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Source : Jerusalem Post -

Quelle Feuille de Route ?

Par Jeff Halper ( en 2ème partie, texte en anglais)

vendredi 9 novembre 2007

( Depuis quand une lettre de Mr Bush, même « votée » par les chambres étasuniennes, a-t-elle la moindre valeur juridique, et engage -t-elle en quoi que ce soit les gens concernés par le problème de Palestine ? Parce que s’il en va ainsi, on peut faire de sérieuses économies et remplacer nos institutions, à commencer par le président à 14 000 euros de notre présipauté, par des sous-fifres transmettant les ordres en provenance d’outre-atlantique. Je sais que c’est déjà commencé, mais ils n’osent pas encore le dire (ndt)

(pour la forme, je rappelle que la position de l’UE, contenue dans une déclaration formelle de Solana, est que les frontière de la zone sioniste sont celles d’avant la guerre de 1967 – j’ai bien entendu les références (ndt))


Tout comme dans ses déclarations d’août dernier à Jéricho ; où le premier ministre Egud Olmet se disait d’accord pour un retrait d’un surface équivalente à 100 % des territoires occupés, se dernières déclarations au Forum Saban, en présence de Condoleezza Rice et d’Anthony Blair, semblaient prometteuses, et même enthousiasmantes. « Annapolis représente un tournant radical », a-t-il déclaré, « sur le chemin des négociations et de l’effort authentique pour parvenir à la réalisation de la vision de deux nations : l’état d’Israël – la nation du peuple Juif ; et l’état Palestinien – la natin du peuple Palestinien.

En outre, il a exprimé l’espoir que la solution à deux états serait réalisée avant la fin du mandat du président étasunien George Bush en janvier 2009.

Ce discours semblait sincère, et même passioné. Olmert donnait l’impression qu’il était prêt à affronter toutes les difficultés – y compris la nécessité qu’Israël remplisse sa part de l’accord de la Feuille de Route. Il a déclaré fermement et clairement qu’Israël a maintenant des « partenaires pour la paix » dans la direction Palestinienne. Il semblait que toutes les points fondamentaux avaient été réglés ; le gouvernement israélien adhérait à la feuille de route et à la solution à deux états sans l’ombre d’un doute.

Alors où est le problème ? La pièce manquante, le document crucial qui rend impossible toute solution à deux états viable, c’est un élément des considérations stratégiques d’Israël mentionné par Olmert comme un détail il y a quelques jours. C’est la lettre adressée par Bush en avril 2004 à Ariel Sharon, qui était alors premier ministre. Ce document dont a peu parlé modifie radicalement les paramètres de tout « processus de paix » et de ce que sont les obligations d’Israël au titre de la Feuille de Route. Il est considéré par le gouvernement israélien comme l’élément le plus important peut-être dans son effort pour conserver le contrôle des grands blocs de colonies et de la sort empêcher toute possibilité d’existence d’un état Palestinien stable.

L’essentiel de la lettre de Bush, qui a été ultérieurement ratifiée par un vote de 407 voix contre 9 de la chambre des réprésentants étasuniens et un vote de 95 voix contre 1 du sénat étasunien, est le passage suivant : « A la lumière des nouvelles réalités sur le terrain, comportant des centres de populations Israéliens déjà existants, il est certainement irréaliste d’attendre du résultat des négociations sur le statut final un retour plein et complet aux lignes d’armistice de 1949. »

Dans un phrase d’apparence innocente, le président Bush porte en pleine connaissance de cause un coup fatal à la Résolution 242 du Conseil de Sécurité de l’ONU, qui est la base même de la solution à deux états depuis 1967, et de sa propre initiative de la Feuille de Route, en annulant l’exigence qu’Israël revienne à la Ligne Verte (avec des ajustements acceptés par les deux parties) de façon à permettre l’émergence d’un état Palestinien viable.

Israël se range bien entendu à la position étasunienne, qui est rejetée par les trois autres membres du Quatuor de la Feuille de Route, les Nations Unies, l’Europe, et la Russie, mais on s’en moque, et qui est considérée comme un accord permettant à Israël de conserver les grands blocs de colonies. Ils sont au nombre de six ou de sept : la vallée du Jourdain, le bloc d’Ariel, le bloc de Modi’in, les trois blocs qui constituent le « Grand Jérusalem » (Givat Ze’ev, Ma’aleh Adoumimn et le bloc d’Etzion/Efrat), et peut-être un saillant dans Hébron.

Et donc, quand Olmert parle de « se conformer à la Feuille de Route », il parle d’un retrait concernant les territoires occupés extérieurs à ces blocs d’implantations, puisque la lettre de Bush les annexe de facto à Israël. La construction massive d’implantations et d’autoroutes dans ces blocs d’implantations ne constitue donc pas une violation des engagements d’Israël de mettre un terme à la construction d’implatations au cours de la première phase de la feuille de route, puisque ces blocs ne font plus partie des territoires occupés.

