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La revue The Lancet retire de son blogue un article consacré à Gaza

L’auteur de l’article « s’explique » Samedi, 7 mars 2009 - 8h42AM

samedi 7 mars 2009

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Le 2 février, le site internet Global Health Network online, de la revue médicale britannique The Lancet Medical Journal, a publié l’article Les blessures de Gaza (The Wounds of Gaza), des Drs Swee Ang et Ghassan Abu Sitta. Cet article avait été publié initialement par notre site Pulsemedia. The Lancet avait introduit l’article en ces termes :

« Deux chirurgiens britanniques, le Dr Ghassan Abu Sitta et le Dr Swee Ang, ont réussi à pénétrer à Gaza pendant l’invasion israélienne. Ils décrivent ci-après ce qu’ils ont vécu, font part de leur point de vue, et concluent que la population de Gaza est extrêmement vulnérable et sans défense, dans l’éventualité d’une nouvelle attaque israélienne ».

Le 2 mars, la prestigieuse publication médicale britannique a retiré cet article (bien que le site The Lancet Student l’affiche encore), affirmant : « Nous avons retiré le ‘post’ The Wounds of Gaza de notre blogue, en raison de ses "inexactitudes factuelles" ».

Aucune erreur spécifique, ni une quelconque correction aux inexactitudes ainsi alléguées n’ont été suggérées. Les commentaires des lecteurs, dans une écrasante majorité favorables à l’article, demeurent affichés sur le blogue. Une lettre, rédigée par quatre Israéliens (surprise, surprise !), objectant à l’article, a été publiée le 18 février. Notre ami, le Dr. Swee, répond ici à ces péripéties, et il développe les chiffres que son collègue et lui-même ont avancés.
Le Dr Swee Ang apporte ici des précisions au sujet des informations disponibles sur la Palestine et le Liban

Beaucoup parmi nous ont peur de citer des chiffres, sachant que le lobby pro-israélien ne manquera pas de nous ensevelir sous les méls et les protestations. Cela va si loin que désormais, seuls les chiffres avalisés par les Israéliens sont réputés crédibles. Tout le reste est (nécessairement...) tenu en haute suspicion !

Tout au long des vingt-six années (et demie) écoulées, j’en ai pris plein la tronche, au sujet de ce genre de question. La seule question que je me pose, lorsque j’écris, c’est la suivante : QUAND la version des faits que donnent les victimes elles-mêmes finira par être audible ? Les habitants de Gaza savent pertinemment que 5 000 des leurs ont été tués lors du massacre de Khan Younis, en 1956, et qu’environ 100 000 d’entre eux sont portés disparus durant la guerre de 1967, dont 35 000 ont été assassinés. Le seul fait qu’ils ne soient pas en mesure d’aller dans le Sinaï pour y prendre des photos, ou pour y fouiller les fosses communes, ne signifie pas que nous devions leur refuser de donner leur version des faits.

Je me souviens du Nord de la bande de Gaza - combien de fois n’ai-je parcouru la Route Saladin, en 1988 et 1989 ?? Je me souviens de tous les tournants, de tous les recoins ; je savais toutes les orangeraies, toutes les fermes et toutes les maisons par cœur. Souvent, j’arrêtais mon ambulance, pour prendre en stop des ouvriers agricoles, et ils me remerciaient en me donnant des citrons et des oranges fraîchement cueillis. Aujourd’hui, je vois tout ceci totalement détruit par les bombes israéliennes ; cela ressemble à l’holocauste nucléaire d’Hiroshima. Mais rien n’y fait : on nous traite de menteurs lorsque nous avançons le chiffre d’un million et demi de tonnes de bombes ?!? Nous avons vu des immeubles d’habitation non seulement réduits en tas de gravats, mais réduits en tas de cendres - combien de tonnes d’explosifs ne faut-il pas, pour obtenir ce genre de dévastation ?

Le retrait des Blessures de Gaza du blogue de The Lancet n’est absolument pas un problème. Le miracle, c’est que cet article ait pu y être publié...

Mon livre, From Beirut to Jerusalem, lors de sa sortie, en 1989, a été republié en version reliée, puis en version de poche, en deux mois, car il a été entièrement vendu dès sa publication, et il a de nouveau très vite été épuisé, dès sa réédition. Puis Tom Friedman publia un livre portant exactement le même titre, un an et demi après, chez le même éditeur. Mon livre fut alors retiré des rayons. Il a été introuvable durant plusieurs années.

Mais la vérité doit sortir. Dans la plupart des cas, au grand dam de certains d’entre nous, comme nous le savons fort bien.

Je tiens seulement à ce que vous sachiez que je n’ai pas peur de croire les Palestiniens. Le fait que l’ampleur du massacre de Khan Younis ne soit pas venue au grand jour, durant toutes ces années, est un véritable scandale. Il est tout aussi scandaleux que ce qui s’est passé durant la guerre des Six Jours n’ait pas été publié. L’intimidation visant à faire taire les témoins doit cesser. Nous ne pouvons plus permettre que les faits soient uniquement rapportés par les responsables des tueries, et à leur manière.

Comme les Palestiniens de Gaza, moi non plus, je n’ai pas peur. Mon témoin de ce qui s’est passé à Gaza compte. Comme le vôtre. Nous ne devons pas être effrayés de dire ce que les Palestiniens nous ont dit. Ce sont leurs familles qui ont été massacrées, ce sont eux, qui portent les plaies de la violence, ce sont eux, qui ont tout perdu, et qui sont persécutés. Leur voix doit être entendue !

