Accueil > Sociétés Civiles à Parlement Européen > Appel urgent pour la transparence et la participation

Source : STOP THE WALL

Appel urgent pour la transparence et la participation

jeudi, 15 septembre 7h56 AM

jeudi 15 septembre 2011

=============================================

La direction palestinienne se doit de ne pas oublier qu’elle est au service de son peuple et ne pas s’attendre au contraire à ce que le peuple soit à son service.

A moins de 15 jours de la session de l’Assemblée générale des Nations-Unies sur la Palestine, durant laquelle la direction officielle palestinienne va présenter une initiative sur l’État palestinien à la communauté mondiale, ses nombreux avantages et inconvénients sont passionnément débattus. Pourtant, même sans entrer dans ces débats, l’une des plus sérieuses préoccupations est son processus fondamentalement vicié qui sape cette candidature aux Nations-Unies. Elle apparaît comme un déjà-vu affligeant des erreurs du passé.

A deux semaines de la date cruciale du 21 septembre, on ne sait toujours pas quels sont le texte et les détails de l’initiative qui vont être proposés aux Nations-Unies. Comme de nombreux groupes, intellectuels et militants palestiniens l’ont déclaré, nous ne voulons pas et nous ne pouvons pas soutenir une initiative dont le contenu n’a pas été porté à notre connaissance. Le cœur du problème est le fait que notre direction a mis en avant cette initiative sans en avoir débattu ouvertement, et que maintenant elle demande au peuple palestinien de la soutenir aveuglément. Ceci est révélateur d’un problème beaucoup plus profond au sein du corps politique palestinien et nécessite un appel à la transparence, à la responsabilisation et à la participation du peuple.

Tous les Palestiniens se souviennent du moment où, en 1993, la direction palestinienne a pris tout le monde par surprise en leur présentant les Accords d’Oslo, totalement négociés. Après des décennies de lutte, de sacrifices et de souffrances du peuple palestinien dans son intégralité, il existait une confiance entière dans la direction. Nous les avons crus quand ils nous ont assuré que les Accords d’Oslo représentaient une avancée vers la réalisation de nos droits. Personne n’a été véritablement informé sur les Accords de Paris, cet accord économique qui complétait les Accords d’Oslo et allait étrangler davantage encore la vie des Palestiniens.

Au cours des vingt années qui ont suivi, les mêmes personnes qui avaient négocié Oslo ont continué les négociations dans des rencontres secrètes et sans aucun mandat publiquement et collectivement approuvé. Comme les documents sur la Palestine publiés par al-Jazeera l’ont finalement révélé, toutes les rumeurs à propos de ces négociations interminables derrière des portes closes étaient fondées : à bien trop de reprises, nos négociateurs ont traité de nos droits eux-mêmes, au lieu des moyens pour les réaliser.

Aujourd’hui, le « processus de paix » et ses négociations inhérentes sont presque unanimement considérés comme un échec, un instrument aux mains d’Israël pour poursuivre la colonisation de notre terre, le vol de nos ressources, et le déplacement de notre peuple. Et par-dessus tout cela, le processus d’Oslo fut un miroir de cirque dépeignant l’occupation et l’apartheid comme étant la paix et l’entente. Pourtant ce sont les mêmes personnes responsables de deux décennies de processus « paix » manqué qui nous demandent aujourd’hui, une fois encore, de croire en une autre initiative, dont le contenu et les dangers sont toujours tenus éloignés du public.

C’est quasiment comme si la direction palestinienne officielle ne voulait pas voir le trou béant qui la sépare de la population ; comme si elle voulait nous faire oublier que les élections pour l’ANP (Autorité nationale palestinienne) et le Conseil législatif palestinien ne nous avaient donné aucune responsabilité ni légitimité à cause de l’interférence de l’Occident, nous faire oublier que les structures de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) subsistaient mais dans la négligence depuis le début des années quatre-vingt-dix, et que leur représentativité s’était érodée. Pendant tout ce temps, les partis de gauche palestiniens ont paru prendre la même position d’indécision qu’en 1993, incapables de proposer une alternative ou même d’offrir une intervention significative sur cette question. Fort heureusement, la société palestinienne en tant que telle a tiré deux leçons de ces deux dernières décennies : la première, c’est que lorsque la destinée de tout un peuple est en jeu, ce peuple doit avoir la parole, et la seconde, c’est de ne pas croire dans un processus sans objectifs et sans échéance.

