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Rubrique quotidienne ’les prisonniers"

Statut des Prisonniers Politiques Palestiniens

Par l’Association Addameer

jeudi 15 décembre 2005

Juin 2004
Rapport préparé par :

Association Addameer pour le Soutien aux Prisonniers et pour les Droits de l’Homme (Palestine) et Groupe Sumoud de Solidarité avec les Prisonniers Politiques (Canada)

I. Perspective Générale
A début de juin 2004, plus de 7 000 Palestiniens des Territoires Palestiniens Occupés étaient retenus par l’armée ou la police Israélienne en tant que prisonniers politiques. Ce nombre inclut 370 enfants Palestiniens (définis par un âge inférieur à 18 ans révolus en accord avec la Convention des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant) et 103 femmes Palestiniennes (parmi lesquelles des jeunes filles). Leurs conditions de détention sont tout à fait misérables et, dans certains cas, mettent leur vie en péril. La majorité de ces prisonniers sont détenus, en violation de la IVème Convention de Genève, dans des prisons situées en dehors de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza.
En plus des 7000 prisonniers et au-delà détenus par Israël, des milliers d’autres Palestiniens ont été détenus et relâchés depuis le début de l’Intifada en Septembre 2000.
Israël continue à pratiquer la torture et d’autres formes de mauvais traitements contre les prisonniers Palestiniens, y compris des séances de coups sévères, le fait d’être attaché pendant de longues durées dans des positions contorsionnées et douloureuses, des sévices psychologiques, de longues périodes de confinement solitaire, et des pressions pour forcer à la collaboration avec les forces d’occupation. Ces violences ne sont pas limitées à des Palestiniens de Cisjordanie et de la Bande de Gaza ; deux Palestiniens possédant la citoyenneté Israélienne ont récemment lancé une grève de la faim à la suite d’une détention de 54 jours, dans un centre de détention Israélien, dans des conditions inhumaines.
Des informations particulièrement préoccupantes portent sur la « Facilité 1391 », un centre de détention secret dont la localisation rapportée est dans le nord d’Israël, où des prisonniers ont déclaré avoir été violés et sodomisés par les interrogateurs.
Dans les prisons Israéliennes, les prisonniers Palestiniens sont fréquemment état d’attaques de la part des gardiens de prison, parmi lesquelles l’emploi de gaz lacrymogène à l’intérieur des cellules, des passages à tabac, le refus de nourriture ou de soins médicaux, et de longues périodes de confinement solitaire. Les femmes prisonnières rapportent qu’elles ont été complètement dépouillées de leurs vêtements et attachées par les gardiens de prison, nues, sur des lits de prison, les membres écartés, en confinement solitaire.
Un grand nombre de prisonniers Palestiniens ont un besoin urgent de traitements médicaux et cependant ne reçoivent pratiquement que les antalgiques les plus banaux. Les prisonniers rapportent que la fourniture de traitements médicaux est souvent utilisée comme une autre forme de coercition par les autorités des prisons.
Une attention grandissante a été apportée à la détention par Israël d’enfants Palestiniens. En 2002 le Comité des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant a soulevé publiquement la question du traitement par Israël des enfants Palestiniens prisonniers. Cependant, Israël persiste à arrêter et à torturer des enfants Palestiniens avec une ampleur sans précédent.
Les visites des familles aux prisonniers Palestiniens ont été presque impossibles depuis le débit de l’Intifada. Lorsque des visites ont eu lieu, les familles ont été contraintes de subir une série de contrôles intimes et humiliants avant d’être admis à la prison où leurs parents sont retenus. En outre, les prisonniers sont empêchés de communiquer avec leurs familles par téléphone. Les lettres sont autorisées mais ne peuvent être scellées et peuvent être lues par l’administration à tout moment.

II Répartition des Prisonniers et Conditions de Détention

Il y a environ 7 036 prisonniers politiques Palestiniens actuellement détenus par Israël. Ce nombre comporte 370 enfants Palestiniens et 103 femmes Palestiniennes.
Environ 700 de ces prisonniers sont retenus en détention administrative. Cela signifie qu’ils ne sont accusés de rien et qu’ils n’ont pas été confrontés à un procès. Les ordres de détention administrative peuvent être donnés pour une durée allant jusqu’à 6 mois, et sont renouvelables à l’expiration du délai. Certains prisonniers sont maintenus pendant des années en détention administrative.
Plusieurs centaines de Palestiniens en détention souffrent de problèmes médicaux graves pour lesquels Israël refuse de fournir un traitement. Depuis 1967, au moins 110 Palestiniens sont morts dans les prisons Israéliennes en raison de tortures ou de négligences médicales.
Dans de nombreux cas des professionnels de santé Israéliens sont complices dans la pratique de tortures et de mauvais traitements. Le 20 février 2003, une fille de 15 ans, Riham Mouasa a été atteinte par trois balles à un checkpoint Israélien près de Tulkarem. Elle a été emmenée dans un hôpital israélien où elle a subi une opération au cours de laquelle une partie de son grand intestin a été enlevée. Pendant deux semaines, elle est restée attachée par ses mains et ses jambes à un lit d’hôpital, empêchée de recevoir aucun visiteur et gardée nuit et jour par des soldats israéliens en armes. Elle a passé 7 mois en prison.
Les conditions sanitaires, notoirement mauvaises, dans les prisions israéliennes, et le refus de traitements médicaux adéquats sont utilisés pour faire pression sur les détenus afin de les pousser à collaborer. Dans une série d’entretiens avec 90 anciens prisonniers de la région de Bethléem en 1994, 90% des personnes interrogées ont déclaré que le refus de traitements médicaux a été utilisé par l’administration pour recruter des collaborateurs. Un enfant, détenu auparavant, déclara que les prisonniers étaient tellement conscients des menaces utilisées par les hôpitaux des prisons pour contraindre les détenus à collaborer que ceux-ci s’efforçaient de ne pas faire appel à des traitements médicaux de peur de passer pour des collaborateurs.
Il y a 24 centres de détention où des prisonniers politiques Palestiniens sont détenus par Israël. Ce nombre comporte 14 prisons et camps militaires, cinq centres de détention et d’arrestation, et cinq centres d’interrogatoire. Dix neuf de ces installations sont situées en dehors des Territoires Palestiniens Occupés, ce qui signifie que les prisonniers sont transférés illégalement en dehors des territoires occupés.
Les prisonniers qui ont été condamnés ou qui font l’objet d’ordres de détention administrative sont en général retenus dans une prison. Ceux qui sont en attente de jugement ou d’interrogatoire sont retenus dans un centre de détention. Les interrogatoires ont lieu dans le centre de détention ou dan l’un des cinq centres d’interrogatoire.
Certaines de ces installations sont des bâtiments, d’autres ne sont que des tentes dressées dans des camps militaires, comme la Camp Prison militaire de Ketziot dans le désert du Négev qui a été rouvert en 2002. Des tentes vieilles et élimées ont été dressées dans ce camp de détention, ce qui expose les détenus à des conditions climatiques extrêmes. Des huttes en zinc abritent des installations hygiéniques rudimentaires. Au Camp de Détention Militaire d’Ofer, situé au sud de Ramallah, des hangars au sol souillé d’huiles de vidange utilisés auparavant pour des véhicules militaires servent de zones de détention pour des centaines de détenus Palestiniens. Ketziot, Ofer et Megiddo sont infestés de mouches, de rats et d’autres vermines.
En plus de ces 24 installations, une prison secrète, connue sous le nom de « Facilité 1391 », est également utilisée par Israël. La « Facilité 1391 » est réputée pour ses méthodes de torture particulièrement sévères. La localisation précise de cette prison est inconnue, et les avocats ainsi que le Comité Internationale de la Crois Rouge n’y ont pas accès. Mustapha Dirani, qui a été récemment relâché de détention israélienne et qui a passé 8 ans dans la « Facilité 1391 », porte plainte contre l’état Israélien pour deux cas d’abus sexuel dont il a été victime alors qu’il y subissait des interrogatoires.
Tous les centres de détention sont extrêmement surpeuplés. Les détenus dorment souvent sur des planches de bois recouvertes d’un mince matelas. Les couvertures distribuées ne suffisent pas pour les besoins de chaque détenu, et sont souvent déchirées et souillées. La nourriture est de mauvaise qualité et insuffisante pour le nombre de détenus. L’accès aux toilettes est restreint et les détenus sont obligés d’uriner dans des bouteilles dans leurs cellules.

