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Par Khaled Amayreh

Echec de la diplomatie palestinienne en 2006

Source : Palestine Info

samedi 6 janvier 2007

Jan 6, 2007, 09:59

En 2006, la diplomatie palestinienne a presque complètement échoué à atteindre ses objectifs principaux. Echec, d’abord, à mettre un terme à l’occupation militaire israélienne qui a commencé en 1967 ; échec ensuite, à lever le siège draconien imposé par Israël, les Etats-Unis et l’Union Européenne, en connivence avec certains régimes arabes, dans le but de punir le peuple palestinien pour avoir élu le Hamas ; et enfin, l’abandon de notre peuple à la brutalité et la criminalité israéliennes.

Au cours de l’année passée, le Président de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas a visité de nombreuses capitales, dont Washington D.C., et a reçu à Ramallah une foule de dirigeants et de diplomates étrangers.

Pourtant, ces réunions et rencontres au somme n’ont mené à rien en termes de résultat positif tangible, à part les plaisanteries habituelles et les pièges des relations publiques.

En fait, un recensement méticuleux des rencontres d’Abbas avec les dirigeants étrangers en 2006 (c’était pareil en 2005) montre que la direction palestinienne a lamentablement échoué dans la communication des messages qu’elle aurait dû faire passer aux visiteurs étrangers.

Abbas a par exemple fait peu ou pas d’efforts pour dire à la communauté internationale qu’il était injuste et peu judicieux de punir les Palestiniens ordinaires parce que le Hamas refusait de reconnaître Israël, et que c’était illogique de demander au Hamas de reconnaître Israël sans demander à Israël la reconnaissance réciproque d’un Etat palestinien souverain en Cisjordanie, Est Jérusalem et la Bande de Gaza.

Il a aussi lamentablement échoué à transmettre efficacement et clairement le message que l’élection du Hamas en Janvier 2006 n’impliquait pas réellement que les Palestiniens dans leur majorité étaient opposés à la paix avec Israël ou qu’ils voulaient la destruction de l’Etat d’apartheid, comme la propagande israélienne a réussi à en convaincre la communauté internationale.

Les remarques et déclarations d’Abbas en présence des visiteurs étrangers ont souvent suggéré qu’il était peu ou prou d’accord pour dire que le peuple palestinien s’était trompé, pour employer un euphémisme, en élisant le Hamas, et devait en subir les conséquences.

De plus, la direction de l’Autorité Palestinienne, en 2006, s’est rendue coupable de complaisance en cherchant à apaiser et à plaire à l’Ouest, en particulier aux Etats-Unis, en donnant l’impression que l’Autorité Palestinienne, en particulier le Fatah, rejoignait la « coalition des modérés » pro-américaine, qui inclut les régimes pro-américains du Moyen Orient contre la coalition anti-israélienne, qui inclut le Hamas, le Hizbullah, la Syrie et l’Iran.

Eh bien, donner cette impression est faux et trompeur, parce que la Palestine et les Palestiniens sont occupés et martyrisés par Israël, dont l’occupation de notre terre est encouragée, soutenue et protégée par les Etats-Unis, pas par l’Iran, ni par le Hizbullah, ni la Syrie.

Sur ce point, nous devons noter le fait que ces classifications artificielles et malhonnêtes (les coalitions de modérés et d’extrémistes) sont utilisées par l’administration Bush en faillite pour redéfinir l’essence de la cause palestinienne, à savoir passer d’une occupation interminable criminelle et raciste de la Palestine et de la répression systématique de son peuple à un simple problème psychologique de modérés et d’extrémistes. C’est comme ça que l’administration Bush, en coordination avec quelques cercles sionistes, comme le soi-disant Centre pour la Paix Peres, en est venu à comprendre le conflit dans cette région.

C’est pour cela qu’ils essaient en permanence d’avoir des joueurs de football palestiniens (habituellement de jeunes garçons et filles non corrompus par la pensée extrémiste !) pour jouer contre leurs homologues israéliens ou jouer avec eux dans une équipe contre une équipe de football étrangère, comme cela est arrivé récemment en Espagne.

Eh bien, ils essaient de répandre le message que le problème n’est pas le viol de la Palestine par les Juifs, l’expulsion de millions de Palestiniens de leur patrie ancestrale, mais simplement un problème psychologique et quelques complexes non résolus.

Ayant effectivement rejoint « l’axe des modérés » (qui est en fait un axe de menteurs), Abbas a peut-être espéré que cette fausse proximité vis-à-vis des Américains le placerait en meilleure position pour arracher les droits palestiniens des mains criminelles d’Israël.

