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Jusqu’où ira la patience du Président Obama ? (ndlr)

Israël fait obstacle à l’enquête des Nations-Unies à Gaza

Al-Ahram-weekly - Amira Howeidy -Mardi, 16 juin 2009 -6h43 AM

mardi 16 juin 2009

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Israël défie une nouvelle fois les Nations-Unies. Une mission chargée d’enquêter sur la guerre à Gaza n’a pas eu l’autorisation d’entrer en Israël et dans la Cisjordanie occupée ce qui a obligé les enquêteurs à limiter leur travail à l’intérieur de la bande côtière.

La mission a été créée en avril par le Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies, avec mandat d’enquêter sur « toutes les violations du droit international relatifs aux droits de l’homme et du droit humanitaire international » qui auraient pu être commises « durant, avant ou après » la guerre d’Israël contre Gaza, du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009. La guerre de 22 jours contre Gaza assiégée a tué plus de 1 400 Palestiniens, détruit une part importante de l’infrastructure de la Bande, et elle a été marquée par l’usage du phosphore blanc sur des zones densément peuplées.

Le 12 janvier - après 16 jours de guerre -, le Conseil des Nations-Unies pour les réfugiés (UNHRC) a adopté une résolution non contraignante accusant Israël de « violations massives des droits de l’homme du peuple palestinien ». Il décidait aussi d’envoyer en « urgence » une mission d’enquête indépendante internationale pour s’enquérir sur les violations présumées. Les conclusions de la mission devraient être présentées à la session du Conseil de mars.

Loin de l’urgence déclarée pourtant indispensable dans la résolution de janvier, la mission n’a été créée que le 3 avril et a commencé ses travaux le 4 mai. Conduite par le juge qualifié Richard Goldstone, ancien membre de la Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud et ancien procureur en chef des tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l’ancienne Yougoslavie, la mission a décidé de se rendre dans les « secteurs concernés », notamment Gaza, la Cisjordanie et le sud d’Israël. Après qu’Israël lui ait refusé l’entrée dans le pays, la mission s’est rendue à Gaza par l’Egypte, du 1er au 5 juin.

Au terme de cette visite de 4 jours, Goldstone s’est déclaré « choqué » par l’ampleur des destructions dans Gaza. Il a refusé tout commentaire sur les conclusions de sa mission, lesquelles devraient être publiées dans un rapport dans les trois mois. Le séjour de la mission ONU à Gaza pourrait être suivi d’autres visites par la suite.

Pour justifier son refus d’autoriser la mission à entrer en Cisjordanie, Tel-Aviv a prétendu que l’UNHRC avait un « parti pris » contre Israël. Cité par le quotidien israélien Ha’aretz, le 5 juin, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Yigal Palmor dit : « Ils devraient nous appeler le jour où le Conseil des droits de l’homme décide d’une enquête sur les droits de l’homme n’importe où dans le monde, dit-il, comme au Darfour et au Sri Lanka. Après cela, nous pourrions commencer à croire qu’ils ne cherchent pas à cibler Israël. »

Après la guerre sur la bande de Gaza, Amnesty International a accusé Israël de crimes de guerre en raison de bombardements répétés sur des secteurs densément peuplés avec du phosphore blanc. Quand le phosphore atteint la peau humaine, il brûle à travers les muscles jusqu’à l’os. Human Rights Watch avait précédemment accusé Israël de l’emploi d’armes incendiaires, acte non constitutif d’un crime de guerre. Le haut-commissaire des Nations unies pour les droits de l’homme, Navi Pillay, a déclaré que certaines des actions israéliennes signalées à Gaza pourraient « justifier des poursuites pour crimes de guerre ».

Depuis sa création en 2006, l’UNHRC fait l’objet d’attaques de la part d’Israël pour ses condamnations répétées d’Israël sur ses pratiques contre les Palestiniens et les violations continues du droit humanitaire internationale. De ce fait, le Conseil a sélectionné minutieusement ses rapporteurs. Richard Falk, l’actuel rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires occupés, n’est pas seulement un éminent professeur de droit international américain, il est également juif. Goldstone aussi est juif, avec « des liens étroits avec Israël », d’après l’Associated Press.

Le juge Richard Goldstone qui conduit la mission d’enquête sur Gaza.Pourtant, Goldstone et sa mission constituée d’enquêteurs de grande qualité (notamment un professeur de droit international à l’école d’économie de Londres, Christine Chinkin, membre également de la mission d’enquête de haut niveau sur Beit Hanoun, Hina Jilani, avocate à la Cour suprême du Pakistan et membre de la commission d’enquête internationale sur le Darfour, et le colonel Desmond Travers, ancien officier des forces armées irlandaises et membre du conseil d’administration des directeurs de l’Institut d’enquêtes criminelles internationales) ont été refoulés par Israël et se sont vu interdire l’entrée à l’intérieur des frontières d’Israël et dans la Cisjordanie occupée.

« En plus de leurs contributions dans les domaines qui sont les leurs, leur choix par l’UNHRC a une dimension politique, » dit Salah Amer, professeur de droit international à l’université du Caire. Il explique qu’avec le refus de laisser la mission accéder aux sources militaires israéliennes, les enquêteurs de l’UNHRC pourraient bien ne pas obtenir les preuves des violations du droit international humanitaire par des individualités israéliennes, mais « ceci ne sapera pas pour autant la crédibilité de leurs conclusions et de leur rapport définitifs. » En réalité, « Israël ne fait que démontrer qu’il a quelque chose à cacher, » a-t-il déclaré à Al-Ahram Weekly.

L’équipe onusienne a annoncé jeudi qu’elle tiendrait des audiences publiques avec les victimes de la guerre dans le courant de ce mois dans Gaza, et à Genève à la fin du mois. Selon Amer, ces audiences sont une procédure qui permet à l’équipe de s’informer davantage sur l’opinion publique dans Gaza. L’objectif est d’offrir « une sorte de guérison ou de satisfaction aux victimes », comme pour les audiences de la commission Vérité et Réconciliation qui se sont tenues en Afrique du Sud après l’abolition de l’apartheid.

On ne sait pas vraiment quels sont les projets de l’équipe de l’ONU puisque ses membres sont restés silencieux à propos de leur enquête. Selon un rapport de l’Autorité palestinienne du 9 juin, l’équipe a réalisé « une enquête de grande envergure sur les allégations les plus importantes sur la guerre ». Les 15 membres de l’équipe de Goldstone ont rencontré le Hamas et les officiels des Nations-Unies, ils ont recueilli des rapports des groupes palestiniens des droits de l’homme et interviewé des dizaines de survivants.

Mais six mois après le massacre, beaucoup se demandent si la preuve de l’usage du phosphore blanc sur des zones densément peuplées, ou d’armes biologiques et expérimentales par Israël ne sera pas compromise après tant de temps passé. « Pas vraiment, » dit Amer, qui est l’un des experts les plus compétents en matière de droit international d’Egypte. « Il y a des rapports médicaux qui informent sur de tels cas durant la guerre. Il y a les rapports de la médecine légale. Et il y a, bien sûr, les corps des victimes. La preuve est là. »

Les attaques aériennes israéliennes continuent sur le sud de la bande de Gaza en réponse aux attaques de roquettes du Hamas