III. Arrestations, Tortures et Mauvais Traitements

Lors de l’arrestation, les détenus sont en général menottés de manière très serrée avec des menottes en plastique et leurs yeux sont bandés. Ils ne sont pas informés de la raison de leur arrestation et on ne leur dit pas où ils seront emmenés. Les brutalités et l’humiliation des détenus par les forces Israéliennes sont la règle après l’arrestation et au cours du transfert vers le centre d’interrogation et de détention.
« Environ 30 soldats ont envahi ma maison à 2heures 30 du matin le 17 août 2001. Ils ont fouillé la maison et mis la pagaille dans nos affaires, ont brisé les vitres et ont confisqué l’agenda téléphonique. Ils m’ont emmené sur le toit de la maison pendant deux heures et m’ont questionné sur les gens qu’ils recherchaient. Après cela, ils m’ont emmené dans la rue, m’ont bandé les yeux et m’ont attaché les mains avec des liens en plastique derrière le dos... Quand nous sommes arrivés à la jeep ils m’ont poussé à l’intérieur et ma tête a cogné le plafond. Mon frère Abed était à l’intérieur de la jeep.
Ils nous ont obligés tous les deux à nous asseoir sur le plancher de la jeep...Il y avait quatre soldats qui nous frappaient pendant le trajet qui a duré à peu près une demi heure. Ils juraient et nous insultaient pendant tout le voyage et nous menaçaient d’agressions sexuelles. Après quoi nous sommes arrivés au Camp Militaire où ils nous ont emmenés à la clinique. Ils nous ont mis dans une cour où nous étions attachés les yeux bandés. Nous avons passé toute la nuit dehors sans rien manger ni boire »
Depuis avril 2002, les détentions arbitraires de masse sont devenues une pratique courante pendant le couvre-feu. Addameer estime qu’environ 15 000 Palestiniens ont été détenus de cette façon au cours du seul mois d’avril 2002. Des jeeps israéliennes équipées de haut parleurs circulent dans les zones Palestiniennes pendant le couvre-feu et appellent tous les résidents masculins dans une certaine fourchette d’âges (d’habitude de 15 à 60 ans) à sortir de chez eux et à se rassembler à un endroit donné pour interrogatoire. Ceux qui sont retenus peuvent être gardés pendant des jours entiers, exposés aux intempéries, sans nourriture ni boisson adéquates, sans avoir le droit d’aller aux toilettes, battus et soumis à des exactions. L’emploi des arrestations de masse a continué au cours de 2004, y compris dans la bande de Gaza.
« On nous a mis les menottes et fait asseoir sur un sol de pierres. On ne nous adonné aucune nourriture, et lorsque nous avons demandé de l’eau ils l’ont versée sur nous. Les menottes étaient très serrées et lorsqu’on nous a ôtés les bandeaux sur les yeux à notre arrivée j’ai vu que des gens avec des mains noires et enflées. Nous avons dit aux soldats que ces menottes nous taillaient dans la chair, et ils nous ont dit qu’il n’y avait pas d’alternative. Nous avons commencé à pleurer et à hurler, et à les supplier de desserrer les menottes. Il faisait très froid et certains d’entre nous ne portaient que des T-shirts et n’avaient pas de chaussures. Nous n’avions pas le droit d’aller nous soulager aux toilettes. Vers 3 heures 30 du matin, nous avons commencé à grelotter et nos dents s’entrechoquaient de froid. »
Après l’arrestation, les Palestiniens sont emmenés dans un centre de détention ou d’arrestation avant de subir des interrogatoires. De nombreux témoignages déposés sous serment font état de prisonniers soumis à des tentatives de meurtre et de viol, jetés dans les escaliers les yeux bandés, parmi de nombreuses autres formes de tortures et de violences physiques. Les méthodes habituelles comportent :
- le passage à tabac, au cours duquel les détenus sont roués de coups
- le maintien de menottes pendant de longues périodes dans des positions contorsionnées. Parmi les exemples cités, être attaché à une très petite chaise, ou encore à un tuyau qui passe au plafond.
- l’exposition à une musique à tue-tête, ou à des hurlements sans fin
- la privation de sommeil
- le refus de nourriture, d’eau et d’usage des toilettes
- des menaces psychologiques et des pressions sur la famille proche
- l’encapuchonnage dans un sac lourd et sale parfois couvert d’urine ou d’excréments
- les abus sexuels ou la menace d’abus sexuels
- le confinement solitaire
- le refus d’accès aux soins médicaux pour des blessures subies au cours de l’arrestation (comme des blessures par balles)

