétiens d’Irak. Autrement dit, pousser au départ les habitants de certains quartiers et villages chrétiens tombés entre les mains des terroristes. Ici, il faudrait se demander sérieusement si l’Occident ira plus en avant dans le tri et l’émigration forcée de cette population ; sans oublier comment ont été fabriqués les prétendus réfugiés syriens, avant même qu’ils n’aient franchi le seuil de leurs maisons ; et sans oublier comment la Turquie a dressé par avance des tentes pour les accueillir, puis les a empêchés de faire le chemin inverse lorsqu’ils ont voulu regagner leurs foyers.

5. Une dernière remarque indispensable concerne la participation du Liban et de l’Irak. Il est clair que les déclarations de ces deux pays vont à l’encontre des objectifs réels de cette manœuvre dirigée contre la Syrie. Il n’empêche que l’on pourrait soulever la question de savoir si quelque chose a changé, puisque certains justifient leur participation « obligée » par la nécessité de ne pas se laisser écarter d’un événement régional militaire et sécuritaire de première importance, ou encore par la nécessité de ne pas rompre leur lien avec les États-Unis desquels ils dépendent d’un point de vue militaire. Quoiqu’il en soit, nous ne pouvons imaginer que ces deux pays puissent se retourner contre la Syrie ; ceci pour des considérations d’ordre subjectif et objectif, liées à ceux qui y détiennent le pouvoir de décision, et aux circonstances.

Pour toutes ces raisons nous ne pouvons pas croire ceux qui disent que ces manœuvres militaires en Jordanie n’ont rien à voir avec les affaires syriennes. Nous disons qu’elles n’auraient pas eu lieu sans la défaite des Etats-Unis en Syrie, et qu’elles font partie intégrante d’un plan visant à transformer l’essai. Réussiront-ils à atteindre leurs objectifs ?

Pour répondre à cette question, nous n’exposerons pas ce que nous avons maintes fois répété quant à l’impossibilité d’une intervention militaire étrangère en Syrie, et à l’improbabilité que le terrorisme puisse atteindre ses objectifs. Il n’en demeure pas moins que subsiste le danger d’une déstabilisation permanente recherchée par tous ces plans successifs, et qui risque de plonger le peuple syrien dans une souffrance insupportable, souffrance ordonnée par l’Étranger, souffrance infligée par l’Arabe et le Musulman, souffrance dont la victime sera un arabe ou un musulman et tous les autres innocents, mais souffrance qui n’empêchera pas une nouvelle défaite des États-Unis !"

Dr Amin Hoteit

21/05/2012