Mais c’est une idée à courte vue, sinon carrément naïve. L’administration américaine quasi messianique, qui croit que l’invasion, l’occupation et la destruction de l’Iraq ont été inspirées par Dieu, ne récompensera pas Abbas d’être modéré (dans le langage américain, « modéré » signifie « accepter l’occupation israélienne, abandonner Jérusalem ainsi que le droit au retour, et une grande partie de la Cisjordanie »).

Ceci est très clair, si on en juge par la récompense que l’Administration Bush a déjà donnée à l’Autorité Palestinienne.

Bien entendu, au lieu d’ordonner à Israël d’arrêter de construire des colonies racistes pour Juifs seulement et de mettre un terme à sa politique de rétrécissement de l’horizon palestinien, George Bush a décidé de nous donner des armes et des millions de balles pour nous entretuer. Qui plus est, le fait que la livraison de ces armes ait été soutenue par les amis d’Avigdor Lieberman et les juifs d’extrême droite aux Etats-Unis parle de lui-même.

C’est le même Bush qui, une fois, a décrit Ariel Sharon (nous savons bien qui est Sharon) comme un homme de paix et a récompensé son retrait artificiel de Gaza en légitimant des dizaines de colonies juives en Cisjordanie.

Notre direction doit réaliser que le peuple palestinien n’est pas un bélier de l’Eidul Adha, qu’on nourrit aujourd’hui pour le sacrifier demain.

Il est lamentable que les porte-paroles de l’Autorité Palestinienne, à commencer par Abbas, échouent scandaleusement à délivrer au monde les vrais messages.

C’est pour toutes ces raisons qu’en 2007, nous devons repenser nos actions concernant les tactiques médiatiques et la diplomatie et supprimer le discours public souvent embrouillé et confus. Pour y arriver, nous devons nous concentrer sur les messages suivants :

1) D’abord, que l’occupation israélienne est un viol et qu’elle est la mère de tous les problèmes, au Moyen-Orient et au-delà, et qu’il ne peut y avoir ni paix ni stabilité entre l’Islam et l’Occident, sans parler d’Israël et du monde musulman, tant que persistera l’occupation israélienne et que le peuple palestinien sera dénié de ses droits, y compris celui d’avoir un Etat viable et souverain avec Jérusalem Est pour capitale, ainsi que le retour des réfugiés palestiniens dans leur maisons et villages d’origine dans ce qui est actuellement Israël.

2) Que le Hamas est une force sociétale authentique qui ne peut pas être ni marginalisée ni éradiquée, et qu’il est futile et irréaliste d’affamer et de tourmenter le peuple palestinien pour affaiblir le Hamas.

3) Que le peuple palestinien n’acceptera ni par la persuasion, ni par des menaces, un Etat qui n’en aurait que la forme, et pas la substance.

4) De plus, l’Autorité Palestinienne devrait cesser de parler du Hamas en présence d’étrangers, en particulier les visiteurs américains, parce que cela donne l’impression que le réel problème tient dans l’existence du Hamas et non dans la réalité de la colonisation et de l’occupation israélienne de notre patrie.

L’autorité palestinienne devrait dire à la communauté internationale qu’elle est elle-même sous occupation israélienne, et que l’occupation israélienne de la Palestine est toujours aussi sinistre et directe qu’elle l’était avant la conclusion des Accords d’Oslo en 1993.

Evidemment, donner une impression fausse de la situation palestinienne par l’emploi de mots emphatiques et trompeurs comme « souveraineté » palestinienne et « gouvernement » palestinien et « forces de sécurité » palestiniennes va vraiment à l’encontre du but recherché et c’est très très nuisible aux aspirations palestiniennes pour une vraie liberté et un véritable Etat. Après tout, une liberté réelle ne peut être atteinte qu’après que notre pays soit réellement délivré de l’occupation nazie.

5) Enfin, il est triste que l’Autorité Palestinienne continue à employer des porte-paroles peu ou non qualifiés, avec des compétences politiques et linguistiques inadéquates pour communiquer le point de vue palestinien au monde extérieur.

Nous avons besoin de porte-paroles professionnels, connaissant parfaitement le monde, qui aient la maîtrise de langues étrangères, l’anglais en particulier, pour dire à l’extérieur, d’une manière directe, qu’Israël est un assassin, un menteur et un voleur de terre, et que le problème vient carrément du vol de notre terre par les sionistes et leur férocité envers notre peuple.

Traduction : MR pour ISM
http://www.palestine-info.cc/french/article_11667.shtml