IV. Procès-verbaux de Torture et Etudes de Cas

1. Mohammed Yassin, 25 avril 2004
« Ils m’ont emmené au poste de police et m’ont dit de me mettre à genoux sur le sol face au mur avec les mains liées derrière la tête. Chaque fois que j’essayais de reposer ma tête sur le mur ils m’en empêchaient. J’ai été gardé dans cette position pendant deux heures. Au bout de deux heures, un soldat a apporté deux morceaux de bois et a commencé à me frapper sur le visage et sur le dos pendant une heure et ensuite ils m’ont emmené dans la salle d’interrogatoire. Quand je suis entré l’officier m’a donné des coups de pied sur la hanche droite et m’a frappé au visage... Il m’a dit « veux-tu que je te traite comme un animal ou comme un être humain ? » Je lui ai répondu comme un être humain bien sûr. Il s’est assis sur sa chaise et a menacé d’ôter ses pantalons. »
2. Mohammed Abu Rish, 25 avril 2004.
« Quand je suis entré au poste de police ils m’ont emmené au second étage, les yeux bandés, et menotté. Haïm et un autre officier m’ont dit de m’agenouiller et de baisser mon dos. Mes mains étaient attachées au-dessus de ma tête et j’étais obligé de faire face au mur. Chaque fois que je perdais l’équilibre ils frappaient ma tête sur le mur ou sur la porte. On m’a gardé comme cela plusieurs heures puis emmené à l’interrogatoire où l’un des interrogateurs m’a frappé avec une cane sur le côté droit du cou. J’ai perdu l’équilibre et il m’a frappé à nouveau après qu’ils aient posé une question à laquelle je n’ai pas répondu. Je sentais que je ne pouvais plus respirer ni y voir clair non plus...L’officier m’a emmené deux fois à l’interrogatoire, chaque fois une heure et demie. Le même interrogateur me donnait souvent des coups de poing et me menaça avec sa cane qui était placée sur son bureau. J’avais l’impression que l’allais m’évanouir tout le temps où j’étais frappé sur la tête... Pendant l’interrogatoire, l’interrogateur écrivit une confession en Hébreu et m’obligea à la signer sans me fournir de traduction. A la fin de la confession, il avait écrit en Arabe que je n’avais pas été battu. Après cela, j’ai été conduit en jeep à « Etzion ». Pendant le transfert, le soldat me donna l’ordre de garder les mains levées. Lorsque je les baissais, l’étais violemment frappé sur le corps. Cela a duré pendant tout le trajet jusqu’à « Etzion »
3. ‘Adel Jamil Al Hidmeh, 8 novembre 2002
Pendant les cinq premiers jours de son interrogatoire, ‘Adel fut interrogé au cours de sessions de 8 à 10 heures, avec une interruption d’au plus une demi-heure, et le matin pendant 1 heure et demie à deux heures. Tout au long de son interrogatoire, ‘Adel fut empêché de dormir, il reçut des coups de poing et des gifles à toute volée sur le visage, avec les mains menottées placées devant lui. Il fut obligé de s’allonger sur le sol, avec les jambes qui passaient au travers du siège d’une chaise et à travers le dos de la chaise alors que ses jambes étaient attachées au dossier de la chaise pendant plusieurs heures d’affilée. On le força à s’accroupir les mains menottées derrière le dos pendant plusieurs heures d’affilée. On le força aussi à s’asseoir sur une chaise avec les mains attachées dan le haut à l’arrière du dossier d’une chaise placée sous son corps sur une table pendant huit heures. A d’autres occasions, ses interrogateurs attachaient ses bras juste sous ses épaules et serraient les menottes jusqu’à ce que la circulation du sang dans le bas de ses bras fut coupée. A de nombreuses reprises, ‘Adel s’est évanoui à la suite des tensions appliquées à son corps, n’étant réveillé que pour subir encore des coups de poing et des gifles alors qu’il était à terre, cependant que ses interrogateurs lui disaient qu’ils n’enlèveraient les menottes que lorsqu’il commencerait à parler des accusations portées contre lui et à travailler avec les interrogateurs. A un moment, ‘Adel perdit la capacité de remuer l’oeil gauche.
Pendant plusieurs jours par la suite, les interrogateurs de ’Adel se mirent à le torturer psychologiquement, menaçant de le déporter, d’arrêter son épouse, de mettre sa maison sous scellés et de la démolir, d’annuler sa carte d’identité de Jérusalem, de briser sa carrière académique à l’Université Hébraïque ainsi que celle de ses autres collègues arabes, et l’informant finalement que leurs existences avaient été détruites par sa faute.
Tout au long de l’interrogatoire, on lui déclara qu’il serait placé en détention administrative à moins qu’il ne reconnaisse ce que les interrogateurs voulaient. Un des interrogateurs menaça de le rendre personnellement responsable de la destruction de la destruction de sa vie et de celle de sa femme et de ses enfants, lui donnant personnellement l’assurance que sa réputation serait tellement noircie qu’il ne songerait plus qu’à se suicider. Une autre fois, ‘Adel fut informé que sa femme avait été arrêtée et qu’elle avait été incarcérée avec des criminels de droit commun. On le fit passer devant une pièce où sa femme était détenue afin qu’il soit persuadé qu’elle avait été arrêtée. (Sa femme avait été arrêtée à deux reprises pendant son interrogatoire, mais n’avait pas été retenue pour la nuit).
4. Anwar Mohammed, juin 2002.
« J’ai passé 40 jours en enfer. Il n’y a pas de mots pour décrire à travers quoi je suis passé. Ils m’ont fait subir toutes sortes de tortures, à commencer par la privation de nourriture et de sommeil, puis les coups, le confinement dans des conditions inhumaines dans une boîte de béton de 2 m sur 1 m20, en isolement pendant 19 jours sans fenêtres avec un trou dans le sol comme toilettes, avec des odeurs répugnantes, des araignées et des cafards rampant sur mon visage. Cette boîte est appelée « le cercueil ». Menaces de mort, privation de vêtements propres et chauds et de mes médicaments (je souffre de maux d’oreille chroniques), mauvais traitements psychologiques et tortures. La chaise où j’étais menotté et enchaîné la tête couverte d’un sac répugnant, étiré dans une position inconfortable pendant des jours d’affilée a fait enfler mes mains qui ont pris la taille d’un ballon et ont perdu toute sensation de toucher. J’ai perdu 20 kg. J’étais au plus profond du désespoir. Tout cela se passait alors que le consulat Américain était situé juste à quelques pâtés de maison de moi, et que notre drapeau Américain flottait par-dessus, haut dans le ciel. »

V. Procès et Condamnations

Les Palestiniens de Cisjordanie et de la Bande de Gaza sont jugés selon la loi militaire Israélienne, en vigueur depuis 1967. Il y a 1 500 règlements militaires qui gouvernent la Cisjordanie et plus de 1 400 qui gouvernent la Bande de Gaza. Le commandant militaire Israélien de chaque région émet des Ordres Militaires. Ces ordres demeurent souvent inconnus et souvent ne sont rendus publics que lorsqu’ils sont exécutés.
Selon les règlements militaires Israéliens, un Palestinien peut être détenu jusqu’à 8 jours sans que les militaires Israéliens informent le détenu de la raison de son arrestation et sans être déféré devant une juridiction. Les avocats sont empêchés de rencontrer leurs clients pendant les deux premiers jours de leur arrestation. L’armée n’est pas non plus tenue d’informer la famille des détenus de leur arrestation ni du lieu de leur détention. L’Ordre Militaire 1 500 du 5 avril 2002 a étendu cette durée à 18 jours. En Août 2002, la durée a été réduite à 12 jours, et le 4 août 2004, l’Ordre Militaire 1531 est revenu au nombre de 8 jours, et autorisé la détention d’une personne pendant 2 jours sans accès à un avocat. Les Ordres Militaires changent fréquemment, et sont décidés par le commandant militaire de chaque région pour servir les objectifs de son occupation militaire.
Les Palestiniens sont présentés à des cours militaires Israéliennes présidées par des juges et des procureurs désignés par les militaires Israéliens. Il n’en va bien entendu pas de même pour les citoyens Israéliens (y compris les colons qui vivent dans la Bande de Gaza et la Cisjordanie) qui sont jugés selon un système légal différent (loi civile Israélienne).

VI. Visites d’Avocats dans les Prisons Centrales

Les avocats Palestiniens sont confrontés à de nombreuses difficultés lorsqu’ils rendent visite à des prisonniers Palestiniens dans les prisons Israéliennes. Il n’y a pas de droit automatique de rendre visite à un prisonnier. Au lieu de cela, les visites doivent être coordonnées avec l’administration de la prison et une liste des noms de prisonniers avec les procurations doit être envoyée à l’avance. L’avocat doit alors attendre un jour ou deux pour obtenir une réponse.
Une fois arrivés à la prison, les avocats Palestiniens ne sont pas autorisés à attendre à l’intérieur du bâtiment de la prison. Ils doivent soumettre les noms des prisonniers qu’ils souhaitent rencontrer et attendre de longues heures à l’extérieur de la prison. Le 24 juin 204, l’avocat Mahmoud Hassan, d’Addameer, dut attendre plus de trois heures avant d’être autorisé à entrer dans la prison d’état de Shatta. Avant d’entrer dans la prison, les avocats sont soumis à une fouille personnelle, parfois menée de manière humiliante. Ils sont obligés d’ôter leurs chaussures pour qu’elles soient contrôlées électroniquement.
Récemment, des avocats n’ont pas été autorisés à conserver leurs serviettes avec eux à l’intérieur de certaines prisons comme la prison Askelan. Les visites sont menées dans des pièces spéciales rendant les échanges difficiles : le prisonnier et l’avocat sont séparés par une barrière physique. Ils ne peuvent pas communiquer aisément et directement, mais doivent utiliser un téléphone interne. Un gardien de prison comprenant l’arabe est d’habitude présent dans la pièce. Le garde prend souvent des notes, malgré plusieurs décisions de la Haute Cour Israélienne qui déclarent que cette procédure est illégale et que les gardes doivent rester à une distance où ils peuvent voir le prisonnier mais ne peuvent entendre la conversation entre le prisonnier et son avocat. Cependant, si un avocat informe un gardien de prison de cette règle, une confrontation est en général le résultat et le gardien argue que des ordres ont été donnés par la direction de la prison afin de contrôler la conversation, dans l’intention de restreindre la liberté pour le prisonnier et pour l’avocat de parler et d’arguer librement.
Beaucoup de protestations ont été présentées à l’administration des prisons à propos de ces conditions. Récemment, une pétition a été présentée à l’Attorney General et à l’Autorité Israélienne des Prisons à propos de la présence et du comportement des gardiens de prison dans la salle de visite. Les officiels ont répondu que les gardiens pensaient faire leur devoir mais qu’ils faudrait qu’ils mettent un terme à de tels comportements. Le 24 juin 2004, l’avocat d’Addameer, pendant une visite à un prisonnier dans la prison de Shatta, dut à plusieurs reprises interrompre sa conversation avec son client pour demander au gardien de s’éloigner. Le gardien s’éloigna mais revint pour écouter la conversation.

