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Source : Rue 89

Une révolution mondiale est en marche (mais le G20 ne le sait pas)

Lundi, 28 février 2011 - 7h04 AM

lundi 28 février 2011

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C’est toujours comme ça avec les révolutions, on ne sait jamais ni comment, ni quand, ni où elles vont surgir. Et puis voilà qu’un « tremblement de terre » (Robert Fisk) secoue soudain le Moyen-Orient, se propage en ondes de choc un peu partout dans le monde, médusant les dirigeants établis de tous pays.

Des potentats arabes en panique

Les roitelets locaux en sont si tourneboulés qu’ils en viennent à promettre rien moins que la démocratie [rires] et à faire n’importe quoi :

•augmenter à tout hasard les salaires des fonctionnaires (« roi » Bachar de Syrie),

•renoncer à un état d’urgence antédiluvien (« roi » Bouteflika d’Algérie),

•ouvrir les portes de ses prisons (« roi » Hamad de Bahreïn),

•promettre 36 milliards de dollar à son peuple pour prix de son silence (« roi » Abdallah d’Arabie saoudite).

Pas sûr pourtant que toutes ces mesures improvisées dans une certaine panique suffisent. Car l’autre problème avec les révolutions, c’est qu’une fois parties, on ne sait plus trop comment, quand et où elles vont s’étendre.

La pandémie atteint le camp occidental

Déjà, les premières secousses sérieuses se sont fait sentir dans l’Etat du Wisconsin aux Etats-Unis et en Grèce où les émeutiers s’attaquent directement aux symboles du pouvoir.

Le FMI, fidèle gardien de l’ordre financier, s’inquiète de l’obstination islandaise et de l’exaspération irlandaise à vouloir renégocier les plans punitifs censés leur venir en aide.

Gageons que nos amis portugais ou espagnols, bientôt italiens et probablement un jour français, de leur plein gré ou contraints par les catastrophes qui leur tomberont dessus, finiront eux aussi par ruer dans les brancards.

Une chose est sûre, l’ampleur de ce qui se passe à travers notre planète depuis le début de cette année 2011 ne peut plus être assimilée à de simples escarmouches sans lendemain. Trop de points convergents et de similitudes dans les revendications. Et ce slogan déjà emblématique qui réunit chacun des foyers de contestation :

« Dégage ! »

Les « importants » du G20 pataugent

Il n’y a plus guère que les cerveaux empâtés et les intelligences suffoquées pour ne pas entendre les hoquets convulsifs de la grosse machine mondialisée, pour croire encore que tout va bientôt rentrer dans l’ordre. LEUR ordre.

Nos importants du G20, par exemple. De valses hésitations en retournements de vestes faux-cul, de faux-pas diplomatiques en erreurs grossières d’interprétation, leur attitude au fil des évènements montre à quel point ces considérables vaniteux pataugent tout autant que les potentats arabes qu’ils font aujourd’hui mine de lâcher.

N’est-ce pas les clés des portes du pétrole qui sont en train de leur échapper ? Leur autorité et la déférence dont ils croient devoir être investis qui sont battues en brèche ?

Les 26 et 27 mai, va se réunir près de chez moi, à Deauville, une énième sauterie de nos maîtres du monde, un G8. Dirigeants et diplomates ne manqueront pas une nouvelle fois d’ergoter, d’y aller de leurs « déclarations communes » creuses, de leurs conseils avisés aux mutins. (Lesquels, vous avez remarqué, n’ont d’ailleurs strictement rien à faire, ni des conseils, ni des conseillers.)

Un début d’année 2011 encourageant

Déjà, leurs forces de sécurité s’activent sur la région à préparer les périmètres interdits de circulation, les zones de filtration et de surveillance. A ménager la tranquillité et les aises des Sarkozy – « plus minable qu’on l’aurait cru » – et autres Berlusconi – « à bien des égards une parodie sinistre de Kadhafi lui-même » (les citations sont de Robert Fisk).

Imaginez que les 26 et 27 mai, des centaines de milliers de protestataires se mettent soudain en tête de converger vers la place Morny (à Deauville) aux cris de « dégagez ! » Croyez-vous que les escadrons de policiers et de gendarmes dépêchés sur site auraient une attitude plus avenante et civilisée que celles des sbires de Ben Ali, Moubarak, Kadhafi ?

Le dernier souci avec les révolutions, c’est qu’on ne sait jamais comment, quand, où et surtout avec qui elles vont s’arrêter. A ce stade, bien des incertitudes, bien des périls demeurent.

Mais le fait que des foules aient soudain le courage, le panache d’essayer d’échapper à l’insupportable joug des tyrans du moment réconcilient quelque peu avec une nature humaine qui se distinguait surtout, ces dernières années, par sa soumission suicidaire et une certaine veulerie.

A ce titre, ce début d’année 2011 n’en finit pas d’être encourageant