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OPINION

Barak : deux Etats ou le risque de l’apartheid.

Jeudi, 28 janvier 2010 - 16h02

jeudi 28 janvier 2010

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Barak : deux Etats ou le risque de l’apartheid.

L’impasse dans laquelle se trouve depuis des années le processus de paix israélo-palestinien constitue un plus grand danger pour Israël qu’une bombe nucléaire entre les mains de la République islamique d’Iran : c’est le ministre israélien de la défense, Ehoud Barak, qui a avancé cette affirmation mardi lors d’une conférence à Tel Aviv. Même si elle a semblé surprendre certains auditeurs, cette analyse n’est pas aussi originale et iconoclaste qu’il y parait.

En juin 2009, alors que la rumeur circulait déjà d’une possible frappe israélienne sur des sites nucléaires iraniens, l’un des anciens patrons du Mossad, Ephraim Halevy, qui a dirigé les services secrets israéliens de 1998 à 2002, expliquait à l’auteur de ces lignes, à Tel Aviv, qu’une « bombe atomique iranienne ne constituerait jamais une menace existentielle pour Israël, que personne ne constituait une menace existentielle pour Israël, pour aune raison simple : Israël, qui est l’une des plus grandes puissances de la planète dispose de tous les moyens nécessaires pour assurer sa protection et pour dissuader un éventuel agresseur ».

Ce qui est frappant, c’est que la déclaration d’Ehoud Barak a eu lieu au lendemain de la publication par la presse allemande d’informations selon lesquelles l’Iran est désormais capable de fabriquer une bombe atomique dans un délai d’un an. Manifestement partisan - comme nombre de militaires israéliens - d’une combinaison de menaces et de sanctions, à condition que les deux soient crédibles, Barak a répété un discours désormais connu : « L’Iran ne s’est engagé dans les négociations que pour gagner du temps, a-t-il affirmé.

La mise sur pied d’un calendrier court et clair d’imposition de sanctions à Téhéran est vitale. Et l’enrichissement d’uranium sur le territoire iranien ne doit pas être permis ».

"Le temps n’est pas avec nous "

Alors qu’il s’apprêtait à partir pour l’Egypte, où il devait aborder avec le président Hosni Moubarak le dossier Gilad Shalit, la coopération égypto- israélienne contre la contrebande d’armes avec la bande de Gaza, et le blocage du processus de paix israélo-palestinien, Ehoud Barak a expliqué à son auditoire : « le temps n’est pas avec nous. Nous devons garder les yeux ouverts et être prêts à agir au cas où une fenêtre d’opportunité pour faire la paix avec les Palestiniens se présenterait et nous permettrait d’arriver enfin à deux Etats pour deux peuples ».

« Chacun doit comprendre, a poursuivi le ministre de la Défense israélien que s’il n’y plus qu’une seule entité politique appelée Israël entre la Méditerranée et le Jourdain elle sera nécessairement soit non juive soit non démocratique et nous nous transformerons en un Etat sous régime d’apartheid. » Rien ne montre pour l’instant que l’analyse de Barak, sur le risque de voir Israël se transformer en un régime d’apartheid, si les négociations ne permettent pas de créer un Etat palestinien, soit partagée par le premier ministre Benyamin Netanyahou et sa majorité.

Tout en répétant qu’il était prêt au dialogue, le premier ministre israélien n’a pas fait, pour l’instant le moindre geste indiquant une volonté concrète de participer aux discussions techniques proposées par George Mitchell pour « créer un climat de confiance ». Idées que Mahmoud Abbas a décidé de soumettre aux responsables égyptiens, jordaniens et saoudiens, pour sonder leurs réactions et éviter de se retrouver à découvert, s’il donne suite à la proposition formulée dimanche par l’émissaire américain avant son départ.

Si les Etats-Unis, leurs alliés arabes et l’Union européenne, visiblement alarmés par l’échec du voyage de Mitchell, affirment qu’il est plus que jamais nécessaire de convaincre les deux parties de reprendre leurs négociations, les pressions, en réalité, semblent se concentrer surtout sur les Palestiniens.

Citant des sources égyptiennes, le journal londonien Al-Quds Al-Arabi affirmait mercredi que Le Caire avait menacé Mahmoud Abbas de se retirer du dossier palestinien s’il ne renouait pas le dialogue avec Israël. Selon des sources diplomatiques arabes, le président égyptien n’aurait pas réellement l’intention de prendre ses distances mais, lassé de l’intransigeance israélienne autant que des hésitations palestiniennes, il aurait demandé aux Etats-Unis de donner au président palestinien des garanties claires sur la nature de la position américaine, pour l’inciter à revenir à la table de négociations.

Ces garanties pourraient comprendre un engagement à créer l’Etat palestinien dans les frontières de 1967, et à négocier chacun des changements qui pourraient être réclamés par les deux parties. L’engagement devrait aussi porter sur le choix de Jerusalem-Est comme capitale de l’Etat palestinien.

"Pas de négociations tant que les colonies se développent"

« L’Autorité palestinienne n’a pas l’intention de succomber aux pressions américaines et israéliennes et ne reprendra pas les négociations tant que le développement des colonies se poursuit et que Jerusalem est occupé », a prévenu mardi Nabil Sha’ath, membre du Conseil central du Fatah, proche de Mahmoud Abbas.

Nabil Sha’ath, qui fut l’un des négociateurs des accords d’Oslo, puis l’un des ministres des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne, estime que reprendre les négociations dans ces conditions serait une perte de temps et servirait de couverture à la poursuite de la colonisation.

Interrogé jeudi par la télévision russe, Mahmoud Abbas a confirmé les propos de Sha’ath. Il a ainsi répété qu’il ne pourrait accepter de reprendre les négociations avec Israël tant que les travaux de construction dans les colonies de Cisjordanie et de Jerusalem-Est continueront.

« Si Israël déclare, à la reprise des négociations qu’il n’accepte pas les frontières de 1967 et qu’il n’est pas disposé à discuter de Jerusalem et de la situation des réfugiés, de quoi allons nous parler, s’est-il interrogé. Et si je commence à négocier avec les Israéliens tandis que les chantiers à Jerusalem-Est continuent, les Israéliens diront que Jerusalem est à eux. Pourquoi accepterais-je de discuter pendant que les constructions à Jerusalem-est se poursuivent ? »

Quant au premier ministre palestinien, Salam Fayyad, de passage à Paris, il a rappelé à François Fillon que l’Autorité palestinienne était prête à parler de paix mais qu’elle avait besoin d’un interlocuteur capable d’accepter les exigences de la communauté internationale. Allusion transparente à Israël qui, après avoir ignoré de nombreuses résolutions de l’ONU, n’a pas respecté les demandes de la Feuille de route, notamment en matière d’arrêt de la colonisation.

« Construire les institutions d’un Etat palestinien est notre responsabilité première, a-t-il affirmé, faisant allusion au programme dont il a entrepris la mise en œuvre, avec le financement de la communauté internationale, mais ce n’est pas un substitut à la fin de l’occupation ».