La superficie des blocs de colonisation qu’Israël souhaite conserver ne semble peut-être pas énorme, de 10 à 20 % de la Cisjordanie, y compris le « Grand Jérusalem ». Mais ils sont cruciaux pour l’établissement d’un état Palestinien viable – et la « viabilité » est un terme essentiel dans le vocabulaire de la Feuille de Route.

Les blocs de colonisation d’un « Grand Jérusalem » israélien enlèvent aux Palestiniens le coeur économique de leur futur état puisqu’environ 40% de l’économie Palestinienne, selon la Banque Mondiale, est liée au tourisme à Jérusalem. Les autres blocs taillent la Cisjordanie en trois « cantons » (c’est le mot employé par Sharon, puisque le Plan de Convergence d’Olmert, qui n’a jamais été abandonné, ets basé sur le Palan de Cantonisation de Sharon). Le bloc de la Vallée du Jourdain assure à Israël le contrôle de la frontière et de l’eau du Jourdain.

En fiat, en acceptant la Feuille de Route, Olmert a en tête un document très différent de celui de l’ONU, des Européens, de la Russie et des Palestiniens eux-mêmes. La « version Israélienne » du document comporte les « 14 points de réserves » qui y sont ajoutés et qui, en fait, annulent la Feuille de Route, du moins en tant que chemin authentique vers la paix.

Ainsi, le « point de réserve » n°5, par exemple, déclare que « L’état provisoire aura des frontières provisoires et certains aspects de souveraineté, sera totalment démilitarisé..., n’aura pas la capcité d’entrer dans des alliances de défense ou des coopérations militaires, et Israël contrôlera l’entrée et la sortie de toute sles personnes et de tous les biens, de même que son espace aérien et son spectre électromagnétique. »

Finalement, il est bien possible que les Palestiniens obtiennent 80 % ou 90 % de la Cisjordanie, mais ils n’auront aucunement un état viable. Ils auront des bouts de territoires stériles alors qu’Israël conservera le contrôle des frontières, le mouvement des personnes et des biens à la fois à l’intérieur de l’« état » Palestinien et entre cet « état » et les pays alentour, d’une partie importante de sa terre arable, de la quasi totalité de ses ressources en eau, de son espace aérien et même de ses communications ! L’« état » Palestinien sera privé d’une économie viable. Etant donné que 60% des Palestiniens ont moins de 18 ans et que le mini état devra absorber des centaines de milliers de réfugiés, ses perspectives pour constituer un état viable, stable et véritablement indépendant sont inexistantes compte tenu des paramètres non rendus publics contenus dans la lettre de Bush.

Il y aura un « état » Palestinien. Israël a un besoin démographique urgent de ne plus avoir sur les bras les presque 4 millions de Palestiniens des territoires occupés. Il pourrait même essayer d’échanger quelques centaines de milliers d’Arabes israéliens du Triangle de Gallée, sous prétexte de donner aux Palestiniens davantage de terre. La question cruciale est celle-ci ; cet état sera-t-il viable ? S’il est exact qu’Olmert a l’intention de conserver en permanence les blocs d’implantations, un « grand Jérusalem » israélien et le contrôle effectif de tout le pays jusqu’au Jourdain inclus, tpout ce qui aura été fait ne sera rien d’autre que le remplacement de l’occupation par une forme sophistiquée d’apartheid.

Le diable se loge dans les détails.

L’auteur est le coordinateur qu Comité Israélien Contre les Démolitions de Maisons

jeff@icahd.org


Cet article est paru pour la première fois dans l’édition du 6 novembre du Jérusalem Post

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Et voici l’original en anglais

Whose road map ? - By Jeff Halper

Date : 07 / 11 / 2007 Time : 11:54

Jerusalem - Jerusalem Post - As did his pronouncements last August in Jericho, where Prime Minister Ehud Olmert indicated a willingness to withdraw from an area equivalent to 100% of the occupied territories, his latest declarations to the Saban Forum, in the presence of Condoleezza Rice and Tony Blair, sounded promising, even stirring. "Annapolis is a landmark," he said, "on the path to negotiations and of the genuine effort to achieve the realization of the vision of two nations : the State of Israel - the nation of the Jewish people ; and the Palestinian state - the nation of the Palestinian people."

Moreover, he expressed the hope that the two-state solution would be achieved before US President George W. Bush’s term ends in January 2009.