Le Dr Swee Ang, sur les explosifs utilisés à Gaza

Seule, l’armée israélienne elle-même connaît avec précision le tonnage des bombes qu’elle a balancées sur Gaza. Tous les autres chiffrages ne peuvent être que de simples estimations. Toutefois, certains d’entre nous ont de nombreuses années d’expérience dans l’évaluation des dégâts subis par des pays ravagés par les bombes.

Vingt-deux jours durant, Gaza a été bombardé intensément par terre, par mer et par air. Les bombes lancées par les avions sont énormes, et la plupart d’entre elles pèsent plus d’une tonne chacune, en moyenne. Dans le sud, les bombes utilisées pour détruire les tunnels et les structures adjacentes étaient de très grosses bombes, à très fort tonnage d’explosif.

Sur les 21 000 immeubles détruits, 4 000 sont totalement en ruines. Certains observateurs pensent que ces immeubles réduits en cendres ou en poudre ont été détruits par de petites bombes nucléaires. Toutefois, il n’existe pas de preuve, et c’est impossible à affirmer, bien que les effets sur toutes les structures, et en particulier le ciment, qui ont toutes été incinérées, suggèrent que la puissance de ces bombes est de l’ordre de plusieurs kilotonnes - qu’elles soient à explosif conventionnel, ou non. Si vous prenez l’exemple des effets de la bombe atomique sur Hiroshima (c’était une bombe d’une puissance située entre 15 et 20 kilotonnes de TNT), vous constatez un phénomène d’incinération du béton tout à fait semblable à celui que nous avons constaté sur ces 4 000 immeubles de Gaza. On peut supposer qu’il a fallu au minimum 4 000 kilotonnes d’explosifs pour incinérer ces immeubles en béton armé. Les 17 000 autres immeubles détruits l’ont été par des bombes d’un tonnage à un seul chiffre, à en juger au types de destruction. Mis à part les bombes larguées sur des immeubles et les réduisant en gravats, d’autres bombes ont été lancées, également, sur des champs cultivés, des vergers, des fermes et des routes.

Nous ne savons pas suffisamment de choses sur la puissance explosive des bombes DIME pour commenter ces armes d’un nouveau type, et c’est la raison pour laquelle nous n’en avions pas parlé. Or, elles ont été utilisées, à Gaza. A ce qu’on en sait, généralement aujourd’hui, il s’agit de bombes extrêmement puissantes, et leur puissance extraordinaire ne fait guère d’elles des armes dites « conventionnelles »...

Quant à la personne qui a contesté notre estimation « d’un million et demi de tonnes d’explosifs lancés sur Gaza en vingt-deux jours », au motif qu’une telle quantité d’explosifs aurait totalement détruit Gaza [la question avait été mise en avant sur le site féministe [www.womenforpalestine.org-

Le chiffre de 1,5 million de tonnes d’explosifs est, de notre point de vue, une estimation extrêmement prudente. Ceux qui ont des doutes à cet égard doivent venir ici, pour voir.

Le Dr. Swee Ang, sur le chiffre de 35 000 prisonniers politiques exécutés durant la guerre des Six Jours

Ce chiffre de 35 000 prisonniers de guerre liquidés provient de l’International Co-operation Department (ICD) de Gaza. De nombreux soldats égyptiens ont été tués. Mais ce n’est pas d’eux dont nous parlons ici, ces soldats ayant été tués au combat.

Des deux premières heures de la guerre des Six Jours, jusqu’à sa fin, ce sont environ 100 000 combattants égyptiens et palestiniens qui ont été déclarés disparus et n’ont jamais été retrouvés. Parmi eux, il y avait beaucoup d’hommes jeunes, de Gaza, qui s’étaient joints aux Egyptiens et à la PLA [Palestinian Liberation Army] créée quelques mois auparavant par Nasser, pour combattre les Israéliens. Il y a (au moins) deux fosses communes, à El-Arish (Egypte), en bordure du désert du Sinaï, et les Israéliens ont eux-mêmes reconnu avoir assassiné leurs prisonniers. En revanche, ils n’ont jamais reconnu en avoir assassiné un tel nombre. L’information obtenue de notre source à Gaza avait mis en avant le chiffre de 35 000 prisonniers exécutés, mais nous ne lui avions pas posé la question du sort des 65 000 restants.

Beaucoup de ces prisonniers de guerre disparus ont des parents habitant actuellement à Gaza. Les noms de ceux qui ont été exécutés peuvent être obtenus à l’ICD, à Gaza. 1967, cela fait longtemps, et je ne vois pas quel intérêt aurait l’ICD de Gaza à avancer de tels chiffres, s’ils n’étaient pas authentiques.

Comme nombre d’entre vous l’aurez sans doute remarqué, une situation similaire s’était produite après les massacres de Sabra et Chatila, les sources palestiniennes étant convaincues que 3 000 civils avaient été massacrés, alors que l’armée israélienne n’en reconnaissait « que » 300. Bayan Al-Hout a compilé au minimum 1 500 noms jusqu’à aujourd’hui, et la liste ne cesse de s’allonger. Nous ne savons toujours pas quel sort a été réservé aux hommes enfermés dans le Stade, alors que certains combattants de la Phalange libanaise ont avoué avoir exécuté des gens, dans ledit stade. Les corps ensevelis sous la Place des Martyrs (de Beyrouth) sont ceux de victimes tuées dans les camps eux-mêmes, et non de victimes ayant été préalablement retenues prisonnières dans le Stade.

Lire aussi : Les soins de santé palestiniens “en souffrance” (BBC)

4 mars 2009 - Pulseimedia - illustration : "Latuff 2008 - Läsarnas pria tidning"
traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier