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Version en anglais en 2è partie d’article.

Un ami d’Israël

Par Gideon Levy - Jeudi, 21 mai 2009 - 21h32

jeudi 21 mai 2009

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Ha’aretz et Gideon Levy

Un ami d’Israël

Désormais, une chose est claire : le président des Etats Unis est un grand ami d’Israël.

Si Barack Obama continue ce qu’il a commencé cette semaine, il pourrait se révéler le plus favorable à Israël de tous les présidents. Richard Nixon a sauvé Israël des états Arabes en 1973, et Obama est sur le point de sauver Israël de lui-même. Nixon nous a envoyé des armes et des munitions à un moment critique, et Obama nous donne, à un moment non moins critique, la substance même d’un plan de paix complet, un plan qui permettrait de sauver Israël.

La seule question est de savoir si Obama va rester déterminé et incisif, comme il l’était la semaine passée. Par un seul acte, il s’est débarrassé de la folie de Washington et de son attitude insensée à l’égard de l’occupation israélienne. Nous allons voir, maintenant, s’il réussit à modifier la folie du même ordre qui règne à Jérusalem et à Tel Aviv ; la route sera longue, et Obama a bien commencé.

Par un seul acte, il a ramené le discours de terreur de Benjamin Netanyahu et ses déclarations fracassantes sur l’Iran à leur dimension véritable. Par un seul acte, il a placé les forces centrifuges de l’occupation, qui sont la véritable menace existentielle pour Israël, à la première place de son agenda. Il a écarté les tentatives de Netanyahu pour détourner l’attention des questions essentielles, et bloqué tous les efforts pour perdre toujours plus d’un temps précieux sur l’Iran et imposer aux Palestiniens des conditions préalables ridicules. Il a également bloqué tous les efforts pour nous détourner de l’essentiel avec des commissions, des promesses de négociations, des formules, des déclarations et des mots vides de sens. Ce sont là les petits trucs habituels d’Israël ; tout pour fuir les responsabilités en face du problème essentiel – la fin de l’occupation.

Obama comprend que c’est maintenant le moment d’en finir avec les petites phrases, les négociations impuissantes, et un processus de paix vidé de toute substance ; c’est maintenant le moment de passer aux actes décisifs et d’avoir le courage de sauter au dessus de l’abîme.

Et voilà que, soudain, tous les « amis » d’Israël à Washington, ont changé de costume. Eux aussi, ils ressentent qu’il y a une possibilité exceptionnelle d’évolution au Proche Orient. Eux aussi, ils sont fatigués de ce que Netanyahu essaie de leur vendre. Eux aussi, ils comprennent que les problèmes créés par l’implantation de « Yitzhar », en Cisjordanie, [ Quelque 130 familles de Juifs orthodoxes à côté de Naplouse – NdT ] doivent être traités avant ceux du réacteur iranien de Bushehr.

Qu’elle était donc pathétique et déchirante, cette image du premier ministre israélien, se tenant assis, nerveux et en sueur, à côté du nouveau président des Etats Unis, confiant, dans son style impressionnant, sans tout le fatras de plaisanteries et de mains passées dans le dos habituel aux rencontres entre Ehud Olmert et George W. Bush. Ce dernier a, en fait, été le président moins amical envers Israël, car il lui a permis de s’engager dans toutes ses folies violentes.

Oui, c’était une scène pathétique, et cependant encourageante ; Netanyahu avait peut-être appris quelque chose au cours de sa courte et intense visite. Cette rencontre a déjà apporté une contribution. : Obama a fait tomber le masque d’un Israël qui adore la paix. Si Netanyahu était vraiment inquiet pour l’avenir du pays, il aurait immédiatement approuvé, dans le Bureau Ovale, toutes les idées avancées par ce fantastique président. Si Israël ne répond pas, nous, les Israéliens, nous le saurons, le président des Etats Unis le saura, et le monde entier le saura : Israël ne veut pas la paix.

Un refus israélien des efforts d’Obama montrera qu’il n’y a pas de partenaire pour la paix au Proche Orient. Le partenaire qui manque, c’est Israël. Non à la paix avec 57 pays, non à une démarche qui neutralisera la menace de la bombe iranienne, et non à deux états maintenant. Cela n’est pas seulement un non à la paix, mais également un non à une possibilité de terminer la guerre relative à la création d’Israël par une victoire majeure. Cela signifierait encore que la plus grande richesse stratégique qu’Israël ait jamais possédé, son alliance avec les Etats Unis, serait détruite ; Netanyahu est peut-être plus menaçant pour la sécurité d’Israël que Mahmoud Ahmadinejad.

Nous devons être reconnaissants à Obama. Quatre mois après le début de son mandat, il vient au secours d’Israël et du Proche Orient, et au fond du monde entier, pour lequel le conflit le plus menaçant est celui-ci.

Les menaces sont nombreuses, et en tout premier lieu les refus formels d’Israël, la perte d’intérêt de la pat d’Obama, ainsi que les divisions Palestiniennes. La balle est dans le camp de Netanyahu, S’il met un terme à l’occupation, il parviendra à la paix et à la sécurité. Il ne s’agit pas là d’un nouvel arrangement mineur, mais de l’avenir de l’entreprise sioniste. Une pareille possibilité ne se représentera pas. Oui, c’est possible. Obama l’a prouvé ; maintenant, c’est notre tour.

