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Contagion ? - Arabie Saoudite

La Mecque : un pèlerinage sous tensions

Dimanche, 6 novembre 2011 - 10h51 AM

dimanche 6 novembre 2011

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Source : Le Parisien - correspondante Clarence Rodriguez
Publié le 06.11.2011, 00h00

"Alors que 2,5 millions de musulmans se retrouvent sur le lieu saint de l’islam, l’Arabie redoute que le pèlerinage ne soit instrumentalisé.

Ryad (Arabie saoudite) |

Samedi. Deux millions et demi de musulmans venus du monde entier étaient rassemblés sur le Mont Arafat, moment fort du pèlerinage annuel de la ville sainte. | (AFP/Fayez Nureldine.) 1/2 2

Le souffle du Printemps arabe, qui a fait basculer la Tunisie, l’Egypte et la Libye, n’épargne pas le grand pèlerinage de La Mecque en Arabie saoudite. A Ryad, où convergent, depuis vendredi, plus de 2,5 millions de musulmans, les autorités redoutent que le plus grand rassemblement religieux du monde ne soit instrumentalisé à des fins politiques.
« Ce qui se passe dans certains pays frères est une affaire interne », a d’emblée prévenu le prince Nayef, ministre saoudien de l’Intérieur, qui n’avait pas hésité à réprimer toute manifestation pour éviter que la contagion révolutionnaire ne touche le royaume. Pour ne courir aucun risque, le tout puissant ministre, fraîchement nommé héritier du trône, a d’ailleurs averti en début de semaine qu’il agirait avec la même détermination contre tous les éventuels fauteurs de troubles. « Nous mobilisons tous les moyens pour prévenir toute atteinte à la sécurité. » Au total, quelque 100000 hommes sont sur le « pied de guerre » pour assurer le bon déroulement du hadj.

Les autorités saoudiennes soupçonnent l’Iran de vouloir provoquer le chaos

Dans le collimateur du futur souverain du royaume sunnite : l’Iran. Le prince Nayef ne cache pas son aversion à l’égard des mollahs iraniens et de l’islam chiite. En mars dernier, en plein Printemps arabe, alors que le Bahrein voisin connaissait un soulèvement de sa population chiite, il n’a pas hésité à envoyer un contingent de mille soldats saoudiens, au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), pour « mater » les manifestants. Une intervention aussitôt dénoncée par Téhéran.

Les mauvaises relations entre ces deux puissances, qui se disputent la suprématie de toute une région sur le politique et le religieux, ne datent pas d’aujourd’hui. Depuis la révolution islamique de 1979, les pèlerins iraniens sont régulièrement accusés de transformer le hadj en tribune politique anti-israélienne, antiaméricaine et hostile au régime saoudien. En 1987, de violents affrontements avaient fait 402 morts dont 275 Iraniens. Les relations diplomatiques entre Ryad et Téhéran s’étaient tendues et les Iraniens avaient été interdits de pèlerinage jusqu’en 1991.

Cette année, ils sont 97000 fidèles à s’être déplacés à La Mecque. Et le contexte diplomatique s’est alourdi. Les autorités saoudiennes soupçonnent l’Iran de vouloir provoquer le chaos tant à Bahrein que dans la province orientale pétrolifère de l’Arabie saoudite où vit la majorité des deux millions de chiites saoudiens. Le mois dernier, à Awamiya, à l’est du pays, de violents affrontements ont opposé forces de l’ordre et manifestants chiites. Le prince Nayef avait alors accusé ces « fauteurs de troubles d’agir à l’instigation d’un pays étranger »…

Une autre affaire a par ailleurs ravivé les tensions entre Riyad et Téhéran : le complot iranien présumé contre l’ambassadeur saoudien à Washington, révélé par les Etat-Unis. Un « coup monté » des Américains pour accroître les tensions entre l’Iran et les pays arabes du Golfe, selon Téhéran, qui a affirmé hier qu’un des suspects appartenait aux Moudjahidin du peuple, un des principaux mouvements de lutte contre le régime des mollahs.