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PALESTINE OCCUPEE

Chronique quotidienne de l’occupation

Dimanche, 21 février 2010 - 20h08

dimanche 21 février 2010

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Numéro : 204

nombre d’entrées : 6

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Les habitants de la Vallée du Jourdain rejettent les restrictions d’un classement en Zone C

Les habitants du village de Jiftlik, dans la Vallée du Jourdain, ont défiés les restrictions imposées par l’occupation et réparé, aujourd’hui, des routes de leur village.

Les villageois rejettent les règles de construction et de planification imposées par les sionistes, qui empêchent les constructions et l’amélioration des infrastructures dans la plupart des endroits de la Zone C, qui représente 60% de la Palestine.

Selon le Comité de Coordination de la Lutte Populaire, les habitants ont été rejoints par le ministre Palestinien de l’agriculture, Ismaïl Deiq. Ils ont réparé environ un kilomètre de chaussée à l’intérieur du village.

Jiftlik est la principale agglomération de la Vallée du Jourdain.. Elle compte 5 000 habitants et est située en Zone C, qui, aux termes des Accords de piax d’Oslo, reste sous contrôle complet des sionistes jusqu’à ce qu’un accord définitif soit négocié.

Selon les accords d’Oslo, la Vallée du Jourdain toute entière est classée en Zone C, à l’exception de la ville de Jéricho.

Selon un rapport des Nations Unies de décembre 2009, len régime de planification très complexe et très restrictif de l’occupation rend toute construction Palestinien effectivement impossible dans à peu près 70% de l’ensemble de la Zone C, soit quelque 44% de la Cisjordanie.

Ce rapport, publié par le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA), a également déclaré que, rien qu’en 2009, l’occupation avait démoli 180 structures appartenant à des Palestiniens en Zone C, laissant 319 personnes sans abri.

Les bâtiments ont été rasés sous prétexte qu’ils n’avaient pas de permis de la part de l’Administration Civile, qui est la branche de l’occupation qui dirige la vie des civils dans l’essentiel de la Cisjordanie.

[ commentaires : comment ne pas comprendre qu’après toutes ces années de procrastination, de discussions sans fin, d’épandage de ce mélange de brutalité, de cynisme, et de mauvaise foi, le tout sous couvert de références aux Grands Principes Démocratiques, évoquant, souvent en plus habile, le pire du stalinisme, les gens en aient plus que par dessus la tête ?

Car enfin, quels sont donc ces crimes abominables qu’ont commis ces femmes, ces enfants, ces agriculteurs, ces artisans, ces commerçants, tout ce peuple enfin à qui on impose une punition qui n’a pas de fin ? Aucun en vérité, si ce n’est d’être les légitimes propriétaires de la Palestine. De toute la Palestine. Et donc, de porter témoignage, par leur seule présence, du brigandage dont leur peuple est victime depuis plus de 60 ans. ]

Bethlehem – Ma’an – 21/02/2010 15:07

http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=262867

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002

Manifestation de Ma’asara : les forces d’occupation ouvrent le feu sur les manifestants

Deux habitants ont été blessés par des balles acier-caoutchouc alors qu’ils manifestaient contre la confiscation de terres du village et de terres privées dans le village d’Al Ma’asa, au sud de Bethlehem, vendredi 19/02/10.

Des dizaines d’habitants du village et de militants pacifistes internationaux ont défilé depuis le centre ancien de Ma’asara en direction des terres confisquées, ont déclaré les organisateurs.

« Les habitants ont été violemment attaqués par les troupes coloniales qui ont lancé des grenades et tiré à balles acier caoutchouc sur les manifestants »n ont déclaré des militants anti-Mur après la manifestation, soulignant que les soldats avaient bloqué la route principale de sortie de village, qui conduit sur les lieux des confiscations de terres.

Des journalistes ont été molestés alors qu’ils essayaient de prendre des photos, a déclaré un porte parole de la manifestation pour les média.

