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Paix et Justice au Moyen- Orient (volet N° 18)

Aujourd’hui:Du conflit régional au conflit mondial ?

Notre rubrique géopolitique

dimanche 11 février 2007

STRASBOURG le 12 février 2007

Dans le jargon des colonialistes, ce sont toujours les agressés qui sont les agresseurs !

Selon un rapport récent des services de renseignements américains, l’Irak s’enfonce dans le chaos. Il a, de toute évidence, pour objectif de justifier l’envoi de troupes supplémentaires en Irak. A sa lecture on peut se demander si la situation chaotique de l’Irak a modifié la politique moyen-orientale des Etats-Unis ?

A entendre Robert Gates, secrétaire à la défense, celui-là même qui avait dit que les Etats-Unis ne peuvent pas gagner la guerre, il existe aujourd’hui quatre guerres civiles en Irak : une guerre intercommunautaire, une guerre intra-communautaire, une guerre provoquée par les insurgés et une guerre liée à Al-Qaida ! Le sénateur Biden, candidat à l’investiture démocrate a dit de son côté : « Monsieur le président, n’envoyez pas davantage d’Américains au milieu d’une guerre civile. ».

La « nouvelle stratégie » de la Maison Blanche est contestée par le Congrès et la majorité de l’opinion. Elle a été critiquée devant la Commission des forces armées du Sénat par le général Casey, ancien commandant des troupes américaines en Irak. A son tour, Hillary Clinton a des difficultés à trouver sa voie. Elle se dit prête à un dialogue des Etats-Unis avec l’Iran, la Syrie, le Hamas et le Hezbollah sans pour autant exclure la possibilité d’une intervention militaire contre l’Iran. Elle n’est pas la seule à dire tout et son contraire. Les sénateurs démocrates et républicains sont plus que jamais divisés sur la conduite de la guerre. Les démocrates ont voté un projet de résolution du sénateur républicain de Virginie John Warner, affirmant que le Sénat « est en désaccord » avec le plan du président. Cette résolution, a été votée avec le soutien de deux transfuges républicains, qui ont subi des pressions dans les journaux néo-conservateurs. Un texte de soutien aux soldats a failli faire capoter la première résolution.

Les menaces proférées contre l’Iran font apparaître une autre facette du chaos régnant aux Etats-Unis. Manifestement, tout le monde n’a pas la même opinion concernant l’envoi de forces navales dans le Golfe persique. Devant la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, Condoleezza Rice, « ange de la mort », nie en bloc les intentions belliqueuses à l’égard de l’Iran : « Nous ne prévoyons ni ne préparons d’attaque contre l’Iran. Nous ne faisons que répondre aux attaques iranienne qui menacent notre sécurité nationale. » (Le Monde du 09/02/07). Autrement dit : les Américains n’attaquent pas ; ils « se défendent » en contre-attaquant ! On connaît la chanson : dans le jargon des colonialistes, ce sont toujours les agressés qui sont les agresseurs !

Une autre voix d’opposition, celle de Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller diplomatique de Jimmy Carter, analyse l’essence même de la politique américaine : « L’échec des Irakiens sera imputé à l’Iran. » D’où l’envoi de porte-avions, de sous-marins nucléaires et d’autres navires de guerre dans le Golfe persique.

La prise de position de Brzezinski et de certains généraux contre une intervention militaire en Iran révèle leur inquiétude face au risque d’une extension du conflit à la Russie. En effet, les Russes, qui subissent déjà la pression de l’Occident par l’ouest, sont très allergiques à l’ouverture d’un nouveau front à leur frontière méridionale. Le renforcement de la présence américaine dans le Golfe persique est ressenti comme une menace pour la sécurité de la Russie. C’est pourquoi, au cas d’un conflit éventuel américano-iranien, une intervention « préventive » russe est plus que probable. Le déploiement d’un bouclier antimissile américain sur le territoire de la République Tchèque et de la Pologne, répond effectivement à l’éventualité d’une réaction hostile des Russes. Ces derniers n’ont pas tardé à réagir : « Nous devons avoir la capacité de battre tout système antimissile » a précisé Sergueï Ivanov, le ministre russe des affaires étrangères. Le risque qu’un conflit de nature locale ou régionale dégénère rapidement en conflit mondial ne peut être nié.

L’évocation par Vladimir Poutine de la création d’un cartel de gaz entre principaux producteurs (Russie, Algérie et Iran) répond-t-elle au souci mutuel des Russes et Iraniens de créer un rapport de force pour contrebalancer les chantages militaires et technologiques de l’Occident ? La question mérite d’être posée.

Face à la montée de la tension à l’échelle mondiale, les alliés des Etats-Unis prennent leurs distances. Paris appelle à un retrait militaire américain d’Irak en 2008. Rome hausse le ton contre Washington et menace de retirer ses 2000 militaires d’Afghanistan (Le Monde du 08/02/09). Le ministre nippon de la défense critique la guerre en Irak.

En raison de la résistance des milieux pacifistes aux Etats-Unis et dans le but de faire pencher la balance en faveur des faucons américains, Israël amplifie ses provocations au Moyen-Orient. Dans la soirée du mercredi 7 février, un échange de tirs a opposé l’armée libanaise à une unité de l’armée israélienne, après qu’un bulldozer eut franchi sa frontière. Une deuxième provocation israélienne se manifeste sous le prétexte de « fouilles archéologiques », à l’une des entrées de l’Esplanade des mosquées à Jérusalem.

En cas de conflit américano-iranien, une question se présente à l’esprit : comment les Etats-Unis pourront-ils vaincre l’Iran, alors qu’ils pataugent depuis trois ans dans le bourbier irakien, dans un pays moins vaste, moins peuplé, moins préparé et moins équipé que l’Iran qui, lui, dispose d’une industrie d’armement et d’une panoplie de missiles de fabrication nationale, sol-sol, sol-air, sol-mer de grande portée ? S’il est vrai qu’ils pourront causer d’importants dégâts à l’Iran, pays en développement, Ils ne resteront pas indemnes à leur tour.

L’expérience de la guerre en Irak montre que chaque coup porté à la puissance américaine, l’affaiblira en contre-coup. Le Golfe persique pourrait bien marquer la fin de sa suprématie.

La présence de l’Iran et de la Syrie, deux pays indépendants du Moyen-Orient, annonce vraisemblablement la libération des pays du « Grand Moyen-Orient » de la domination Occidentale. Le développement de la région du Proche et du Moyen-Orient commencera le jour où cessera sa destruction systématique par les colonialistes américano-britanniques.

Le comité de rédaction