VII. Enfants Prisonniers

Trois cents soixante dix enfants Palestiniens sont actuellement détenus par Israël et plus de 2 500 ont été arrêtés depuis le début de l’Intifada en septembre 2000.
Le plus jeune détenu Palestinien en 2003-2004 fut Rakan Ayad Nasrat de Jéricho, qui a passé plusieurs mois en prison. Il fut arrêté le 29 septembre 2003 à un checkpoint à Bethléem et emmené dans une implantation Israélienne où il fut menacé de chocs électriques pendant son interrogatoire puis placé pendant 12 jours en confinement solitaire dans un petit local de 2m sur 2m. Il fut battu et assailli sexuellement. Il essaya de se suicider quatre fois, et à la suite d’une de ses tentatives il dut être hospitalisé pendant 2 jours. Dans une déposition recueillie par Defence for Children International/Section Palestine, Rakan déclara ceci :
« comme il n’y avait personne à qui je pouvais parler et que je me sentais incroyablement effrayé et terrifié, j’ai tenté de me suicider pendant que j’étais en confinement solitaire. Le 12 octobre, j’ai été transféré au camp de prison militaire d’ « Ofer ». Quand je suis arrivé, les soldates m’ont demandé d’ôter mes vêtements et je n’avais plus que mes sous-vêtements. Alors un des soldats m’a aussi enlevé mes sous-vêtements et a commencé à utiliser un détecteur de métaux sur mon corps nu. Pendant qu’il faisait cela, il utilisait son autre main pour palper mon corps en se concentrant surtout sur le dos et le bas. Ceci se poursuivit pendant un certain temps et je pleurais, craignant que quelque chose arrive. »
Avant et pendant l’interrogatoire, les enfants Palestiniens sont confrontés à une pression physique et psychologique extrême pour obtenir des aveux et fournir des renseignements sur les activités politiques d’autres Palestiniens. Le jeune Murad Abu Judeh, âgé de 17 ans, relate les exactions qu’il a subies avant son interrogatoire en décembre 2000 :
« [Un soldat masqué portant des vêtements civils] m’a fait sortir, m’a menotté et m’a mis un sac sur la tête. Il pleuvait. Un groupe de soldats a commencer à me donner des coups de poing et ils s’encourageaient les uns les autres à me battre ; ils parlaient en arabe afin que je puisse les comprendre. Après quoi deux soldats m’ont emporté et jeté dans une jeep. Je suis tombé sur quelqu’un d’autre dans la jeep - un autre prisonnier- et je lui ai fait mal. La jeep a commencé à avancer et un des soldats a commencé à nous frapper et à nous insulter jusqu’à notre arrivée au Centre d’Interrogatoire d’« Etzion »... Avant mon entrée en interrogation, un des soldats a menacé de revenir dans ma maison et de la détruire si je n’avouais pas. »
Un autre garçon de 17 ans, arrêté pour jet de pierres, a rapporté ce qui suit à B’Tselem, qui est une organisation Israélienne de droits de l’homme :
« Trois autres personnes masquées sont entrées dans la pièce. Ils m’ont bandé les yeux et mis un capuchon sur la tête... Ils m’ont donné des coups de pieds et des gifles. Ils m’ont battu avec un tuyau en plastique et avec tout ce qui leur tombait sous la main. Je ne pouvais rien voir car j’avais les yeux bandés. Je sentais juste les coups. Ca a duré dix à quinze minutes...Plus tard ils m’ont mis debout sur une chaise et m’ont menottés à un tuyau qui était fixé au mur. Ils ont ôté la chaise de sous mes pieds et m’ont laissé pendu en l’air, les mains menottées au tuyau et le poids du corps, pendu en l’air, tirant sur mes mains. Ils sont sortis de la pièce. »
Dans le climat de peur et d’exposition aux mauvais traitements physiques et à l’intimidation, la plupart des enfants avouent relativement vite, même s’ils sont innocents. Dans beaucoup de cas les enfants signent des aveux sans avoir une idée claire du contenu, d’autant que les aveux sont écrits en Hébreu, une langue que la plupart des enfants Palestiniens ne comprend pas. En fait, il y a beaucoup d’exemples qui avouent un délit pour éviter la torture ou d’autres formes de mauvais traitements.
Un autre élément particulièrement dérangeant avec ce type de coercition est la tentative d’obtenir par les enfants des informations sur des activistes de leur communauté ou même de recruter des enfants comme collaborateurs des forces d’occupation en contrepartie de sentences clémentes ou de remises en liberté rapides. Les enfants prisonniers politiques sont particulièrement vulnérables devant ce type de coercition. Bien que cet objectif de la détention des enfants par Israël soit bien connu dans les Territoires Occuppés, il est rarement évoqué en public. Un enfant a décrit son expérience de la torture en 1998 en liaison avec des tentatives de le recruter comme collaborateur :
« Les interrogateurs disaient « Si tu travailles avec nous on te donnera de l’argent et on te laissera partir, sinon on te donnera une peine très longue. » Quand j’ai refusé ils m’ont attaché à une petite chaise avec des pieds de 15 cm (une chaise de jardin d’enfants) les mains attachées derrière le dos, les pieds attachés à la chaise. Ils m’ont mis un sac répugnant, sans ventilation, sur la tête. On me plaçait dans cette position pendant 6 à 12 heures. D’autres fois j’étais mis en confinement solitaire. »
La durée des peines a également augmenté pour les enfants Palestiniens depuis le commencement de l’Intifada. Voici quelques exemples de peines prononcées en 2002
- un garçon de 17 ans reconnu coupable de jet de pierres, condamné à 20 mois de prison ferme et 24 mois avec sursis, et une amende de 1000 US$
- un garçon de 14 ans reconnu coupable de jet de pierres, condamné à 6 mois et demi de prison et une amende de 500 US$
- un garçon de 16 ans reconnu coupable de fabrication (non de jet) d’un cocktail Molotov condamné à 53 mois de prison ferme et 18 mois avec sursis de 5 ans.
- un garçon de 17 ans reconnu coupable de jet de pierres et d’un cocktail Molotov, condamné à 6 ans de prison ferme.

