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OPINION (en français, puis en anglais(- In french and in english)

Colonialisme culturel occidental et libre choix des Palestiniens

par Gilad Atzmon, artiste israélien

mardi 31 janvier 2006

30.01.2006
http://peacepalestine.blogspot.com
Traduit de l’anglais en français par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala,
le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique
(transtlaxcala@yahoo.com). Cette traduction est en Copyleft.

Chers Amis,

je suis désolé de vous décevoir. Je n’ai pas l’intention d’écrire une
réfutation détaillée de la lettre ouverte de M. Davidsson. Ceci, pour trois
raisons. a) je ne vois pas de quelle manière la cause palestinienne pourrait
en quoi que ce soit bénéficier d’un débat de cette nature ; b) je n’ai
vraiment pas de temps à perdre à ce genre de stupidité : je joue chaque soir
devant des centaines de personnes, et engager un débat avec un Davidsson pas
content, pour moi, c’est une perte totale de temps ; c) ce n’est peut-être
pas sympa de le dire, mais M. Davidsson n’est pas de taille. La lecture de
sa « lettre ouverte » indique que cet excellent homme est un moderniste
conservateur, profondément englué dans une rhétorique désuète relative aux « 
valeurs universelles ».

Elias Davidsson eût-il été un tant soit peu plus cultivé, il aurait sans
doute intégré que la notion d’humanisme universel n’est pas applicable à la
question de l’Islam et du judaïsme. L’universalisme et le fait de penser en
termes universels sont le fruit de la philosophie et de l’âge des Lumières,
en Occident. L’universalisme est intrinsèquement lié à la notion de « sujet
 ». Dans le judaïsme, ainsi que dans l’Islam, l’être humain est le sujet de
Dieu [pas de lui-même, ndt]. Il est un disciple, plus qu’un libre penseur.
Cette différenciation démantèle toute possibilité de réduction
terminologique transculturelle entre l’Occident et l’Orient. Autrement dit,
parler de valeurs Universelles est, en soi, une forme de colonialisme
culturel occidental. Si Davidsson tient absolument à être colonialiste, qui
suis-je, moi, Gilad Atzmon, pour l’en empêcher ?

Dois-je le préciser ; je ne crois pas à la notion de valeurs universelles.
En réalité, je ne sais même pas ce peuvent bien être les « droits humains
universels ». De plus, j’ai tendance à être très méfiant vis-à-vis de ceux
qui prétendent le savoir. Simplement parce qu’il m’arrive, de temps à autre,
d’ouvrir un journal, je sais très bien que Blair et Bush assassinent au nom
de l’ « humanisme universel ». Ceux qui suivent mes écrits savent très bien
que je suis un disciple fervent de Martin Heidegger. Je pense que les objets
sont formés par la langue. En d’autres termes, pour moi, le discours
universel et le discours sur l’universalité sont totalement dépourvus de
signification. De plus, je pense que ceux qui s’efforcent d’imposer le
discours de l’universalité à autrui sont soit des ignorants, soit des gens
qui aspirent à l’hégémonie.

Je l’ai dit : je n’ai nulle intention de répliquer à la lettre ouverte d’
Elias Davidsson. Non. Il y a mieux : je vais demander à M. Davidsson de m’
envoyer (à moi, ou à n’importe qui d’autre) une référence bibliographique à
la lettre ouverte qu’il a certainement publiée à la suite de l’épouvantable
assassinat de Sheikh Yassine. Si Davidsson est tellement outragé par moi, l’
assassinat de Sheikh Yassine a dû au moins autant l’ulcérer. Au cas où il n’
aurait pas publié une telle lettre ouverte, à l’époque, il peut m’envoyer, à
moi ou à n’importe qui d’autre, ses commentaires ou ses condoléances publiés
à l’intention du peuple palestinien après l’assassinat brutal du Dr. Abdel
Aziz Rantissi. Je me permettrai même d’insister un peu, en demandant où
étaient les Elias Davidssons et autres gardiens des valeurs universelles
quand la quasi totalité de la direction du Hamas était en train d’être
liquidée en série et en plein midi ?