[ commentaires : j’ai du mal à suivre. C’est tellement bien, tellement beau, tellement fort, tellement civilisé, tellement démocratique, ce qu’ils font. Ils ne devraient pas en avoir honte, mais s’en glorifier, au contraire, et remercier les journalistes qui immortalisent leurs glorieux exploits ! ]

Bethlehem – Ma’an – 21/02/2010 01:28

http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=262738

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003

Nouvelles restrictions de l’occupation sur Azzun Atma déjà complètement isolé

Les habitants d’Azzun Atma, près de Qalqiliya, encerclé par le mur d’apartheid sur deux côtés, par des colonies illégales sur trois côtés et un barrage routier au sud, disent que les forces coloniales stationnées dans le secteur ont récemment encore renforcé les procédures de sécurité.

Le conseil de village d’Azzun Atma a déclaré que les forces d’occupation ont retardé les heures d’ouverture du checkpoint situé au nord du village par lequel les résidents doivent passer pour accéder à leurs terres agricoles et se rendre à leurs lieux de travail à Qalqiliya et dans les villages alentour. Au lieu d’ouvrir à 4h30, le checkpoint ouvre maintenant une heure plus tard, ce qui empêche de nombreux villageois d’arriver à l’heure à leur travail ou à l’école.

Les fermiers disent que ce retard d’une heure sera particulièrement préjudiciable au fur et à mesure que l’été approche et que les heures matinales sont les plus fraîches. Les témoins rapportent que tous les matins, de longues files de travailleurs, de fermiers et d’étudiants s’étirent au checkpoint, chacun espérant passer le plus rapidement possible.

Les résidents d’Azzun Atma rapportent aussi que lorsqu’ils reviennent des villages voisins où ils sont allés faire leurs courses, les soldats les obligent à laisser leurs achats au checkpoint, sous prétexte que les quantités qu’ils ramènent au village excèdent ce qui est nécessaire pour un usage personnel, et qu’ils doivent avoir une autorisation d’achat pour ramener de plus grandes quantités.

Le checkpoint situé au sud, appelé par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires « Azzun Atme 2 », a lui aussi réduit ses heures d’ouverture, en plus de l’installation de détecteurs de métal et de nouvelles barrières, disent les villageois. Utilisé essentiellement par les fermiers qui ont des terres agricoles et des pacages au sud du secteur isolés par le barrage routier sioniste, ces mesures dites « de sécurité » reflètent le déploiement en augmentation de l’infrastructure militaire installée à d’autres grilles agricoles, comme celles de Khirbet Jubara.

Source : Maan News Traduction : MR pour ISM

[ commentaires : qui croient-ils tromper avec leurs pitoyables mensonges ? Vous imaginez aisément quelle menace sécuritaire pour tout l’est de la Méditerranée – au moins - peut représenter une métropole aussi considérable que Azzun Artma. Et qu’il est donc en effet essentiel de la soumettre à un contrôle sans faiblesse. Ah mais ! Leur véritable but, qui se voit comme le nez au milieu du visage, est bien entendu d’écoeurer les Palestiniens pour venir à bout de leur ténacité...]

ISM et Maan News - Qalqilia - 19-02-2010

http://www.ism-france.org/news/article.php?id=13451&type=temoignage≤sujet=Checkpoints

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004

Fiasco de Netanyahou à Moscou : le durcissement des sanctions contre l’Iran refusé

Il faut croire que la visite du Premier ministre sioniste Benjamin Netanyahou à Moscou n’a rien changé à la position russe. Après le départ du numéro un sioniste, les responsables russes ont renouvelé les mêmes déclarations qui avaient précédé son arrivée. A cet égard, le Kremlin a affiché vendredi une nouvelle fin de non recevoir à la demande « de sanctions paralysantes » chères au responsable sioniste. Selon le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, « le terme est inacceptable » pour la Russie.