Sans surprise, l’une des demandes fondamentales du mouvement de la jeunesse palestinienne qui a émergé dans le sillage du Printemps arabe, est l’appel à des élections immédiates et directes pour le Conseil national de l’OLP, afin de permettre la participation de la population dans le processus politique. Et l’autre génération de Palestiniens est de plus en plus favorable à reprendre la lutte où nous l’avons laissée et à rejoindre la résistance populaire.

Cependant, une fois encore, la direction palestinienne manifeste la même attitude d’arrogance face au peuple. L’ANP, au lieu de soutenir son peuple dans le combat, cherche continuellement à limiter et contrôler la mobilisation populaire dans les zones sous son contrôle administratif. Les confrontations avec l’occupation en sont réduites à une tentative de transformer la résistance populaire en une manifestation de soutien à telle ou telle initiative. Avec comme résultat que la véritable résistance populaire actuelle ne progresse que dans les Zones C, où l’ANP n’exerce aucune présence policière.

En même temps qu’il existe certainement un large consensus au sein du peuple palestinien pour dire que nous avons tardé à modifier notre stratégie pour nous sortir des négociations, il existe aussi un besoin urgent de débattre collectivement, démocratiquement et publiquement sur la direction à prendre. Repenser le combat palestinien, élaborer une nouvelle stratégie, sont en effet nécessaires et ne peuvent être laissés entre les mains de quelques-uns. La direction palestinienne se doit de ne pas oublier qu’elle est au service de son peuple et ne pas s’attendre au contraire à ce que le peuple soit à son service.

L’initiative proposée aux Nations-Unies pourrait, potentiellement - et en fonction du contenu toujours opaque de la proposition - représenter un changement monumental qui nous emmène loin de notre combat de libération nationale, vers une querelle sur État de fait et État virtuel, une initiative qui pourrait compromettre les lieux pour revendiquer les droits des réfugiés palestiniens et les changements de structures de notre représentation officielle. D’autres soutiennent qu’à la place, l’initiative aux Nations-Unies n’aborde aucune de ces questions et qu’elle donne simplement aux Palestiniens de nouvelles possibilités pour tenir responsable Israël dans des forums internationaux.

Cela soulève la question pourquoi l’OLP n’a-t-elle pas encore utilisé les instruments déjà à notre portée ? Pourquoi en sept ans n’a-t-elle jamais tenté d’activer l’exécution de la décision stipulant les conséquences juridiques du Mur et rendue par la Cour internationale de justice le 9 juillet 2004 ? L’OLP ne soutient-elle donc pas activement la Turquie quand celle-ci manifeste son intention de briser le siège de Gaza devant cette même Cour internationale ? Pourquoi le rapport Goldstone n’est-il pas utilisé pour tenir Israël responsable de ses crimes de guerre ?

En conclusion, l’initiative en cours aux Nations-Unies marque l’apogée d’une crise au sein des structures politiques de la représentation palestinienne et exige pour l’immédiat, le court et long termes, des réponses. A court terme, nous avons besoin de voir clair, immédiatement, sur le contenu de l’initiative aux Nations-Unies et d’ouvrir un forum de discussions ouvert et inclusif, où les préoccupations de la population et des experts seront prises au sérieux et intégrées dans la proposition ; un forum qui prennent en compte les Palestiniens et leurs expressions politiques et sociales, de toute notre patrie et de la diaspora. Dans le moyen et long termes, les élections directes pour le Conseil national de l’OLP et un reversement complet de l’attitude actuelle de notre direction pour un plus grand respect du peuple, une plus grande confiance envers lui, et un soutien plus grand à son combat sont indispensables. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons construire un nouveau processus qui rende possible un véritable consensus sur une stratégie nationale palestinienne post-Oslo.

Si, dans les deux semaines à venir, notre direction se montre prête pour une transparence, une responsabilisation et un processus de participation véritables, alors non seulement, nous profiterons de l’initiative aux Nations-Unies, mais cette démarche pourra nous ouvrir la voie pour une restructuration du corps politique palestinien, réduire le fossé entre la direction et le peuple, et jeter les bases d’une refonte efficace de la stratégie nationale palestinienne.

Jusque-là : nous n’achèterons rien dans un sac fermé.

Source : Stop the Wall