Je vais vous le dire : d’une manière ou d’une autre, ils sont restés cois.
Ils sont restés très, très cois. Pourquoi sont-ils restés cois ? Parce qu’
ils n’aiment pas le Hamas. En gardant le silence en des circonstances aussi
graves, ils ont fondamentalement approuvé la politique israélienne des
assassinats contrôlés. D’une certaine manière, Davidsson et ses semblables
ont extrêmement peu de respect pour des partis religieux, des politiques
inspirées par des préceptes religieux et pour la religion, d’une manière
générale. Certes, ils aiment le peuple palestinien, mais seulement dans la
mesure où il leur rappelle eux-mêmes, c’est-à-dire des « juifs athées
européens de la classe moyenne ». Si cela n’était pas encore très clair
jusqu’à mercredi dernier, désormais, clair, ça l’est. Or, voyez-vous, les
Palestiniens ne sont pas précisément des juifs athées européens de la classe
moyenne. M. Davidsson trouve ça difficile à digérer. Malheureusement, je ne
puis lui être d’aucun secours.

C’est précisément cela qui m’a toujours rendu si réticent à avoir un
quelconque contact avec l’un quelconque de ces « militants » ethniques
juifs. Inutile de dire qu’ils ont pourtant tous, peu ou prou, flirté avec
moi et ma musique, et fort longtemps. Mais j’ai compris très tôt que leur
agenda était totalement hypocrite. Ce qui leur tenait à cour, ce n’était en
rien la Palestine. C’était la défense de leur propre idéologie rationaliste
athée, sur le dos du peuple palestinien !

Chers Amis. Je sais depuis pas mal de temps que la rue palestinienne est en
train de glisser vers l’Islam. Je précise tout de suite que, contrairement à
Davidsson et ses semblables, je n’ai pas peur de l’Islam. De fait, j’aime l’
Islam et j’aime me trouver dans un environnement musulman. De plus, je
constate que la démocratie, dans le monde arabe, peut conduire à l’Islam,
alors que l’Islam n’est pas nécessairement voué à maintenir la démocratie.
Et, comment dire ? Cela ne me dérange nullement, bien au contraire, puisqu’
il s’agit véritablement du choix des masses et que cela me convient
parfaitement. Et si cela ne suffisait encore pas, j’ajoute que je suis loin
d’avoir conservé mon enthousiasme pour la Démocratie. Je n’oublie pas que c’
est dans le cadre de la phase atteinte actuellement par la démocratie
occidentale que des criminels de guerre assoiffés de sang comme Blair, Bush
et Sharon ont été réélus.

Je ne suis pas islamologue, mais j’en sais assez pour dire que les juifs ont
vécu sous la protection de l’Islam pendant des siècles. Nous savons tous
parfaitement qu’un des principes de l’Islam est la protection de l’étranger.
Quitte à choisir entre vivre dans une Palestine islamique ou une Palestine
juive, je choisirais l’islamique, sans l’ombre d’une hésitation. Mieux : si
on me donne à choisir entre la « démocratie juive » et l’Islam, je choisis l
’Islam.

J’avoue avoir été plutôt inquiet au moment de mettre mon dernier article en
ligne. La plupart de mes amis palestiniens sont des musulmans et des
chrétiens laïcs. Beaucoup sont affiliés au Fatah. Ils sont, tous, très
préoccupés par les derniers développements intervenus dans leur pays. Comme
je l’ai indiqué dans mon article, ce vote n’exprime pas la volonté des
Palestiniens de l’exil. D’une certaine façon, je les comprends fort bien. J’
ai grandi en Israël, un pays qui glisse, lentement mais sûrement, vers le
fondamentalisme religieux. Je sais ce qu’est le fondamentalisme, et je sais
parfaitement que je serais strictement incapable de survivre ne serait-ce qu
’un seul jour dans un environnement talmudique. Je comprends combien cela
peut être difficile, pour mes amis palestiniens, qui se sont habitués à un
mode de vie libéral occidental. Je suis conscient de tout ceci. Et pourtant,
ceux qui vivent en Palestine occupée ont dit ce qu’ils avaient à dire ; ils
sont allés voter et ils nous ont administré, à nous tous, une grande leçon.
Ils nous ont montré ce qu’est l’esprit de résistance le plus héroïque. Ils
ont dit à l’Occident, à Israël, à l’Union européenne, au monde arabe, aux
Davidssons et aux autres gardiens du temple : « Vous pouvez tous aller vous
faire voir ! Nous savons ce que nous voulons ! Votre fausse gentillesse, on
en a marre ! Votre désir hypocrite d’aider, nous en avons plus qu’assez !
Votre solidarité nous fait gerber ! Nous n’avons pas besoin que vous veniez
nous dire qui nous sommes et ce que nous devrions être. Ne nous libérez pas,
s’il vous plaît, et ne sauvez pas nos femmes. Nous allons prendre soin d’
elles, dorénavant. Lâchez-nous les baskets ! »

