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L’offensive contre Gaza : un inventaire

Dimanche, 10 août 2014 - 11h51 AM

dimanche 10 août 2014

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Par Adnan Abu Amer*

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L’échec d’Israël à concrétiser ses objectifs résulte d’un certain nombre de facteurs, notamment le fait que l’armée israélienne s’est retrouvée face à une résistance acharnée qui a entravé ses progrès dans Gaza.

Le premier jour de son attaque contre Gaza, Israël a annoncé un certain nombre d’objectifs dont le plus important était de porter un coup sévère au Hamas, de stopper les tirs de roquettes, de frapper le réseau de tunnels et de rétablir le calme au bénéfice de la population du sud d’Israël.

Mais près d’un mois après avoir lancé son attaque, Israël n’a pas été en mesure d’annoncer que ces objectifs avaient été atteints, même s’il a atteint un autre objectif tacite : les massacres de civils palestiniens, dont le nombre de victimes dépasse 1.800 martyrs, la plupart d’entre eux étant des enfants, des femmes et des personnes âgées.

Carences du renseignement israélien

Il y a eu des fuites chez les Israéliens et des assurances venant des Palestiniens sur l’extrême férocité de la résistance dans les faubourgs Est de Gaza.

Quelques jours après le lancement des opérations terrestres par Israël, des cercles d’influence ont critiqué leur propre gouvernement parce que l’opération militaire contre le Hamas à Gaza n’avait parachevé aucun de ses objectifs et que l’armée restait incapable d’empêcher le Hamas de poursuivre ses tirs de roquettes vers Israël.

En plus de tout cela, l’armée a été incapable de gérer les tunnels, qui sont devenus une menace stratégique avec des roquette toujours tirées profondément dans le territoire d’Israël, malgré les opérations de l’armée. Qu’une organisation aussi petite que le Hamas puisse infliger de tels dégâts à Israël n’est pas logique.

Israël a expliqué que le déclin de l’armée pendant les affrontements avec la résistance sur les frontières de Gaza était dû au fait que les soldats devaient se battre dans des conditions de terrain complexes qui ont donné au Hamas une réussite stratégique après qu’ils eurent pu capturer un soldat israélien. Cette réussite n’a pas été la seule, puisque le Hamas a pu fermer l’espace aérien d’Israël pendant plusieurs jours et obliger des milliers de colons à se réfugier dans les abris.

Autre revers subi par l’armée israélienne : la carence du renseignement sur ce qui l’attendait en cas d’incursion terrestre à Gaza, en particulier les avertissements d’autorités expérimentées sur les conséquences d’une incursion profonde dans les zones plus peuplées de la bande de Gaza et le risque pour ses soldats d’être faits prisonniers.

Le Hamas attendait l’occasion de capturer plus de soldats et de les brandir comme un signe final de victoire dans la guerre, soulignant la supériorité au sol du Hamas qui a transformé la bande de Gaza en un « métro de tunnels », qui permet à ses combattants de disparaître des zones de confrontation et d’émerger derrière les lignes de forces pour les attaquer.

Il est intéressant de noter qu’Israël a admis que les opérations militaires « Shelf Steadfast » se sont poursuivies même quand le Hamas tirait des roquettes, infiltrait des colonies et tuait et blessait des dizaines de soldats. Cela indique que l’armée n’était pas sérieusement préparée pour la guerre et que le Hamas a « fait éclater la bulle » à la face d’Israël, infligeant des blessures et des pertes sérieuses aux forces militaires et à l’infrastructure civile.

Les stratégies qui ont été utilisées suggèrent que la souveraineté israélienne a été violée et que l’armée est incapable d’arrêter les tirs sur les colonies ni de marquer des points décisifs dans la bataille. Elle indiquent également que malgré sa force régionale, Israël n’a pas été capable de vaincre significativement le Hamas.

Les combats continus dans la bande de Gaza ont révélé des défauts dans l’armée israélienne sur le plan de sa préparation à la bataille et de son management. Les forces militaires sont accoutumées à se servir d’armes à feu très puissantes dans la mise en œuvre de plans opérationnels modèles, qui sont pré-planifiés et pré-médités, chose qui n’a pas réussi à Gaza malgré le coût élevé en victimes palestiniennes.

C’est un échec parce qu’ils n’étaient pas préparés pour un « ennemi » déterminé avec un petit budget comme le Hamas, qui avait développé des réponses à la supériorité aérienne et au renseignement perfectionné d’Israël. C’est ce qui a empêché les combines-surprises et performances de l’armée israélienne et l’a obligée à se reposer sur la force aérienne, négligeant les forces au sol et les unités spéciales.

En outre, les affrontements militaires avec des combattants du Hamas ont également révélé l’échec du renseignement à découvrir le système de contrôle et de commandement du Hamas et à localiser ses dirigeants. Les Brigades al-Qassam ont continué de contrôler leurs troupes, de tirer des roquettes vers Israël et d’attaquer les forces dans les banlieues de Gaza, en l’absence de renseignements des services secrets israéliens. L’armée a choisi les armes lourdes contre des zones peuplées et a donc exposé les civils palestiniens à la mort et au déplacement.

