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Héberger la Vème flotte US n’est-ce pas également conforter l’ingérence ? (ndlr)
Pendant ce temps-là, au Bahreïn…
Dimanche, 20 novembre 2011 - 10h45 AM
dimanche 20 novembre 2011
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" - Le petit royaume, à majorité chiite, est en proie depuis février à une révolte sans précédent contre la dynastie sunnite des Khalifa, accusée de violations des droits de l’Homme et de torture dans le cadre d’une répression dont on n’entend presque pas parler.
Par ailleurs, Manama accuse l’Iran d’être lié aux membres d’une cellule démantelée qui projetait de perpétrer des attentats contre des bâtiments officiels bahreïnis.
Alors que le monde a les yeux rivés sur la Syrie, le peuple du Bahreïn continue de manifester dans l’anonymat le plus total, contre le régime, sur fonds de conflit communautaire…
En février, avant même que Damas ne se soulève à son tour, suivant le courant démocratique initié par la Tunisie et l’Egypte –baptisé le « Printemps arabe »- les habitants du petit royaume de l’archipel du Golfe Persique descendaient dans la rue pour demander la démission du Premier ministre, le cheikh Khalifa ben Salman al Khalifa, qui gouverne le pays depuis son indépendance en 1971.
Oncle du roi, il est perçu par la majorité chiite comme le symbole de la richesse de la famille régnante, sunnite, et donc des discriminations dont leur communauté serait victime -dans l’accès au logement, aux soins et aux emplois dans la fonction publique.
Les protestataires exigent aussi la libération des prisonniers politiques, ce que le gouvernement a accepté, et l’adoption d’une nouvelle Constitution –mesure qui avait endigué, avec l’organisation d’élections législatives, la précédente vague insurrectionnelle, qui avait duré plusieurs années, jusqu’en 2002. Ils réclamaient en outre des mesures contre la pauvreté et le chômage.
Mais comme l’ont fait d’autres dirigeants arabes avant lui, le roi a soufflé le chaud et le froid, prenant une série de mesures visant à apaiser les tensions, tout en réprimant sévèrement les manifestations.
Le dernier bilan fait état de 40 personnes tuées, et de centaines d’autres -pour la plupart chiites- arrêtées et disparues.
Cheikh Ali Salman, chef du Wefaq
Si l’apogée des manifestations a eu lieu en février et mars, la colère continue de gronder. Pas plus tard que le 4 novembre dernier, plusieurs milliers de chiites ont affronté les forces de l’ordre alors qu’ils protestaient en marge des obsèques d’Ali al-Daihi, le fils du vice-président du mouvement d’opposition Wefaq, Sheikh Hussain al-Daihi.
Selon les anti-gouvernementaux le jeune homme aurait été abattu par la police anti-émeutes alors qu’il rentrait chez lui ; les autorités, elles, affirment qu’il est décédé de causes naturelles.
Fin octobre, le chef d’une mission d’information chargée de faire la lumière sur les accusations de violation des droits de l’Homme durant les troubles a dénoncé le recours à la torture. « Il n’est pas possible de justifier l’usage de la torture, et, en dépit d’un faible nombre de cas, il est clair qu’il s’agissait d’une pratique systématique », avait déclaré le président de la commission, Cherif Bassiouni, dans une interview accordée au journal égyptien « Almasry Alyoum ».
« Après enquête, j’ai dénombré 300 cas de tortures », avait-il ajouté. La commission doit rendre son rapport final au roi Hamad ben Issa al Khalifa le 23 novembre.
Les autorités bahreïnies reconnaissent des cas isolés de violations des droits de l’Homme, mais rejettent les accusations d’usage disproportionné de la force contre des protestataires et des détenus.
Plusieurs manifestants ont par ailleurs été jugés, souvent pour tentative de renversement du gouvernement bahreïni, à l’instar de Jalila al Salman, ancienne vice-présidente de l’Association des enseignants de Bahreïn, pour qui Amnesty International s’inquiète depuis son arrestation brutale, « par un groupe de plus de 30 membres des forces de sécurité » à son domicile, au milieu de la nuit du 18 octobre.
Condamnée à une peine de trois ans de prison le 25 septembre, elle a formé un recours, qui doit être examiné par un tribunal civil le 1er décembre.
Tensions avec l’Iran
Par ailleurs, le ministère bahreïni de l’Intérieur a annoncé samedi avoir démantelé une cellule terroriste début novembre. Quatre personnes, des Bahreïnis, ont été arrêtées au Qatar, à bord d’une voiture en provenance de leur voisin et allié saoudien, alors qu’ils faisaient route pour l’Iran. Leur audition a permis l’interpellation d’une cinquième personne à Bahreïn.
Lors de leur interrogatoire, les suspects ont avoué avoir quitté illégalement le territoire pour rejoindre l’Arabie Saoudite, puis Doha. Dans leur véhicule, les autorités qataries ont saisi un ordinateur portable « contenant des informations sensibles et des détails sur certains hauts-lieux bahreïnis, ainsi que des billets d’avion pour la Syrie », et de l’argent, a précisé le porte-parole du ministère de l’Intérieur. Le groupe planifiait vraisemblablement des attentats dans le royaume.
Selon CNN, les attentats visaient précisément le ministère de l’Intérieur et l’ambassade d’Arabie Saoudite à Manama, la Chaussée du roi Fahd –le pont de 25 kilomètres reliant l’Arabie Saoudite au Bahreïn via le golfe de Bahreïn- et peut-être d’autres bâtiments encore.
Manama a affirmé dimanche que ces suspects appartenaient à une « organisation terroriste » liée à l’Iran. Selon le parquet de Bahreïn, cité par l’agence officielle Bahrain News Agency (BNA), ils devaient être « envoyés en Iran pour recevoir une formation militaire », en particulier dans les rangs des pasdarans (les « Gardiens de la révolution », l’armée d’élite du régime islamique), et des Bassidji (littéralement, « mobilisation »), le groupe paramilitaire également pro-Ahmadinejad et lié à l’ayatollah Ali Khamenei. Une enquête a été ouverte, et cherche notamment à établir un éventuel lien de ces présumés terroristes avec les opposants à la dynastie régnante.
Lundi, l’Iran a rejeté ces accusations « ridicules » et « sans fondement », a rapporté la télévision d’Etat, citant un haut responsable des Affaires étrangères.
Interrogé par l’agence semi-officielle iranienne Fars, Amir Hussain Abdullahian, vice-ministre des Affaires étrangères pour les affaires arabes et africaine, a estimé que ces allégations n’étaient que la « répétition du scénario ridicule initialement mis en scène contre Téhéran par les Etats-Unis », faisant référence à la tentative d’attentat que Washington a dit avoir déjoué, qui aurait été fomenté par des hommes liés au gouvernement iranien pour tuer l’ambassadeur saoudien aux États-Unis.
« La poursuite d’une politique d’iranophobie inefficace et l’accroissement de la pression sécuritaire ne permettront pas de résoudre les problèmes » de Bahreïn, dont le régime ferait « mieux de travailler à rétablir la confiance pour combler l’abîme qui s’est créé » avec la population, a-t-il ajouté.
Les relations entre Téhéran et Manama se sont tendues depuis que le premier a vivement critiqué la répression, par la dynastie sunnite, de la révolte principalement menée par les chiites, majoritaires aussi en Iran.
Les dirigeants bahreïnis, soutenus par les autres monarchies arabes du Golfe et par son allié américain –le pays héberge notamment la Ve Flotte américaine-, ont eux accusé l’Iran d’ingérence pour avoir encouragé les manifestations."
Par Marie Desnos -