VIII. Femmes Prisonnières

En juin 2004, il y a 103 femmes Palestiniennes prisonnières des autorités Israéliennes. Ce nombre n’a cessé de croître au cours des années d’Intifada. C’est le plus grand nombre de femmes détenues par Israël en deux décennies.
Dix huit de ces femmes sont mères, deux d’entre elles (Mirvat Amin et Manal Ghanem) ont accouché en détention et continuent à vivre avec leurs enfants à l’intérieur de la prison. Il y a huit jeunes filles dans les prisons Israéliennes en plus d’un certain nombre de femmes qui ont passé l’âge de 18 ans alors qu’elles étaient emprisonnées.
Régulièrement, les gardiens de prison Israéliens entrent violemment dans les cellules des prisonnières, coupent l’électricité, ferment les fenêtres et attaquent les prisonnières. Les journaux, les livres et d’autres objets personnels sont confisqués. Les femmes détenues sont souvent placées en confinement solitaire pendant de longues périodes, dans certains cas plus de 30 jours. Elles sont régulièrement privées de temps de récréation en dehors de leurs cellules. Les punitions individuelles comme les restrictions de visites familiales ainsi que les amendes monétaires sont aussi utilisées.
Le 13 septembre 2001, des gardiens de prison ont envahi les cellules des trois filles prisonnières à Ramallah et ont exigé, sans raison, la remise de leurs affaires personnelles. Ils ont fait sortir de la pièce toutes les prisonnières de la pièce sauf la femme adulte prisonnière Amneh Muna. Selon la déposition d’Amneh, elle a entendu les autres filles hurler parce qu’elles étaient soumises à des coups violents. Amneh elle-même fut placée dans une cellule d’isolement et battue si sévèrement que l’infirmière de la prison décrivit son état comme très dangereux et exigeant un traitement immédiat. Son visage fut aussi arrosé de gaz lacrymogène.
Au cours de raids dans les cellules des prisonnières, les femmes détenues sont souvent complètement dévêtues et leurs affaires sont détruites.
Au matin du 25 octobre 2003, [Amneh] Muna fut transférée de sa cellule à le Prison de Ramallah vers une cellule d’isolement dans la même prison. Après une heure en isolement, u certain nombre de gardiens vinrent à sa cellule et lui ordonnèrent de se déshabiller afin qu’ils la fouillent. Selon le témoignage donné par Muna, les gardiens lui donnèrent le choix, ou bien d’ôter ses vêtements de sa propre volonté, ou bien de laisser un grand nombre de gardiens s’en charger. Elle refusa de se déshabiller, en particulier parce qu’il y avait des gardiens masculins dans la cellule. Les gardiennes lui dirent qu’elles feraient sortir les gardiens masculins derrière la porte pendant qu’elle se déshabillerait, mais elle refusa encore.
Les gardiens de prison sortirent alors, mais au bout d’une heure revinrent avec un grand nombre de soldats et de gardiens de prison, à la tête desquels un certain « Asher », qui commencèrent à agresser physiquement Muna, la forçant en même temps à se dévêtir et l’attaquant dans la cellule d’isolement avec des gaz lacrymogènes. Elle endura des coups violents au niveau de la taille, du dos et sur les mains. Selon le témoignage de Muna, l’un des gardiens, le nommé « Shabi », la saisit par la gorge et commença à l’étrangler, en même temps qu’il hurlait « Tu es une terroriste ! » Elle perdit conscience, et aussi sa bouche commença à saigner. A ce moment, Muna sentit que quelqu’un retirait « Shabi » en arrière.
Trois heures plus tard, elle fut transférée dans une autre cellule d’isolement et on lui donna un sédatif. Elle ne reçut pas d’autre attention médicale. Le directeur de la prison lui rendit visite dans la cellule d’isolation et l’informa qu’elle devrait rester 7 jours en isolement en l’accusant d’avoir agressé 3 gardiens de prison... La cellule d’isolation où elle est retenue à l’hôpital de Ramallah n’a pas de toilettes, et, pour aller aux toilettes ou prendre un bain elle doit être extraite enchaînée de la cellule d’isolation.
Beaucoup de prisonniers Palestiniens, y compris des femmes, se voient refuser les traitements médicaux dont ils ont besoin comme punition pour avoir protesté contre les conditions dans lesquelles ils sont détenus. Quelques exemples de femmes prisonnières qui, au milieu de 2004, avaient besoin d’une attention médicale urgente :
- ‘Amneh Muna (27 ans), souffrant d’ulcères et de douleurs dans la colonne vertébrale
- Souna ar-Ra’y (34 ans), condamnée à 12 ans de prison, et souffrant d’une grave maladie psychologique
- Asma’ Abu el-Hayja (40 ans), détenue administrative (retenue sans procès ni accusation), souffrant de cancer du cerveau
- Abeer Amr (22 ans), souffrant de graves douleurs dans la colonne vertébrale, et qui n’a reçu aucun traitement médical depuis deux ans
- Manal Ghanem (28 ans), souffrant de thalasémie
- Ilham Mughraby, souffrant d’un cancer.
Certaines femmes prisonnières ont été arrêtées afin de faire pression sur leurs époux. Ainsi Asma’ Abu el-Hayja par exemple, qui a 40 ans et qui souffre d’un cancer du cerveau, a été placée en détention administrative de façon à faire pression sur son mari qui est aussi en détention. Mme Ablaa’ Saadat a été arrêtée le 21 janvier 2003 alors qu’elle voyageait en qualité de représentante Palestinienne à destination du Forum Social Mondial au Brésil. Mme Saadat est l’épouse du Secrétaire Général du Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP). Elle a subi quatre mois de détention administrative à la suite de son arrestation. Un interrogateur lui a confié que son arrestation avait d’abord comme but de démontrer qu’« ils » pouvaient faire tout ce qu’ils voulaient. On lui dit également que si son mari « avait du sang sur les mains », ils tueraient ses enfants.
Pour protester contre leurs conditions de vie et les exactions continuelles de la part des gardiens de prison, les femmes Palestiniennes ont continuellement organisé des grèves de la faim et des démonstrations. Leur principale demandes ont porté sur : l’amélioration des conditions de vie à l’intérieur des prisons, des traitements médicaux adéquats, l’autorisation des livres et des journaux, l’autorisation que leurs familles apportent des vêtements dans les prisons et la fin des fouilles à corps approfondies.

Appendice I : Sélection d’Etudes de Cas
1. TYPE DE CAS : Exactions lors de l’arrestation (Fillette Palestinienne)
Su’ad Ghazal, du village de Sebastia, près de Naplouse, en Cisjordanie du nord.
Arrestation le : 13 décembre 1998
Date de naissance : 23 septembre 1983
Age lors de l’arrestation : 15 ans
Age actuel : 20 ans
Date de condamnation : 21 janvier 2001
Condamnation et accusation : Su’ad a été condamnée à 6 ans et demi de prison pour avoir donné un coup de couteau à un colon illégal Israélien.
Circonstances : le jour où Su’ad a été condamnée, la Jerusalem District Court a condamné Nahum Korman, 37 year, colon lillégal Israélien à 6 mois de travaux d’intérêt général pour avoir brutalement assassiné un enfant Palestinien de 11 ans, Hilmi Shawasheh, en 1996.

