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Déclaration solennelle du Président Mahmoud ABBAS :

« Le temps est venu pour la Palestine »

Dimanche, 10 mai 2015 - 15h08

dimanche 10 mai 2015

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Traduction non-officielle de l’anglais

Mahmoud Abbas

La lutte du peuple palestinien pour la liberté et l’indépendance nationale a atteint son heure de vérité. La formule des deux États est sérieusement menacée à cause des politiques et pratiques israéliennes qui la compromettent gravement et systématiquement et qui menacent de la rendre inapplicable dans un avenir très proche. Plus alarmant, alors que la Palestine prend des mesures déterminées et concrètes afin de démontrer son attachement au droit international et aux droits de l’Homme en voulant accéder aux principaux instruments du droit international, Israël a pris des mesures concrètes pour les miner, tout en déclarant ouvertement et sans ambiguïté, son hostilité aux droits nationaux palestiniens.

Ceci survient au même moment où les réfugiés palestiniens sont massacrés en Syrie – victimes d’un conflit auquel ils n’ont jamais pris part. Les images qui parviennent du camp des réfugiés d’Al Yarmouk, ainsi que d’autres camps palestiniens en Syrie rappellent celles du Liban en 1982 et d’Irak en 2003. Elles sont un rappel de l’urgence d’honorer les droits inaliénables du peuple palestiniens, y compris ceux de ses réfugiés. Plus de 200 enfants palestiniens qui meurent de faim pendant le siège du camp est un cruel rappel de l’échec total de la communauté internationale à protéger les civils en temps de guerre.

Il est temps de mettre fin à la tragédie palestinienne en protégeant les droits des palestiniens en vertu du droit international.

En tant que l’un des architectes de l’Accord Intérimaire d’Oslo, je peux dire sans aucune hésitation que les palestiniens ont compris et approuvé les compromis douloureux et nécessaires pour parvenir à la paix, bien avant que les Accords d’Oslo soient signés. En 1988, la Palestine a unilatéralement reconnu Israël sur plus de 78 pour cent de la Palestine historique, en plus de reconnaître les résolutions pertinentes des Nations Unies comme cadre de travail pour parvenir à une résolution pacifique du conflit.
Quand la Palestine a signé les Accords d’Oslo avec Israël, elle l’a fait en fondant son engagement même, sur la solution des deux États. En effet, la Palestine a montré à travers des actions démontrables et pratiques son fervent attachement à la vision de deux États souverains et démocratiques vivant côte à côte dans la paix et la sécurité sur les frontières de 1967.

La réponse israélienne

Israël a accueilli ces compromis palestiniens historiques et douloureux par la création et l’expansion de colonies illégales en territoire palestinien, ainsi que par la violation systématique du droit international et des dispositions de l’accord.
En fait, depuis la signature des Accords Intérimaires d’Oslo, il y a plus de vingt ans, Israël a triplé le nombre de citoyens illégalement transférés pour vivre dans les colonies illégales, dont le nombre croît constamment. Israël a perpétré ces violations en toute impunité – encouragée par la réticence de la communauté internationale à tenir Israël pour responsable devant les mêmes normes des droits de l’homme que tous les autres États sont tenus de suivre.

Les Accords d’Oslo étaient fondés sur la promesse d’aboutir à un accord de statu final après une période intérimaire de cinq ans. Aujourd’hui, vingt deux ans après les Accords d’Oslo, l’occupation israélienne s’est muée en une annexion de fait de notre pays.

En outre, Israël s’est livrée à un acte de piraterie pure et de punition collective contre le peuple palestinien – nommément, l’obstruction permanente de la libre circulation des personnes et des biens, le vol de nos ressources naturelles, notamment l’eau, et la confiscation répétée de nos recettes fiscales. Cette mesure illégale menace de déconstruire les accomplissements remarquables des palestiniens aux niveaux institutionnels et économiques. C’est un acte extrême d’hostilité dans le but d’exercer un chantage politique.

