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Nadal Tamir, consul général israélien à Boston. Son « mémo interne »se retrouve sur la place publique ! ( ndlr)

Réveils tardifs (titre anodin - contenu essentiel -ndlr)

par Mmida Ben Romhane - Tunis - Mardi, 11 août 2009 - 10h24 AM

mardi 11 août 2009

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Il est, dit-on, un diplomate chevronné, largement respecté et que ses vues ont « une influence considérable » sur le processus de décision politique en Israël. Il n’avait peut-être pas l’intention de faire parler de lui, ni de mettre en difficulté le gouvernement israélien et son chef, mais son « mémo interne » a trouvé sa voie vers la presse israélienne, et de là vers la presse internationale.

Lui, c’est Nadal Tamir, consul général israélien à Boston. Son « mémo interne » était destiné à son patron, Avigdor Lieberman, ministre des Affaires étrangères, lui-même censé le transmettre à son patron, Benyamin Netanyahu. On ne sait pas si celui-ci a reçu le mémo de Tamir avant qu’il ne tombe entre les mains des journalistes, ou il a pris connaissance de son contenu comme tout le monde à travers la presse. Une chose est sûre, en lisant le texte rédigé par son consul à Boston, Netanyahu a dû piquer l’une de ces colères noires qui vous transforme un homme en une boule de nerfs.

« La manière dont nous sommes en train de gérer nos relations avec l’administration américaine provoque un dégât stratégique pour Israël. La distance entre nous et l’administration américaine a des conséquences claires sur le pouvoir de dissuasion d’Israël (…). Il y a des éléments politiques israéliens et américains qui s’opposent à Obama sur une base idéologique et qui sont prêts à sacrifier la relation spéciale entre les deux pays au profit de leur propre programme politique. (…) Il y a toujours eu des différences entre les deux Etats sur la question des colonies, mais il y avait toujours un degré de coordination entre les gouvernements. Maintenant, aux Etats-Unis, on sent qu’Obama est forcé de faire face à l’obstination de l’Iran, de la Corée du nord et d’Israël. »

Ces quelques idées exprimées par le consul israélien à Boston ont dû secouer profondément Lieberman et Netanyahu. Ces deux là devaient s’attendre à tout sauf à ce que l’un des leurs mette dans le même paquet Israël, l’Iran et la Corée du nord. Mette dans le même sac Mahmoud Ahmadinejad, Kim jong il et Benyamin Netanyahu.
On comprend l’empressement d’Avigdor Lieberman de convoquer Nadal Tamir pour qu’il s’explique sur son mémo. Les choses sont pourtant d’une clarté indiscutable. Tamir inclue visiblement Lieberman et Netanyahu parmi « les éléments politiques israéliens et américains qui s’opposent à Obama sur une base idéologique et qui sont prêts à sacrifier la relation spéciale entre les deux pays au profit de leur propre programme politique. »

En fait, Nadal Tamir d’un côté et le couple Liberman-Netanyahu de l’autre, représentent le dilemme d’Israël, divisé entre réalistes et fanatiques, entre ceux qui sont de vrais patriotes israéliens et cherchent l’intérêt immédiat et à long terme de leur pays et ceux qui se croient patriotes, qui croient servir l’intérêt immédiat et à long terme de leur pays, mais qui sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis.
Les fanatiques israéliens et américains dont parle Tamir dans son mémo et qui sont en train de provoquer des dégâts stratégiques à la relation Israël-USA sont de deux sortes. Il y a les anonymes, ceux qui travaillent dans les coulisses, c’est-à-dire en gros les gens de l’AIPAC (American Israeli Public Affairs Committee) dont la défense inconditionnelle et aveugle d’Israël a fini par les transformer de défenseurs acharnés en fossoyeurs tout aussi acharnés de ce pays.

La deuxième catégorie est composée de gens qu’on connaît bien, qu’on voit s’agiter sur les plateaux de télévision et sur les ondes et pour qui Israël est un ange en danger entouré de diables qui veulent sa peau. Ces gens se trouvent en Israël au sein et autour du gouvernement extrémiste de Benyamin Netanyahu. Ils se trouvent aussi aux Etats-Unis et travaillent soit en « défenseurs » organisés d’Israël, comme c’est le cas au Congrès, soit en « défenseurs » free-lance, comme c’est le cas de John Bolton et de beaucoup de ses semblables. Il est pathétique de voir John Bolton s’égosiller sur les plateaux de télévision, qualifiant d’ami des terroristes quiconque ose dénoncer les exactions de la politique colonialiste israélienne. Il est tout aussi pathétique de voir ce groupe de 25 congressistes américains sillonner Israël, répétant à l’envi que « le problème n’est pas les colonies mais l’Iran ».

Ce sont ces gens que vise Nadal Tamir dans son mémo et qui, par fanatisme, par intérêt électoraliste ou par dessein politique inavoué sont en train de pousser Israël vers le précipice.

Nadal Tamir n’est pas un novice qui vient de rejoindre le corps diplomatique israélien. C’est un diplomate de carrière qui, depuis des décennies avait défendu la politique de son pays à l’étranger, y compris la colonisation à outrance de Jérusalem-est et de la Cisjordanie. C’est seulement maintenant qu’il vient de tirer la sonnette d’alarme. Pourquoi ? Parce qu’il a vu le précipice vers lequel avance Israël et, pris de vertige, il a commencé à tirer vers l’arrière.

Son cas ressemble au cas de Thomas friedman, le célèbre chroniqueur du New York Times. Lui aussi, depuis des décennies a défendu bec et ongles la politique israélienne, y compris la colonisation. Lui aussi a vu le précipice vers lequel avance Israël et, pris de vertige, il a écrit ceci dans l’édition du 2 août dernier du New York Times : « L’incapacité de résoudre ce conflit (du Moyen-Orient) est dû au pouvoir du Lobby israélien qui est utilisé pour protéger déraisonnablement Israël contre les pressions américaines et pour dissuader les responsables politiques et les diplomates américains de critiquer la colonisation. Tout le monde connaît cela à Washington, et beaucoup de gens, tous ceux qui ont à cœur Israël, en sont malades. »

Mieux vaut tard que jamais est-on tenté de dire. Les Arabes, eux, en sont malades depuis un demi siècle.

posted by Hmida Ben Romdhane @ 4:37 PM