Conclusion : des questions sérieuses ont surgi en Israël à propos de l’échec militaire contre le Hamas à Gaza. Des questions comme : que savez-vous et qu’ignorez-vous ? Qu’avez-vous fait et que n’avez-vous pas fait ? Fallait-il attendre 10 jours avant de lancer l’opération terrestre, ou valait-il mieux entrer à Gaza dès le début ? Qu’est-ce qui est plus efficace pour l’exécution de la mission et qu’est-ce qui a nui à la mission, bombardement ou lancer de missiles ? Les tunnels ou les grenades propulsées par roquettes présentent-ils des risques dans le futur ? Ce qui a fait dire à certains qu’après la guerre, le chef de l’armée israélienne aura à examiner la conduite du cabinet de sécurité pendant la guerre.

Peut-être la preuve israélienne de l’échec dans la bande de Gaza ne se limite-t-elle pas aux témoignages et à l’aveu des soldats et des généraux de l’armée, mais atteint son apogée dans l’arène politique, où abondent les appels à se méfier de ce que l’élite politique et militaire raconte sur la puissance du Hamas. D’aucuns affirment que le public israélien a été induit en erreur par une prétendue faiblesse du Hamas qui aurait donc été décrit comme incapable de se confronter à Israël.

Mais les âpres confrontations à Gaza ont montré que ces allégations étaient tout à fait inexactes. Il est également avéré, puisque plusieurs jours se sont écoulés avant qu’Israël ne soit capable de répondre aux menaces venant de la bande de Gaza, que ces élites couvraient les failles de leur renseignement et leur incapacité à collecter l’information sécuritaire qui aurait permis à Israël de cibler les rampes de lancement de roquettes ou les systèmes de commandement et de contrôle des Brigades al-Qassam.

C’est pourquoi il est clair que la liste des succès du Hamas est bien plus longue que celle d’Israël.

En outre, le cours de la guerre à Gaza a démontré que la logique poursuivie par le Hamas a été un succès puisque des soldats israéliens ont été traités dans de hôpitaux israéliens. Pendant cette guerre les politiciens et les militaires israéliens ont préparé des plans reposant sur les résultats des confrontations passées avec le Hamas, mais ils ont loupé l’élément de pensée militaire créative. Le Hamas a choqué les chefs de l’armée israélienne par leur propres surprises militaires, que les généraux semblent ne pas avoir pu suivre .

Commissions d’enquête

L’opération militaire "Nahal Oz" a soulevé plusieurs questions sur les performances des forces israéliennes sur le terrain ainsi que sur les décisions qui ont été prises de déployer des forces défensives. L’utilisation par les « combattants » du Hamas de tunnels pour mener des opérations à l’intérieur des lignes ennemies a été le symbole de leurs réussites en réponse à l’agression contre Gaza. La diffusion de la vidéo dans les médias est encore une preuve d’une victoire certaine du Hamas dans l’opération, et de l’échec des opérations offensives de sécurité contre les tunnels par les militaires israéliens. Le Hamas a réussi un certain nombre de raids sous la frontière grâce aux tunnels.

L’élément le plus intéressant touche peut-être aux commentaires israéliens sur la férocité des combats à Gaza et des actions contre l’armée israélienne, en ce sens qu’il manquait à Israël un dirigeant authentique et fort bénéficiant d’un solide soutien international, ainsi que de confiance et de popularité dans l’arène internationale, alors que les opérations militaires tournaient rapidement au scandale national.

L’opération militaire en cours n’a pas été un succès même après l’élimination d’éminents dirigeants palestiniens, laissant l’opération dans une impasse pour les dirigeants politiques et militaires. Les objectifs militaires n’ont pas été atteints en dépit de la durée du temps passé. Les dirigeants militaires vétérans et les politiciens influents du gouvernement se préparent à des commissions d’enquête qui vont être constituées, après la fin de l’offensive sur Gaza, et qui examineront l’imprudence et les échecs de la guerre ainsi que les affrontements avec la résistance sur les frontières de la bande de Gaza.

Le passage en revue rapide des faits de la guerre de Gaza
indique clairement la différence entre les capacités de l’armée israélienne sur le terrain de la défense et du renseignement – considérablement affaiblies et ébranlées – et la maturité du Hamas, sa capacité d’infliger des pertes sérieuses à Israël. Le Hamas est à présent mieux préparé à trouver des cibles militaires et à lancer des missiles sur des véhicules militaires.


* Adnan Abu Amer est doyen de la Faculté des Arts et responsable de la Section Presse et Information à Al Oumma Open University Education, ainsi que Professeur spécialisé sur l’Histoire de la question palestinienne, la sécurité nationale, les sciences politiques et la civilisation islamique. Il a publié un certain nombre d’ouvrages et d’articles sur l’histoire contemporaine de la Palestine.