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Et pendant ce temps, où est l’Europe ?

Une nouvelle occasion de perdue

Par Khaled Al Sabawi

jeudi 21 avril 2005

Au cours de la première semaine d’avril, les Territoires Palestiniens sous occupation ont été une nouvelle fois le théâtre de réceptions de haut niveau et d’une frénésie médiatique.

Les Palestiniens ont été privilégiés avec l’arrivée de personnages américains connus ; cette fois-ci cependant les visiteurs n’étaient pas simplement des politiciens, bien qu’ils aient sans doute plus d’influence dans la société contemporaine américaine - il s’agissait d’acteurs d’Hollywood.

Malheureusement, cette fois encore, le peuple de Palestine a été dans l’incapacité de saisir cette opportunité et d’influencer le jugement des visiteurs.

Le gagnant d’un Oscar, Ben Kinsley, est arrivé à Ramallah le 6 avril pour promouvoir le lancement du « Projet Gandhi » - un projet financé par des fonds américains qui a pour objectif de promouvoir la non-violence contre l’occupation israélienne. Le projet se propose de parvenir à ses fins par la diffusion à travers la Cisjordanie et la bande de Gaza d’une version en arabe du long-métrage de trois heures du film hollywoodien « Gandhi ».

L’entourage autour du projet Gandhi, qui comprend Kinsley et le président du site internet de vente « eBay », Jeff Skoll, tinrent une réunion à Ramallah avec diverses ONG (Organisations Non-Gouvernementales) palestiniennes pour gagner des soutiens à leur projet.

Le but de cette réunion était de donner l’occasion à ces ONG palestiniennes d’exprimer leurs idées et leurs expériences quant à la vie sous occupation, et aussi d’établir un partenariat entre le projet Gandhi et ces diverses ONG.

On pourrait s’imaginer que c’était là une occasion en or pour tous les présents, et spécialement les ONG qui sont supposées travailler pour le bénéfice du peuple Palestinien, de profiter de la présence de ces américains éminents et de fournir un témoignage en faveur du peuple Palestinien.

Cependant, procéder de la sorte n’aurait pas seulement demandé du courage, mais aurait aussi hypothéqué les chances de ces ONG de participer au partenariat proposé par le projet Gandhi - en d’autres termes, cela aurait mis en péril les chances de ces ONG de recevoir de l’argent.

Vu leur souhait de recevoir ces fonds offerts par le projet Gandhi, il était automatiquement dans l’intérêt des ONGs de voir le projet réussir, et par conséquent il leur était impossible d’aborder ce projet avec objectivité.

Ceci est, de façon regrettable, une nouvelle illustration de l’industrie émergente du processus de paix [emerging peace process industry - N.d.T]. Le même jour, les promoteurs du projet Gandhi ont rencontré Mahmoud Abbas et selon Jeff Skoll, Abbas «  a été agréable avec nous et a apporté son soutien au projet ».

A peine celui-ci parti, Abbas a été aussi occupé cette semaine avec un autre acteur d’Hollywwod. Après avoir visité Israël, le vétéran hollywoodien Richard Gere est arrivé à Ramallah dans sa quête de « promouvoir la paix » et « entendre les voix du peuple ». Comme notre gouvernement sait si bien le faire, ils ont accueilli Gere avec des accolades et des embrassades, ont souri devant les photographes lorsqu’ils les prenaient en photo, puis se sont faits des adieux devant les caméras.

Personne, ni les politiciens Palestiniens, ni des ONG, ni un quelconque individu, n’a eu le courage de prendre à partie directement ces acteurs influents et hommes d’affaires américains pour leur faire savoir qu’en tant que citoyens américains, ils avaient une responsabilité dans l’intervention directe et dévastatrice de leur pays dans le conflit israélo-palestinien.

Pourquoi n’y a-t-il eu aucune voix collective palestinienne pour suggérer aux américains que leurs efforts devraient être orientés vers un changement dans leur propre société plutôt qu’à l’étranger ?

S’il n’y avait pas les dollars américains, alors il n’y aurait pas aujourd’hui d’occupation de la Palestine par les israéliens. Aucun Palestinien n’a osé suggérer que l’origine du problème israélo-palestinien ne se situe pas en fait pas dans les Territoires Palestiniens mais plutôt aux Etats-Unis.

Le gouvernement palestinien n’a aucune stratégie, plan ou idée pour démontrer comment ces américains jugés influents peuvent orienter leurs efforts afin d’influencer le public américain et ses institutions civiques.

Il n’y a pas eu un seul avis suggérant à ces acteurs de déclarer publiquement leur soutien à leurs compatriotes Craig et Cindy Corrie, lesquels ont entamé juste un mois auparavant et à l’occasion du second anniversaire du meurtre de leur fille, une procédure judiciaire contre Caterpillar, la compagnie américaine qui fournit Israël en bulldozers pour détruire des milliers de maisons palestiniennes à Rafah.

Cette violation colossale des droits humains a abouti au meurtre de Rachel Corrie, la fille de Craig et Cindy, alors que courageusement elle tentait de façon non-violente de protéger la maison d’un médecin à Rafah.

Le projet Gandhi fait la promotion de la non-violence ? Alors pourquoi aucun des Palestiniens présents à ces réunions n’a mis en avant le fait que les sanctions sont une forme efficace de non-violence qui peut être utilisée pour qu’Israël se plie aux lois internationales et mette un terme à ses crimes dans les territoires occupés ?

Le monde entier a été témoin du pouvoir des sanctions économiques lorsqu’elles ont permis la chute du régime d’apartheid d’Afrique du Sud. Les sanctions américaines contre le régime d’apartheid d’Afrique du Sud ont été le résultat direct des actions menées par les institutions civiques américaines, lesquelles pourraient être sollicitées de la même façon, mais cette fois-ci contre Israël.

Où est le soutien diplomatique et politique nécessaire à la représentation d’un mouvement anti-occupation en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ? On ne ressent que de l’incompréhension lorsque on aborde ces questions.

Le 15 mars dernier, lorsque le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan a fait sa visite illégale et provocatrice à Sharon à Jérusalem, il fut invité à l’inauguration du nouveau musée israélien de l’Holocauste. Israël ne manque jamais de rappeler aux diplomates en visite le martyr enduré il y a près de 60 ans. Lorsque Annan était la veille dans les Territoires Palestiniens, il a refusé de voir de ses propres yeux les destructions causées par le mur des israéliens, et il a refusé aussi de visiter les camps de réfugiés de Jénine où avaient été commis des crimes de guerre trois années auparavant.

Annan doit avoir quitté la région avec la mémoire de l’Holocauste plutôt qu’avec celle des victimes palestiniennes d’aujourd’hui.

Rouvrir les livres d’Histoire nous remet en mémoire que les sionistes ont été capables d’exploiter un petit paragraphe appelé « Déclaration de Balfour », écrit par un ministre britannique, pour gagner le soutien des Britanniques et d’une résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies nommée « plan de partition » pour l’établissement d’un état.

Aujourd’hui les Palestiniens disposent de résolutions du Conseil de sécurité, de lois internationales édictées par les Nations Unies, et d’un jugement de la Cour Internationale de Justice. Les Palestiniens sont totalement du côté du droit, et ils sont pourtant incapables d’en tirer profit.

Cet article peut être consulté sur : www.miftah.org
et sur www.protection-palestine.org
traduction : Claude Zurbach (CCIPPP)