Combien de fois ne me suis-je pas retrouvé déçu et frustré, au cours de ce
combat sans fin contre le sionisme et la juiverie mondiale qui le soutient ?
Combien de fois n’ai-je pas eu à payer très cher le fait de dire ce que je
pense ? Cette fois-ci, pour la première fois de ma vie, je sens
véritablement un changement, dans l’air. Les Palestiniens vont vaincre. Avec
moi. Ou sans moi. Ils vont gagner, parce qu’ils n’ont rien à perdre. Ils
vont gagner, parce qu’ils le méritent.

Désolé, mes chers Amis. Avec un tel changement décisif dans l’air, une
réfutation de l’idéologie dix-neuvième siècle d’un Davidsson est
pathétiquement dénuée de sens. Je n’ai qu’un devoir : je dois voyager, de
ville en ville, et féliciter le peuple palestinien, depuis la scène où je me
produis.

C’est ce que je vais faire. Aujourd’hui. Demain. Après-demain. Depuis quatre
jours, c’est ce que je fais, à Istanbul. Vous l’aurez sans doute deviné : à
chaque fois, tout mon public est transporté sur un petit nuage. Et je vais
vous dire pourquoi : c’est parce que l’esprit de révolte de la résistance
palestinienne est un esprit avec lequel les gens n’ont aucune difficulté à
sympathiser.

Vous voulez savoir pourquoi ?

C’est parce que les Palestiniens sont à l’avant-poste de la guerre contre le
mal.

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Monday, January 30, 2006
http://peacepalestine.blogspot.com/
Gilad Atzmon - Western Cultural Colonialism and the Palestinian choice
http://photos1.blogger.com/blogger/1493/655/1600/2005-08-06 Gilad
Atzmon1.jpgIn these days immediately following the landslide victory of
Hamas, many people had been caught unprepared to face such an outcome. It
has been the object of debate and discussion, and following it on the
"internet world" really could be a full-time job. Gilad had told me about an
internet debate concerning the article he published here, Gilad Atzmon,
Where to Now, Palestine ? that was going on at Togethernet. This is the
response of Gilad Atzmon to the "Open Letter by Elias Davidsson".

Dear Friends,
I am sorry to disappoint you. I am not going to write a detailed rebuttal to
Mr. Davidsson’s open letter. I would offer three reasons. First : I can’t see
how the Palestinian cause would benefit from such a debate. Second : I don’t
really have the time for that kind of nonsense. I perform every night in
front of hundreds of people and engaging with one unhappy Davidsson is for
me a total waste of time. Third : It isn’t nice to say it but Mr. Davidsson
isn’t exactly a match. Reading his ’open letter’ suggests that the good man
is a conservative modernist who is deeply engaged in some dated vocabulary
to do with ’universal values’.

If Elias Davidsson were just slightly more educated he would probably grasp
that the notion of universal humanism isn’t applicable to the Islamic and
Judaic subject. Universalism and thinking in universal terms is the fruit of
Western philosophy and enlightenment. It is intrinsically linked with the
notion of the ’subject’. Within Judaism and Islam the human is subject to
God. He is a follower rather than a free thinker. This differentiation
dismantles any possibility of cross-cultural terminological reduction
between west and east. In other words, talking about Universal values is in
itself a form of Western cultural colonialism. Davidsson wants to be a
colonialist, who am I to stop him ?

Needless to say, I do not believe in the notion of universal values. In
fact, I don’t even know what ’universal human rights’ are. Furthermore, I
tend to be very suspicious of those who claim to know. Just because I open
the newspapers from time to time, I know very well that Blair and Bush kill
in the name of ’universal humanism’. Those who follow my writings know
pretty well that I am a devoted follower of Martin Heidegger. I believe that
beings are shaped by language. In other words, for me, universal discourse
and discourse of universality are nothing but meaningless. Moreover, I
believe that those who try to impose discourse of universality on others are
either ignorant or hegemony seekers.

