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Source : VISCERAL - Auteur Thomas VESCO

Entre Israéliens et Palestiniens, le statu quo n’existe pas

Dimanche, 12 juillet 2015 - 18h09

dimanche 12 juillet 2015

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La notion de « statu quo » désigne une situation figée, l’absence de perspectives. Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, vient de terminer une tournée dans la région, motivé par son « opposition au statu quo ». Quiconque s’intéresse à la situation au Proche-Orient comprendra rapidement que le statu quo, tout imaginaire qu’il soit, ne profite qu’au colonisateur.

L’agression israélienne contre Gaza en juillet 2014 a fait 2 200 victimes palestiniennes dont 80 pour cent de civils. Mahmoud Hams/AFP

Depuis 2008, l’État d’Israël a mené quatre offensives sur la bande de Gaza. Celle de l’été 2014 a tué 2 132 Palestiniens, dont 70 % de civils, 501 enfants. 18 000 logements ont été détruits ou endommagés. Aucun programme de reconstruction n’a pu être envisagé, le blocus étant maintenu, aggravant la situation sanitaire du territoire. Récemment, un convoi humanitaire international a été empêché d’atteindre le port de Gaza par la marine israélienne. Peut-on parler de statu quo dans ces conditions ?

Depuis 1967, l’État d’Israël occupe et colonise la Cisjordanie. La population de colons est passée de 268 756 en 1993 à 575 000 aujourd’hui, dont 200 000 à Jérusalem-Est. Pas une semaine ne passe sans que le gouvernement israélien annonce un nouveau projet de construction. L’Organisation de libération de la Palestine s’est lancée dans une intifada diplomatique, en adhérant notamment à la Cour pénale internationale pour y faire traduire les responsables des crimes militaires israéliens. Une démarche qu’Israël et ses alliés nord-américains tentent de saborder. Peut-on parler de statu quo dans ces conditions ?

La force de la propagande israélienne tient dans sa capacité à se diffuser, insidieusement, même là où on ne l’attend pas. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai lu que les Palestiniens ne devaient leur sort qu’à leur propre chef puisqu’ils avaient vendu leur terre. Entendu en Israël, cet argumentaire se retrouve assez fréquemment dans les rues d’Égypte ou du Liban, de Tunisie ou de Jordanie. Une victoire pour la « hasbara » (explication), alors qu’un simple examen historique ferait voler en éclats cette affirmation perverse. Il en va de même pour le statu quo.

L’État d’Israël a tout à gagner à maintenir ce « statu quo ». Le blocage insinué détourne les yeux de l’opinion internationale vers d’autres régions, tandis que la guerre invisible, incluant colonisation, apartheid et sociocide, peut se poursuivre en silence. Dans ce schéma, périodiquement, l’État hébreu peut même envisager une opération d’envergure à Gaza ou en Cisjordanie. Le temps que les « alliés » des Palestiniens se réveillent, tout est déjà terminé.

Le gouvernement Netanyahu n’a aucun intérêt à montrer publiquement une quelconque inquiétude à l’égard d’une campagne internationale ciblant son pays. Pourtant, depuis plusieurs mois, ses diplomates s’activent pour empêcher les victoires diplomatiques palestiniennes, et s’inquiètent de la propagation de la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS). En 2012, de nombreux amis israéliens m’expliquaient encore les dangers d’une telle campagne, utilisée par Netanyahu pour pointer la haine des peuples étrangers à l’égard des Israéliens, et donc légitimer sa politique. En 2015, très peu me l’affirment encore, et le célèbre romancier Avraham Yehoshua prend la parole publiquement pour soutenir la pression diplomatique et économique sur son pays, ultime solution pour contraindre ses dirigeants à stopper leur politique suicidaire.

Les dirigeants israéliens savent ce qu’ils font. Ils imposent leur projet politique à l’ensemble des peuples du Proche-Orient. Plus que jamais, nous devons combattre la propagande israélienne et exiger de nos gouvernants des prises de position courageuses. Exiger de nos commerçants l’arrêt des importations des produits israéliens. Bâtir et solidifier des ponts entre nos sociétés et le peuple palestinien, car c’est en faisant exister l’État de Palestine que la justice et la paix auront une chance de régner au Proche-Orient. Le dernier camouflet d’Israël au Conseil des droits de l’homme de l’Onu nous y invite.