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Géopolitique

Le rapprochement inter-palestinien dénote un changement égyptien

Vendredi, 29 avril 2011 - 20h02

vendredi 29 avril 2011

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L’accord de réconciliation entre les « frères ennemis » palestiniens du Fatah et du Hamas, fruit d’une médiation du Caire, dénote un net changement de la stratégie égyptienne au Moyen-Orient depuis la chute du président Hosni Moubarak, le 11 février.
En poussant le président palestinien Mahmoud Abbas et ses rivaux du mouvement islamiste à enterrer la hache de guerre, les généraux qui dirigent désormais l’Egypte cherchent à renforcer leur main par rapport à Israël, à améliorer leurs relations avec la puissance régionale rivale iranienne et s’acquérir l’opinion palestinienne.

L’Egypte partage avec la bande de Gaza, aux mains du Hamas depuis quatre ans, une frontière commune, et une véritable réconciliation entre le mouvement islamiste et le Fatah d’Abbas, qui administre la Cisjordanie, mettrait fin à leurs dissensions en rendant cette frontière plus sûre.

« Le Caire a un certain nombre d’intérêts dans cet accord et les autorités militaires transitoires ont joué un rôle clé dans sa conclusion », souligne Kamrane Boukhari, analyste au cabinet de consultants Stratfor Global Intelligence.

« L’Egypte ne souhaite pas voir de troubles à Gaza au moment où elle est engagée dans une transition sur le front intérieur. Il semble aussi que l’Egypte cherche à s’affirmer par rapport à Israël », qui ne voit pas d’un bon oeil cet accord de réconciliation, explique-t-il.

L’Egypte est le pays arabe le plus peuplé mais son influence régionale a décliné au fur et à mesure des trente ans de règne d’Hosni Moubarak, durant lesquelles la politique du Caire s’est progressivement alignée sur celle de Washington et de son allié israélien, et s’est éloignée des sentiments de la population.

Si l’Egypte a signé un accord de paix en 1979 avec Israël, sous la houlette des Etats-Unis, bon nombre d’Egyptiens restent hostiles à leur voisin oriental en raison de la perpétuation depuis 1967 de l’occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est et du Golan syrien.

Lors de la chute de Moubarak, Israël a exprimé la crainte que les nouveaux dirigeants ne remettent en cause l’accord de paix, mais l’une des premières déclarations des généraux qui lui ont succédé a été de rassurer l’Etat juif sur la pérennité du traité.

Mais, peu de temps après, le Conseil suprême des forces armées (CSFA) égyptien a tendu la main à l’Iran, ennemi juré d’Israël, avec lequel le régime de Moubarak était en très mauvais termes, et qui soutient le Hamas.

L’Egypte semble avoir coordonné avec l’Iran ses efforts pour rapprocher le Hamas et le Fatah, signe sans doute d’un certain dégel entre les deux puissances régionales.

Que le ministère iranien des Affaires étrangères se soit félicité de l’accord, qui sera signé lors d’une cérémonie de trois jours prévue au Caire à partir du 2 mai, est un signe que Téhéran soutient cette réconciliation, souligne Boukhari.

« Et comme l’Iran a donné son accord et que le Hamas est basé à Damas, cela signifie que la Syrie aussi a autorisé la réconciliation à se faire », ajoute-t-il.

« La politique contre le Hamas et l’alliance étroite avec les Etats-Unis et Israël remonte aux efforts de l’administration de Moubarak pour faire passer ses intérêts personnels au-dessus de ceux de la nation », estime un responsable égyptien.

Depuis la chute de Moubarak, les dirigeants militaires provisoires se sont employés à s’éloigner de cette politique pour étendre les relations avec les pays voisins et rétablir le statut de l’Egypte comme puissance régionale.

Ce sont les services de renseignement militaires égyptiens qui ont facilité l’accord de réconciliation entre le Hamas et le Fatah, et l’Egypte compte dépêcher à Gaza une équipe de sécurité pour veiller à la bonne application de l’accord.

Les services de renseignement égyptien ont considérablement allégé le blocus de la bande de Gaza décrété par Israël avec l’aide de l’Egypte de Moubarak.

La cérémonie de signature de l’accord de réconciliation, à laquelle les autres factions palestiniennes sont invitées à se joindre, aura lieu en présence du président Mahmoud Abbas et du chef du bureau politique du Hamas en exil à Damas, Khaled Méchaal.

Reuters