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Palestine Think Tank - (original en anglais dans 2è partie de cet article)

Une troisième Intifada Palestinienne se prépare

par Ramzy Baroud

samedi 8 novembre 2008

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Lors d’une conférence récente, on m’a demandé, à plusieurs reprises, quelles étaient les perspectives pour un soulèvement Palestinien, une Intifada. La question, bien que simple en apparence, est en même temps lourde d’implications et importante, et il n’est pas possible d’y répondre en plus ou moins deux minutes.

Une « troisième intifada » implique déjà que la seconde est terminée. Mais est-ce le cas, Ou a-t-elle simplement perdu de son impulsion, de son sens des objectifs et de la direction à suivre, ou bien ses énergies ont-elles été gaspillées – comme dans un soulèvement populaire- dans des luttes de partis et des divisions internes ?

Certains de ses premiers leaders ont cessé d’y être impliqués, et un soulèvement cohérent ne peut durer si un trop grand nombre de ses acteurs ont changé de côté, ont modifié leurs rôles, ou sont tout simplement absents. Pour approcher ce sujet de façon plus sérieuse, la première Intifada, celle de 1987, doit être examinée soigneusement et en détail.

Les révoltes collectives des Palestiniens ne sont pas une réponse singulière à des problèmes singuliers provoqués par des gens venus de l’extérieur, comme le mandat britannique, les projets coloniaux sionistes, l’occupation de l’actuel régime sioniste, et ainsi de suite. Ce qu’on omet bien souvent, ce sont les facteurs internes qui provoquent la colère des masses Palestiniennes, comme les insuffisances de leurs dirigeants, les divisions, les demi-tours, la corruption, le népotisme, et ainsi de suite.

Le soulèvement de 1987 était cohérent avec ce modèle, bien qu’il ait certainement inspiré un changement de paradigme. D’un côté, c’était une exigence collective pour la justice et une tentative sérieuse pour en finir avec l’occupation sioniste des terres Palestiniennes occupées en 1967. Mais il comportait aussi le désir instinctif de reprendre le contrôle de la lutte Palestinienne, si longtemps commandée depuis l’étranger : la Jordanie, le Liban, puis, dans une certaine mesure, la Tunisie.

Il y avait un sentiment général parmi les Palestiniens des territoires occupés que leur fardeau s’était transformé en luttes de pouvoir entre diverses factions basées dans diverses capitales Arabes, et que leurs disputes, en fait très peu idéologiques, portaient beaucoup plus sur des points comme le contrôle, l’argent, et le statut.

Le premier soulèvement eut vite fait de formuler des propres idées, ses propres mécanismes, et ses propres symboles, qui tous reflétaient l’unité de but parmi les Palestiniens. En fait, l’insistance constante sur « l’unité nationale » dans les symboles et les slogans de l’Intifada était un signe clair du refus des Palestiniens de la désunion et des luttes de partis.

Malgré la sauvagerie de la réponse sioniste à la premières Intifada, elle ne peut se comparer à la répression, beaucoup plus violente, au second soulèvement, celui de 2000. Le gouvernement sioniste voulait écraser la révolte avant qu’elle développe un rythme permanent et ne se transforme en un engagement populaire à long terme. Le régime sioniste fonctionnait également sur l’hypothèse erronée que le soulèvement était organisé par le défunt dirigeant de l’Organisation de Libération de la Palestine, Yasser Arafat, dans le but d’arracher des concessions politiques.

La réalité qu’aussi bien le régime sioniste que l’Autorité Palestinienne -constituée à la suite des accords d’Oslo de 1993 comme alternative à la toute puissante OLP- ont été complètement pris par surprise lorsque les Palestiniens sont descendus dans les rues pour défier non seulement l’occupation sioniste mais encore les attitudes peu claires et la corruption rampantes qui avaient fini par envahit leur propres direction.

Si nous acceptons que la seconde Intifada est terminée, ou encore qu’elle a pris fin avec les combats entre le Fatah et le Hamas, alors il est nécessaire de procéder à un examen de ses résultats. Bien que la seconde Intifada n’ait pas mis un terme à l’occupation sioniste, elle a eu à coup sûr un impact important sur les institutions politiques de la Palestine. Elle a donné naissance à une nouvelle direction, celle du Hamas, et contraint à une révision majeure à l’intérieur du Fatah autrefois triomphant.

