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Accueil > NAKBA > Le district de Jerusalem (numéro 9 de notre série de 14 districts) > District de Jerusalem : al Qastal

Et si on parlait de la Nakba !

District de Jerusalem : al Qastal

Samedi, 17 mars 2012 - 22 h 50

samedi 17 mars 2012

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al NAKBA

(la catastrophe)

Si nous ouvrons aujourd’hui une nouvelle rubrique intitulée al NAKBA, c’est notamment pour éviter que tous les pernicieux efforts de l’Etat d’Israël pour faire disparaître ce terme de la mémoire de l’humanité aboutissent. Il serait, en effet, dommageable pour l’Histoire que soient « oubliés » les moments tragiques que connut le peuple palestinien, notamment en 1947-1948, période durant laquelle se déroulèrent les événements ayant donné lieu à cette appellation qui se passe de commentaires, les faits étant là pour en témoigner.

Les faits

Faits significatifs précédant la période dénommée Nakba par les Palestiniens

1917 : Le ministre des affaires étrangères du Royaume Uni, sir Arthur James Balfour, déclare envisager "favorablement l’établissement d’un foyer national pour le peuple juif". L’armée britannique occupe la Palestine et facilite l’entrée et l’installation d’immigrés étrangers armés, créant, de fait, une situation de colonisation.

1922 : La S.D.N (Société des Nations devenue O.N.U) entérine la déclaration Balfour en confiant au Royaume Uni un mandat sur la Palestine. Cette reconnaissance provoque une intensification de la résistance des Palestiniens à l’occupation britannique et à son soutien à l’ établissement de l’Etat d’Israël.

1936-1939 : Un soulèvement majeur et massif marque le point culminant de la double résistance des Palestiniens contre l’occupant britannique et le Mouvement sioniste : "Grande grève", boycott de l’Etat, contrôle des zones rurales par des maquisards ; forte répression par l’armée britannique cantonnée essentiellement aux frontières et qui "réoccupe" plus de 700 villages.

1939-1945 : Seconde guerre mondiale et génocide nazi contre les juifs

Période Nakba

29/11/1947 : L’ONU vote un plan de partition de la Palestine toujours placée sous mandat britannique. Dès le lendemain, le 30 novembre, les affrontements deviennent de plus en plus violents entre les communautés palestinienne et juive ; cette dernière, puissamment armée et soutenue par une opinion internationale encore traumatisée par le tragique sort réservé aux juifs par les nazis, attaque, dévaste, villes et villages palestiniens, harcelant et forçant la population à fuir et c’est ainsi qu’environ 800 000 Palestiniens sont conduits à prendre la route de l’exil.

14/05/1948 : Fin du mandat britannique et proclamation de l’Etat d’Israël contre la volonté des Palestiniens et des Etats arabes voisins. Dès le lendemain, la première guerre israélo-arabe éclate mais 80% de la population de la Palestine est déjà expulsée. Israël déclarera « absents » les propriétaires palestiniens réfugiés dans les pays arabes voisins, ce qui permettra la mainmise de l’Etat sur 90% des terres et possessions palestiniennes après que plus de quatre cent villages ont été rasés.

Ces événements constituent le cœur même de cette tragédie que les Palestiniens ont dénommée Nakba et, au vu et au su de tous les crimes perpétrés durant cette période envers ce peuple martyr par l’occupant toujours présent 63 ans après l’envahissement, on comprend les raisons qui poussent Israël à tenter de faire oublier ce sinistre épisode qui d’ailleurs se prolonge sous d’autres formes plus perverses encore jusqu’à aujourd’hui.

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Les informations fournies dans les articles de cette nouvelle rubrique proviennent du remarquable ouvrage "All that remains : The palestinian villages occupied and depopulated by Israel in 1948" (ed. Walid Khalidi )- Traduction : Philippe Lewandowski.

L’ouvrage édité par Walid Khalidi et publié en 1992 (second tirage : 2006) par
the Institute for Palestine Studies (Washington, D.C.) recense, district par district,
l’ensemble des 418 villages qui ont disparu de la carte.

Nous nous proposons
d’en publier des extraits permettant de faire connaître aux lecteurs francophones
la réalité de la Nakba (c’est-à-dire la catastrophe), nom donné par les Palestiniens
à l’évènement tragique dont le gouvernement israélien, dans une vaine tentative
d’effacer l’histoire réelle, prétend même interdire la commémoration.

Pour chacun
des 14 districts traités, nous reproduirons la liste de tous les villages concernés avec
leur population estimée en 1944/45, et en traduisant entièrement l’article consacré à
l’un d’entre eux.

Les Palestiniens aussi ont droit à leurs livres du souvenir.

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Les districts de la Palestine avant 1948

Les villages détruits du district

‘Allar (440 habitants) ; ‘Aqqur (40) ; ‘Artuf (350) ; ‘Ayn Karim (3.180) ; Bayt ‘Itab
(540) ;
Bayt Mahsir (2.400) ; Bayt Naqquba (240) ; Bayt Thul (260) ; Bayt Umm al-Mays
(70) ;
al-Burayj (720) ; Dayr Aban (2.100) ; Dayr ‘Amr (10) ; Dayr al-Hawa (60) ;
Dayr Rafat (430) ; Dayr al-Shaykh (220) ; Dayr Yasin (610) ; Ishwa’ (620) ; ‘Islin
(260) ; Ism Allah, Khirbat (20) ; Jarash (190) ; al-Jura (420) ; Kasla (280) ; al-
Lawz, Khirbat (450) ;
Lifta (2.550) ; al-Maliha (1.940) ; Nitaf (40) ; al-Qabu (260) ; Qalunya (1.260) ;
al-Qastal (90) ; Ras Abu ‘Ammar (620) ; Sar’a (340) ; Saris (560) ; Sataf (540) ;
Suba (620) ; Sufla (60) ; al-Tannur, Khirbat (?) ; al-‘Ummur, Khirbat (270) ;
al-Walaja (1.650).

al-Qastal

al-Qastal avant 1948

Le village se dressait au sommet d’une haute colline arrondie, dominant de
larges étendues dans les quatre directions. Il dominait la grande route Jérusalem
– Jaffa au nord et au nord-ouest, à laquelle il était relié par une route secondaire.
Sa position au-dessus de la grande route donnait à al-Qastal une importance
stratégique. Le nom du village vient du latin castellum, employé pour le fort romain
qui avait été construit sur le site. Le vieux fort romain avait été rénové et reconstruit,
et appelé Belveer des croisés lors de la période des croisades. À la fin du dix-
neuvième siècle, al-Qastal se trouvait au sommet d’une colline rocheuse. Il y avait
plusieurs sources hors du village, vers l’est. Classé en tant que hameau par le
Palestine Index Gazetteer du gouvernement du Mandat britannique, le village avait
un plan semi-circulaire et ses maisons étaient construites en pierres. Des bâtiments
plus récents s’étendaient tout au long des pentes orientales de la région entourant la
colline de al-Qastal. Les habitants du village, qui étaient majoritairement musulmans,
entretenaient le tombeau d’un sage local, Shaykh Karaki, à la limite occidentale du
village. Les habitants dépendaient de la ville voisine de Jérusalem pour beaucoup
de leurs besoins. Ils cultivaient des céréales arrosées par les pluies, des légumes,
des fruits et des oliviers. Leurs terres agricoles étaient concentrées dans une bande
rectangulaire au sud-ouest du village. En 1944/45, 42 dunums (1 dunum = 919 m²) étaient plantés en céréales ; 169 dunums étaient irrigués ou utilisés par des vergers,
dont 50 étaient garnis d’oliviers.

Occupation et nettoyage ethnique

L’occupation de al-Qastal eut lieu avant le commencement officiel de
l’opération Nachshon. L’historien israélien Benny Morris affirme, de manière
improbable, que ce fut « le premier village arabe pris par la Haganah lors de la
guerre de 1948 avec un objectif de conquête et d’occupation permanentes. »
Le quatrième bataillon du Palmach attaqua et prit le village le 3 avril.
Une unité de commandos en fer de lance ravagea le village avant l’aube ; elle fut
rapidement renforcée par le gros des troupes qui repoussa les contre-attaques dans
la nuit. Le correspondant du New York Times relate qu’il y eut des batailles autour du
village lors des quelques jours qui suivirent. Selon les documents du Palmach,
l’attaque initiale n’avait pas rencontré de résistance, les défenseurs du village et ses
habitants s’étant enfuis auparavant.