Les seules sanctions acceptables, mentionne ce responsable russe, sont uniquement celles qui « doivent avoir pour but de renforcer le régime de non-prolifération », rapporte l’AFP.

La thèse avait été développée à plusieurs reprises par le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, selon lequel « il est important que le régime de non-prolifération soit respecté… C’est notre position commune avec les Etats-Unis. Nous ne sommes pas d’accord à 100% sur les méthodes de sa réalisation ».

Ce refus a été jumelé d’un autre concernant le système de défense anti aérien S300, que les sionistes et Occidentaux craignent de voir aux mains des Iraniens.

Réitérant la position de son pays exprimée la veille de la visite du responsable israélien, Ryabkov a rappelé la volonté de son pays de remplir son contrat avec Téhéran, attribuant les retards de livraisons à « des problèmes techniques liés à l’adaptation de ces systèmes ».

« Il est absolument erroné de mettre l’accent sur la question du S-300, (...) et des fournitures d’armements pour le transformer en un problème majeur, et le lier à la discussion sur le rétablissement de la confiance dans le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire de l’Iran », a expliqué Ryabkov ce samedi, rapporte l’agence russe Interfax.

Analysant la position de son pays sur ce dossier, le directeur du Centre des études contemporaines iraniennes à Moscou, Radjab Safarov, considère que dans son ensemble, elle reste inchangée, jugeant que c’est seulement le ton qui a changé.

« En dépit de ces déclarations menaçantes, il est très clair que la Russie n’apporterait pas son soutien à de nouvelles sanctions si le Conseil de sécurité devait se prononcer maintenant », estime-t-il.

« La Russie ne veut pas d’un cataclysme, dans la mesure où cela pourrait nuire à ses propres intérêts. L’Europe est loin de l’Iran, tandis que la Russie est quasiment un voisin », a déclaré Safarov à l’AFP.

Même son de cloche de la part de l’analyste russe Alexeï Malachenko, interrogé par l’AFP, selon lequel, « au fond, rien n’a changé dans la position russe ».

« Ce qui intéresse la Russie, c’est que la situation reste en suspens. Si Ahmadinejad cède aux pressions, la Russie sera d’abord glorifiée, mais ensuite son rôle sera minime, car on pourra continuer sans elle », explique M. Malachenko, du centre Carnegie.

Concernant la position iranienne, Malachenko considère que le président iranien « comprend le jeu de la Russie. Étant persuadé qu’elle allait faire marche arrière », en refusant finalement de se joindre à de nouvelles sanctions.

Bien entendu, ces analyses venant de l’intérieur russe discréditent une fois de plus les dernières allégations des dirigeants occidentaux (faisant état d’un ralliement de la Russie, en faisant croire entre autre que des sanctions seront votées le mois prochain), et qui à force d’être martelées sans jamais aboutir relèvent d’une guerre psychologique en perte de moyens.

Source : Al Manar

ISM et Leila Mazboudi - Russie - 21-02-2010

http://www.ism-france.org/news/article.php?id=13460&type=analyse

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005

Sumud : L’âme du peuple palestinien

Sumud désigne la qualité et l’expérience principale du Palestinien moderne, judicieusement rendu par la double signification de son équivalent anglais : détermination, ténacité.

D’un côté, il s’agit de préserver une présence dans le territoire Palestinien, et de l’autre, de conserver une présence temporelle en observant la patience. Le terme “en dépit” est aussi un élément essentiel. Sumud veut dire persévérer malgré toutes les oppressions et les épreuves auxquelles les Palestiniens doivent faire face.

Les exemples ne manquent pas : les paysans et les familles qui s’agrippent à leurs terres malgré les expropriations ou la construction du Mur, la mère qui continue d’élever sa famille en dépit des couvre-feux, les propriétaires qui reconstruisent « illégalement » leur maison pour l’énième fois, l’étudiant qui aspire à l’obtention d’un certificat, malgré les peines de prison ou le temps d’attente quotidien aux postes de contrôle pour aller à l’école ou à l’université, sans oublier de mentionner la continuité de la vie quotidienne malgré les massacres aux alentours, comme à Gaza.