Le second soulèvement a gravement affaibli l’AP, et par conséquent les accords d’Oslo qui ont conduit à son existence, soulignant la nécessité d’institutions politiques alternatives véritablement représentatives, comme une version revitalisée de l’OLP.

En vérité, chaque grande révolte Palestinienne dans le passé a donné naissance à de nouvelles réalités, impossibles à prévoir, et, malgré toutes les tentatives, le statu quo qui régnait au cours de la période précédant le soulèvement est devenu ensuite quantité négligeable. De nouveaux visages, de nouveaux noms, de nouvelles priorités, de nouveaux slogans et de nouveaux symboles sont souvent incorporés dans le mélange, bien que définis en référence à un désir permanent de justice, de paix véritable et de liberté.

Les méthodes employées par le régime sioniste pour apaiser les Palestiniens et écraser les soulèvements ont produit de nouvelles réalités, de nouvelles barrières et des liens nouveaux. Des méthodes comme le Mur gigantesque, les nouvelles implantations, et les armes de suppressions massives ont souvent compliqué l’existence déjà douloureuse des Palestiniens qui vivent sous occupation et provoqué de nouvelles révoltes.

La première Intifada a ramener le combat dans notre patrie, et suscité des dirigeants venus de Palestine, qui sont entrés en compétition avec la vieille garde sur tous les fronts, y compris le droit de formuler des exigences et les aspirations des Palestiniens. La seconde Intifada a vu les accords d’Oslo et la « culture de paix » qui les accompagnait se révéler un processus dépourvu de substance qui a échoué à améliorer la terrible réalité sur le terrain – bien qu’il ait cependant réussi à donner du pouvoir, aussi bien financier que politique, à une certaine classe de Palestiniens.

Maintenant les Palestiniens se retrouvent dans une période de transition dont l’issue est incertaine. Il y a plus de questions que de réponses : où va conduire l’affrontement entre le Fatah et le Hamas ? Le Fatah va-t-il continuer avec sa structure actuelle ? Pendant combien de temps ? Les Palestiniens vont-ils continuer à adhérer à la revendication, autrefois incontestée, pour une solution à deux états ? Et quelle est la crédibilité de cette formule dans les circonstances actuelles, alors qu’une séparation claire et nette est très compliquée et autant dire complètement impossible ? Comment la séparation géopolitique entre la Cisjordanie et la Bande de Gaza va-t-elle jouer au cours des années à venir ?

Les soulèvements Palestiniens sont souvent une réponse collective à des questions difficiles. Il y a beaucoup de chances pour que la prochaine Intifada – car il est certain qu’il y en aura une aussi longtemps que l’occupation se poursuit- rencontre à nouveau un rejet populaire des maux qui ont été imposés à la cause Palestinienne, et qu’elle affirme une fois de plus la pertinence et le rôle essentiel du peuple Palestinien comme véritables propriétaires de leur destin, et les gardiens de leur propre combat.

Ramzy Baroud (www.ramzybaroud.net) est un auteur et un éditeur de PalestineChronicle.com.. Son travail est publié par de nombreux journaux dans le monde entier. Son dernier livre est « La Seconde Inrtifada Palestinienne : Chronique du Combat d’un Peuple » (Pluto Press, Londres).

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et voici l’original en anglais :

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Ramzy Baroud - A Third Palestinian Intifada in the Making

By Ramzy Baroud • Nov 2nd, 2008 at 18:13

At a recent conference I was repeatedly asked about the prospects for a third Palestinian uprising, or Intifada. The question, although seemingly uncomplicated, is both loaded and important, and cannot be answered in a mere two minutes or less.

A ‘third Intifada’ would imply that the second has already ended. But has it ? Or did it simply lose momentum, sense of focus and direction, or were its energies squandered - as a popular uprising - on factional disputes and internal division ?

Some of its initial leaders are no longer involved, and a cohesive uprising cannot exist if too many of its players have switched sides, changed roles, or are absent altogether. To approach this subject more practically, the first Intifada in 1987 must be thoroughly scrutinized.

