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Lettre ouverte de Francis Wurtz, Président du groupe GUE/NGL au Parlement européen

A Mr Bernard KOUCHNER, Président en exercice du Conseil « Affaires générales » de l’Union européenne

Co-responsable pour ne pas dire « initiateur ou incitateur » (ndlr)

lundi 29 décembre 2008

Monsieur Bernard Kouchner

Ministre des Affaires Etrangères

Quai d’Orsay - Paris

Monsieur le Ministre,

Je m’adresse à vous, face à l’enfer de Gaza, comme Ministre des Affaires Etrangères de la France et toujours Président en exercice du Conseil « Affaires générales » de l’Union européenne.

C’est vous qui, à ce titre, avez, le 3 décembre dernier, fait approuver par vos homologues européens, le principe d’un « rehaussement » des relations entre l’Union européenne et Israël, conduisant à faire bénéficier cet Etat, dans de nombreux domaines, d’un niveau de coopération digne d’un quasi-Etat membre.

Vous avez pris cette lourde responsabilité malgré les cris d’alarme des dirigeants palestiniens vous adjurant de surseoir à pareille décision dans les circonstances présentes. Vous l’avez prise en passant outre le refus du Parlement européen d’émettre l’ « avis conforme » – auquel la décision du Conseil est soumise en la matière – tant qu’Israël n’aura pas donné des signes tangibles de sa volonté de relancer le processus de paix. Vous avez délibérément voulu ignorer les violations de plus en plus graves du droit international par les dirigeants israéliens, particulièrement vis-à-vis de la population de Gaza, à laquelle ils infligent un blocus total que le Rapporteur spécial pour l’ONU des Droits de l’Homme dans les territoires occupés, Richard Falk, a assimilé avec raison à « une punition collective équivalant à un crime contre l’humanité » Si vous avez agi ainsi, c’est que la Présidence française de l’Union européenne – au plus haut niveau – avait fait ce choix.

Il lui incombe d’autant plus aujourd’hui, où ce crime se double d’une offensive militaire d’une violence sans précédent depuis la guerre de 1967, de prendre une initiative politique significative, rompant clairement avec cette intolérable propension à garantir aux dirigeants israéliens l’impunité et la bienveillance quoi qu’ils fassent.

Une chose est de condamner – comme le fait naturellement l’Autorité palestinienne – les tirs du Hamas sur des quartiers d’habitation israéliens. Toute autre chose est de justifier un bain de sang contre une population privée de tout et soumise à l’insupportable cruauté de l’occupant. Cette nouvelle tragédie infligée au peuple palestinien est, en fait, à l’évidence, à replacer dans le contexte de la campagne électorale israélienne. Elle n’en est que plus insoutenable.

Laisser se développer pareil engrenage sans que le Chef de l’Etat n’en tire les conséquences constituerait une fin déshonorante de la Présidence française de l’Union européenne. Nombreux sont les regards aujourd’hui tournés vers Paris, dans l’attente d’une décision à la hauteur du crime perpétré sous nos yeux.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes salutations très distinguées.

Francis WURTZ