Mais l’historien palestinien ‘Arif al-‘Arif qu’il fut
défendu par cinquante hommes de la milice du village, qui ne se retirèrent que
lorsqu’ils furent à court de munitions. Un article du journal palestinien Filastin
confirme que les villageois étaient partis après une attaque à la mi-mars, mais dit
que de nombreux hommes du village étaient restés sur place pour le défendre.

Le
journal affirme que les défenseurs avaient transpercé les lignes de siège tenues par
les troupes de la Haganah et s’étaient retirés dans un village voisin.

Le 5 avril, les
occupants de la Haganah érigèrent des clôtures de fil de fer barbelé autour de leurs
positions, et deux jours plus tard employèrent des avions d’entraînement pour lancer
des bombes sur les forces palestiniennes qui encerclaient al-Qastal, d’après le New
York Times. Le village fut repris par les partisans palestiniens le 8 août, lors d’une
bataille dans laquelle fut tué leur chef, le commandant ‘Abd al-Qadir al-Husayni, de
Jérusalem. Le rapport de la Haganah déclare que plusieurs officiers juifs furent
également tués lors de leur retraite. Plusieurs jours de combats acharnés avaient
précédé la contre-attaque palestinienne finale, qui fut lancée à 13h30 sous la
couverture de tirs de mortiers et de mitrailleuses. Le correspondant du New York
Times écrivit : « Ils surgirent en masse sur les pentes raides couvertes de gros blocs
de pierre en poussant leurs cris de guerre. » À 15h, une troupe composée de
plusieurs groupes de partisans palestiniens était entrée dans le village.
Cependant les troupes du Palmach le réoccupèrent lors d’un assaut qui
commença dans la nuit du 8 au 9 avril. Lorsqu’elle s’approcha alors du village,
la brigade fut surprise de le trouvé déserté ; le 9 avril, la plupart des hommes
qui l’avaient repris participaient aux funérailles de leur commandant tué qui se
déroulaient à la mosquée du Dôme du Rocher à Jérusalem. Les troupes du Palmach
entourèrent le village avec de nombreux véhicules blindés afin d’empêcher l’arrivée
de renforts et se mirent à l’occuper. L’attaque se produisit en même temps que le
massacre de Dayr Yasin, à moins de 5 km. La History of the Haganah proclame
que « el Qastal est revenu une fois de plus, et pour toujours, dans des
mains juives. »

Aussitôt qu’ils l’eurent réoccupé, les unités du Palmach se mirent à détruire
ses maisons, établissant ainsi un précédent pour tous les villages pris lors de
l’opération Nachshon. La raison donnée pour l’arasement du village était que cela
rendrait le site plus facile à défendre et l’empêcherait de retomber dans des mains
palestiniennes. L’historien palestinien al-‘Arif affirme que tous les bâtiments du
village, y compris le tombeau / mosquée, furent détruits par les troupes sionistes.
Un récit du New York Times confirme que la mosquée du village fut détruite, mais
dit que cela s’était passé le mois précédent, dans la nuit du 16 mars. L’article du
journal cite ‘Abd al-Qadir al-Husayni, qui devait plus tard perdre la vie en combattant
pour le village, disant que cette destruction était un « acte honteux » et que la
mosquée « n’avait jamais été employée pour autre chose que le culte religieux. »

Pour feuilleter, cliquez sur "play".

Implantations israéliennes sur les terres du village

L’implantation de Ma’oz Tziyyon fut établie en 1951 sur les terres du village.

Elle fut plus tard adjointe à Mevasseret Yerushalayim, fondée en 1956 sur les
terres de Qalunya, pour former le voisinage de Jérusalem connu sous le nom de
Mevasseret Tziyyon.

Le village aujourd’hui

Les pentes sud, nord et est du site sont couvertes de moellons et de ruines
de terrasses en pierre à moitié cachés par de l’herbe sauvage. Les ruines du vieux
fort gisent au sommet de la montagne. Un abri souterrain a été construit sur le site,
au sud-ouest du fort.

Des tranchées militaires peuvent être vues au nord et à l’est du
fort. Des oliviers, des caroubiers et des figuiers poussent sur les côtés nord et ouest
du site, et des cactus poussent sur le côté sud. L’ensemble du site, y compris des
parties du fort, constitue une attraction touristique israélienne.

Pour en savoir plus : english
arabic,

Images : Palestineremembered.com

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