En tant que projet national, Sumud souligne l’importance de préserver les communautés sur le territoire palestinien que soit ce soit en Cisjordanie, à Jérusalem, à Gaza ou dans les territoires de 1948. L’essence du Sumud : c’est résister à la continuité du sionisme et de la politique de l’Etat sioniste qui vise à denier et éliminer la présence palestinienne sur les terres, que ce soit en planifiant des mesures physiques et violentes, par une division sociale ou un anéantissement culturel. Sumud signifie supporter et ne pas abandonner les droits politiques et humains.

Sumud a acquis une importance parmi les Palestiniens parce que c’est l’affirmation de la présence collective sur le territoire. Elle reconnaît l’importance du nombre et de la portée démographique dans la décision de l’avenir du pays, mais sert aussi à soutenir le moral et à maintenir l’espoir. Nous sommes là et nous le resterons, mais pas en tant que peuple soumis. Peut-être que la domination extérieure de la Palestine pendant des siècles ou par des pouvoirs d’occupation a renforcé le caractère des Palestiniens et leur obstination, typique pour le trait insoumis du paysan à se cramponner à son territoire. En 2002, lorsque Moshe Yaalon le chef d’état-major de l’époque disait que « les Palestiniens doivent se faire à l’idée au plus profond de leur conscience qu’ils sont un peuple déchu », il avait sous-estimé le Sumud palestinien.

En tant que terme clé dans le discours national, Sumud a été introduit à la fin des années 70, lorsque le fond Sumud a été établi en Jordanie pour soutenir économiquement la présence des Palestiniens en Cisjordanie, à Jérusalem Est et à Gaza. Dans l’analyse politique des années 70 et du début des années 80, il s’agissait de garder la communauté palestinienne intacte lors de la construction de la communauté, alors qu’à cette époque, il n’y avait pas encore de grand mouvement de lutte soutenu contre l’occupation. Sumud a souvent été perçu comme la contribution à la lutte nationale par les Palestiniens qui sont restés en Palestine, complétant une lutte armée à l’extérieur.

Parmi les militants politiques, le débat que soulevait Sumud, était de savoir s’il ne fallait pas considérer le terme plus comme une forme de résistance trop passive voir même statique désignant un effort plutôt de survie que de défi de l’ennemi ? Mais pour de nombreux Palestiniens, aujourd’hui exister en Palestine est une forme de résistance. En effet, l’attitude du Sumud peut facilement être attribuée à des formes actives de résistance non-violentes qui, après tout, sont comprises comme une stratégie majeure autant théorique que pratique de refus de coopérer avec l’ennemi.

Le concept ressemble à d’autres utilisés dans la résistance de base contre la domination ; par exemple les paysans en Amérique latine où ils ont utilisé le terme comparable de « persistance implacable » pour se référer à leurs luttes pour la paix, la justice et la dignité humaine, combinant amour pour leur terre et de leurs communautés avec la protection active de leurs droits.

En même temps, le concept a voyagé au delà de la politique au sens strict du terme. Dans la culture, l’art et la conception palestinienne, Sumud est devenu un symbole par l’olivier qui est profondément enraciné à la terre par le cactus qui survit à la rudesse des circonstances et aussi par la femme palestinienne et mère comme symbole de la continuité et lien à travers les générations.

Ces symbolisations soulignent non seulement la force du Sumud, mais aussi l’amour pour leur terre souvent exprimé par les images silencieuses des communautés rurales, incluant celles détruites en 1948. La vie de la communauté rurale de la Palestine, dans l’ombre des oliviers et des figuiers. Lisez le poète national Palestinien Mahmoud Darwish pour les belles et douloureuses expressions de cette nostalgie.