Justice et réparation

Face à ces graves menaces qui pèsent sur nos droits nationaux et notre survie économique, il est de notre devoir, en tant que dirigeants palestiniens, de demander justice et réparation par tous les moyens légitimes disponibles. Cela comprend une réévaluation sérieuse et responsable de nos relations avec Israël, dans le but de veiller à ce que celle-ci, ne soit plus en mesure d’utiliser notre respect des accords signés aux fins de bafouer nos droits, notre économie, voire notre subsistance la plus élémentaire.

Notre stratégie pacifique et positive vise à changer l’inacceptable et insoutenable statu quo. Nous sommes déterminés à veiller à ce qu’Israël ne soit plus autorisée ou en mesure de profiter d’un État belligérant, colonial et militarisé, comme elle l’a fait depuis près de cinquante ans. Notre objectif reste le même : implémenter la formule des deux États en conformité avec le droit et le consensus international. Nos instruments sont également clairs : nous nous appuyons sur les outils que sont le droit international et les droits de l’homme et qui ont été conçu pour résoudre les conflits pacifiquement et éviter les indignités de la guerre.

Tous nos efforts, s’appuient sur l’immuable fermeté de notre peuple et son droit à manifester pacifiquement et faire campagne contre l’occupation israélienne et ses politiques d’apartheid. Nous trouvons aussi un solide appui dans le grand et croissant mouvement de solidarité de par le monde.

Mettre fin à l’occupation

Le peuple palestinien poursuit une stratégie d’internationalisation pour mettre fin à l’occupation, parvenir à une pax juste et durable, et mettre l’outil indispensable qu’est la demande de rendre des comptes afin de mettre fin à la culture d’impunité d’Israël qui a perpétué le conflit et consolidé l’occupation.

Pendant ce temps, les dirigeants israéliens ont clairement indiqué et répété leur détermination d’empêcher la création de l’État de Palestine, en poursuivant le programme d’expansion des colonies, le racisme institutionnel et les pratiques d’apartheid - y compris contre des citoyens israéliens d’origine palestiniennes, comme cela a été clairement vu pendant les récentes élections.

En 1948, notre peuple a subi l’une des campagnes de déplacement forcé de population des plus dramatiques de l’histoire moderne. La Nakba, ou catastrophe, se réfère à l’annihilation de 418 villages palestiniens et le déplacement systématique et forcé de soixante-dix pour cent du peuple palestinien pour faire place à la création de l’État d’Israël – cela continue encore de nos jours. J’étais un jeune garçon alors, mais le souvenir du déracinement de ma ville natale de Safad reste encore vivace.
Aujourd’hui, les politiques et pratiques israéliennes font écho à ce déracinement dans la vallée du Jourdain, Hébron, Jérusalem Est et la bande de Gaza. Ce cycle de souffrance et indignités doit s’arrêter.

Nous sommes très préoccupés par les affirmations et la politique de la récente formation politique qui a remporté les dernières élections israéliennes. Il ne fait aucun doute maintenant que le nouveau gouvernement israélien sera pleinement engagé sur une voie qui va consacrer l’occupation et renier les droits des palestiniens. La politique de construction de colonies, la colonisation et l’incitation à la haine et au racisme, l’encouragement de la ferveur religieuse, sont les pierres angulaires de la politique d’Israël comme annoncé par les vainqueurs des récentes élections. C’est l’antithèse de la solution des deux États.

Être du bon côté de l’Histoire

À la lumière de ces évolutions majeures, nous avons l’intime conviction que la communauté internationale doit faire savoir, à travers des actions concrètes et urgentes, de quel côté de l’Histoire elle se positionne.

Des décennies d’impunité et le défaut de rendre des comptes ont de toute évidence conduit la situation à sa conjoncture dangereuse actuelle. Afin de sauver la formule des deux États, il est temps pour la communauté internationale de réévaluer son plan d’action pour appuyer ce noble objectif. De toute évidence, le changement est nécessaire.
Tous les États ont une obligation légale et morale d’observer et de défendre les principes du droit international et des droits de l’homme. À cet égard, nous affirmons que notre approche multilatérale, fondée sur le droit, complète et ne contredit aucunement notre engagement pour une résolution pacifique et négociée du conflit.