Palestinian collective revolts are not a singular response to singular problems caused by outsiders, for example the British mandate, Zionist colonial designs, Israeli occupation, and so on. What is often missed are the internal factors which anger the Palestinian masses, such as their leadership’s failures, divisions, u-turns, corruption, nepotism, and so on.

The 1987 uprising was consistent with this model, although it certainly inspired a paradigm shift. On one hand, it was a collective cry for justice and an earnest attempt at ending an Israeli occupation of Palestinian land occupied in 1967. But it also represented the instinctive desire to reclaim the Palestinian struggle, which had for long been managed from abroad : Jordan, Lebanon, then, more or less, Tunisia.

There was a permeating awareness among Palestinians in the occupied territories that their plight had turned into power struggles between various factions based in various Arab capitals, and that their disputes were hardly ideological, but more pertinent to issues of control, money and status.

The first uprising quickly formulated its own ideas, mechanisms and symbols, all reflecting the unity of purpose among Palestinians. In fact the overt emphasis on “national unity” in the Intifada’s symbols and slogans was a clear sign of Palestinian denunciation of disunity and factionalism.

Although the Israeli response to the first Intifada was lethal, it hardly compares to the more violent response to the second uprising of 2000. The Israeli government wanted to crush the revolt before it developed a rhythm and turned into a long-term, popular commitment. Israel also operated with the erroneous assumption that the uprising was manufactured by the late Palestine Liberation Organization (PLO) leader, Yasser Arafat, to extract political concessions.

The fact is both Israel and the Palestinian Authority (PA) - assembled following the 1993 Oslo Accords as an alternative to the all encompassing PLO - were caught by complete surprise when Palestinians took to the streets in defiance, not just against the Israeli occupation, but also the wavering attitudes and rampant corruption that pervaded their own leadership.

If we must accept that the second Intifada is over, or was ended by the infighting between Fatah and Hamas, then an examination of its outcomes is necessary. Although the second Intifada has not brought an end to the Israeli occupation, it certainly has made a serious impact on the political institutions in Palestine. It has given rise to another leadership, that of Hamas, and forced a major rethink within the once leading movement, Fatah.

The second uprising greatly undermined the PA, and therefore the Oslo accords that brought it into existence, highlighting the need for alternative - and truly representative - political institutions, such as a revived version of the PLO.

Indeed, every major Palestinian revolt in the past has resulted in new, unpredictable realities, and despite all attempts, the status quo that defined the pre-revolt periods is often negligible afterwards. New faces, names, priorities, slogans and symbols are often introduced to the mix, although still defined by an everlasting desire for justice, meaningful peace and freedom.

Israel’s methods for subduing Palestinians and crushing uprisings have also produced new realities, thresholds and relationships. Methods such as huge walls, new settlements and weapons of mass suppression often complicate the already painful existence of Palestinians living under occupation and result in more revolts.

The first Intifada brought the struggle home, and introduced local leaderships, who competed with the old guard on all fronts, including the right of articulating Palestinian demands and aspirations. The second Intifada saw the Oslo accord and its adjoining ‘culture of peace’ as a worthless process that failed to improve the dreadful reality on the ground - although it did manage to empower a specific class of Palestinians financially as well as politically.

Now Palestinians find themselves in a transition that has an uncertain outcome. There are more questions than answers : where will the Fatah-Hamas clash lead ? Will Fatah carry on while maintaining its current structure ? For how long ? Will Palestinians continue to adhere to the once uncontested demand for a two-state solution ? And how credible is that formula under the current circumstances, where a clear cut separation is complicated if not totally unfeasible ? How will the geopolitical split between the West Bank and Gaza play out in coming years ?

Palestinian uprisings are often a collective response to hard questions. The chances are the next Intifada - as surely there will always be one as long as the occupation continues - will find again a popular rejection of the ills which have afflicted the Palestinian cause, it would once again reassert the relevance, if not the leading role of the Palestinian people as the real owners of their fate, and guards of their own struggle.

Ramzy Baroud (www.ramzybaroud.net) is an author and editor of PalestineChronicle.com. His work has been published in many newspapers and journals worldwide. His latest book is The Second Palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle (Pluto Press, London).