Alors que peintures et poèmes créent des images, d’autres genre de supports tels que les journaux intimes et documentaires rapportent des récits témoignant des expériences du Sumud de nombreux Palestiniens. Des journaux intimes publiés tels que ceux de l’avocate Raja Shehadeh, de l’architecte Suad Amiry, et du pasteur Mitri Raheb véhiculent l’effort humain de garder le train de la vie quotidienne face à toutes les épreuves imaginables, petites ou grandes telles que les sièges, les couvre-feux permanents, les tirs de balles et de fusées et bien sûr les postes de contrôles.

Qui d’autre peut faire face à de telles circonstances sur une aussi longue période ? Parfois je dis à ma femme palestinienne : si des citoyens hollandais étaient amenés à être déportés collectivement pour vivre sous occupation, ils ne pourraient pas y survivre, même pas quelques jours.

En lisant des journaux palestiniens, vous pouvez sentir que Sumud est aussi une conception accueillante. Ce qui importe n’est pas seulement de continuer à protéger le bien-être physique de la famille, mais également les petites choses de base de la vie quotidienne : le café, l’accueil, les relations mutuelles entre voisins, le soin de la belle-mère. En fait, dans son premier journal intime avec pour titre la « Troisième voie » (1982), Shehadeh décrit le Sumud comme un troisième moyen entre la subordination à l’oppression d’un côté et être emprisonné de l’autre par le réflexe de la violence.

A son fondement, Sumud signifie garder son humanité et son âme et c’est cependant aussi une conception éminemment éducative. Entre injustice et oppression, lutter pour ses droits, mais rire, observer l’espoir et même garder la foi en l’humanité, c’est ce qui prévaut encore dans la vie palestinienne, malgré les circonstances impossibles où rien de moins que l’existence d’une belle communauté est en jeu.

Toine van Teeffelen est anthropologue et Directeur de Développement l’Institut Arabe d’Education (AEI-Open Windows) à Bethlehem. Contact : tvant@p-ol.com

Octobre 2009 - This Week in Palestine - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.thisweekinpalestine.com/...
Traduction de l’anglais : Sarah Bouachacha

Info-Palestine - Toine van Teeffelen – samedi 20 février

http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=8196

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006

Bir al-Idd, le retour

Quelques vêtements sèchent au grand air, les animaux cherchent l’herbe qui pousse entre les pierres après les premières et rares pluies de l’hiver, l’âne se repose avant de commencer à transporter des pierres d’un endroit à l’autre pour dégager et habiliter cette partie du versant de la montagne.

Les petites filles courent et jouent à l’air libre, leurs mères réparent et rangent les grottes et les tentes que la Croix Rouge Internationale et les Nations Unies leur ont données. Abu Naser, Abu Ali et el Hajj Issa se reposent hors de la grotte, observant le magnifique paysage qui nous entoure. Assis sur la dernière montagne qui nous sépare des immensités du désert du Nakab, les coups de feu et les explosions retentissent dans mes oreilles. Tons marrons, ocres, jaunes, montagnes escarpées et rocheuses, les lumières et les édifices de la ville israélienne de Aarat au loin, à quelques kilomètres au sud, la ligne verte comme si elle avait été tracée au pinceau dessine la route, à l’Est la Mer Morte, derrière, la cordillère jordanienne. Tout ce que nous pouvons observer à l’horizon est le désert du Nakab. D’étranges cercles et rectangles d’un vert intense me surprennent ; je questionne Abu Naser, il me répond : « légumes, arbres fruitiers, orangers et citronniers », ça me rappelle certaines photographies que j’avais vues, il Sabrina et Um Naser nous servent un thé très sucré et nous continuons à observer le paysage.

Le 8 novembre 2009, neuf familles palestiniennes retournent à Khirbet Bir al-Idd, dans les montagnes du sud d’Al-Jalil [1], dans ce qu’on appelle la zone C de la Cisjordanie. L’histoire de Bir al-Idd est incroyable, les Romains s’étaient déjà intéressés à la région et s’y installèrent grâce à l’existence d’une source qui approvisionnait toute la région en eau. En 1948, le plan systématique de nettoyage ethnique sioniste, qui détruisit plus de 800 villages de la Palestine historique, toucha également la région de Bir al-Idd. Garatin, le plus grand village de ce territoire fut démoli en 1948 et ses habitants se réfugièrent à Jinba, Bir al-Idd et dans d’autres villages alentour.

En 1954, des terroristes de la Haganah (qui formèrent par la suite l’armée sioniste), associés avec les groupes terroristes du Stern et de l’Irgoun, envahirent Jinda, assassinèrent quatre hommes du village, parmi eux, le père d’Abu Naser et sa famille fut obligée de se réfugier dans le village de Yatta. Le père d’une des quatre épouses d’Abu Ali fut assassiné le même jour à Jinda et sa famille dut se réfugier à Dar Airat. On conserve encore les ruines d’un puits romain et le souvenir nostalgique de l’aqueduc qui transportait l’eau jusqu’à piscine de Jinda, au pied de la montagne, jusqu’à ce qu’en 1985 les 40 maisons, 3 commerces, une mosquée, la magnifique piscine romaine et ce même aqueduc soient complètement démolis par l’État sioniste, prétextant qu’il s’agissait d’une zone fermée d’entraînement militaire. Les habitants durent à nouveau se réfugier, certains d’entre eux pour la deuxième fois, dans des villages comme Bir al-Idd, contraints de se déplacer de plus en plus au nord. En novembre 1999, l’armée sioniste a délogé et détruit les tentes et les grottes qui constituaient le village de Bir al-Idd et les 15 familles qui y habitaient ont été expulsées de force.

N’arrivant pas à se résoudre à abandonner la terre qui légalement leur appartenait, elles revinrent en janvier 2000 et conservent de nombreux documents de l’Empire Ottoman et du Mandat britannique qui prouvent leur droit de propriété. Mais quelques mois plus tard, l’armée et les agressions constantes des colons (décimant le bétail, brûlant les petites cultures et mettant le feu aux tentes et aux grottes, attaquant la population avec des chiens, bloquant les routes et les points d’accès aux chemins qui reliaient les petites villes, contaminant les puits d’eau...) qui occupèrent la zone dans les années 80 les expulsent à nouveau. Ils se réfugient à nouveau dans les villages voisins de Yatta, Tuwani, Dar Airat, Karmil i Ma’hin.

Après une longue bataille judiciaire entre avocats et procédures, en janvier 2009, la Cour Suprême de Justice sioniste déclare que les habitants de Bir al-Idd pourront repeupler la région en juillet 2009 mais qu’il leur sera interdit de bâtir des maisons ou autres constructions, de construire des systèmes de canalisation d’eau ou d’accéder au réseau électrique. El Hajj Issa explique comment ces conditions les empêcheront d’avoir un mode de subsistance et de développement moderne, de pouvoir satisfaire leurs besoins de première nécessité en eau, assainissement, électricité et logement. Malgré cela, le 8 novembre 2009, soit dix ans après avoir été expulsés, ils sont dans leur droit et décident de revenir ; ils repeuplent les grottes, dressent des tentes en plastique précaires et adoptent le mode vie rural et semi-nomade de leurs parents. Dans différentes zones de Cisjordanie, des populations semblables semi-nomades ont été forcées en 1967 à se déplacer et se réfugier quand le régime sioniste occupa ces zones, après la guerre des six jours. Toute cette région fait partie de la zone qu’on appelle la Zone C.

