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Avis trés autorisé

De Charm-el Cheikh à Jérusalem, les mêmes diktats de l’occupant

par Claude LEOSTIC

jeudi 23 juin 2005

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publié le jeudi 23 juin 2005

Sharon vient de déclarer qu’il allait bombarder une nouvelle fois la Palestine occupée "si les attaques n’arrêtaient pas" et recommencer les assassinats politiques sur des dirigeants -islamiques- de la résistance palestinienne à l’occupation.

Il est vrai que la trêve unilatérale décidée par les groupes de la résistance ne tiendra peut-être plus longtemps devant les incursions, arrestations et invasions répétées des forces d’occupation israéliennes.

Aujourd’hui, 22 juin 2005 : arrestations à Azzoun, Qalqilya, Bethléem, Beit Sahour, Jénine, Ramallah, Tulkarem et Naplouse (25 à Hébron et les villages environnant : Beit Kamil, al-Thaheriyya, Ithna, Surif, Beit Ummar Tafoah, Doura, et le camp de réfugiés d’al-Fawwar, hier). A Jifflik où les colonies, toutes illégales, s’étendent et les vergers palestiniens sont confisqués,7 maisons ont été rasées, celles de Sa’oud Ali Ka’abnah, Ali Ahmad Bani-Odeh, Awad Masoud Bdeirat, Jom’a Hassan Sbeitan, Nayef Ibrahim Jahalin, Ameed al-Marsy, et Suleiman Jahaleen, tandis que la zone sud de Tulkarem était bouclée.

A Jérusalem hier mardi 21 juin 2005, un sommet a réuni le président palestinien Mahmoud Abbas et le premier ministre israélien, M. Sharon qui a osé mettre des conditions à toute avancée de sa part vers la paix : l’arrêt de la violence...palestinienne !

C’est ce que nous ont appris de nombreux journalistes d’ "information". Plus le mensonge est gros et mieux nombre de médias, ignorants ou mal intentionnés, le relaient.

Selon un rapport de l’armée israélienne diffusé mercredi et basé sur des déclarations de responsables palestiniens qui assistaient à la rencontre, le président palestinien s’est dit « furieux et déçu » car le premier ministre israélien a refusé de répondre aux demandes palestiniennes qui exigeaient l’allègement des conditions dans les Territoires occupés. A Charm el Cheikh, en février 2005, les Palestiniens avaient annoncé une trêve si les conditions de vie infernales dues à l’occupation israélienne s’amélioraient.

Saeb Erekat, ministre et négociateur de l’ANP, a indiqué que « la réunion a été difficile, franche et parfois agressive ». « Cela a été très difficile entre ...les deux », a-t-il dit, alors qu’un autre responsable palestinien déclarait : « Sharon nous a fait de longs discours sur la lutte contre le terrorisme et des commentaires moralisateurs, mais on n’a abouti à rien ».

Abbas et Sharon se sont rencontrés dans la résidence de ce dernier à Jérusalem ouest mardi après-midi, dans un climat de tension dans les Territoires palestiniens occupés. C’était leur première rencontre de travail depuis Charm el-Cheikh en février et le premier à être ainsi organisé à Jérusalem.

Il n’y a eu aucune déclaration après le sommet et la délégation palestinienne est rapidement rentrée à Ramallah.

Selon des sources bien informées, la rencontre a duré deux heures pendant lesquelles Sharon a exigé à plusieurs reprises que l’Autorité palestinienne agisse "contre les groupes terroristes" et empêche les attaques contre les soldats et les colons [1].

Abbas a exigé que Israël "renforce son bras" afin qu’il puisse agir. On sait que la population palestinienne a élu Mahmoud Abbas largement et démocratiquement mais sans enthousiasme en janvier 2005, 60 jours après le mystérieux décès de Yasser Arafat, comme le demande la constitution palestinienne. L’objectif, l’espoir des Palestiniens étaient alors que le nouveau président, considéré comme « modéré » et donc bien perçu des occidentaux, notamment des dirigeants américains [2], arriverait à arracher des améliorations de leurs conditions de vie et un allègement de l’occupation.

Il n’en a rien été. Sharon n’a pas fait un geste d’allègement de l’occupation qui aurait pu donner crédit aux efforts de M. Abbas auprès de la population palestinienne. Les 750 points de contrôle militaires asphyxient toujours la Cisjordanie. Le Mur,les colonies et les routes d’apartheid qui les relient, réservées aux seuls colons et soldats, n’en finissent pas de morceler et d’isoler ce qui reste de la Palestine tout en volant toujours plus de terre et en confisquant l’eau.