Il est temps

Nous demandons à la communauté internationale de soutenir notre droit à l’autodétermination en reconnaissant l’État de Palestine sur les terres qu’Israël a occupé en 1967.

Soutenez notre droit à demander justice et mettre fin à l’impunité en approuvant et en soutenant notre adhésion au Statut de Rome ainsi que notre engagement à coopérer avec le procureur général de la Cour Pénale Internationale.
Soutenez l’initiative de paix arabe – le plan de paix régionale le plus généreux que nous puissions jamais avoir.

Assumez vos responsabilités en vertu du droit international en interdisant tous les produits et services provenant des colonies israéliennes, et en veillant au désinvestissement rapide de toutes les entreprises et organisations impliquées, directement ou indirectement, et qui tirent profit des violations du droit international et des droits de l’Homme des palestiniens.

Rejoignez-nous en affirmant que l’universalité des droits de l’Homme et l’engagement au droit international sont les pierres angulaires de la justice et de la paix en tout lieu.

Rejoignez-nous en affirmant que la voie de la domination militaire, de l’agression et de l’impunité est inacceptable et intolérable.

Reconnaissez l’État de Palestine et soutenez notre effort concerté et sincère à réaliser une paix fondée sur la justice et le respect mutuel.

Il est temps.

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Op-Ed de S.E.M. le Président Mahmoud ABBAS “It’s Time for Palestine”, in the Spring 2015 Edition of Horizons Magazine

Texte original en anglais}

It’s Time for Palestine

Mahmoud Abbas

THE Palestinian people’s struggle for freedom and national independence has reached a decisive moment. The two-state formula is under serious threat, due to systematic Israeli policies and practices that have seriously undermined the solution-threatening to make it impracticable in the very near future. More alarmingly, while Palestine takes concrete and determined steps to demonstrate its commitment to international law and human rights by acceding to the main instruments of international law, Israel has taken concrete steps to undermine them, whilst openly and unambiguously declaring its hostility to Palestinian national rights.

This is happening at the same time that Palestinian refugees are being slaughtered in Syria—victims of an internal conflict to which they have never been party. The images coming out from the Al Yarmouk Refugee Camp as well as from other Palestinian camps in Syria are reminiscent of Lebanon in 1982 and Iraq in 2003. They are a reminder of the urgency to honor the inalienable rights of the Palestinian people, including Palestinian refugee rights. Over 200 Palestinian children dying out of starvation during the camp’s siege is a crude reminder of the total failure of the international community to protect civilians in time of war.

It is time to put an end to the Palestinian tragedy by ensuring the rights of Palestinians under international law.

As one of the architects of the Oslo Interim Agreement, I can say without hesitation that Palestinians understood and endorsed the painful compromises required to reach peace well before the Oslo Accords were signed. In 1988, Palestine unilaterally recognized Israel over 78 percent of historic Palestine, in addition to recognizing relevant United Nations resolutions as the framework for a peaceful solution to the conflict.
When Palestine signed the Oslo Accords with Israel, it did so based on this very commitment to the two-state solution. Indeed, Palestine has shown through demonstrable actions its staunch and practical commitment to the vision of two sovereign and democratic states living side by side in peace and security on the 1967 borders.

The Israeli Response

Israel met these historic and painful Palestinian compromises with the creation and expansion of illegal settlements on Palestinian territory, as well as systematic violations of international law and the agreement’s provisions.
In fact, since the signing of the Oslo Interim Accords over 20 years ago, Israel has tripled the number of citizens illegally transferred to Palestine to live in the continuously growing illegal settlements. Israel has committed these violations with impunity—encouraged by the reluctance of the international community to hold Israel accountable to the same standards of human rights and international law that all other states are obliged to follow.

The Oslo Accords were based on the promise of a final status agreement after a five-year interim period. Today, 22 years after the Oslo Agreement, the Israeli occupation has turned into the effective annexation of our country.