En 1993, les accords d’Oslo aboutirent à la fragmentation de la Cisjordanie en zones A, B et C. La zone A passa sous le contrôle de l’Autorité Palestinienne, c’est le cas de Ramallah, Naplouse, Tulkarem et d’autres villes Palestiniennes, bien que seulement 17% de la superficie totale de la Cisjordanie soit définie comme telle et les incursions de l’armée sioniste sont habituelles. Le contrôle de la zone B, représentant 23% du territoire fut partagé, l’Autorité Palestinienne détient le contrôle civil et le régime sioniste le contrôle administratif. La zone C qui occupe 60% de la totalité de la Cisjordanie est sous le contrôle absolu des sionistes qui poursuivent ainsi le processus de nettoyage ethnique et l’annexion du territoire perpétués par l’état sioniste.

Aussitôt que les habitants de Bir al-Idd décidèrent de retourner sur leur terre, des activistes internationaux de ISM (International Solidarity Mouvement) et Ta’ayush décident de les accompagner et vivent parmi eux. Abu Naser demande comment fonctionne la caméra vidéo que B’tselem leur a donnée pour pouvoir filmer les attaques des colons. Ses mains puissantes et endurcies jouent avec les boutons et nous faisons des essais, el Hajj Issa filme le désert et à nos pieds les tentes désordonnées qui constituent l’ancien village de Jinba. Une organisation espagnole a financé les quatre réservoirs d’eau qui les approvisionnent et Ta’ayush a installé une plaque solaire pour recharger les téléphones mobiles et la batterie des caméras vidéo. Chaque jour, Abu Naser, dès les premières lueurs du jour, sort faire paître les moutons, il porte la caméra vidéo autour du cou et des activistes l’accompagnent.

Depuis 50 jours qu’ils sont ici, ils ont été attaqués par les colons qui les entourent, par le sud la colonie Lucifer i Magen David (appelée aussi Mitzpeh Yair) tente d’empêcher qu’ils repeuplent la région. Ces agressions ont donné lieu à des affrontements avec les soldats qui les contrôlaient à divers endroits. El Hajj Issa fait remarquer qu’il n’a pas peur, « je dors tranquillement dans la grotte, c’est ma terre, regarde les colons », dit-il, « des clôtures et des services de sécurité privés entourent et patrouillent sans cesse dans leurs colonies et pourtant ils continuent d’avoir peur, moi mon âme est propre, c’est ma terre, ce sont eux les occupants, les sionistes colonisateurs, les voleurs, les assassins ».

Le 4 janvier 2010, l’administration sioniste d’Al-Jalil et son armée arrivèrent à Bir al-Idd avec des documents qui déclaraient que toutes les tentes de Bir al-Idd étaient illégales et que celles-ci devaient être démontées, dans le cas contraire les bulldozers de l’armée se chargeraient de leur destruction. La population doit se limiter à vivre dans les grottes qui furent détruites en l’an 2000 par cette même armée. Les familles de Bir al-Idd ont porté le cas devant les tribunaux ; le juge a reporté l’affaire. La bataille légale ne fait que commencer et l’État sioniste essayera par tous les moyens possibles d’expulser à nouveau la population de Bir al-Idd. Avant de nous lever pour continuer à travailler et après trois verres de thé sucré, Abu Naser me regarde et me fait remarquer, « sans vous, nous ne pourrions pas repeupler notre terre. Je veux mourir chez moi, à présent ils ne pourront plus m’obliger à partir. ».

[1] Al-Jalil est le nom arabe que nous utiliserons pour faire référence au nom hébreu de la ville d’Hébron.

De la même auteure :
Israël et le réseau routier de l’Apartheid - 29 janvier 2010
Bikaf ! Ça suffit ! - 22 janvier 2010

28 janvier 2010 - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.rebelion.org/noticia.php...
Traduction de l’espagnol : Yolande Renedo
Info-Palestine - Ariadna Jove Marti - Rebelión – dimanche 21 février 2010

http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=8207