As I said, I do not have any plans to address Elias Davidsson’s open letter.
Instead, I will ask Mr. Davidson to send me or anyone else a bibliographic
reference to his open letter following Sheik Yassin’s disgraceful
assassination. If Davidsson is so outraged by me, surely the murder of Sheik
Yassin must have moved him at least as much. In case he failed to issue such
a letter at the time he may as well send me or anyone else his published
comment or condolences for the Palestinian people following the brutal
murder of Dr. Abdel Aziz Rantissi. I may press on and ask where were the
Elias Davidssons and the gatekeepers of universalist values when the entire
leadership of the Hamas was serially liquidated in broad daylight.

Let me say it, somehow they kept quiet. They were very, very quiet. Why did
they keep quiet ? Because they don’t like the Hamas. Being silent at such a
grave time, they basically approved the Israeli controlled assassination
policy. Somehow, Davidsson and those like him have very little respect for
religious parties, politics inspired by religious tenets and religion in
general. Indeed they love the Palestinian people, but only as long as they
remind them of themselves i.e., ’European middleclass atheist Jews ’. If it
wasn’t clear until last Wednesday, now it is obvious. The Palestinians aren’
t exactly middleclass atheist Jews. This is something Mr. Davidsson finds
hard to digest and unfortunately, I can’t help him.

It is that very fact that made me so reluctant to have any contact with any
of those ethnic Jewish campaigners. Needless to say, they all had tried to
flirt with me and with my music for a very long time. But rather soon I
understood that their agenda was totally hypocritical. It wasn’t Palestine
that they cared about ; it was the maintenance of their own rational atheist
ideology at the expense of the Palestinian people.

Dear friends. For more than a while I know that the Palestinian street is
drifting towards Islam. I may say it, unlike Davidsson and his ilk, I am not
afraid of Islam. In fact I love Islam and love being in a Muslim
environment. Moreover, I can see that democracy in the Arab world may lead
to Islam while Islam isn’t necessarily committed to maintaining democracy.
And how to say it, I am far from being bothered by it because if this is
indeed the choice of the masses, it is good enough for me. If this isn’t
enough, I am far from being enthusiastic about Democracy anymore. It is
within the current phase of western democracy where bloodthirsty war
criminals such as Blair, Bush and Sharon were re-elected.

I am not an expert on Islam but I know enough to say that Jews were living
under the protection of Islam for hundreds of years. We all know very well
that one of the principles of Islam is committed to protecting the
foreigner. If I would have to choose between living in an Islamic Palestine
or a Jewish one, I would be going for the Islamic one without a single
doubt. Moreover, if I have to choose between ’Jewish democracy’ and Islam I
go for the latter.

I may admit that I was pretty concerned before posting my last piece. Most
of my Palestinian friends are secular Muslims and Christians. Many of them
are affiliated to the Fatah. They are all rather concerned with the latest
development in their homeland. As I mentioned in my piece, the vote doesn’t
express the will of Exile Palestinians. Anyhow, I understand my Palestinian
friends very well. I grew up in Israel, a country that slowly but surely is
shifting towards religious fundamentalism. I know what fundamentalism is all
about and I know very well that I wouldn’t survive a single day in a
Talmudic environment. I understand how difficult it may be for my
Palestinian friends who became accustomed to western liberal life. I am
aware of it all, and yet, those who dwell in occupied Palestine had their
say, they went to the poll and gave all us a major lesson. They presented us
with the most heroic spirit of resistance. They told the West, and Israel,
and the EU, and the Arab world, and the Davidssons and the other
gatekeepers, "you can all bugger off. We know what we want. We are tired of
your phoney kindness. We are exhausted of your hypocritical willingness to
help. We are sick of your solidarity. We don’t want you to tell us what we
are and what we should be. Don’t liberate us and don’t save our women. We
will take care of it all from now on. Leave us alone."

So many times I found myself disappointed and frustrated in this endless
struggle against Zionism and its backing world Jewry. So many times I had to
pay a heavy price for saying what I believe. This time, for the first time
in my life, I do feel a change in the air. The Palestinians are going to win
with me or without me. They are going to win because they have nothing to
lose. They are going to win because they deserve it.

Sorry my dearest friends, within this change in the air a rebuttal of
Davidsson’s 19th century ideology is pathetically meaningless. I have only
one duty. I have to travel from town to town and to congratulate the
Palestinian people from the stage. This is what I am going to do today and
tomorrow and the day after tomorrow. I did it in Istanbul for the last 4
days. As you probably can guess, everybody was over the moon. And I tell you
why, because the rebellion spirit of the Palestinian resistance is a spirit
people can empathise with. You know why ? Because the Palestinians are in the
forefront of the war against evil.