Gaza est une prison à ciel ouvert, et les projets israéliens, s’ il y a bien, non pas retrait mais redéploiement autour la Bande de Gaza , sont de contrôler le territoire palestinien enclavé par divers moyens électroniques [3] et même un mur -encore un- qui irait jusque dans l’eau de la Méditerranée pour mieux enfermer la population de Gaza. [4]

Concernant les « violences », Sharon a rejeté les arguments palestiniens qui expliquent que la plupart des attaques sont menées à partir de zones qui sont contrôlées militairement par Israël et donc inaccessibles aux forces de sécurité de l’ANP. Il a aussi menacé d’une nouvelle vague de bombardements sur la Cisjordanie.

Malgré les divergences fondamentales quelques accords ont été trouvés : Abbas a dit qu’il y aurait une coordination sécuritaire entre les deux parties et que l’ANP déploierait 5,000 policiers à Gaza. Il a aussi accepté le plan selon lequel Israël détruirait les maisons des colons, comme C. Rice l’a demandé aux Israéliens lors de sa visite la semaine dernière, et à l’aide de fonds internationaux, l’ANP enlèverait les débris.

Récemment S. Pérès, chef du parti travailliste, qui n’en est pas à une malhonnêteté intellectuelle ou une hypocrisie près, déclarait que la destruction des maisons des colons était un vrai problème car cela coûterait extrêmement cher et donnerait au monde la mauvaise image d’un « Israël qui détruit des maisons » ! ! ! C’est vrai que, au lieu de dynamiter, bombarder ou écraser les maisons de civils de Rafah ou Beit Lahia, ça changerait de détruire les maisons illégales de colons qui ne sont finalement qu’une armée sans uniforme, fer de lance de l’occupation voulue et décidée par les gouvernements successifs d’Israël.

Ces colons dont Sharon va faire le « sacrifice » et se servir pour clamer au monde, admiratif devant ce début de « décolonisation », qu’il ne faut vraiment rien lui demander de plus. D’autant plus qu’il va faire quelques gestes « généreux » : quelques libérations de plus, alors que les quelque 8000 prisonniers palestiniens entament une nouvelle grève de la faim et qu’un prisonnier vient de perdre la vue sous la torture [5] ; Bethléem et Qalqilya « remises » à l’ANP d’ici quelques jours, deux enclaves sur leur propre terre, dont le seul horizon est le mur d’apartheid et d’annexion.

C’est dans ce contexte là que le président Chirac ose inviter le « père de la colonisation », l’ancien général criminel de guerre [6] reconverti en gouvernant mais dans le même objectif, réitéré publiquement depuis des décennies et partagé par la quasi totalité de la classe politique israélienne et une grande partie de la population : s’approprier illégalement un territoire en en éliminant la population d’une manière ou d’une autre : massacres de civils palestiniens en 48, 53, 56, 67 et depuis, ou asphyxie totale de toute vie économique et sociale, expulsion, transfert rampant, spoliation, occupation militaire et apartheid.

Monsieur Chirac aurait-il oublié le droit, droit international, droit humanitaire et droits humains, dont il se réclame et que nous exigeons ?

Ce que le droit exige c’est la fin de la colonisation illégale - Mur, colonies, routes et autres parcs- c’est l’arrêt immédiat de la torture et de la détention arbitraire - doublement quand il s’agit d’élus du peuple occupé- de l’emprisonnement des occupés dans le territoire de l’occupant, des punitions collective - destructions de maisons, arrachage d’arbres- de l’impossibilité de circuler -check-points, routes d’apartheid, Mur de spolisation, occupation militaire-.

C’est ce que la France doit exiger et tout faire pour obtenir. Ce sont ces violations répétées du droit qu’elle doit absolument sanctionner.

C. Léostic, 22 juin 2005


[1] rappelons que la résistance -y compris armée- à l’occupation est un droit reconnu voire un devoir, et que si les attentats contre des civils sont une violation du droit, les attaques dont les cibles sont des militaires(en uniformes ou pas) sont légitimes

[2] voir l’invitation de M. Abbas à Washington par G.W. Bush

[3] al-Jazeera

[4] voir article sur le site

[5] imemc, 22 juin 2005

[6] voir la Quatrième Convention de Genève