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Paix et Justice au Moyen-Orient (volet N° 12)

Aujourd’hui : La carte palestinienne de Bush- Blair

samedi 30 décembre 2006

Strasbourg, le 30 décembre 2006

L’accolade Olmert- Abbas sera-t-elle le baiser de la mort du Président palestinien ?

Suite à l’enlisement de l’administration de G.W.Bush en Irak, une commission, du nom de Baker- Hamilton, fut mise en place pour aider les Etats-Unis à atteindre « leurs objectifs au Moyen-Orient ». Pour sortir de la crise, plusieurs scénarios ont été proposés dont « un dialogue constructif » avec la Syrie et l’Iran et le traitement du « problème du conflit israélo-palestinien. »

Par la bouche des « responsables du département d’Etat », Washington n’a pas écarté le principe d’une discussion directe avec l’Iran et la Syrie. Certaines capitales ont même rêvé de la « collaboration » de la Syrie afin de briser l’axe Damas - Téhéran et contribuer ainsi à l’isolement de l’Iran. Les ministres espagnol et allemand des affaires étrangères se sont rendus à Damas pour convaincre la Syrie de « se tourner vers l’Ouest » en lui faisant miroiter « une aide européenne en cas de son évolution favorable » vers l’Occident. Jusqu’au dernier moment la Syrie a multiplié les ouvertures en direction d’Israël, espérant pouvoir récupérer le plateau du Golan en contrepartie de ses éventuels bons offices en Irak et dans la région. De son côté, Tony Blair avait dépêché à Damas Nigel Sheinwald, son principal conseiller diplomatique.

Quelles sont les revendications de Damas et de Téhéran ? Pour Damas, il s’agit, ni plus ni moins, de récupérer le plateau du Golan et de faire reconnaître son rôle d’acteur régional face à Israël. Quant à l’Iran, sans vouloir détailler ses revendications, ce pays ne cache pas sa volonté de se protéger des visées agressives des Américano-britanniques, de restreindre leur marge de manœuvre au Moyen-Orient, de limiter la puissance israélienne et de faire reconnaître son rôle de « grande puissance » régionale, rivale des puissances occidentales. Les pourparlers américano-britanniques avec Damas et Téhéran ont vite montré leurs limites. Pour « stabiliser » la situation en Irak et au Moyen-Orient au profit du couple américano-britannique, le « coût » à payer à l’Iran et à la Syrie semblait trop élevé. G.W. Bush a même affirmé, mercredi 20 décembre, qu’il n’envisageait aucune discussion approfondie avec Téhéran et Damas. Ce qui signifie, en langage diplomatique, que les « discussions » pour résoudre l’ensemble des problèmes du Moyen-Orient attendront un nouveau rapport de forces militaire et politique. Des turbulences en perspective...

La troisième recommandation, le traitement du « problème israélo-palestinien », fut donc adoptée. Cette voie semble moins coûteuse et moins risquée pour les intérêts immédiats des américano-britanniques. Même si, selon les responsables militaires et diplomatiques occidentaux eux-mêmes, la situation en Irak et en Afghanistan ne cesse de se détériorer rapidement ; de plus, rien n’indique que les Américains arriveront à y rétablir leur crédibilité et leur puissance. La France a même annoncé le retrait de ses « forces spéciales » d’Afghanistan.

Un cessez-le-feu entre Israël et les Palestiniens à Gaza a été conclu le 26 novembre et le lendemain, Ehoud Olmert, le premier ministre israélien, s’est déclaré prêt à une « paix réelle » sous certaines conditions.

« La carte » palestinienne semble plus facile à manœuvrer et moins coûteuse. Contre quelques levées de barrages, la construction d’une série d’« échangeurs » le long de la route 60, ou la restitution d’une partie (100 millions sur les 500 millions de dollars) de taxes douanières palestiniennes confisquées par Israël, les américano-britanniques comptent mettre l’équipe de Mahmoud Abbas dans leur poche et la renforcer au détriment du Hamas. « Les Etats-Unis cherchent à renforcer les services de sécurité, c’est-à-dire la garde présidentielle. Plusieurs dizaines de millions de dollars devraient être débloqués à cette fin par le Congrès américain. » De même, Ehoud Olmert constate qu’« il faut tout faire pour renforcer Mahmoud Abbas. »(Le Monde du 20/12/06). Bref « pacifier » le front palestinien en le divisant, dans le but de s’occuper ensuite du front Nord (Liban, Syrie,...).

Dans la soirée du samedi 23 décembre, Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas se sont rencontrés et donnés l’accolade à Jérusalem. L’avenir dira si cette accolade est plutôt le baiser de la mort qui discréditera définitivement Mahmoud Abbas aux yeux des Palestiniens humiliés, ou si elle aidera à résoudre la question palestinienne ? On peut en douter, sachant que les droits nationaux du peuple palestinien ne sont pas à l’ordre du jour de Bush-Blair-Olmert.

Tout porte à croire que la « carte palestinienne » aura pour conséquence de retarder la résolution des problèmes du Moyen-Orient et qu’une fois les effets de cette « carte » dissipés, les problèmes, y compris la question palestinienne, referont surface avec encore plus d’acuité et de douleurs pour les peuples de la région.

En attendant, les Etats-Unis multiplient les provocations. En guise d’avertissement à l’Iran, les Etats-Unis envisagent de déployer des porte- avions dans le golfe Persique en 2007. De son côté, l’armée américaine a arrêté en Irak des Iraniens dont des responsables militaires. Ces arrestations ont provoqué le mécontentement de Jalal Talabani, président irakien, qui a affirmé que deux Iraniens avaient été invités « dans le cadre de la coopération sécuritaire entre les deux pays. » (Le Monde du 27/12/06). Vu le discrédit américain grandissant au Moyen-Orient et l’impuissance de son armée à venir à bout de l’insurrection armée en Irak, on peut penser que, pour asseoir son autorité inexistante dans le pays, le gouvernement irakien cherche l’aide de l’Iran, suffisamment influent en Irak. L’intrusion officielle de l’Iran dans le pré carré américain a dû déplaire à l’Oncle Sam. S’agit-il d’un avertissement adressé au gouvernement irakien, sans souveraineté ni autorité ?

« La carte » palestinienne de Bush-Blair donne le signal de départ d’une nouvelle période de tensions, de provocations et de guerres au Moyen-Orient.

Le comité de rédaction