The speech sounded sincere, even impassioned. Olmert gave the impression that he was willing to confront all the difficulties - including the necessity of Israel fulfilling its part of the road map bargain. He stated firmly and clearly that Israel had now "partners for peace" in the Palestinian leadership. All the bases appeared to have been covered ; the commitment of the Israeli government to the road map and a two-state solution beyond doubt.

SO WHAT is the problem ? The missing piece, the crucial document that subverts any viable two-state solution, a factor in Israel’s strategic considerations mentioned by Olmert as an aside only a few days ago, is Bush’s letter of April, 2004, to then-prime minister Ariel Sharon. This little-noticed document fundamentally changed the parameters of what is to be discussed in any "peace process" and what Israel’s obligations are under the road map. It is considered by the Israeli government as perhaps the most crucial element in its effort to retain the major settlement blocs and in that way foreclosing the possibility of a viable Palestinian state.

The essence of the Bush letter, which was subsequently ratified by the House of Representatives by a vote of 407-9 and by the Senate by 95-1, is the following passage : "In light of new realities on the ground, including already existing major Israeli populations centers, it is unrealistic to expect that the outcome of final status negotiations will be a full and complete return to the armistice lines of 1949."

In one seemingly innocuous sentence, President Bush fatally but knowingly undermined UN Resolution 242, the very basis of the two-state solution since 1967 and of his own road map initiative, by nullifying the requirement that Israel return to the Green Line (with agreed-upon adjustments) so that a viable Palestinian state might emerge.

Israel takes the American position - rejected by the other three members of the road map Quartet, the UN, Europe and Russia, but so what ? - as agreement to its retaining its major settlement blocs. They are six or seven in number : the Jordan Valley, the Ariel bloc, the Modi’in bloc, the three blocs that make up "Greater Jerusalem" (Givat Ze’ev, Ma’aleh Adumim and the Etzion Bloc/Efrat), and perhaps a salient into the Hebron.

When, then, Olmert speaks of "conforming to the road map," he speaks of withdrawal from all the occupied territory outside those settlement blocs, since the Bush letter de facto annexes them to Israel. The massive building of settlements and highways within these settlement blocs do not, therefore, constitute a breach in Israel’s responsibility to end settlement construction in the first phase of the road map, since they are no longer parts of the occupied territory.

The area of the settlement blocs that Israel wishes to retain may not seem like much ; between 10-20% of the West Bank, including "Greater Jerusalem." But they are crucial for a viable Palestinian state - and "viability" is a term of reference in the road map.

The settlement blocs of an Israeli "Greater Jerusalem" remove from the Palestinians the economic heart of their future state, since up to 40% of the Palestinian economy, according to the World Bank, revolves around tourism in Jerusalem. The other blocs carve the West Bank into three "cantons" (Sharon’s term, since Olmert’s Convergence Plan, which he never abandoned, is based on Sharon’s Cantonization Plan). The Jordan Valley bloc ensures Israeli control of the border and of the Jordan River’s water.

Indeed, while accepting the road map, Olmert has in mind a very different document than that of the UN, the Europeans, the Russians and the Palestinians themselves. Integral to Israel’s version of the document are the "14 reservations" it appended, which effectively nullify the road map as a genuine path to peace.

Reservation # 5, for example, states that "The provisional state will have provisional borders and certain aspects of sovereignty, be fully demilitarized…, be without the authority to undertake defense alliances or military cooperation, and Israeli control over the entry and exit of all persons and cargo, as well as of its air space and electromagnetic spectrum."

IN THE end, the Palestinians may get 80-90% of the West Bank, but they do not get a viable state. They will have sterile swatches of territory whereas Israel retains control of the borders, movement of people and goods both within the Palestinian state and between it and the countries around, much of the country’s arable land, almost all its water, the Palestinians’ airspace and even control of their communications. The Palestine state is deprived of a viable economy. Given that 60% of Palestinians are under the age of 18 and that mini-state must absorb hundreds of thousands of refugees, it’s prospects for being a viable, stable and truly independent state are nil given the unspoken parameters outlined in the Bush letter.

There will be a Palestinian state. Israel has an urgent demographic need to get the almost four million Palestinians of the occupied territories off its hands. It might even attempt to "swap" a couple hundred thousand Israeli Arab citizens of the Galilee Triangle under the pretense of giving the Palestinians more land. The crucial question is : will it be a viable state ? If it’s true that Olmert intends that Israel permanently retain the settlement blocs, an Israeli "greater" Jerusalem and effective control of the entire country to the Jordan River, then we will merely be substituting a sophisticated form of apartheid for occupation. The devil is in the details.

The writer is the coordinator of the Israeli Committee Against House Demolitions.

jeff@icahd.org


This opinion article originally appeared in the 6 Nobember edition of the Jerusalem Post.