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Est-ce trop demander que l’Europe joue son rôle sur la scène internationale ?

Proche-Orient : la cruelle irresponsabilité occidentale

par Jean-Claude Lefort

samedi 23 juin 2007

Et voilà maintenant que de Washington à Tel-Aviv, de Paris à Bruxelles il n’est qu’un chœur : « Nous allons lever les sanctions anti-palestiniennes et nous apportons notre soutien au nouveau gouvernement palestinien. »

Quelle est donc la raison de ce qui peut apparaître comme un revirement ? Il n’en est pas question. Pourtant il est deux choses établies. La première c’est que les sanctions jusqu’ici appliquées ont abouti aux sanglants événements de Gaza. Il n’est jamais de bonnes sanctions contre tout un peuple. La seconde c’est que contrairement à ce qu’y était indiqué jusqu’à hier, l’Occident ne cherchait pas une évolution du Hamas mais sa mise hors jeu du pouvoir. Il n’est pire que la politique du même nom.

On passe en force. On impose. On manœuvre depuis Washington et Tel-Aviv. On fait du carotte et bâton. On soutient comme la corde du pendu. On exclut. On forme et on défait les gouvernements. On s’assied ouvertement sur la démocratie. On bafoue la loi fondamentale palestinienne. On pousse encore aux affrontements cruels qu’on a déjà alimentés. On tient la population de Gaza en « service minimum » humanitaire. On fabrique une nouvelle poudrière porteuse de guerre civile. On en est bien content. On le dit. Et après cela on lève, peut être, les sanctions. Peut-être : car rien n’est encore fait aujourd’hui. Et après tout cela on nous fera croire qu’on veut la paix au Proche-Orient ?

Je rappelle que les élections voulues par l’Occident dans les Territoires occupés ont abouti aux élections législatives, au résultat que l’on sait. La loi fondamentale palestinienne ne permet pas la nomination d’un gouvernement qui soit autre que celui résultant des urnes. C’est vrai partout en démocratie. Le Quartet a appelé à un gouvernement d’Union nationale et posé des conditions. Trois. Elles ont été remplies avec l’Accord de La Mecque. Mieux, le Plan de paix arabe a été réactivé à Riyad.

Tout était donc en place du côté palestinien et arabe pour non seulement que les sanctions soient levées mais que soit initié un processus politique qui satisfasse aux deux exigences : la création d’un Etat palestinien et l’application des résolutions de l’ONU d’une part, et, d’autre part, le droit d’Israël d’exister et de vivre en paix et en sécurité. L’un des termes supposant l’autre. A qui veut bien le voir.

Or, sans revenir sur l’incroyable politique occidentale qui n’est que meurtrière, la décision évoquée de lever les sanctions, si elle est nécessaire n’est strictement pas suffisante. La question fondamentale est : quelles initiatives politiques le Quartet est-il décidé à prendre pour que s’ouvre un espace d’avenir pour les Palestiniens qui endurent, le mot est faible, une occupation étrangère depuis 40 ans.

Sur ce point c’est le silence total. Rien de prévu. Rien. Donc on ne veut pas. On peut dire tout ce qu’on voudra mais la chose est établie : on ne veut pas d’accord global de paix. Pourtant hors cet accord point de salut. Ni pour les Palestiniens, ni pour Israël.

L’urgence est là. Elle est dans l’application de la Charte des Nations unies, simple morceau de papier pour cette région du monde. Deux poids, deux mesures. Elle est dans l’application du chapitre VII de cette Charte solennelle. Tout le monde peut le comprendre, même un French Docteur Honoris causa. L’histoire convoque l’intelligence de la paix. C’est plus courageux et plus difficile que de faire la guerre. Surtout quand on la commet en toute impunité. Et la paix ce n’est pas seulement l’absence de guerre. C’est la justice accomplie.

Nous ne serons jamais assez intransigeants, alors qu’il est tant question d’Europe aujourd’hui, pour exiger d’elle qu’elle soit à la pointe de ce combat. C’est sa raison d’être théorique. Il faut qu’elle passe à la pratique en s’émancipant de son suivisme pro-américain et israélien. Est-ce trop demander que l’Europe joue son rôle sur la scène internationale ? Son rôle propre ? Si on nous répond « non, c’est impossible » alors inéluctablement l’Europe sera réduite à néant. Cela demande beaucoup ? Il suffit d’en avoir le courage ! Avoir le courage d’oser.

Jean-Claude Lefort Député honoraire du Val-de-Marne Le 22 juin 2007