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et voici le texte en anglais :

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Thu., May 21, 2009 Iyyar 27, 5769

A friend of Israel

By Gideon Levy

It’s already clear : the U.S. president is a great friend of Israel. If Barack Obama continues what he started this week, he might prove to be the friendliest president to Israel ever. Richard Nixon saved Israel from the Arab states in 1973, and Obama is about to save Israel from itself. Nixon sent us arms and ammunition at a critical time, and Obama is sending us, at a time no less critical, the substance of a complete peace plan, a plan that would save Israel.

All that remains is whether Obama stays determined and decisive, as he was earlier this week. In one move he changed Washington’s madness and the attitude toward the Israeli occupation. Now we will see if he succeeds in altering the same madness in Jerusalem and Tel Aviv. It’s a long road, and Obama began well.

In a single move he shrank the fearmongering of Benjamin Netanyahu and his mouthpieces on Iran to its proper size. In a single move he put the centrifuges of occupation, the real existential threat to Israel, at the top of the agenda. He fended off Netanyahu’s attempts to divert attention from substantial issues, and blocked all efforts to waste more precious time on Iran and impose ridiculous preconditions on the Palestinians. He also blocked all efforts to distract us with committees, promises for negotiations, formulas, declarations and empty words. These are Israel’s best tricks and games ; anything to evade responsibility for the main issue - the end of the occupation.

Obama understands that now is the time for an end to petty words, impotent negotiations and a hollow peace process ; now is the time for big deeds and a courageous leap over the abyss.

Suddenly all of Israel’s "friends" in Washington have shed their skin. They, too, sense a rare opportunity in the Middle East. They, too, are tired of what Netanyahu has tried to peddle. They, too, understand that the Yitzhar settlement in the West Bank must precede Iran’s nuclear reactor in Bushehr. How pathetic and heartrending was the sight of the Israeli prime minister, sitting tense and sweaty, next to the new American president, confident, stylish, and impressive, without all the jokes and back-patting of Ehud Olmert and George W. Bush. The latter was in fact the least friendly president to Israel - one who allowed it to carry out all its violent madness.

How pathetic was the sight, yet how encouraging ; perhaps Netanyahu learned something during his short and dramatic visit. The visit has already made one contribution : Obama tore off the mask of so-called peace-loving Israel. If Netanyahu really feared for the fate of the country he would have immediately agreed, in the Oval Office, to all the ideas put forth by this fantastic president. If Israel does not respond, we, the Israelis, will know, the U.S. president will know and the entire world will know that Israel does not want peace.

An Israeli refusal of Obama’s efforts will reveal that there is no peace partner in the Middle East. The absent partner is Israel. No to peace with 57 countries, no to a move that will neutralize the threat of the Iranian bomb, and no to two states now. This is not only a no to peace but also a no to a chance to end the war over Israel’s establishment with a major victory. This would mean that Israel’s greatest strategic asset ever, its alliance with the United States, would be destroyed. Netanyahu may now endanger Israel even more than Mahmoud Ahmadinejad.

We must be thankful to Obama. Four months after taking office, he is trying to rescue Israel, the Middle East, and basically the entire world, whose most dangerous conflict is this one. The threats are many ; first and foremost refusals by Israel, a loss of interest by Obama, and Palestinian divisions. The ball is in Netanyahu’s court. If he ends the occupation, he’ll get peace and security ; if he doesn’t, he won’t. It’s not about another minor deal, but about the future of the Zionist enterprise. Such an opportunity will not return. Yes, we can. Obama has proved it ; now it’s our turn.

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Commentaires

[ Il y a 15 ans, paraissait, l’année même de la mort de Leibovitz, un petit livre courageux et clairvoyant de Joseph Algazy : Yechayahou Leibovitz : La mauvaise conscience d’Israël Entretiens avec Joseph Algazy - Le Monde Editions, 1994.

Leibovitz, homme de foi et de passion, récipiendaire du Prix Israël en 1992, parle de son rêve d’un Israël qui serai véritablement la Lumière des Nations, et non une base militaire raciste surarmée au service de l’impérialisme mondial dans son projet de domination universelle.

Le livre s’achevait par l’engagement de Leibovitz à continuer « à lutter pour qu’on obéisse à l’ordre de retrait des territoires occupés avec la même ardeur que j’ai mise à appeler à refuser de servir dans ces mêmes territoires. »

Israël, comme tous les pays, compte évidemment, et peut-être plus que d’autres, des gens que nous ne pouvons qu’aimer et respecter, même si nous ne partageons pas toutes les analyses, et dont nous ne serons jamais les ennemis. Leibovitz était de ceux-là

Aujourd’hui, hélas, nous avons vu, au fil des années, Israël s’affirmer comme une entité profondément et résolument raciste et impérialiste, se moquant comme d’une guigne de tout droit des gens, de toute décence, de toute humanité.

Il est vrai que ce que Gidéon Lévy semble avoir compris des projets de Barack Obama serait de nature à planter les racines de la pais au Proche Orient.

Je l’avoue, je n’y crois guère. Parce si l’on veut donner à la paix quelque chance de s’établir et de se développer, il y a un préalable, qui ne s’exprime pas par telle ou telle mesure particulière, mais par un changement radical d’optique et d’attitude, de la part des sionistes. Qu’ils cessent, une bonne fois pour toutes, de s’imaginer que le Bon Dieu les a placés dans une position supérieure à celle des autres hommes. Leur foi, comme la foi des fidèles d’autres religions, leur crée non pas des droits, mais des devoirs.

Qu’ils acceptent les Arabes en général, et singulièrement les Palestiniens, comme des égaux et un jour, comme des frères.

J’ai cessé de croire que cela est possible]