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TOUT SE TIENT (ndlr) - Article de François Leclerc, invité de Paul Jorion.

L’actualité de la crise : INTROUVABLE LÉGITIMITÉ

Vendredi, 4 novembre 2011 - 7h31 AM

vendredi 4 novembre 2011

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La leçon de la crise grecque est immédiate, alors qu’elle n’est pas encore résolue : rien n’est réglé, tout s’est encore compliqué, et pas uniquement seulement au plan financier.

Quelle que soit la formule politique qui parviendra à émerger, l’Etat grec n’est pas devenu solvable pour autant et la société va continuer de traverser une crise profonde. La solution d’un gouvernement d’unité nationale, si elle parvient à être mise sur pied, ne donnera pas davantage de légitimité à un pouvoir à qui il a été trop demandé et qui a trop exigé.

D’autres pays au bord de gouffre et qui s’apprêtent à changer de gouvernement – l’Espagne et l’Italie, pour commencer – ne vont pas plus trouver à cette occasion de solution à une équation qui n’en possède pas, telle qu’elle est posée. Les dirigeants européens sont entraînés vers le fond par la dynamique de leur stratégie. Ils peuvent se succéder, se coaliser, s’unifier, ils n’en restent pas moins démunis à l’arrivée. En France, l’opposition socialiste se révèle incapable de formuler une alternative construite, alors qu’elle s’approche du pouvoir.

La crise est donc politique, au sens qu’elle traverse tout le monde politique. Mais elle s’exprime également dans la défiance généralisée, quand ce n’est pas l’opprobe, qui touche les élus sans exception. Dans la conviction profondément ancrée qu’ils ne sont pas à la hauteur, incapables de régler les problèmes qu’ils prétendent gérer. Sans parler de la légèreté de leur conduite dans tous les domaines, qui en dit long sur leur sentiment d’impunité.

Sous-jacente, se profile l’idée que les Etats-Nations ne sont plus à la mesure d’une finance mondialisée devenue folle, rendant inopérants des systèmes de représentation démocratique nationaux. Un vide s’installe, affolant ceux qui dénoncent immédiatement le populisme, amalgamant tout ce qui n’est pas dans leurs cordes.

Dans le camp des autorités, le mot d’ordre reste de tenir envers et contre tout. En considérant comme un mal nécessaire l’élargissement des zones de pauvreté, le développement des petits boulots informels destinés à la survie, ainsi que la montée de la précarité, qui se poursuit. En jouant sur l’angoisse et le découragement, sur le sentiment qu’il n’y a rien à faire, encouragé par des discours d’opposition qui prônent aussi le recours à la responsabilité, en l’occurrence à la soumission.

Sauvent l’honneur ceux qui continuent de s’indigner, recueillant la sympathie d’une opinion publique désarmée. Déterminés et utilisant des tentes de sans abri comme symbole de leur protestation, accueillant pour les nourrir les exclus du voisinage. Tout un programme !

Les rebondissements imprévus de la crise ne s’arrêteront pas en si bon chemin. Le besoin qu’a ressenti George Papandréou de consulter les électeur grecs, par delà ses calculs, exprime la nécessité que les gouvernements ressentent de trouver des points d’appui lorsqu’ils font défaut et que la crise sociale dérive vers le chaos. La manœuvre a tourné court, laissant le problème entier.

La situation sociale et politique devient progressivement toute aussi instable que le système financier. Désormais globale, la crise incite au partage d’une vision libératrice qui le soit aussi.

Présentée comme solution, la gouvernance économique européenne en est à l’exact opposé. Porteuse non pas d’un déficit mais d’un gouffre démocratique.