Sources : basé sur la déposition donnée par Su’ad à Defence for Children International/Section Palestine
Disponible online à : http://www.dci-pal.org/prisonweb/suad2.html
« Le matin du 13 décembre 1998, j’ai été arrêtée à l’entrée de l’implantation de Tsvi Shemron. Alors que j’essayais de quitter l’endroit, deux colons en vêtements civils sont sortis de deux voitures qui m’ont barré la route, m’ont assailli et ôté mon couvre tête. Ils m’ont battu sur tout le corps avec leurs mains et leurs pieds. Ils m’ont tenue par les mains et m’ont traînée sur une dizaine de mètres, et ils m’ont menée à l’intérieur de l’implantation. Là, une foule de colons et de soldats a commencé à me battre à coup de crosses de fusils et avec leurs poings et leurs pieds, tout en jurant et en me crachant dessus. Ceci dura environ 15 minutes pendant lesquelles j’ai souffert aux articulations et à la tête, où j’ai encore mal. »
« Plus tard, ils m’ont emmenée dans une jeep de patrouille, et là les soldats m’ont mise entre eux, mains liées derrière le dos, les yeux bandés. Pendant que j’étais dans la jeep, j’entendais les gens qui hurlaient et menaçaient de me battre, mais les autres dans la jeep les en ont empêché. Je ne savais pas où ils m’emmenaient à cause de mes yeux bandés. Ensuite, ils m’ont mis dans un autre véhicule. J’ai réalisé alors que les gens dans cette voiture étaient des investigateurs. Cependant, ils continuaient à hurler pour m’intimider alors qu’ils me posaient quelques questions. Plus tard, je suis arrivée à un endroit, et j’ai reconnu l’implantation de Kédoumime. Là, ils m’ont emmené dans une salle d’interrogatoire, en fait le bureau d’un soldat. En entrant, en raison des coups que je venais de recevoir, je ne pus me retenir de vomir. Deux femmes me fouillèrent à fond. Dans ce bureau, ils commencèrent à m’interroger, les mains liées derrière le dos et les yeux couverts. Je répondis à leurs questions. Mes menottes étaient si serrées que je me mis à saigner, alors je demandais aux interrogateurs d’arrêter l’interrogatoire et de me relâcher les mains. Ils refusèrent. Alors je cessai de répondre à leurs questions. L’un d’eux ôta alors la couverture de mes yeux, mais je refusai de répondre aux questions jusqu’à ce qu’ils me détachent les mains. Les marques des menottes restèrent sur mes mains pendant plus de quatre mois. Les interrogatoires duraient de 3 heures du matin à sept heures du soir. Pendant ce temps là, ils me déplaçaient d’une pièce à l’autre. Les interrogateurs cherchaient à me provoquer en proférant des grossièretés sur le peuple Palestinien et leurs leaders, Arafat, Yassin et Habbache. »
« J’ai passé les 17 premiers jours de mon arrestation dans une cellule d’isolement d’environ 1 mètre carré. J’ai passé mon séjour en isolement sans radio, sans TV et sans vêtements propres. Pendant la première semaine, en fait les dix premiers jours, je n’ai pas pu prendre de douche et ce n’est que lorsque je fus déplacée vers une autre cellule que j’ai pu le faire. Dans la cellule, il y avait des toilettes et je devais y passer 23 heures. Je n’ai eu aucun contact avec qui que ce soit et j’ai été complètement isolée du monde extérieur. La première fois que ma mère est venue me voir fut plus d’un mois après mon arrestation. Bien que mon père ait essayé ) plusieurs reprises de me rendre visite, il ne put le faire que sept mois après mon arrestation. »
2. TYPE DE CAS : Attaque par des gardiens de prison (femme Palestinienne prisonnière adulte)
Amneh Muna, déposition décrivant l’attaque subie le 12 septembre 2001par des gardiens de prison. Recueillie par l’avocat A. Pacheco à Ramallah - prison de Neve Tirtza.
Source : http://www.ppsmo.org/e-website/Reports-Lawyers/16-9-2001.htm
« A 9 heures 30 du matin, j’étais dans une cellule d’isolement séparée et j’entendais les autres femmes qui criaient à mon intention et qui pleuraient en suppliant les gardiens qui s’apprêtaient à me frapper. Je leur ai crié à mon tour de ne pas s’inquiéter. J’entendis alors que des gardiens masculins étaient entrés dans leurs cellules alors qu’elles étaient attachées sur les lits avec des menottes. Je commençai à hurler et à crier. Personne ne me répondit. J’avais si peur pour les femmes. Mais c’est mon droit de crier. J’étais toute seule, et personne ne venait à mon aide. Je jetai le tabouret contre la porte et il se brisa. Au bout d’une heure, ils enlevèrent les deux prisonnières de droit commun qui étaient dans la cellule voisine et me laissèrent seule dans la section. »
« Alors, des douzaines de gardiens armés d’Ayalaon et des gardes de Neve Tirtza - comme Yehudi Bafley, le chef de section ; Miri Weitzman, l’officier de sécurité, le directeur de la prison Ofer Malka, Limor et d’autres - ouvrirent la porte. Ils commencèrent à m’attaquer avec leurs boucliers en plastique. Je tentai de ma protéger. Tout ce que je réalisai ensuite est que j’étais sur le sol, protégeant ma tête - trois hommes me frappant sur la tête et sur le corps. »
« Ils répandirent du gaz sur mon visage. Je pensais que j’allais mourir. C’est Miri Weitzman qui le répandait. Je ne pouvais pas respirer et je hurlais. Un des policiers commença à écraser sa botte sur ma main et je me mis à saigner et je le suppliais d’arrêter. Ils me mirent face contre terre et continuèrent à me battre. Ils me prirent ensuite par les bras et les jambes et me traînèrent vers une autre pièce. Ma tête cognait sur le sol. Ma main saignait. Alors Miri m’en a répandu encore. Je pensais que j’allais mourir. »
« Ensuite ils me mirent sur le lit, ils attachèrent mes mains et mes jambes au lit - sans cesser de me frapper - tenant ma tête et mon cou dans une position qui me faisait suffoquer. J’entendis un officier dire « Ce n’est pas la peine de tant la battre - ça suffit » Les menottes en plastique étaient si serrées et j’étais dans une position si humiliante. Yehudit Bafley vit ma main saigner et elle me frappa encore. Je hurlai de douleur. L’infirmier dit aux gardiens que je saignais et qu’il fallait qu’elle s’occupe de moi. Miri Weitzman dit à l’infirmière de prendre soin de noter dans son rapport que mes blessures étaient dues au bris de la chaise et de ne pas rapporter que c’était dû aux coups qu’ils m’avaient portés. »
« Les coups et les attaques durèrent 20 minutes. Après une demi-heure, le directeur de la prison et un officier arrivèrent. J’étais en larmes et je lui dit que mon doigt était cassé et que j’avais besoin d’un médecin... L’infirmière ne me soigna pas. L’officier essaya de nettoyer le sang. Mon doigt était très enflé, bleu et saignant toute la nuit. Ils m’examinèrent alors que j’étais enchaînée au lit. Entre ce moment et aujourd’hui, trois jours sont passés et je ne suis pas sortie. J’ai été totalement bouclée dans la cellule. C’est la nuit dernière qu’ils m’ont apporté des vêtements propres pour la première fois...Elle a dit que j’étais en isolement pour 7 jours parce que, d’après elle, j’ai dit aux femmes prisonnières de ne pas se lever pour être comptées bien que je sois moi-même restée debout pendant tout le comptage. »
« J’ai peur de ce qui va arriver ensuite. Je suis terrifiée pour ma vie. Après ce qu’ils m’ont fait, il est clair qu’ils ont un long programme contre moi. J’ai essayé de coopérer et d’améliorer les conditions. Ils ne nous respectent toujours pas. »
3. TYPE DE CAS : Détention arbitraire (Palestinien adulte masculin)
Source : Amnesty International. Rapport : “Israel and the Occupied Territories : Mass detention in cruel, inhuman and degrading conditions,” Mai 2002. http://web.amnesty.org/library/Index/ENGMDE150742002?open&of=ENG-ISR
Ahmar Muhammad ’Abd al-Karim, 25 ans, arrêté dans le camp de réfugiés de Jénine le 9 avril 2002, a relaté comment tous ceux qui s’abritaient dans une maison avec lui sont sortis quand ils ont vu que les maisons étaient rasées au bulldozer autour d’eux.
« Il y avait environ 60 personnes dans le même bâtiment, il y avait trois femmes, un nouveau-né, et environ sept enfants et cinq vieillards... le bombardement reprit et la maison d’à côté était rasée au bulldozer. Les gens dans la maison décidèrent de partir plutôt que de faire face au bulldozer. Quand ils partirent, ils firent signe qu’ils se rendaient. Les FOI leurs dirent de s’asseoir sur le sol et de mettre leurs mains derrière le dos, et leurs mains furent attachées avec des liens en plastique. Les hommes furent séparés des femmes et emmenés 10 par 10 et reçurent l’ordre de ne garder que des sous-vêtements. Ensuite on nous donna l’ordre de parader en cercle. Nous n’eûmes pas les yeux bandés. Ensuite on nous fit marcher environ 20 mètres et séparés l’un de l’autre. »
« Alors que nous marchions, je vis une femme blessée qui n’avait qu’une jambe. Nous avons demandé aux FOI de l’aider et de faire venir une ambulance. Ils refusèrent et nous dirent de ne pas nous inquiéter. A ce moment, j’entendis des coups de feu venant de la gauche qui durèrent environ 10 minutes. Pendant cette période, les soldats Israéliens utilisaient les gens comme boucliers humains. Les soldats nous faisaient marcher devant eux, quelquefois avec eux, leurs fusils posés sur nos épaules. Au bout d’environ 10 minutes, on nous banda les yeux et on nous emmena dans un grand terrain. J’essayais d’enlever mon bandeau pour voir s’il y avait des amis avec moi. Je demandai ce qui était arrivé à la femme blessée et on me dit qu’ils avaient laissé la femme là-bas. On nous attacha alors ensemble par les mains par groupes de cinq. Il se passa alors environ 30 minutes...on nous fit asseoir sur le sol pendant environ 5 minutes. J’entendis un soldat dire de se mettre en colonnes par quatre. Il y avait un char derrière et un devant. Je les ai entendus. »
« Il était maintenant tard le soir. On nous rassembla dans un terrain et on nous fit asseoir en ligne. J’essayais d’ôter mon bandeau avec ma jambe. J’avais peur d’être écrasé par un char...ils commencèrent à nous frapper sur le corps et la poitrine avec les crosses de leurs fusils...après avoir été battus nous étions assis avec la tête sur les genoux, les bras dans le dos. Nous étions tous réunis dans un grand terrain près de la forêt de Bir al-Sa’adeh près des avant postes de Jénine. Nous étions tous réunis en sous-vêtements. Il faisait froid. Quand on demandait des couvertures, ils nous donnaient des coups. On ne nous donna rien à boire. Nous sommes restés là depuis environ minuit jusqu’à peu près 10 heures du matin. On nous emmena à Salem en bus ou quelque chose comme un camion avec des sièges. On nous fit descendre du bus un par un et on nous demanda nos papiers d’identité et nos noms. Ils commencèrent alors à rassembler des informations — les noms et des détails personnels. Un soldat demanda qui connaissait l’hébreu. Je levai la main. Ils ôtèrent mon bandeau. On me donna environ un gallon d’eau qui était chaude et me dit de la donner à ceux qui avaient soif. Il y avait là une trentaine d’hommes. Comme je connaissais l’hébreu, on me demanda de dire aux soldats qu’il y avait des blessés. Les soldats répondirent qu’on s’en occuperait plus tard. L’eau fut terminée avant que tout le monde ait pu boire. »
« Un soldat m’ordonna de dire aux autres que « vos combattants ne méritent pas de vivre — vous devriez mourir ». Je lui dit que « nous sommes venus pour nous rendre, nous sommes des civils ». Il commençait à faire très chaud et certains essayaient de s’allonger sur le sol mais les soldats nous dirent de mettre la tête entre les jambes. Il y avait un homme d’environ 68 ans qui refusa, alors les soldats le frappèrent à coup de crosses et de bottes. Nous sommes restés accroupis de la sorte d’environ 10 heures du matin jusqu’à la nuit. Nous n’avons pas pu nous détendre. Ce n’est que lorsque je versais de l’eau que j’avais le droit de changer de position. Nous sommes restés à Salem de mardi soir jusqu’à mercredi soir. Il y avait avec nous un homme qui souffrait du diabète mais il n’y eut aucune assistance médicale pendant cette période. On me relâcha à un poste à essence. Mes yeux étaient toujours bandés mais mes mains étaient menottées par devant. Quand j’ai quitté le bus, ils me dirent de ne pas retourner à Jénine ou dans le camp. »