Further, Israel is engaged in an act of outright piracy and collective punishment against the Palestinian people—namely, the ongoing obstruction of free movement of persons and goods, the theft of our natural resources including water, and the repeated withholding of our tax revenues. This illegal measure threatens to deconstruct the remarkable accomplishments Palestinians have achieved at the institutional and economic levels. It is an act of extreme hostility for the purpose of political blackmail.

Redress and Justice

Facing these grave threats to our national rights and economic survival, it is our obligation, as the Palestinian leadership, to seek redress and justice through all available legitimate means. This includes a serious and responsible reassessment of our relations with Israel, with the aim of ensuring that Israel is no longer able to use our commitment to signed agreements in order to undermine our rights, economy, and even basic sustenance.

Our peaceful and positive strategy aims to change the unacceptable and unsustainable status quo. We are committed to ensuring that Israel is no longer allowed or able to profiteer from a belligerent colonial military state of affairs, as it has done for almost 50 years. Our goal remains the same : realizing the two-state formula in line with international law and the international consensus. Our tools are also clear : we rely on international law and human rights instruments that were designed to resolve conflicts peacefully and prevent the indignities of war. In all endeavors, we rely on the steadfastness of our people and its right to peacefully demonstrate and campaign against Israeli occupation and apartheid policies. We also take great strength from the growing global solidarity movement.

Ending the Occupation

The Palestinian people are pursuing a strategy of internationalization in order to end the occupation, reach a just and lasting peace, and apply the indispensable tool of accountability so as to end Israel’s culture of impunity that has perpetuated the conflict and entrenched the occupation. Meanwhile, the Israeli leadership has clearly and repeatedly stated its commitment to preventing the establishment of a Palestinian state, persisting in a program of settlement expansion, institutional racism, and apartheid practices—including against Israeli citizens of Palestinian origin, as was clear during the latest election.

In 1948, our people suffered one of the most dramatic forced displacement campaigns in modern history. The Nakba, or catastrophe, refers to the erasure of 418 Palestinian villages and the forced and systematic displacement of 70 percent of the Palestinian people to make way for the creation of Israel—this continues until the present day. I was a young boy then, but the memory of being uprooted from my hometown of Safad remain fresh.

Today, Israeli policies and practices are mirroring that displacement and uprooting in the Jordan Valley, Hebron, East Jerusalem, and the Gaza Strip. This cycle of suffering and indignities must stop.

We are very alarmed by the assertions and policy platforms that won the recent Israeli elections. There is no doubt now that the Government of Israel will be fully committed to a path that entrenches the occupation and denies Palestinian rights. The policies of settlement construction, colonization inciting hate and racism, and encouraging religious fervor, are the cornerstones of Israel’s policy as stated by the election victors. It is the antithesis of the two-state formula.

Standing on the Right Side of History

In light of these radical developments, we believe that the international community must make clear, through urgent and effective actions, on which side of history it stands.
Decades of impunity and lack of accountability have clearly brought the situation to its current dangerous juncture. In order to save the two-state formula, it is time for the international community to reassess its course of action in support of this noble goal. Clearly, change is required.

All states have a standing legal and moral obligation to uphold and protect the principles of international law and human rights. In this regard, we assert that our multilateral and law-based approach complements and does not contradict our commitment to a peaceful and negotiated resolution of the conflict.

It is Time

We ask the international community to support our right to self-determination by recognizing the State of Palestine on the land Israel occupied in 1967.
Support our right to seek justice and ensure accountability by endorsing and supporting our accession to the Rome Statute and commitment to cooperate with the General Prosecutor at the International Criminal Court.
Support the Arab Peace Initiative—the most generous regional peace plan we could ever have.

Shoulder your responsibilities under international law by banning all Israeli settlement products and services, and ensuring the swift divestment from all companies and organizations implicated in the direct or indirect profiteering from violations of international law and Palestinian human rights.

Join us in asserting the universality of human rights and the commitment to international law as cornerstones of justice and peace everywhere.

Join us in asserting that the path of military domination, aggression, and impunity is unacceptable and intolerable.

Recognise the State of Palestine and support our concerted and sincere effort to achieve peace based on justice and mutual respect.

It is time