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Paix et Justice au Moyen-Orient (volet N° 47)
Aujourd’hui : A qui profite le chaos au Moyen-Orient ?
Notre rubrique géopolitique
vendredi 10 août 2007
Strasbourg, le 10 août 2007
Le gouvernement israélien est sur la même longueur d’onde que le complexe militaro- industriel américain
Alors que les tensions ne cessent de croître au Moyen-orient, les médias ont publié le projet surprenant de l’administration Bush de vendre en dix ans pour 20 milliards de dollars d’équipements militaires à l’Arabie saoudite et à cinq autres pays du Golf persique (Qatar, Bahreïn, Koweït, Oman, Emirat arabes unis). Parallèlement, l’aide militaire à Israël sera augmentée de 25% et celle promise à l’Egypte atteint 13 milliards de dollars (Le Monde du 31/07/07).
Ces ventes massives de matériels militaires ne sont possibles que si deux conditions sont réunies :
1- Grande tension et guerres régionales,
2- Solvabilité des pays acheteurs.
Concernant le premier point, depuis la naissance du « Grand jeu » en 1809, l’Asie centrale et le Moyen-Orient sont en état de tension permanente. A différentes époques, la rivalité entre les Empires russe et britannique a conduit au démembrement, à l’écrasement voire à l’asservissement des pays de la région (Turkménistan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Arménie, Géorgie, Caucase, Azerbaïdjan).
Sur des bases ethniques ou religieuses, si ce n’est dénuées de tout lien historique entre les régions formant une entité territoriale, certains pays ont été créés selon des intérêts colonialistes. Ainsi, le Pakistan, l’Irak, Israël, le Liban, l’Arabie saoudite, la Jordanie, le Koweït, l’Emirat arabe unis, etc., sont nés dans les bureaux du « Foreign office » britannique, alors que, selon des révélations récentes, les Etats-Unis cherchent à remodeler les frontières des Etats existants. Le mensuel « Armed Forces Journal » de juin 2006, publiant le fruit des réflexions de l’état- major interarmes des Etats-Unis, a présenté une carte du Moyen-Orient remodelé. Sur cette carte, l’Arabie saoudite, l’Iran, le Pakistan, l’Afghanistan et la Turquie sont démantelés et de nouveaux pays sont créés sur des bases purement ethniques et religieuses. Par ailleurs, Israël n’a jamais caché son intention de favoriser au Liban la création d’Etats maronite, chiite et sunnite.
Ces manœuvres de division colonialiste, s’accompagnent toujours de déportation et de massacres collectifs. Lors de la partition de l’Inde, on dénombre selon certaines estimations, un million de morts en trois mois. Quinze millions de personnes passèrent la frontière dans les deux sens. En Palestine, selon l’AFP, on compte 5803 victimes depuis 2000, en majorité des Palestiniens (LM du 4/08/07).
Depuis lors, la guerre n’a jamais cessé entre les Etats de la région, en majorité alliés des colonialistes occidentaux. L’Inde et le Pakistan se sont fait quatre fois la guerre : en 1948, 1965, 1971 et 1999. Les escarmouches irano- irakiennes se sont finalement transformées, de 1980 à 1988, en huit années d’une guerre meurtrière, encouragée par les Occidentaux et financée par les pays arabes « amis », causant des centaines de milliers de morts et d’ innombrables dégâts matériels. Les Etats arabes et Israël se sont fait plusieurs fois la guerre et restent en état d’alerte permanente. La dernière guerre entre Israël et le Liban date de juillet-août 2006 et la tension reste très vive entre Israël, d’une part et la Palestine, le Liban, la Syrie et l’Iran d’autre part.
Peut-on évaluer la quantité monumentale d’armes et de munitions utilisées, ainsi que leur valeur, durant les guerres qui ont déchiré la région ? A qui profite la consommation phénoménale d’armes au Moyen-Orient ? Cherche-t-on vraiment la baisse de la tension, voire la paix, en Irak, en Afghanistan, en Palestine ? Comment, dans ce cas, expliquer les bombardements fréquents de la population civile afghane par l’aviation de l’OTAN ?
Pour résoudre le conflit israélo- palestinien, une nouvelle réunion est prévue en novembre à Washington, même si « les invités ne sont toujours pas connus » (LM du 04/08/07). Pour Condoleezza Rice : « Il existe une volonté des deux côtés d’aller de l’avant pour parvenir à une solution à deux Etats » (LM du 04/08/07). Mahmoud Abbas commence à rêver d’une déclaration de principe en vue de la création d’un Etat palestinien. Tandis que les responsables israéliens préfèrent parler d’un simple « horizon politique » quant à l’avenir des territoires occupés.
Ces dissensions laissent à penser que Condoleezza Rice n’est pas maître à bord. Ehoud Olmert n’est pas disposé à résoudre la question israélo-palestinienne et préfère entretenir la tension. De fait, le gouvernement israélien est sur la même longueur d’onde que le complexe militaro- industriel américain, qui ne peut vivre que de tensions et de guerres. En effet, toutes les tentatives de médiation des pays arabes « amis » des Etats-Unis, conduisant à la baisse des tensions au Moyen-Orient, ont été torpillées séance tenante, soit par l’armée israélienne soit par les positions intransigeantes des Etats-Unis et d’Israël.
La tension politique favorise l’armement, voire, le surarmement. Actuellement, un nouveau foyer conflictuel se développe autour du pétrole et de l’uranium africains. L’Union européenne enverra des troupes au Soudan et dans les pays limitrophes, tandis que la Libye s’arme auprès de l’industrie française. En même temps que le Moyen-Orient, de la Somalie à la Guinée, en passant par le Soudan, l’Afrique s’apprête à s’enfoncer à son tour dans le chaos, donc dans la consommation d’armes. Qui dit pays riches en pétrole et en uranium, dit pays solvables !
Pourtant les conflits et la guerre n’entravent jamais le commerce mondial d’armes et d’énergie. Durant les multiples guerres (Irak- Iran, guerres du Golfe, etc.), les détroits d’Ormuz ou de Bab al Mandab sont restés navigables. Nuisible aux intérêts géostratégiques des Etats-Unis impliqués en Afghanistan, la dernière tension Indo- pakistanaise fut rapidement réglée par Colin Powell, l’ancien secrétaire d’Etat américain.
Comme tout règne, celui des "marchands de canons" ne peut perdurer éternellement car il n’engendre que malheurs, discriminations et "ingérence humanitaire colonisatrice" des plus puissants.
Face à cet état de fait, les foyers de résistance se multiplient, animés, ici par la désespérance, là par la soif de justice et de liberté ; le temps viendra (proche ou lointain ?) où ils s’uniront pour faire face.
Le comité de rédaction