4. TYPE DE CAS : Détention administrative (Palestinien masculin adulte)
Daoud Dirawi, du village de Nu’am dans la zone de Bethlehem. Daoud est un avocat spécialisé dans la défense du droit des enfants et il est coordonnateur du Programme de Justice Juvénile de Defence for Children International/Section Palestine.
Date de naissance : 23 août 1975
Date d’arrestation : 21 février 2003
Date de remise en liberté : 29 janvier 2004, dans le cadre de l’accord d’échange de prisonniers entre le Hezbollah et Israël
Daoud n’a jamais été inculpé ni jugé. Il a été retenu pendant presque un an sur base d’un ordre de détention administrative. L’ordre d’internement initial, de 6 mois, devait expirer le 23 août, mais il a été renouvelé pour 6 mois de plus.
Le témoignage qui suit est une compilation de deux documents : la déposition de Daoud remise à l’avocat de Defence for Children International/Section Palestine (http://www.dci-pal.org/free/affidavits.html) et une partie écrite par Daoud au cours de son emprisonnement (http://www.dci-pal.org/free/diaries.html).
« Je suis né le 23 août 1974 dans un petit village à l’est de Bethlehem. Le village est appelé Nu’man, par référence aux petites fleurs blanches qui poussent en Palestine au printemps ».
« Le 10 août 2001, comme je rentrais de vacances en Jordanie avec ma famille, je fus arrêté par les autorités Israéliennes et emmené au centre de détention d’Askalan. Au cours des deux mois où j’y ai été retenu pour interrogatoire, on m’a contraint, à plusieurs reprises, à adopter des poses de torture de position, on m’a menacé de mort et privé de sommeil. Un jour, en raison des brutalités que j’avais subies, je tombai lourdement et je me suis gravement blessé à la colonne vertébrale. On me conduisis à l’hôpital d’Al-Afula puis on m’assigna au centre de détention de Magiddo proche de là, sans jugement ni accusations spécifiques, et m’infligea un ordre de détention administrative de 6 mois. Les souvenirs de mon séjour en prison continuent de me hanter jusqu’à ce jour. Mais les cicatrices ne sont pas que mentales, et la douleur dans mon dos est un rappel toujours présent des mauvais traitements que j’ai subis et les médecins m’ont dit que je continuerais à souffrir pour le reste de mes jours. »
« J’ai été relâché de la prison de Magiddo en mai 2002 à l’expiration de mon ordre de détention administratif, et j’ai commencé à travailler sur la défense des droits des enfants. Le vendredi 21 février 2003, j’étais à Jérusalem où je logeais dans la maison de ma belle-mère. A 7 heures et demie du soir, je sortis pour acheter des médicaments pour ma fille, Mira, qui a deux ans. Les garde-frontières m’ont arrêté à Bab al-Zafira et m’ont dit que j’étais entré à Jérusalem sans permission. Ils m’ont emmené au poste de police d’Al-Qishle à la porte d’Hebron. Sur le chemin du poste de police, l’un de garde-frontières commença à m’insulter. »
« Quand j’arrivai au poste de police, je fus placé en garde à vue pour 24 heures. Je montrais alors des documents de « regroupement familial ». Les policiers dirent alors qu’ils avaient annulé mon arrestation, mais que la polie secrète avait décidé de m’arrêter pendant 12 jours. Pendant cette arrestation, je dis également au capitaine de police de quelle façon les garde-frontières m’avaient traités et il s’adressa à eux officiellement et mit un terme à leurs outrages. »
« Ensuite, les garde-frontières m’emmenèrent vers la jeep. Mes jambes et mes mains étaient liées. Ils m’emmenèrent au « checkpoint » du tunnel, au sud ouest de Jérusalem. Dans la jeep, il y avait un chauffeur et deux gardes-frontières, dont un nommé « Eyal ». Le soldat à côté du chauffeur continua à m’insulter. Lorsque nous atteignîmes le « checkpoint » du tunnel, il dit aux dolfats du « checkpoint » que j’étais un important terroriste qui venait d’être arrêté à Jérusalem. Après quoi l’un des soldats, qui avait à peu près 40 ans, vint du « checkpoint » et me frappa sur la tête. Ensuite la jeep qui devait m’emmener au centre de détention d’« Etzion » arriva et ils m’ôtèrent les menottes parce que les policiers voulaient les récupérer. »
« Il y avait un soldat nommé Strovosky qui me tira brutalement hors de la jeep et je tombai sur le sol. Il apporta alors une corde et m’attacha les mains si serré que cela faisait très mal. Il me poussa ensuite dans une cuvette d’eau et je tombai sur le visage et il apporta un morceau de tissu et m’aveugla. Je parvenais encore à y vois un peu sous le bandeau. Alors les soldats me frappèrent avec leurs poings et me donnèrent des coups de pieds et l’un d’eux versa sur moi de l’eau glacée. Au bout de 20 minutes, les garde-frontières revinrent et me donnèrent des coups de poing dans l’estomac et dans le dos. Ensuite ils me traînèrent et me jetèrent sur le plancher de la jeep. Strovosky vint et m’allongea sur le dos avec mes mains sous le corps. Puis il mit ses pieds sur mon visage et les autres me mirent les pieds sur le ventre. Après environ 2 km, Strovosky me dit en anglais de me tenir serré car il voulait ouvrir la portière et je pourrais tomber. Il riait. Il ouvrit alors la portière et je me poussai vers l’arrière de peur de tomber. »
« Après notre arrivée à « Atziun », on me laissa à l’extérieur pendant environ une heure. Ils m’emmenèrent ensuite pour un contrôle médical dans une grosse voiture. Pendant le contrôle, j’étais trempé à cause de la pluie. Ma pression sanguine était de 140/100 . Ils mentionnèrent dans le rapport que je souffrais d’une douleur dans le dos. Ensuite ils m’emmenèrent vers la voiture surélevée les mains attachées et les yeux bandés. J’essayais de monter dans cette voiture, mais c’était trop haut. Les soldats me tirèrent brutalement et mon visage heurta le coin du siège. J’avais la mâchoire disloquée. Ils me ramenèrent à la clinique où je restai une heure jusqu’à ce qu’ils me remettent la mâchoire en place. Quand je fus ramené au complexe d’internement d’ « Atziun », je devais prendre des médicaments, mais on ne m’en donna aucun. »
« J’ai eu les mains attachées et les yeux bandés entre 1 h et demi l’après midi et 10 h et demi du soir. Ils m’ont détaché deux fois pour aller aux toilettes et pour manger deux concombres. Pendant tout ceci, j’étais gardé dans une cellule extérieure. Il pleuvait fort et la cellule n’était pas couverte. Lors de la relève, un des soldats nommé Ashraf m’amena à l’intérieur sans que le capitaine le sache. Il me dit que c’était la procédure pour tous les prisonniers. Lorsque le capitaine, qui s’appelait Mike, arriva, on me banda les yeux et on me remit dans la cellule extérieure et mon visage heurta l’un des barreaux. Il m’insulta copieusement, surtout quand il apprit que j’étais avocat. »
« Ensuite il me mit dans une cellule avec 21 autres prisonniers. Elle faisait à peu près 5 m x 3m. Il y avait des matelas sur le sol, chacun partagé entre deux prisonniers. Le sol était trempé et il n’y avait pas assez de couvertures. La nourriture fournie pour 21 personnes était à peine suffisante pour deux. Nous étions très mal traités. Une des règles était que lorsqu’ils ouvraient la fenêtre, les détenus devaient se tourner vers le mur. Si l’un deux n’observait pas la règle, ils l’emmenaient mains liées et yeux bandés à l’extérieur de la cellule et se mettaient à le frapper pendant environ quatre heures. J’entamai une grève de la faim pour protester contre la situation et les hommes de deux autres cellules entamèrent aussi une grève de la faim. »
« On me transporta d’“Atziun” à “Ofer” avec 8 autres prisonniers. Nos mains étaient liées et nos yeux bandés et les soldats nous insultaient. Pendant la route, les soldats avaient une caméra, et ils visaient nos têtes avec leurs fusils pendant qu’un autre nous photographiait. »
« Aujourd’hui, mon village fait face à une crise. Il est sur le tracé dur mur de séparation Israélien. Avec la construction du mur, Nu’man va se trouver complètement isolé des zones environnantes et les résidents du village n’auront d’autre choix que de partir s’ils veulent subvenir le moins du monde à leurs besoins. »
5. TYPE DE CAS : Exactions graves (Palestinien masculin adulte)
Ghassan Jarrar, 42 ans, directeur des ventes dans uns compagnie commerciale, et ancien détenu administratif, a été arrêté dans sa maison de Ramallah à 11 heures du matin le 04 avril 2002.
Source : Amnesty International. Rapport : “Israel and the Occupied Territories : Mass detention in cruel, inhuman and degrading conditions,” Mai 2002. http://web.amnesty.org/library/Index/ENGMDE150742002?open&of=ENG-ISR
« A minuit environ ils m’attachèrent les mains et me bandèrent les yeux. J’entendis des soldats demander : « C’est quoi son statut ? » et la réponse « Il a du sang sur les mains ». L’un d’eux me battit sur la jambe avec un bâton. J’avais l’impression que ma jambe était cassée et je me mis à hurler. Ensuite le soldat sortit Au bout d’environ 10 minutes ils recommencèrent à me frapper. Ceci se répéta environ sept ou huit fois. Puis un soldat arriva et commença à m’étrangler avec un vieux torchon pendant que les autres soldats me donnaient des coups de pied sur tout le corps, et surtout dans la poitrine et dans les reins. Ils firent cela quatre ou cinq fois, et une fois je m’évanouis. Je repris conscience lorsqu’ils recommencèrent à me frapper à toute force sur la tête. A un moment, un autre soldat vint...Le soldat commença à me battre avec hystérie et arma un pistolet rt lr pointa sur ma tête. UN des soldats cria « Ne fais pas ça ! » et l’emmena de force. Ensuite le soldat me frappa la tête avec le pistolet. Il recommença cette séquence plusieurs fois. Je fus gardé dans cette situation jusqu’à environ 8 heures et quart du matin....[J’entendis les soldats parler de me tuer] A cet instant un bus arriva...Les soldats durent me porter pour que je puisse monter dans le bus. Le bus m’emmena au camp de détention d’« Ofer » prsè de Beïtunia... »
6. TYPE DE CAS : Conditions de détention (Palestinien adulte masculin)
Source : Amnesty International, Medical Concern/Detention Without Charge, Index Amnesty International : 15/030/2003 - 17 March 2003
Le Dr ’Abd al-Fatah Labadeh, arrêté par l’armée Israélienne le 11 mars 2003 et détenu sans accusation, décrit les conditions à Huwwara comme suit :
« Il y a environ neuf cellules dans la prison. Celle où j’ai été placé mesurait à peu près 3m sur 3 m, n’avait pas de lumière, pas de toilettes et contenait six autres hommes. Nous avions des petits matelas très minces qui étaient mouillés car la cellule était très humide. Il n’y avait pas de chauffage et la cellule était très froide. Il n’y avait pas assez de couvertures pour nous tenir tous au chaud. La seule lumière était celle d’une fenêtre qui ne mesurait pas plus de 50 cm sur 50 cm. Pendant que j’étais là-bas, on nous fit trois fois sortir de la cellule, pendant 10 à 15 minutes chaque fois. Nous étions obligés d’uriner dans des bouteilles parce qu’il n’y avait pas de toilettes, et la seule source d’eau était une petite bouteille qui était remplie au moment des repas...Les conditions sanitaires étaient déplorables. Nous ne pouvions pas nettoyer la pièce, il n’y avait pas de verres à boire et pas d’eau pour se laver. La plupart des hommes avaient des problèmes d’estomac comme la constipation, des crampes d’estomac et de l’acidité stomacale. »

