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Uri Avnery dixit :

« Israël n’attaquera pas l’Iran »

Mardi, 13 mars 2012 - 9h39 AM

mardi 13 mars 2012

Rien d’impossible : le cynisme atteint des sommets :

« Le ministre de l’Education Gidéon Saar a pu dire, et à juste titre, que Néta­nyahou avait détourné l’attention mon­diale des Pales­ti­niens vers le pro­blème iranien. Un fan­tas­tique succès, vraiment. Obama lui a dit, en effet : OK, allez jouer avec les colonies autant que vous voulez, mais s’il vous plait, laissez l’Iran aux adultes »

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Michel Flament

Coordinateur

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Israël n’attaquera pas l’Iran. Point. Les États-​​Unis n’attaqueront pas l’Iran. Point.

Les États-​​Unis n’attaqueront pas. Ni cette année, ni dans les années qui viennent. Pour une raison beaucoup plus impor­tante que des consi­dé­ra­tions élec­to­rales ou des limites mili­taires. Les États-​​Unis n’attaqueront pas, parce qu’une attaque signi­fierait une catas­trophe nationale pour eux-​​mêmes et un consi­dé­rable désastre pour l’ensemble du monde.

“Si vous voulez com­prendre la poli­tique d’un pays, regarder la carte,” disait Napoléon. Quelques minutes après le déclen­chement d’une attaque, l’Iran fermera le Détroit d’Hormuz, par lequel passe presque tout le pétrole exporté par l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweit, le Qatar, Barhein, l’Irak et l’Iran – 40% du pétrole mondial trans­porté par mer passe par le Détroit. Quelques minutes après, les prix du pétrole grim­peront, dou­bleront, tri­pleront ou qua­dru­pleront – et les économies amé­ri­caine et mon­diale s’écrouleront.

Des ques­tions aussi mineures ne tra­versent pas l’esprit des généraux, des com­men­ta­teurs mili­taires et autres indi­vidus qui regardent le monde avec d’étroites œillères de “sécurité”.

Fermer le Détroit serait la plus facile des opé­ra­tions mili­taires. Quelques mis­siles, lancées de mer ou de terre, suf­fi­raient. Pour le réouvrir, il ne suf­firait pas d’envoyer les puis­sants porte-​​avions de la Marine amé­ri­caine. Les États-​​Unis devraient conquérir de grandes parties de l’Iran, afin de mettre le Détroit hors de portée des mis­siles ira­niens. L’Iran est plus grand que l’Allemagne, la France, l’Espagne et l’Italie réunies. Ce serait une guerre longue, à peu près à l’échelle de la guerre du Vietnam.

Pour l’Iran, il n’y a pas de dif­fé­rence entre une attaque israé­lienne et une attaque amé­ri­caine. Ils seraient traités l’un comme l’autre. Dans les deux cas, les consé­quences seront la fer­meture du Détroit et une guerre longue.

Tout ceci est plus qu’assez pour que les États-​​Unis n’attaquent pas, et pour qu’ils inter­disent à Israël d’attaquer.

Il s’est passé 56 ans depuis qu’Israël a fait la guerre sans en aviser les Amé­ri­cains et obtenir leur consen­tement. Quand Israël a fait cela en 1956, le pré­sident Eisen­hower a effacé tous les résultats de la vic­toire, sans rien épargner. Avant la guerre des Six Jours et à la veille de la pre­mière guerre du Liban, le gou­ver­nement d’Israël envoya des émis­saires spé­ciaux à Washington pour s’assurer du consen­tement sans équi­voque. Si cette fois il lançait une attaque contre la volonté des Amé­ri­cains, qui réap­pro­vi­sion­nerait les arsenaux des FID (forces israé­liennes de défense) ? Qui pro­té­gerait les villes d’Israël qui seraient exposées à plu­sieurs dizaines de mil­liers de mis­siles de l’Iran et de ses alliés ? Sans parler de la vague d’antisémitisme dont on peut craindre l’explosion à la décou­verte par l’opinion publique amé­ri­caine que c’est Israël, et Israël seul, qui leur apporte une catas­trophe nationale.

La pression écono­mique et diplo­ma­tique amé­ri­caine peut suffire pour arrêter la pour­suite de la Bombe par les aya­tollahs. Elle a marché dans la Libye de Khadafi et main­tenant dans la Corée du Nord de Kim. Les Persans sont une nation de mar­chands et il peut être pos­sible de trouver un accord avec eux.

Cela est dis­cu­table, car il y a quelques années les néo-​​conservateurs à Washington s’engagèrent dans un débat désin­volte sur la pos­si­bilité d’occuper l’Iran – ce qui a cer­tai­nement convaincu les Ira­niens qu’ils devaient acquérir l’arme de dis­suasion suprême. Qu’aurions-nous fait à leur place ? Ou plutôt, qu’avons-nous fait réel­lement (selon des rap­ports étrangers, etc) quand nous étions dans leur situation ?

Alors que va-​​t-​​il se passer ? Si aucun accord n’est trouvé, l’Iran déve­loppera des armes nucléaires. Ce n’est pas la fin du monde. Comme cela a été indiqué par cer­tains de nos plus cou­rageux chefs de la sécurité, ce n’est pas une menace exis­ten­tielle. Nous vivrons dans une situation d’équilibre de la terreur. Comme l’Amérique et la Russie pendant la Guerre Froide. Comme l’Inde et le Pakistan aujourd’hui. Ce n’est pas agréable, mais ce n’est pas si ter­rible non plus.

L’Iran n’a jamais attaqué un autre pays depuis mille ans. Ahma­di­nejad parle comme un déma­gogue sauvage, mais la direction ira­nienne négocie en réalité avec beaucoup de pré­caution. Israël ne menace aucun intérêt iranien. Un suicide national conjoint réci­proque n’est pas une option.

Le ministre de l’Education Gidéon Saar a pu dire, et à juste titre, que Néta­nyahou avait détourné l’attention mon­diale des Pales­ti­niens vers le pro­blème iranien. Un fan­tas­tique succès, vraiment. Obama lui a dit, en effet : OK, allez jouer avec les colonies autant que vous voulez, mais s’il vous plait, laissez l’Iran aux adultes