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Dernier recours à un Homme d’Etat (ndlr)

Lettre ouverte de Serge Grossvak à Alain Juppé, Ministre des Affaires Etrangères

Dimanche, 3 juillet 2011 - 6h58 Am

dimanche 3 juillet 2011

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Serge Grossvak

44 rue Carnot

95410 Groslay

à

M. le Ministre Alain JUPPÉ

Ministère des Affaires Etrangères

37 quai d’Orsay

75351 PARIS CEDEX 07

Groslay, le jeudi 30 juin 2011

Monsieur,

Monsieur le Ministre, nous sommes dans la minute d’avant le drame. Dans cette minute de l’histoire où l’énorme se joue, où seul le courage et la détermination peut infléchir le devenir. Nous sommes dans le moment où chaque geste compte. J’espère votre geste à vous, qu’en cette minute de lourde importance vous ferez écho à ce qui fut la grandeur du Général De Gaulle. Aurez-vous l’audace d’aider à la Paix ?

Ce drame qui s’annonce, c’est au Moyen Orient qu’il s’engage. Après 60ans de guerres et d’ espoirs de paix déçus nous parvenons à l’ultime séquence pour une solution de moindres souffrances. Un nouveau recul dans la reconnaissance de l’Etat de Palestine sonnerait le glas de l’espoir en une justice. Depuis des années maintenant les négociations et les promesses s’enchaînent pour ne devenir que des chaînes de désespoir et d’exaspération.

Les récentes années ont épuisé le temps des tergiversations. Les palestiniens en sont réduits à un asservissements dans le ghetto gazaouit, de se voir spoliés de terres de Cisjordanie, de voir colonisé Jérusalem-est . 2000 « implantations » cette semaine dans un lâche silence international !

Ainsi se diffuse un sentiment de droit à l’impunité et de mépriser pour l’un, et le désespoir de l’injustice pour l’autre. L’ingrédient explosif est là. Le sang guerrier se prépare à couler à flot.

Et le monde bouge. Le monde arabe bouge. Le monde palestinien bouge. L’aspiration à la dignité est monté en vague puissante depuis le printemps tunisien, rendant encore plus insupportable la conduite coloniale et méprisante à l’égard du peuple palestinien. Une troisième intifada s’annonce. Une intifada du désespoir. Une intifada différente des précédentes où survivait le rêve d’un gouvernement israélien pouvant en revenir à la reconnaissance des frontières de 67. Une intifada de la désespérance, du sacrifice absolu. Une intifada de vies offertes en témoignage des souffrances accumulées et de l’impossibilité de vivre et de rêver. Du sang offert pour hurler à la face du monde.

Le sang s’annonce. Et Goliath ne pourra plus se faire passer pour David. Et le rappel du martyr des ancêtres ne viendra plus atténuer la sauvagerie des descendants.

Nous sommes parvenus à un point limite.

Sans l’espoir d’un acte ferme de reconnaissance de l’Etat palestinien, sans l’espoir d’une intervention internationale pour contraindre Israel au respect des frontières de 67, les armes les plus puissantes, les plus cruelles, seront finalement submergées comme dans toutes les guerres d’asservissement. Le sang coulerait comme jamais. Vous ne pouvez laisser faire !

Demain, à l’ONU, la France doit s’engager par votre voix, une voix énergique et entraînante, en faveur de la reconnaissance de la Palestine, de ses frontières inaliénables. Frontières inaliénables pour deux pays égaux en droits et en respect.

Les frontières de 67.

Ne peuvent conduire à la paix ni la conquête intégrale de la Cisjordanie du projet de droite, ni le « partage » de la Cisjordanie après de longues négociations, du projet de la gauche travailliste.

Deux pays, Israel et Palestine, pour la paix. Et pour la paix, deux pays de citoyens.

L’ethnicisation n’est pas l’avenir du monde, ni de la paix. Rien ne compromettrait plus l’avenir que l’établissement d’une suprématie d’une partie des habitants sur les autres. Désigner un Etat comme juif, ou musulman, ou chrétien, est non seulement rétrograde mais pourvoyeur d’affrontements. Martin Luther King l’avait clamé aux USA, Nelson Mandela l’avait combattu en Afrique du Sud, la Constitution de notre pays l’avait rejeté. Israel est la nation de ses habitants, de tous ses habitants. Ces habitants doivent être libres et égaux. Seul ce gouvernement de dérive fascisante a pu établir cette indigne revendication. Céder à cette exigence est contribuer encore une fois à la dérive vers un nationalisme fanatique, qui a peu à voir avec la culture juive, et beaucoup avec l’extrême droite.

Je suis juif, et français. Et je tiens à ma nationalité. Que penseraient les résistants juifs qui ont donné leur vie pour la liberté, qui se sont engagés solidairement des autres résistants de leurs pays pour une libération commune ? Accorder aux dirigeants israéliens actuels, fanatiques, le droit de déclarer « juif » leur pays, c’est jeter aux orties notre nationalité à nous, français juifs. C’est une insulte à ce que nous sommes.

Ne sacrifiez pas mon identité, notre identité, pour satisfaire un pouvoir colonisateur. Ce serait déshonorer la France en plus de renforcer un ressort guerrier.

Monsieur le ministre, je ne sais encore si vous pouvez agréer toute ma sincère considération. Au delà de mes divergences j’avais pu avoir ce sentiment positif à l’égard du Président Jacques Chirac. J’espère ressentir ce même respect à votre égard parce que vous aurez su mettre tout le poids de votre fonction dans le sens de la paix. Je ne peux ôter de mon esprit que ceux qui par faiblesse, par lâcheté, auront laissé se développer les conditions du drame, ceux là auront une tâche de sang sur la conscience. Monsieur, c’est d’innombrables vies humaines dont il s’agit.

Serge Grossvak

entre autre signataire de l’appel « la Palestine c’est maintenant »