Appendice II :
Nombre de Détenus et de Prisonniers dans les Prisons, Centres de Détention et d’Interrogations Israéliens (données fournies par Addameer, exactes à la date de juin 2004)
Prisons, centres de détention et d’interrogation Israéliens Nombre de
détenus Palestiniens Remarques
Camp Militaire d’Ofer 780 - compte 150-170
- tentes et hangars
- administration militaire
Ketziot (Ansar 3)
Désert du Negev 1200
- compte 500 détenus administratifs
- tentes
- administration militaire
Megiddo 1175 - pas de détenus administratifs (transférés à Ketziot)
- tentes et cellules
-administration militaire
Shatta 408 - autorité des prisons Israéliennes
Nafha 840 - autorité des prisons Israéliennes
Ha’sharon 70 - enfants masculins de moins de 16 ans en addition à d‘autres prisonniers
Ayalon 87 -------------
Gilboa 650 --------------
Telmond 50 - détenues féminines
- autorité des prisons Israéliennes
Bir Al Sabe’ 259
Hadarim 360 - autorité des prisons Israéliennes
Kfar Yuna 15 - autorité des prisons Israéliennes
Neve Tertza 45 - autorité des prisons Israéliennes
- détenues féminines
‘Askelan 400 - autorité des prisons Israéliennes
Prison de Ramallah 180
Hôpital de Ramallah 19 - autorité des prisons Israéliennes
Centre de Détention
de Qaddumim 41-45 - centre de regroupement et de répartition, comprtant un poste de police
- administration militaire
- beaucoup de mouvement
Centre d’Interrogation
de Huwarra 52 - le nombre de détenus fluctue constamment
- les détenus du nord de la Cisjordanie sont gardés à Dotan, Salem, Qadummim, et Huwwara
Centre de Détention
D’Etzion 57 - le nombre de détenus fluctue constamment
Centre de Détention
D’Erez 24 - le nombre de détenus fluctue constamment.
- détenus de la Bande de Gaza.
Centre de Détention
de Benyamin 70 - le nombre de détenus fluctue constamment
Centre de Détention
de Salem 50
Centre d’Interrogation
de Muscobiyeh
Centre d’Interrogation
d ‘Askelan
Centre d’Interrogation
de Petakh Tikva
Centre d’Interrogation
d’Al Jalameh 200
le nombre de détenus fluctue constamment dans ces centres d’interrogation