Accueil > Sociétés Civiles à Parlement Européen > GEL DES ACCORDS DE COOPERATION DE L’UNION EUROPEENNE AVEC ISRAEL (...)

« Frimas d’hiver »

GEL DES ACCORDS DE COOPERATION DE L’UNION EUROPEENNE AVEC ISRAEL ?

Par Véronique De Keyser, députée européenne

vendredi 10 novembre 2006

Dès que la paix dans le conflit israelo-palestinien semble à portée de main, elle s’échappe. Malédiction originelle ? Non : stratégie d’extrémistes, décidés à saborder tout processus de négociation.

Rappelons simplement qu’après l’échec de Camp David II Ehmud Barak avait repris le dialogue avec Yasser Arafat mais la promenade d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées d’Ariel interrompait brutalement ce rapprochement et déclenchait la seconde Antifada et sa spirale de violence.

Il y a quelques mois, après les élections législatives de janvier 2OO6 qui avaient démocratiquement porté le Hamas au pouvoir, l’espoir, une fois de plus d’aboutir a une solution durable a avorté.

Alors qu’un accord sur le document dit « des prisonniers » semblait sur le point d’aboutir - accord qui était un pas en avant puisqu’il reconnaissait implicitement l’Etat d’Israël et proposait de mettre fin aux attentats sur le sol israélien- le massacre d’une famille palestinienne sur la plage de Gaza rompait de facto la trêve du Hamas. La suite, on la connait : la machine de guerre est lancée et elle aboutit à la capture des soldats israéliens, à la « riposte disproportionnée » que fut la guerre du Liban, et aux opérations sanglantes à Gaza portant les doux noms de « pluies d’été » ou « nuages d’automne » : 25O morts à Gaza pendant la guerre du Liban, des morts à bas bruit, principalement des civils et des enfants, 6O morts ce dernier week-end.

Ce bain de sang ne peut se comprendre que parce que les négociations sur un gouvernement d’union nationale étaient relancées avec des chances d’aboutir. Les Etats-Unis ne veulent pas de ce gouvernement.et les Israéliens non plus. Ils l’ont dit et répété : cela ne changera rien pour eux et cela ne devrait rien changer dans la politique européenne vis à vis de la Palestine- en clair cela ne devrait pas aboutir à la reprise de l’aide européenne. Mais Abbas a toujours martelé qu’il n’accepterait un gouvernement d’union nationale que si ce dernier reconnaissait les accords de paix antérieurs et le droit à la sécurité de l’Etat d’Israël.

Les attaques sanglantes sur Gaza ce week-end dernier rendent intentionnellement quasi impossible cet acte de reconnaissance. Mieux encore. Les Etats-Unis proposent à Mahmoud Abbas de le soutenir et de l’appuyer - d’armer les troupes qui lui sont loyales en leur fournissant des milliers de fusils transitant par l’Egypte. Pour tirer sur qui ? Sur les Israéliens ? Non, bien sur : sur le Hamas. Une guerre civile fomentée en toute transparence devant une opinion européenne muette. A quel jeu mortel joue-t-on ?

Ce matin, à Gaza, nouvelle flambée encore plus meurtrière : près de vingt civils, dont des femmes et des enfants sacrifiés. Erreur de tir, semble-t-il ... comme sur la plage de Gaza ! Et la riposte du Hamas ne s’est pas fait attendre : il n’est plus question de gouvernement d’union nationale et les attentats suicides vont reprendre. Précisément, ce que le gouvernement israélien recherchait...

Le gouvernement israélien s’est allié à l’extrême droite sans provoquer de convulsion européenne et Xavier Solana a déjà rencontré le Ministre Lieberman ! Dans une récente discussion avec la ministre des Affaires Etrangères, Tzipi Livni, le Haut Représentant soulignait l’excellente collaboration qui les unissait et ajoutait en paraphrasant Martin Luther King- puisse le rêve devenir réalité. Mais quel rêve ? Le rêve de Monsieur Lieberman ? Mais ce rêve est notre cauchemar et celui de tout démocrate.

Jamais les Européens n’ont été aussi présents au Moyen Orient. Jamais nous n’y avons été dépensé autant d’argent, investi autant d’espoirs. Mais avec quels résultats ?

Allons-nous, après les pluies d’été et les nuages d’automne, écoper des frimas d’hiver ? Exigeons un cessez le feu immédiat !

Et si nous ne l’obtenons pas, utilisons alors les instruments de pression dont nous disposons. L’un d’eux est le gel des accords de coopération avec Israël. Ce n’est pas mon souhait, car ce serait sans doute une fois de plus prendre une population en otage - mais que faire si les gouvernements deviennent fous et si la diplomatie est impuissante à les arrêter ?

Véronique De Keyser

Députée européenne PSE

Chef de la mission d’observation de l’Union européenne des élections législatives en Palestine en 2006